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Date : 20031028

Dossier : T-3016-92

Référence : 2003 CF 1258

ENTRE :

                                                        MILLIKEN & COMPANY ET

                                       MILLIKEN INDUSTRIES OF CANADA LTD.

                                                                                                                                            demanderesses

                                                                                   et

                                 INTERFACE FLOORING SYSTEMS (CANADA) INC.

                                                                                                                                               défenderesse

                                                 TAXATION DES DÉPENS - MOTIFS

CHARLES E. STINSON

Officier taxateur


[1]                 Une copie des présents motifs est déposée aujourd'hui dans le dossier T-1212-95 et s'y applique en conséquence. Les demanderesses ont reproché à la défenderesse d'avoir violé leur droit d'auteur sur un dessin (ci-après le dessin Mangrove) relatif à des dalles de moquette installées à l'aéroport international de Calgary en 1991 et 1992. Cette action a finalement été jointe à celle du dossier T-1212-95 (qui avait été intentée par Milliken & Company seulement : ci-après Milliken), qui concernait la contrefaçon du droit d'auteur et du dessin industriel à l'égard du dessin Mangrove dans le cas des dalles de moquette installées en 1995 au même aéroport. À l'instruction, Milliken a obtenu un jugement sur consentement avec dépens à l'égard des questions portant sur le dessin industriel. Les deux actions concernant l'allégation de violation du droit d'auteur ont été rejetées avec dépens. Dans le dossier T-3016-92, la demande reconventionnelle que la défenderesse avait engagée à l'égard de l'atteinte au droit d'auteur relative à son dessin se rapportant à des dalles de moquette a été rejetée avec dépens. Les appels des demanderesses ont également été rejetés avec dépens.


[2]                 Les deux parties ont convenu que leurs arguments exposés ci-dessous au sujet de la répartition de leurs honoraires s'appliqueraient également aux débours connexes et que le montant de 13 820,30 $ fixé par règlement au titre de la responsabilité de la défenderesse à l'égard de la contrefaçon du dessin industriel serait déduit des dépens que les demanderesses lui devraient (cette déduction serait faite de manière informelle entre les parties). Au début de l'audience qui a eu lieu devant moi, la défenderesse s'est opposée au bref délai de l'avis de présentation des demanderesses et a demandé un montant de 2 500 $ au titre de sa comparution à l'audience. Les demanderesses ont répondu que les parties connaissaient depuis plusieurs mois le mémoire de dépens et la position de l'autre en raison de l'échec des négociations. Dans les circonstances, je n'accorderai aucun montant supplémentaire à l'égard de la comparution de la défenderesse. Aucune des parties n'a formulé de réclamation fondée sur l'article 26 pour la taxation des dépens. J'aurais été enclin à accorder le même montant à chacune, sans appliquer la répartition, ce qui aurait donné lieu à des montants s'annulant les uns les autres, puisque chaque partie a réclamé des intérêts sur les dépens à compter de la même date. En conséquence, je n'ai ajouté aucun montant dans les mémoires de dépens des parties au titre de la taxation. En général, les articles des mémoires de dépens sont examinés ci-dessous dans l'ordre dans lequel ils ont été débattus, parce que chaque partie s'est fondée sur sa position antérieure lorsqu'elle a commenté chaque article à tour de rôle. Cependant, j'ai réuni certains articles qui n'avaient pas été débattus ensemble lorsqu'un lien existait entre eux. Les accords que les avocats ont conclus devant moi au sujet des honoraires et débours ont été consignés sur les mémoires de dépens taxés, mais non dans les présents motifs et je tiens à féliciter les avocats pour la courtoisie dont ils ont fait montre afin de régler plusieurs de ces questions.


[3]                 La défenderesse a indiqué que le litige visé par la présente taxation portait sur trois réclamations qui ont été débattues dans le cadre de deux actions, d'une série d'interrogatoires préalables, d'une instruction et d'un appel et a souligné que l'avocat des demanderesses a tenu un seul dossier s'y rapportant (l'avocat des demanderesses a alors précisé que deux dossiers avaient été ouverts, mais qu'ils ont finalement été fusionnés en un seul). La défenderesse a ajouté que la plupart des ventes apparemment constitutives de contrefaçon ont été regroupées dans le dossier T-3016-92 et représentaient le principal élément du litige, c'est-à-dire qu'environ 95 p. 100 du travail a été consacré aux questions liées à l'atteinte au droit d'auteur et environ 5 p. 100 à celles qui concernaient le dessin industriel. La correspondance échangée dans le cadre du règlement appuie cette proposition; en effet, dans leur offre du 29 avril 1997, les demanderesses réclamaient un montant de 350 000 $ au titre de l'atteinte au droit d'auteur, alors qu'un montant de 13 820,30 $ a été convenu pour la responsabilité relative à la contrefaçon du dessin industriel. La défenderesse a souligné que l'offre de règlement du 12 novembre 1997 des demanderesses portait sur le droit d'auteur et non sur le dessin industriel et que l'indemnité possible était évaluée à une somme allant de 300 000 $ à 700 000 $, y compris les intérêts, mais non les dépens. La défenderesse a ajouté que les demanderesses ont poursuivi leurs causes d'action relatives à l'atteinte au droit d'auteur même si elles avaient obtenu gain de cause en ce qui concerne la contrefaçon du dessin industriel, parce que les conséquences du recours en injonction à l'égard du droit d'auteur étaient beaucoup plus importantes.


[4]                 De l'avis de la défenderesse, il est très facile de distinguer les dépens liés à sa demande reconventionnelle portant sur l'atteinte au droit d'auteur (le dessin d'Interface) des dépens associés aux actions relatives au droit d'auteur des demanderesses (le dessin Mangrove), en raison des différences entre le déroulement de chacune d'elles. De plus, l'année 1995 a été marquée par une seule vente de quelque 660 verges carrées de dalles de moquette, tandis qu'environ 11 500 verges carrées ont été vendues au cours des années 1991 à 1993, qui sont visées par le dossier T-3016-92, de sorte que cette dernière période est la période clé à examiner dans la présente taxation. Effectivement, l'instance portant le numéro T-1212-95 était une instance complémentaire par rapport à celle du dossier numéro T-3016-92, où les principales questions de fond ont été débattues. La défenderesse a fait valoir que les demanderesses ont poursuivi ces causes d'action relatives au droit d'auteur malgré des offres de règlement raisonnables, soit un montant total de 60 000 $, et malgré les problèmes évidents liés à la preuve de leurs allégations, en l'occurrence, l'absence de preuve concernant la date de création du dessin Mangrove. Des affidavits de documents distincts et parfois répétitifs ont été produits, mais des interrogatoires oraux couvrant toutes les actions et réclamations ont été menés. L'instruction a porté uniquement sur les allégations des demanderesses concernant le droit d'auteur, étant donné que les questions relatives à la contrefaçon du dessin industriel et à la demande reconventionnelle avaient déjà été réglées.


[5]                 Pour leur part, les demanderesses ont soutenu qu'il s'agissait d'une instance fusionnée qui portait sur trois causes d'action : (1) les ventes, en 1991, 1992 et 1995, de dalles de moquette comportant le dessin Mangrove, qui ne soulevaient aucune difficulté quant aux questions de fait se rapportant à l'atteinte au droit d'auteur; (2) la demande reconventionnelle de la défenderesse concernant l'atteinte à un droit d'auteur, qui se rapportait à un dessin entièrement différent (le dessin d'Interface) et (3) l'allégation de contrefaçon d'un dessin industriel apparemment survenue en 1995 (le dessin Mangrove), qui est importante aux fins de la répartition des dépens relatifs aux interrogatoires préalables. Les demanderesses ont dû engager des frais de préparation à l'égard des trois causes d'action, parce que la défenderesse n'a consenti au rejet de la cause d'action (2) et à un jugement concernant la cause d'action (3) que le matin du premier jour de l'instruction. La répartition susmentionnée qu'a proposée la défenderesse, soit 95 p. 100 pour les questions liées à l'atteinte au droit d'auteur et 5 p. 100 pour les questions concernant le dessin industriel, ne tient pas compte de la demande reconventionnelle. Ces trois causes d'action étaient différentes et devraient être examinées séparément aux fins des dépens. Les demanderesses ont ajouté que le Tarif ne permet pas une taxation des dépens semblable à celle que propose la défenderesse.

(Tarif)

Article 2 :        Défense (T-3016-92), 6 unités réclamées, fourchette de 4 à 7 unités selon le Tarif (les numéros indiqués entre parenthèses par la suite après le nombre d'unités réclamées représentent la fourchette prévue au Tarif)

Article 2 :        Défense (T-1212-95), 6 unités réclamées (4 - 7)

Article 1 :        Déclaration (T-1212-95), 6 unités réclamées (4 - 7)

Article 2 :        Défense à la demande reconventionnelle (T-3016-92), 6 unités réclamées (4 - 7)

[6]                 Les avocats des deux parties ont d'abord convenu devant moi que je devrais accorder le même montant à l'égard des actes de procédure de chacune d'elles. Toutefois, elles se sont ravisées par la suite à ce sujet. Les avocats ont également convenu que la proportion de 81 p. 100 réclamée dans le dossier T-1212-95 (13 des 16 paragraphes de la défense) pour l'atteinte au droit d'auteur devrait être abaissée à 50 p. 100 et que cette même proportion devrait également s'appliquer à l'acte de procédure de Milliken dans l'instance T-1212-95.


[7]                 Les demanderesses ont allégué que l'octroi de 4 unités suffit pour la préparation d'une défense (T-3016-92) portant uniquement sur deux ventes simples et distinctes. Des 27 paragraphes du document, 13 étaient consacrés à la demande reconventionnelle. Selon les demanderesses, il suffit d'accorder 4 unités pour la défense déposée dans l'instance T-1212-95, parce que le travail fait pour la défense dans l'affaire T-3016-92, au sujet de ventes comparables, a permis de simplifier la tâche dans le dossier T-1212-95. Dans la mesure où le travail accompli pour l'instance T-3016-92 n'a pas été utile pour l'affaire T-1212-95, les frais réclamés devraient néanmoins être abaissés, parce que la défenderesse n'a pas droit à des dépens associés à la partie de sa défense qui concerne le dessin industriel.

[8]                 Reprenant pour son compte l'argument susmentionné des demanderesses, la défenderesse a allégué à son tour qu'il y avait lieu d'accorder 4 unités seulement pour la déclaration déposée dans l'instance T-1212-95, parce que la préparation de ce document a été simplifiée en raison du travail déjà fait dans l'affaire T-3016-92. De plus, grâce au travail accompli dans le cadre des efforts déployés en vain dans ce dernier dossier, pour inclure une cause d'action concernant le dessin industriel, il a été plus facile de faire la préparation relative à cette cause d'action dans l'instance T-1212-95. De l'avis de la défenderesse, la responsabilité qu'ont invoquée les demanderesses justifiait l'octroi de frais selon un montant correspondant au nombre maximal d'unités de la fourchette pour les défenses produites dans les deux dossiers T-3016-92 et T-1212-95. L'issue de l'instruction dépendait du sort des allégations de fait que les demanderesses ont formulées, mais qu'elles n'ont pas établies. La défenderesse a précisé que les défenses n'étaient pas de simples dénégations générales et découlaient d'une réflexion sérieuse; ainsi, la défense dans l'instance T-3016-92 n'a été déposée que près de deux ans après l'institution de l'action et après la présentation des requêtes en radiation.


[9]                 Les avocats des deux parties ont convenu qu'il y avait lieu d'accorder 4 unités (aucune répartition) en ce qui a trait à la défense des demanderesses à la demande reconventionnelle (T-3016-92) et se sont également entendus sur plusieurs débours connexes, mais la défenderesse s'est opposée au montant de 121 $ réclamé pour les photocopies. De l'avis de la défenderesse, ce montant ne se rapportait pas à des documents précis, mais plutôt à des rapports d'activité destinés au client; un montant de 10 $ serait donc raisonnable, puisque la préparation d'une défense dans ce type d'action ne nécessitait aucune recherche. Les demanderesses ont répliqué que la rédaction des actes de procédure nécessite des recherches et ont proposé un montant de 25 $.

TAXATION


[10]            Le mot « répartition » ne figure ni dans les Règles ni dans le Tarif, mais je pense qu'ensemble, le paragraphe 400(1) et l'alinéa 6a) des Règles autorisent vraisemblablement ce concept. Le dilemme que pose l'attribution d'une partie des dépens à l'instance T-1212-95 illustre clairement le rôle des procédures interlocutoires dans le règlement d'un litige. En effet, les questions en litige sont formulées dans les actes de procédure, mises de côté ou distillées au moyen d'interrogatoires préalables et de requêtes et celles qui restent sont examinées à l'instruction. Lorsque cette façon de procéder est utilisée, il arrive parfois que les deux parties, comme c'est le cas en l'espèce dans le dossier T-1212-95, obtiennent gain de cause relativement à différents droits d'action et des dépens pour chacune d'elles. Au cours de la taxation des dépens, il devient alors nécessaire de déterminer comment répartir les dépens relatifs à un document donné, comme un acte de procédure, qui a donné lieu au succès relativement à une cause d'action et à un échec relativement à une autre (dans la présente affaire, Milliken a obtenu gain de cause sur la question du dessin industriel, mais non sur celle du droit d'auteur, lesquelles causes d'action étaient fondées toutes deux sur une seule déclaration; dans la même veine, la défenderesse a gagné relativement à la question du droit d'auteur et perdu quant à celle du dessin industriel en invoquant une seule défense). Il existe au moins deux façons acceptables d'examiner ces questions en fonction des Règles de la Cour et du Tarif : (i) accorder un montant inférieur à partir de la fourchette du Tarif afin de tenir compte des frais imputables à la partie du document qui a donné lieu à un échec et (ii) faire une répartition entre les causes d'action après avoir choisi à partir de la fourchette disponible un montant imputable au travail de préparation du document en question.

[11]            J'ai conclu au paragraphe [7] de la décision Bruce Starlight et al. c. Sa Majesté La Reine, [2001] A.C.F. 1376 qu'il n'est pas nécessaire d'utiliser le même nombre d'unités du Tarif pour chaque service rendu, parce que chaque article est taxable en fonction de ses propres circonstances. J'ai lu les actes de procédure et les motifs des décisions interlocutoires rendues dans les dossiers de la Cour. À mon avis, le travail d'élaboration des actes de procédure dans le dossier n ° T-3016-92 aurait dû simplifier la tâche correspondante dans le dossier T-1212-95. Cependant, comme je l'ai mentionné dans la décision Bruce Starlight, précitée, il faut établir des distinctions générales relativement au choix de la position retenue dans la fourchette. Les actes de procédure en question n'étaient ni simples ni très complexes. J'accorde respectivement 6 et 4 unités pour la défense déposée dans les dossiers T-3016-92 et T-1212-95. J'accorde 4 unités pour la déclaration déposée dans le dossier T-1212-95. Quant au montant de 121 $ réclamé dans le mémoire de frais des demanderesses pour les photocopies, j'accorde une somme de 15 $.


Article 5 :        Préparation de la défenderesse en vue de la requête que les demanderesses ont déposée le 29 avril 1993 afin d'interjeter appel de la décision radiant la déclaration (T-3016-92) : appel accueilli avec dépens le 7 octobre 1993, 6 unités réclamées (3 - 7)

Article 6 :        Comparution, 3 unités réclamées (1 - 3)

[12]            La défenderesse a fait valoir que l'importance du règlement, dans un pays bilingue, des ambiguïtés liées à l'interprétation des versions française et anglaise de différents articles de la Loi sur le droit d'auteur à la lumière de la Convention de Berne de 1886 justifie l'octroi d'un nombre d'unités correspondant au maximum prévu, ou presque. Il s'agissait d'une nouvelle question de droit qui avait une importance vitale pour l'ensemble de l'action relative au droit d'auteur que les demanderesses ont engagée en 1992. Les deux parties ont fait appel à un avocat principal pour plaider ces questions, dont le sort a finalement été scellé par la Cour d'appel fédérale.

[13]            Les demanderesses ont décrit cette requête comme une question relative au contenu d'un acte de procédure qui portait sur un point de droit simple et sur une seule cause d'action et pour laquelle il suffirait habituellement d'accorder le minimum de 3 unités au titre de l'article 5, préparation. Cependant, l'importance de la question linguistique (français et anglais) justifie l'octroi de 4 unités. Les demanderesses ont fait valoir que les requêtes portant sur des questions de cette nature ne justifient pas l'octroi d'un nombre d'unités supérieur au minimum en ce qui concerne les articles 5 et 6. Par conséquent, il convient d'accorder 1 unité pour chaque heure pour l'article 6, comparution, relativement à une question dont l'audition a duré deux heures.


TAXATION

[14]            La position de la défenderesse m'apparaît justifiée dans les circonstances, du moins en ce qui concerne l'article 5, préparation, pour lequel j'accorde les 6 unités qu'elle réclame. De plus, j'accorde les 3 unités pour chaque heure qu'elle réclame au titre de l'article 6, comparution : les subtilités des différences en l'espèce entre les versions française et anglaise de la Loi ne justifient pas en soi l'octroi du nombre maximal d'unités, pas plus que le risque pour les demanderesses que leur litige déraille dès le départ; cependant, examinés ensemble, ces facteurs sont suffisamment importants pour justifier l'octroi du nombre maximal d'unités dans les circonstances.

Article 18 :      Préparation par les demanderesses (intimées) du dossier d'appel à l'égard de l'appel de la défenderesse à l'encontre de l'ordonnance datée du 7 octobre 1993 (A-590-93) : appel rejeté le 7 septembre 1994 avec dépens en faveur des demanderesses (intimées), 1 unité réclamée (1)

Article 19 :      Préparation par les demanderesses (intimées) de leur mémoire des faits et du droit, 7 unités réclamées (4 - 7)

Alinéa 22a):    Comparution lors de l'audition de l'appel, 3 unités réclamées (2 - 3)


[15]            Ces éléments ont été réclamés dans le mémoire de frais des demanderesses pour le dossier T-3016-92 et concernent la décision susmentionnée que la Cour fédérale a rendue le 7 octobre 1993 au sujet des questions relatives à la Convention de Berne de 1886. Les avocats des deux parties ont convenu que les conclusions concernant les articles 19 et 22a) devraient être les mêmes que celles que j'ai tirées plus haut au sujet des articles 5 et 6 du mémoire de frais de la défenderesse en ce qui a trait à l'ordonnance du 7 octobre 1993, sous réserve de mes conclusions en ce qui a trait aux objections de la défenderesse quant à l'admissibilité de ces dépens. La défenderesse s'est opposée à la réclamation fondée sur l'article 18, parce que les demanderesses n'ont nullement participé à la préparation du dossier d'appel. La défenderesse invoque la deuxième édition de l'ouvrage de Mark M. Orkin, c.r., intitulé The Law of Costs, notamment le paragraphe 105.3.1, à la page 1-14, où il est mentionné que la phrase [traduction] « les frais sont accordés à la partie défenderesse » a été interprétée comme signifiant que les frais sont accordés à la partie défenderesse dans la cause, de sorte que les demanderesses ne peuvent réclamer quoi que ce soit au titre de l'article 19 et de l'alinéa 22a) relativement à cet appel interlocutoire, puisque leur action de 1992 a finalement été rejetée.

[16]            Dans le cas des débours connexes de 88,75 $, 54,18 $ et 1,58 $ réclamés respectivement pour les photocopies, les télécopies et le téléphone, les demanderesses ont fait valoir que la préparation d'un dossier d'appel nécessite des services essentiels de cette nature dont les coûts sont raisonnables, y compris les photocopies de documents à 0,25 $ la page. La défenderesse a répliqué en disant que la plupart de ces frais ont été engagés avant l'ordonnance visée par l'appel et que, en raison de l'absence d'activité (l'absence de mémoire), aucun débours n'était justifié. S'il y avait lieu d'accorder quoi que ce soit, ce serait un montant d'environ 40 $, qui se compare aux débours de la défenderesse à l'égard de la requête datée du 29 avril 1993 des demanderesses.

TAXATION


[17]            Au paragraphe 105.3.1 de son ouvrage The Law of Costs, précité, l'auteur cite la décision Digiandomenico c. Ramos (1994) 92 B.C.L.R. (2d) 286 (protonotaire C.S.), où il est fait mention de la décision Aziz c. Aziz (1986) 3 B.C.L.R. (2d) 385 (C.S.). À mon avis, la décision Aziz ne s'applique pas, parce que la question pertinente dans cette affaire-là portait sur des ordonnances muettes sur la question des dépens. Compte tenu de la Règle 400(1) des Règles de la Cour fédérale, les parties ne peuvent invoquer une ordonnance ou un jugement muet sur la question des frais pour réclamer des dépens. En ce qui concerne la décision Digiandomenico, je ne crois pas que j'en arriverais aux mêmes conclusions dans le cas d'une ordonnance ou d'un jugement comportant des précisions au sujet des dépens, eu égard à la façon dont j'interprète la décision Aziz et au fait que le pouvoir discrétionnaire découlant de la Règle 400(1) dans le cas des dépens interlocutoires est exercé indépendamment du résultat du jugement, sauf lorsque la Cour en dispose expressément autrement en utilisant des phrases comme « les dépens suivront l'issue de la cause » . De plus, je doute que l'exercice du pouvoir accordé à la Cour d'appel fédérale en vertu de la Règle 400(1), même pour les appels interlocutoires, soit entravé par une adjudication de dépens fondée sur cette même disposition dans un jugement de la Cour fédérale. J'accorde l'unité réclamée au titre de l'article 18, comme je le fais habituellement pour les parties intimées ayant gain de cause, parce que les deux parties sont tenues de veiller à ce que le dossier d'appel soit préparé en bonne et due forme. Des mémoires ont été déposés dans cette affaire. J'accorde respectivement 6 unités et 3 unités pour chaque heure dans le cas des réclamations fondées sur l'article 19 et sur l'alinéa 22a). J'accorde les débours réclamés, parce que j'estime que le montant total est raisonnable pour un appel interlocutoire de cette nature, quelles que soient les controverses liées à la preuve.


Article 5 :        Préparation de la défenderesse relativement à la requête datée du 18 novembre 1993 par laquelle les demanderesses ont interjeté appel de la décision radiant les modifications apportées à la déclaration modifiée (Règle 1104) (T-3016-92) : appel accueilli le 14 décembre 1993, les dépens devant suivre l'issue de la cause, 6 unités réclamées (3 - 7)

Article 6 :        Comparution, 3 unités réclamées (1 - 3)

Article 5 :        Préparation de la défenderesse relativement à sa requête datée du 1er novembre 1993 et fondée sur l'alinéa 419(1)a) en vue de radier les modifications apportées à la déclaration modifiée à l'égard de la contrefaçon du dessin industriel (T-3016-92) : requête accordée le 18 mars 1994 avec dépens en faveur de la défenderesse, 6 unités réclamées (3 - 7)

Article 6 :        Comparution, 3 unités réclamées (1 - 3)

Article 5 :        Préparation des demanderesses relativement à la requête datée du 21 décembre 1993 par laquelle la défenderesse a renouvelé sa demande fondée sur la Règle 419 en vue de radier les modifications des demanderesses à l'égard du dessin industriel (T-3016-92) : requête rejetée le 17 janvier 1994 avec dépens en faveur des demanderesses, quelle que soit l'issue de la cause, 6 unités réclamées (3 - 7)

Article 6 :        Comparution, 3 unités réclamées (1 - 3)

[18]            La défenderesse a souligné que, dans l'ordonnance du 14 décembre 1993 par laquelle elle a accueilli l'appel à l'égard des questions concernant la Règle 1104, la Cour a commenté par inadvertance la requête de la défenderesse fondée sur la Règle 419(1)a), même si les parties s'étaient entendues devant elle pour reporter la présentation de leurs arguments sur cette requête. Il a donc été nécessaire de demander des directives supplémentaires permettant aux parties de débattre pleinement les questions concernant la Règle 419(1)a), ce qui a mené à l'ordonnance du 18 mars 1994 dans laquelle la Cour a radié les modifications relatives au dessin industriel. Le 17 janvier 1994, le protonotaire adjoint a rejeté la requête de la défenderesse datée du 21 décembre 1993, au motif que les questions concernant la Règle 419 avaient déjà été tranchées dans la décision du 14 décembre 1993.


[19]            La défenderesse a soutenu que les montants qu'elle réclame aux articles 5 et 6 et qui correspondent à peu près au maximum de la fourchette du Tarif traduisent l'importance de ces questions de nature interlocutoire pour l'ensemble de la réclamation de 1992 des demanderesses au sujet du dessin industriel et ont nécessité l'utilisation des services d'un avocat principal. Le fait que la Cour a eu besoin de deux audiences distinctes pour finalement trancher ces questions en faveur de la défenderesse et rejeter du même coup cette réclamation des demanderesses et la confusion qui a mené au règlement prématuré des questions concernant la Règle 419 le 14 décembre 1993 indiquent la grande complexité de ces procédures. La défenderesse a ajouté qu'aucun montant ne devrait être accordé à l'égard de la réclamation des demanderesses au titre de l'article 5, préparation, en ce qui concerne l'ordonnance du 17 janvier 1994, parce que le fond des questions concernant la Règle 419 n'a jamais véritablement été débattu, les avocats ayant passé tout leur temps ce jour-là à expliquer au protonotaire adjoint le règlement par inadvertance des questions susmentionnées. De plus, aucune préparation n'était nécessaire, exception faite de celle qui concernait la comparution du 14 décembre 1993. La défenderesse a proposé que j'accorde 1 unité pour chaque heure au titre de l'article 6, puisqu'il s'agissait d'une question de procédure simple.


[20]            Les demanderesses ont invoqué leur argument susmentionné concernant le contenu des actes de procédure pour faire valoir qu'il suffit d'accorder respectivement 3 unités et 1 unité pour chaque heure dans le cas des réclamations de la défenderesse au titre des articles 5 et 6. Il s'agissait d'une question de procédure et il n'y a pas lieu de tenir compte de l'expérience des avocats relativement à des comparutions d'une durée de deux heures chacune. De l'avis des demanderesses, je devrais leur accorder, en ce qui concerne les dépens qu'elles ont obtenus en vertu de l'ordonnance du 17 janvier 1994, un montant identique à celui que la défenderesse a obtenu relativement à l'ordonnance du 18 mars 1994, parce qu'elles se sont préparées pour l'audience s'y rapportant comme si le fond des questions portant sur la Règle 419 serait débattu.

[21]            Les avocats se sont entendus sur tous les débours que la défenderesse a réclamés, sauf dans le cas d'un montant de 185,70 $ (requête portant rejet des modifications relatives au dessin industriel) se rapportant à une chambre d'hôtel. La défenderesse a expliqué qu'il s'agissait d'une suite aménagée de façon à lui permettre de travailler. Les demanderesses ont répliqué qu'en l'absence de preuve établissant le caractère raisonnable de la réclamation, le montant semblait élevé, mais elles m'ont laissé le soin de trancher la question à ma discrétion.


[22]            En ce qui concerne les montants de 411,75 $ et de 56,94 $ réclamés respectivement pour les photocopies et les télécopies (requête visant à renouveler la demande fondée sur la Règle 419), les demanderesses ont admis la possibilité que des frais aient été ajoutés, mais ont précisé qu'il était nécessaire de photocopier certaines autorités. À leur avis, la défenderesse a une perception généralement trop restrictive des photocopies nécessaires et un montant de 50 $ devrait être accordé à cet égard, mais le montant de 56,94 $ demandé pour les photocopies devrait demeurer inchangé. La défenderesse a répondu que ces frais étaient excessifs, puisqu'il s'agissait d'une courte requête, et ont proposé un montant de 25 $ pour chaque élément.

TAXATION

[23]            À mon sens, les questions portant sur la Règle 419 étaient plus difficiles à trancher que celles qui concernaient la Règle 1104. En ce qui a trait à l'ordonnance du 14 décembre 1993, je fais droit aux réclamations de la défenderesse au titre des articles 5 et 6, soit respectivement 5 et 2 unités pour chaque heure. Quant à l'ordonnance du 18 mars 1994, j'accorde respectivement 6 et 3 unités pour chaque heure pour les réclamations au titre des articles 5 et 6. Dans le cas de l'ordonnance du 17 janvier 1997, je conviens que l'avocat des demanderesses devait, par mesure de prudence, se préparer comme si les questions portant sur la Règle 419 seraient pleinement débattues et j'accorde les 6 unités réclamées pour l'article 5. Cependant, d'après les arguments qui ont été exposés devant moi, les avocats ont passé quelque temps le 17 janvier 1994 à tenter d'expliquer à la Cour les événements à l'origine de la confusion. J'étais d'abord enclin à accorder 1 unité pour chaque heure pour l'article 6; cependant, compte tenu de l'importance que ces questions avaient pour les demanderesses et de la présence d'un avocat principal qui les a représentées, j'accorde 2 unités pour chaque heure.


[24]            Quant aux frais d'hôtel dont la défenderesse demande le remboursement, j'appliquerai les conclusions que j'avais tirées au sujet du pouvoir discrétionnaire dans Grace M. Carlile c. Sa Majesté La Reine (1997), 97 D.T.C. 5284, à la page 5287, et les commentaires que le juge Russell a formulés dans Re Eastwood (deceased) (1974), 3 All E.R. 603, à la page 608, selon lesquels dans le domaine de la taxation des dépens, [traduction] « la justice est rendue d'une façon sommaire, en ce sens que de nombreuses approximations sensées sont faites » pour en arriver à un résultat raisonnable au sujet des dépens. Malgré mes remarques concernant les honoraires, je ne crois pas que l'avocat avait besoin d'un espace de travail spécial dans sa chambre d'hôtel pour préparer cette requête interlocutoire. Il n'est nullement question de ces frais dans l'affidavit de Mary Mutchler qui a été fait sous serment le 4 octobre 2001. Il se peut que l'avocat n'ait pas accès à des programmes comparables ou aux rabais accordés aux employés du gouvernement ou à certaines entreprises. J'accorde un montant de 120 $. Par ailleurs, j'accorde respectivement 50 $ et 45 $ aux demanderesses pour les photocopies et les télécopies.

Article 5 :        Préparation des demanderesses en vue de la requête datée du 20 août 1997 que la défenderesse a présentée afin de modifier sa défense (T-3016-92) : accueillie le 8 septembre 1997, les demanderesses ayant obtenu les dépens de la requête, quelle que soit l'issue de la cause, tandis que tous dépens supplémentaires découlant directement de la modification tardive seraient déterminés par le juge de première instance, 6 unités réclamées (3-7)

Article 6 :        Comparution, 3 unités réclamées (1-3)


[25]            Les demanderesses ont convenu qu'il s'agissait d'une requête de nature procédurale, mais ont souligné qu'elle avait été déposée tardivement au cours de l'instance. Elles ont sollicité les dépens inutiles, mais le sort de cette question a été remis entre les mains du juge de première instance (dans deux ordonnances subséquentes datées du 17 novembre 1997), la requête des demanderesses en vue de radier l'acte de procédure modifié a été rejetée, tandis que la requête de la défenderesse en vue d'obtenir un délai supplémentaire pour déposer l'acte de procédure modifié a été accueillie, et les deux parties ont été sommées de présenter des observations au sujet des dépens inutiles, après le prononcé du jugement, par suite de ces modifications). Les demanderesses ont admis que les réclamations présentées au titre des articles 5 et 6 pourraient être ramenées respectivement à 4 ou 5 unités et à 1 ou 2 unités pour chaque heure.

[26]            La défenderesse a fait valoir qu'il s'agissait d'une requête relativement simple pour laquelle elle n'a eu besoin que de 35 minutes et non de l'heure réclamée afin de préciser sa position au sujet de l'absence de qualité des demanderesses pour alléguer l'atteinte au droit d'auteur. L'avocat en second qui a représenté les demanderesses devait simplement répondre aux arguments formulés et non présenter lui-même des arguments. La question des dépens inutiles ne devrait pas être un facteur favorisant les demanderesses, parce que le juge de première instance a finalement rendu une décision défavorable à leur endroit sur ce point. La défenderesse a proposé que j'accorde respectivement 3 unités et 1 unité pour chaque heure pour les articles 5 et 6.


[27]            Les avocats se sont entendus sur les montants réclamés pour tous les débours connexes, sauf dans le cas des sommes 56,51 $ et 66,70 $, qui concernent respectivement les frais de téléphone/télécopie et les frais de reliure. Les demanderesses ont admis qu'une partie du montant de 56,51 $ pourrait concerner d'autres questions et ont accepté de ramener la réclamation à 20 $. Elles ont fait valoir que les frais de reliure devraient être traités de la même façon que les frais des photocopies, puisqu'il s'agit d'un service acheté à un tiers fournisseur désintéressé. La défenderesse a proposé un montant de 10 $ pour les frais de téléphone/télécopie, étant donné que des frais de messagerie ont également été réclamés; de plus, a-t-elle a soutenu, aucun montant ne devrait être accordé pour la reliure, parce qu'il s'agit d'une dépense générale pour un cabinet d'avocats.

TAXATION

[28]            J'ai accordé 4 unités pour l'article 5. Il appert de l'ordonnance de la Cour que d'autres mesures visant à faire avancer le dossier ont été prises en plus de la modification des actes de procédure le 8 septembre 1997. Les affidavits visant à contester cette requête renfermaient des réponses à certaines questions des interrogatoires préalables et l'ordonnance comportait un échéancier des réponses à donner à une partie de cette preuve. J'accorde 2 unités pour chaque heure pour l'article 6. Je souscris habituellement à l'argument des demanderesses selon lequel la reliure constitue un service acheté à un tiers fournisseur désintéressé. Par conséquent, j'accorde des montants s'élevant respectivement à 20 $ et 35 $ pour les frais de téléphone et de télécopie et les frais de reliure.

Article 7 :        Affidavit de documents de la défenderesse (Jeffrey Casselman) fait sous serment le 30 mars 1995 (T-3016-92), 4 unités réclamées (2 - 5)

Article 7:         Affidavit de documents des demanderesses (Eugene P. Willimon) fait sous serment le 12 janvier 1995 (T-3016-92 : Milliken Industries of Canada Ltd.) (affidavit supplémentaire fait sous serment le 30 août 1995), 5 unités réclamées (2 - 5)


[29]            Les avocats des deux parties ont convenu de conserver la proportion de 83 p. 100 (calculée en fonction du nombre de documents attribuables à la réclamation principale plutôt qu'à la demande reconventionnelle) qui est prévue dans le mémoire de frais de la défenderesse dans le cas des honoraires et les débours associés à cet article uniquement. Les parties ont convenu devant moi que je devrais appliquer une proportion de 33 p. 100 en ce qui concerne l'affidavit de Milliken Industries of Canada Ltd. (ci-après Milliken Canada) et accorder le même nombre d'unités pour l'affidavit de chaque partie. La défenderesse a fait valoir qu'une valeur moyenne de 4 unités convient. De l'avis des demanderesses, quelques-uns des documents étaient de simples lettres et certains portaient sur la demande reconventionnelle, de sorte qu'il convient d'accorder 2 ou 3 unités dans le cas de l'affidavit de la défenderesse.

TAXATION

[30]            Après avoir lu les différents affidavits de documents déposés dans les dossiers de la Cour, j'accorde 3 unités pout chacun de ces deux affidavits.

Article 7 :        Affidavit de documents de la défenderesse (Jeffrey Casselman) fait sous serment le 24 août 1995 et affidavit de documents supplémentaire (Jeffrey Casselman) fait sous serment le 11 octobre 1995 (T-1212-95), 4 unités réclamées (2 - 5)


[31]            La défenderesse s'est opposée à une répartition mécanique des dépens entre les trois causes d'action, parce qu'elles n'ont pas nécessairement toutes demandé le même travail. La demande reconventionnelle et la demande concernant le dessin industriel étaient simplement des instances complémentaires par rapport à l'action relative à l'atteinte au droit d'auteur et n'étaient pas liées au fait que celle-ci entravait considérablement le droit de la défenderesse de poursuivre ses activités. La défenderesse a réclamé une proportion de 95 p. 100 des débours et honoraires relatifs à l'action concernant le droit d'auteur, parce que ces documents ont été faits avant 1995 et n'avaient rien à voir avec la cause d'action portant sur le dessin industriel. La plupart des documents concernaient les questions en litige dans l'action principale relative au droit d'auteur. En conséquence, la proportion que les demanderesses ont proposée, soit 47,5 p. 100, n'est pas justifiée, parce que ce sont les actes de procédure qui sont taxés plutôt que les causes d'action. De l'avis de la défenderesse, il convient d'accorder un nombre d'unités correspondant au milieu de la fourchette prévue au Tarif, soit 4 unités, pour deux affidavits déposés à une étape clé de l'instance.

[32]            Les demanderesses ont répliqué que certains de ces documents portent à la fois sur l'action relative au dessin industriel et sur celle qui concerne le droit d'auteur et que la défenderesse ne les aurait pas produits dans le dossier T-1212-95 s'ils n'avaient pas été pertinents quant aux deux causes d'action. Étant donné qu'un document concerne uniquement le dessin industriel et que les 19 autres portent tant sur le dessin industriel que sur le droit d'auteur, les honoraires et débours devraient être répartis selon une proportion de 47,5 p. 100. En ce qui concerne la répartition mécanique entre les causes d'action, les demanderesses ont ajouté que les documents 11 à 20 mentionnés à l'affidavit supplémentaire sont exactement les mêmes que les documents 14 à 23 énumérés à l'affidavit supplémentaire fait sous serment le 11 octobre 1995 (T-3016-92), de sorte qu'il suffirait d'accorder 2 unités.

TAXATION


[33]            Comme je l'ai mentionné plus haut, il est acceptable de répartir les dépens de façon à tenir compte du travail exécuté relativement à différentes adjudications de frais, mais je dois me rappeler que ces adjudications ont été faites séparément les unes des autres, ce qui signifie que je ne suis pas tenu de faire une répartition. Toutefois, une répartition est logique dans les circonstances de la présente affaire, où il est possible que les documents susmentionnés aient été utilisés sans distinction relativement à plusieurs causes d'action dont les résultats n'ont pas été les mêmes. J'accorde 3 unités et j'applique une répartition selon la proportion de 83 p. 100 utilisée plus haut dans le dossier T-3016-92.

Article 7 :        Affidavit de documents de Milliken (Terry Moyer) fait sous serment le 29 août 1995 (T-1212-95), 5 unités réclamées (2 - 5)

[34]            Les parties se sont entendues devant moi sur le nombre d'unités (2), mais non sur la répartition. Elles ont consenti à un montant réduit total de 10 $ pour les débours non visés par la répartition. Les demanderesses ont fait valoir que trois des six documents (illustration, acte confirmant la cession et document d'appel d'offres) étaient imputables à la fois au dessin industriel et au droit d'auteur, un (certificat de renouvellement) au dessin industriel et deux (enregistrements du droit d'auteur) au droit d'auteur, ce qui signifie qu'une répartition selon une proportion de 42 p. 100 (2,5 documents sur six) devrait s'appliquer.


[35]            La défenderesse a répliqué que, dans son jugement, la Cour a finalement écarté l'acte confirmant la cession et qu'il n'y a donc pas lieu de tenir compte de celui-ci aux fins des dépens. Selon la défenderesse, l'illustration était importante uniquement pour les questions liées au droit d'auteur et sa valeur en ce qui a trait au dessin industriel se limitait à l'enregistrement, lequel n'est pas pertinent aux fins des dépens. La défenderesse a admis que le document d'appel d'offres concernait à la fois le dessin industriel et le droit d'auteur, mais a allégué qu'aux fins des dépens, il devrait être considéré comme un document attribuable uniquement au droit d'auteur. Par conséquent, la répartition devrait être fondée sur un pourcentage de 17 p. 100, soit un document sur six.

TAXATION

[36]            J'accorde une répartition de 42 p. 100.

Article 8:         Préparation de la défenderesse en vue de l'interrogatoire préalable de la défenderesse (Jeffrey Casselman) fixé le 11 octobre 1995 (T-3016-92 et T-1212-95), 5 unités réclamées (2 - 5)

Article 9 :        Présence de la défenderesse à l'interrogatoire du 11 octobre 1995, 3 unités réclamées (0 - 3)

Article 8 :        Préparation de la défenderesse en vue de l'interrogatoire préalable de Milliken Canada (Jim Davidson) le 12 octobre 1995 (T-3016-92 et T-1212-95), 5 unités réclamées (2 - 5)

Article 9:         Présence de la défenderesse à l'interrogatoire du 12 octobre 1995, 3 unités réclamées (0 - 3)

Article 8:         Préparation de la défenderesse en vue de l'interrogatoire préalable de Milliken (Robert Yates) le 12 octobre 1995 (T-3016-92 et T-1212-95), 4 unités réclamées (2 - 5)

Article 9:         Présence de la défenderesse à l'interrogatoire du 12 octobre 1995, 3 unités réclamées (0 - 3)

Article 8:         Préparation des demanderesses en vue de l'interrogatoire préalable de la défenderesse tenu le 11 octobre 1995, 5 unités réclamées (2 - 5)

Article 8:         Préparation des demanderesses en vue de l'interrogatoire préalable de Milliken et de Milliken Canada tenu le 12 octobre 1995 (T-1212-95), 5 unités réclamées (2 - 5)


Article 9:         Présence des demanderesses à l'interrogatoire du 12 octobre 1995 (Milliken), 3 unités réclamées (0 - 3)

Article 9:         Présence des demanderesses à l'interrogatoire du 12 octobre 1995 (Milliken Canada), 3 unités réclamées (0 - 3)

Article 9:         Présence des demanderesses à l'interrogatoire du 11 octobre 1995 (défenderesse) (T-1212-95), 3 unités réclamées (0 - 3)

[37]            Les avocats des deux parties ont convenu que le nombre d'unités que j'accorde à la défenderesse pour les articles 8 et 9 avant la répartition devrait être identique à celui que j'accorde aux demanderesses pour les mêmes articles, les demanderesses ayant toutefois exigé que le nombre d'unités attribué au titre de l'article 8 pour M. Yates corresponde à 1 unité de moins que celui de MM. Casselman et Davidson. De plus, les avocats ont convenu que leurs arguments concernant la répartition s'appliqueraient aux honoraires et aux débours. La défenderesse a demandé le maximum d'unités prévu au Tarif, parce que le litige mettait en jeu une somme importante au titre des dommages-intérêts et a nécessité la participation d'avocats principaux. Pour leur part, les demanderesses ont répondu qu'il s'agissait d'interrogatoires préalables routiniers, de sorte qu'il convient d'accorder 2 unités pour chaque élément réclamé au titre de l'article 8 et 1 unité pour chaque heure relativement à chaque élément de l'article 9.


[38]            Les avocats des deux parties ont admis que la transcription du 11 octobre 1995 totalisait 201 pages, soit huit pages concernant des questions générales au sujet de la qualité des témoins et du statut des entreprises, 172 pages concernant l'élaboration et la fabrication du produit correspondant au dessin d'Interface de la défenderesse, 13 pages concernant la demande reconventionnelle, une page concernant le dessin industriel et 7 pages concernant les ventes visées par l'allégation d'atteinte au droit d'auteur dans le dossier T-3016-92. Les avocats ont convenu que les 13 pages et la page susmentionnées devraient s'appliquer aux demanderesses et les sept pages, à la défenderesse.


[39]            En ce qui concerne les proportions de 94 p. 100 et 77 p. 100 (calculées en fonction des pages de la transcription attribuables à ces témoins) qu'elle réclame respectivement pour M. Casselman et M. Davidson, la défenderesse a fait valoir que l'instance du dossier T-1212-95 n'aurait pas été engagée en l'absence de l'instance T-3016-92. L'action de 1992 portait sur 95 p. 100 des ventes, de sorte que l'action de 1995, qui concernait une seule vente, n'était qu'un ajout utile. Au paragraphe [13] de ses motifs d'ordonnance datés du 24 avril 1998 (lesquels concernaient les dépens inutiles), la Cour a conclu que les demanderesses ont poursuivi leur action dans le dossier T-3016-92 même si elles savaient que leur cause comportait de graves lacunes. Il est facile de distinguer les circonstances d'une seule vente en litige dans l'action de 1995 de celles des nombreuses ventes en cause dans l'action T-3016-92. De l'avis de la défenderesse, il est inéquitable de répartir les huit premières pages susmentionnées, comme les demanderesses le suggèrent, parce que l'hypothèse sous-jacente selon laquelle l'action T-1212-95 était indépendante est inexacte. Subsidiairement, la défenderesse a soutenu que la perception des demanderesses quant à l'existence d'interrogatoires préalables distincts pour chacune des trois causes d'action est erronée, parce qu'il y avait au moins six causes d'action : (i) l'effet des ventes de 1991 sur le droit d'auteur; (ii) l'effet des ventes de 1992 sur le droit d'auteur; (iii) l'effet des ventes conclues vers la fin de 1992 sur le droit d'auteur; (iv) la demande reconventionnelle; (v) l'effet de la vente de 1995 sur le droit d'auteur et (vi) l'effet de la vente de 1995 sur le dessin industriel. L'application du raisonnement des demanderesses donne lieu à l'imputation de quatre des six causes d'action à la défenderesse, de sorte qu'elle devrait obtenir 67 p. 100 des dépens afférents à ces huit pages de transcription.


[40]            La défenderesse a ajouté qu'en raison des différences fondamentales entre les règles de droit applicables au droit d'auteur et celles du dessin industriel, les procédures relatives au droit d'auteur et au dessin industriel et les dépens connexes étaient entièrement dissociables, de sorte que les 172 pages et les huit autres pages sont attribuables en entier aux dépens de la défenderesse dans l'instance relative au droit d'auteur. En effet, dans cette dernière instance, étant donné que la défenderesse agissait conformément aux directives qu'elle avait reçues de l'aéroport de Calgary, elle a allégué en défense que le dessin apparemment contrefait avait été créé de manière indépendante. En conséquence, les demanderesses avaient besoin de ces 180 pages pour savoir comment la défenderesse en était arrivée à son dessin afin de décider s'il y avait eu atteinte au droit d'auteur. En revanche, la reproduction d'un dessin qui était reprochée ne constitue pas un élément de preuve important en ce qui a trait à la contrefaçon d'un dessin industriel. Les demanderesses devaient plutôt comparer ce qui a été enregistré avec ce qui a été vendu et ne se sont donc vraisemblablement pas intéressées à la genèse du dessin de la défenderesse. En résumé, la défenderesse a soutenu que, dans le cas de l'interrogatoire préalable de M. Casselman le 11 octobre 1995, 187 des 201 pages de transcription, ce qui correspondait à quatre des six causes d'action, étaient attribuables à ses dépens. Un montant élevé était en jeu dans le litige au titre des dommages-intérêts et il a été nécessaire d'avoir recours aux services d'avocats principaux.

[41]            Les avocats des deux parties ont convenu, dans le cas de l'interrogatoire préalable de M. Yates qui a eu lieu le 12 octobre 1995 et pour lequel la défenderesse réclamait 76 p. 100 des frais connexes, que la transcription de l'interrogatoire comptait 53 pages au total, soit trois pages qui portaient sur le droit d'auteur et étaient attribuables aux dépens de la défenderesse, 19 pages qui portaient sur le dessin industriel et étaient attribuables aux dépens des demanderesses, six pages qui portaient sur des questions générales et 25 pages qui concernaient la question du droit de propriété afférent au droit d'auteur sur le dessin Mangrove des demanderesses; cependant, les avocats ne s'entendaient pas sur la pertinence de cet interrogatoire pour la question du dessin industriel. La défenderesse a souligné que 4 unités seulement ont été réclamées au titre de l'article 8 pour l'interrogatoire de M. Yates, parce que l'interrogatoire des deux autres personnes était plus long et plus détaillé.


[42]            La défenderesse a réitéré, à l'égard des six pages, son argument exposé ci-dessus selon lequel elle avait droit à une répartition de 100 p. 100 ou de 2/3 (soit quatre causes d'action sur six). Dans le cas des 25 pages, la défenderesse a souligné les commentaires du juge de première instance au sujet de la difficulté de Milliken à prouver sa cause (83 C.P.R. (3d) 470, aux pages 481 à 484). Plus précisément, Milliken n'a pas expliqué pourquoi elle n'avait pas présenté d'éléments de preuve disponibles validant la qualité qu'elle avait pour alléguer l'atteinte au droit d'auteur, permettant de ce fait au juge de l'instruction de tirer une déduction défavorable à ce sujet. Cette preuve n'était pas disponible au moment de l'interrogatoire préalable. La défenderesse a donc soutenu que ces 25 pages devaient être attribuées aux questions relatives au droit d'auteur sur le dessin Mangrove. La position subsidiaire, soit une répartition de 2/3, ne s'applique pas en l'espèce, parce que ces pages portaient uniquement sur le titre de propriété afférent au droit d'auteur. Les allusions (pages 16 et 33 de la transcription) au dessin industriel ne visaient qu'à obtenir des clarifications mineures dans une série de pages concernant le titre afférent au droit d'auteur. Il appert de la transcription de l'interrogatoire préalable (page 34, question 110) que le dessin industriel n'était pas une question litigieuse avant le 1er septembre 1992. Ces 25 pages ne devraient pas être réparties sur une base égale entre le droit d'auteur et le dessin industriel simplement en raison de l'existence d'une ligne concernant le dessin industriel. Dans ses motifs, le juge de l'instruction explique de façon détaillée l'origine du dessin Mangrove, qui était pertinente quant au droit d'auteur, mais non quant au dessin industriel.


[43]            Pour leur part, les demanderesses ont allégué, relativement à huit des 201 pages (interrogatoire de M. Casselman tenu le 11 octobre 1995), que l'ensemble des instances examinées dans la présente taxation portaient sur trois causes d'action distinctes, soit l'atteinte au droit d'auteur, la demande reconventionnelle et la contrefaçon du dessin industriel, et que chacune comporte ses propres frais. L'interprétation que la défenderesse a proposée au sujet de la décision de la Cour concernant les dépens inutiles n'est pas pertinente en l'espèce. Si la défenderesse n'avait pas attendu jusqu'à la dernière minute avant le début de l'instruction pour abandonner deux causes d'action, aucune question ne se poserait quant à la répartition des dépens. Par conséquent, la répartition devrait dépendre des causes d'action et du temps qui leur a été consacré, de sorte que les huit pages devraient être réparties sur une base égale entre le droit d'auteur et le dessin industriel, parce que les questions s'y rapportant auraient été nécessaires s'il y avait eu simplement une cause d'action concernant le dessin industriel. Les demanderesses ne partageaient pas le point de vue de la défenderesse en ce qui a trait aux 172 pages et aux huit autres et ont répliqué que l'origine du dessin de celle-ci était très pertinente quant à l'action relative au dessin industriel. Par conséquent, il y a lieu de répartir ces pages sur une base égale aux fins des dépens des demanderesses et de la défenderesse. En résumé, les demanderesses ont demandé une répartition correspondant à 104 des 201 pages en ce qui a trait aux dépens que la défenderesse a réclamés pour l'interrogatoire préalable de M. Casselman. Elles ont précisé que le litige portait sur quelques ventes peu différentes les unes des autres, de sorte qu'il conviendrait d'accorder respectivement 2 unités et 1 unité pour chaque heure pour tous les éléments des articles 8 et 9 figurant dans les mémoires de frais des deux parties.


[44]            Dans le cas des dépens que la défenderesse a réclamés pour l'interrogatoire préalable de M. Davidson, les demanderesses ont fait valoir que la transcription contenait 226 pages plutôt que les 236 mentionnées dans le mémoire de frais, soit 173 pages qui portaient sur l'action relative au droit d'auteur de 1992 (les avocats ont convenu que ces pages étaient attribuables aux dépens de la défenderesse) et 44 pages qui concernaient la demande reconventionnelle (les avocats ont convenu que ces pages étaient attribuables aux dépens des demanderesses), ce qui laissait neuf pages à répartir. Les avocats ont admis que les arguments exposés ci-dessus au sujet de l'interrogatoire préalable tenu le 11 octobre 1995 (M. Casselman) s'appliqueraient respectivement dans ce cas-ci en fonction d'une proportion de 50 p. 100 que les demanderesses réclament pour les neuf pages et d'une proportion de 100 p. 100, ou subsidiairement 2/3, soit quatre causes d'action sur six, que la défenderesse réclame pour celles-ci.

[45]            Dans le cas des 25 pages de transcription susmentionnées de l'interrogatoire préalable de M. Yates tenu le 12 octobre 1995, les demanderesses ont précisé que ces pages concernaient la façon dont Milliken a acquis le titre de propriété afférent au dessin Mangrove tant en ce qui a trait au droit d'auteur qu'au dessin industriel. En conséquence, une répartition de 50 p. 100 devrait s'appliquer, étant donné que les actions pour atteinte au droit d'auteur intentées en 1992 et 1995 et l'action relative au dessin industriel engagée en 1995 découlaient des mêmes faits entourant l'acquisition de ce titre de propriété. Les nombreuses allusions au dessin industriel dans la transcription de l'interrogatoire préalable (page 16, question 49; page 33, question 108) justifient une répartition de 50 p. 100. De plus, la question 126 indique que les questions 119 à 125 pourraient englober le dessin industriel. Les demanderesses ont allégué qu'il appert clairement des pages 16 et 33 que les droits acquis étaient à la fois un droit d'auteur et un droit afférent au dessin industriel et ont réclamé une répartition de 50 p. 100 pour les six pages (questions générales) en litige dans le cas de l'interrogatoire de M. Yates.

[46]            Les avocats se sont entendus sur les montants et les retraits de plusieurs débours associés à la préparation et à la comparution des demanderesses, sauf en ce qui a trait aux montants de 225,50 $ et 291,88 $ réclamés respectivement pour les photocopies et les photographies couleurs/grand format. Les demanderesses ont déplacé le montant de 291,88 $ à l'article 13a) ci-dessous, qui concerne la préparation de l'instruction, et ont précisé que ce montant ne représentait pas des travaux déjà réclamés et se comparait à celui qui avait été convenu pour la défenderesse. De plus, elles ont proposé un montant de 50 $ pour les photocopies. Selon la défenderesse, une partie des frais porte nécessairement sur la cause d'action principale, soit le droit d'auteur, si bien qu'un montant total de 25 $ pour les deux conviendrait.

TAXATION


[47]            Les événements survenus dans le présent litige et les questions de répartition qui se posent indiquent que chaque cause d'action peut être réglée différemment, que ce soit par une entente à l'amiable, par un désistement ou encore par une décision négative ou positive. Selon l'ordonnance datée du 10 août 1995, par laquelle la Cour a réuni les instances T-3016-92 et T-1212-95 aux fins de l'instruction, la preuve et les interrogatoires préalables devaient être communs dans les cas pertinents. La Cour a accueilli en partie la demande de jugement sommaire des demanderesses et rejeté la demande reconventionnelle de la défenderesse (droit d'auteur) au motif qu'elle était prescrite en ce qui concerne les recours autres que l'injonction, et ce, avec dépens contre la défenderesse. Par la suite, la Cour a rejeté le reste de la demande reconventionnelle sur consentement et a condamné la défenderesse à payer les dépens. Dans le présent litige, la défenderesse a eu gain de cause en ce qui a trait à la question du droit d'auteur, tandis que la demanderesse (Milliken) a eu gain de cause quant à celle du dessin industriel. À mon avis, la confusion qui s'est produite était prévisible, car en raison de l'existence de deux dossiers d'instance, différentes causes d'action ont été réglées de manière distincte. En conséquence, il m'apparaît nécessaire d'examiner chacune des causes d'action séparément pour trancher les questions de taxation qui se posent pour chacune d'elles.

[48]            Le droit d'auteur était au coeur du présent litige, mais la fragmentation des dépens en fonction des questions débattues devant moi au sujet de la répartition ne diminue pas la valeur de chaque adjudication de dépens indépendante fondée sur la Règle 400(1). À mon avis, l'action de 1995 aurait été réglée autrement qu'au moyen d'une instruction, en l'absence de l'action de 1992 qui portait sur un volume de ventes relativement plus élevé et qui a constitué l'essence du litige. Par cette conclusion, je n'ai pas l'intention de minimiser le succès que les demanderesses ont remporté à l'égard de certains aspects du litige. Je reconnais que le titulaire de droits de propriété intellectuelle ne peut être passif et est tenu, en vertu de la loi, de prendre des mesures actives et positives pour faire valoir et protéger ces droits, y compris l'introduction et la contestation de litiges.


[49]            Dans les motifs de jugement datés du 26 janvier 2000 (A-120-98, A-121-98), la Cour d'appel fédérale a présenté un résumé utile des faits et des questions à trancher dans le litige. Lorsque j'examine ce résumé avec les motifs des différentes décisions interlocutoires rendues dans les dossiers d'instance, je suis d'avis que le litige portait sur trois causes d'action : une cause d'action relative au droit d'auteur (ou une série de causes d'action de cette nature) par suite des nombreuses installations de dalles de moquette constituant apparemment une contrefaçon du dessin Mangrove des demanderesses, une cause d'action relative au droit d'auteur (ou une série de causes d'action de cette nature) au moyen d'une demande reconventionnelle par suite de nombreuses installations de dalles de moquette constituant apparemment une contrefaçon du dessin d'Interface de la défenderesse et une cause d'action relative au dessin industriel par suite de l'installation de dalles de moquette constituant apparemment une contrefaçon du dessin Mangrove des demanderesses. Toutefois, cette synthèse du litige donne lieu à un déséquilibre favorisant les demanderesses quant aux incidences de la cause d'action relative au droit d'auteur sur les dépens. Par conséquent, même si je ne souscris pas nécessairement à la proposition de la défenderesse quant à l'existence de six causes d'action, étant donné que chaque installation visée par la demande reconventionnelle a donné lieu à sa propre cause d'action, j'estime que la répartition de 67 p. 100 qu'elle suggère est justifiée.



[50]            Bien que cette fragmentation ait certainement donné lieu à des problèmes, je ne crois pas qu'elle justifie l'octroi des nombres d'unités maximaux réclamés. À mon avis, il y a lieu de tenir compte de l'existence des questions relatives au dessin industriel. J'accorde respectivement 4 unités et 2 unités pour chaque heure pour les articles 8 et 9 relativement à l'interrogatoire de MM. Casselman et Davidson dont il est fait mention dans le mémoire de frais de la défenderesse. Dans le cas de M. Casselman, la défenderesse a droit à 63 p. 100 des frais correspondants, compte tenu du calcul suivant : [(8 + 172) x 67 p. 100 + 7] ) 201 x 100 p. 100. En ce qui concerne M. Davidson, la défenderesse a droit à 79 p. 100 des frais correspondants, compte tenu du calcul suivant : [(9) x 67 p. 100 + 173] ) 226 x 100 p. 100. Quant à l'interrogatoire de M. Yates, j'accorde respectivement 3 unités et 2 unités pour chaque heure au titre des articles 8 et 9 du mémoire de frais de la défenderesse, qui a droit à 45 p. 100 des frais correspondants, compte tenu du calcul suivant : [(6 + 25) x 67 p. 100 + 3] ) 53 x 100 p. 100. J'appliquerai les pourcentages de la répartition au mémoire de frais des demanderesses (pour les articles 8 et 9, compte tenu des allocations convenues entre les avocats, à la différence que, puisque les demanderesses ont fait une seule réclamation couvrant tant M. Davidson que M. Yates au titre de l'article 8, j'ai accordé 4 unités dans les circonstances) en fonction des calculs suivants : a) pour M. Casselman, [(8 + 172) x 33 p. 100 + 13 + 1] ) 201 x 100 p. 100 = 37 p. 100; b) pour M. Davidson, [(9) x 33 p. 100 + 44] ) 226 x 100 p. 100 = 21 p. 100 et c) [(6 + 25) x 33 p. 100 + 19] ) 53 x 100 p. 100 = 55 p. 100. La réclamation au titre de l'article 9, comparution (interrogatoire préalable de Milliken et Milliken Canada), a été inscrite séparément dans le mémoire de frais des demanderesses pour chacune des causes d'action relatives à la demande reconventionnelle et au dessin industriel. Étant donné que j'ai regroupé ces causes d'action dans mon calcul, j'ai rajusté le mémoire de frais taxé en conséquence. J'accorde un montant de 50 $ pour les photocopies mentionnées dans le mémoire de frais des demanderesses. Contrairement à la défenderesse, les demanderesses n'ont pas isolé les débours propres à M. Casselman, à M. Davidson et à M. Yates, de sorte qu'il est nécessaire de faire une répartition proportionnelle pour atteindre un résultat équitable : j'ai utilisé le pourcentage de 38 p. 100 (moyenne des proportions de 37 p. 100, 21 p. 100 et 55 p. 100 susmentionnées) que j'ai appliqué au total des débours de 2 280,77 $ (compte tenu des rajustements et des réductions) apparaissant deux fois (aux pages 9 et 14 du mémoire de frais).

Article 27 :      Préparation, réponses, revue des réponses et suivi de la défenderesse quant à l'interrogatoire préalable écrit de M. Casselman (lettres datées des 19 et 28 juin 1996) par suite de l'ordonnance datée du 11 mars 1998, 2 unités pour chaque heure réclamées pour 18,3 heures (l'avocat de la défenderesse a ajouté 0,8 heure pour le document du 27 juin 1996 aux 17,5 heures réclamées dans le mémoire de frais d'après la pièce O jointe à l'affidavit de Mary Mutchler fait sous serment le 4 octobre 2001) (1 - 3)

Article 27 :      Préparation de la défenderesse selon la description qui précède quant à la suite de l'interrogatoire préalable écrit de MM. Davidson et Yates (lettre datée du 18 juillet 1997), 3 unités pour chaque heure réclamées pour 11,5 heures (1 - 3)

Article 27 :      Préparation de la défenderesse selon la description qui précède quant à la suite de l'interrogatoire préalable écrit de M. Casselman (lettres du 2 août et du 15 septembre 1997), 3 unités pour chaque heure réclamées pour 10 heures (1 - 3)

Article 27 :      Préparation de la défenderesse selon la description qui précède quant à la suite de l'interrogatoire préalable écrit de M. Casselman (lettres datées des 24 et 30 septembre et du 9 octobre 1997), 3 unités pour chaque heure réclamées pour 6,4 heures (1 - 3)

Article 27 :      Préparation de la défenderesse selon la description qui précède quant à la suite de l'interrogatoire préalable écrit de MM. Davidson et Yates (lettres des 9, 23 et 27 octobre 1997), 3 unités pour chaque heure réclamées pour 3 heures (1 - 3)

Article 27 :      Préparation de la défenderesse selon la description qui précède quant à la suite de l'interrogatoire préalable écrit de MM. Davidson et Yates (lettres des 31 octobre et 3 novembre 1997), 3 unités pour chaque heure réclamées pour 1,5 heure (1 - 3)



[51]            Le 11 mars 1998, dans le dossier T-3016-92, la Cour a statué comme suit : [traduction] « dans le cas de l'interrogatoire préalable mené par écrit, la défenderesse a droit à des dépens selon la valeur unitaire que déterminera l'officier taxateur pour chaque heure raisonnablement consacrée à la préparation des questions écrites, aux réponses à ces questions et à la revue des réponses » . La défenderesse a souligné que les 2 unités réclamées concernent les services de l'avocat adjoint et les 3 unités, ceux de l'avocat principal. Elle a précisé que les arguments qu'elle a invoqués plus haut au sujet des interrogatoires préalables oraux devraient généralement s'appliquer aux interrogatoires préalables écrits, puisque ceux-ci faisaient suite aux premiers. Il ne s'agissait pas de questions complémentaires routinières, mais plutôt de questions portant sur des préoccupations nombreuses et majeures, comme la qualité que les demanderesses avaient pour alléguer l'atteinte au droit d'auteur, qui constitue un facteur clé de la décision du juge de première instance. Les 18,3 heures, qui couvraient 47 questions, portaient sur des aspects comme la création du dessin, les détails des ventes, notamment les dates et la notification du droit d'auteur à l'égard du dessin Mangrove dans le contexte du fondement de l'atteinte au droit d'auteur et d'autres questions de fait. La défenderesse a soutenu que la position qu'invoquent les demanderesses ci-dessous a pour effet d'imposer un plafond artificiel en fonction des dépens partie-partie et va à l'encontre de l'objet que visait l'ordonnance du juge de première instance, soit accorder des dépens partie-partie s'approchant des dépens réels. De plus, les questions de l'interrogatoire oral sont posées l'une après l'autre à un rythme qui ne se compare pas à celui de la présentation des questions et réponses écrites. Dans le cas de celles-ci, il est nécessaire de compiler des renseignements à partir de plusieurs sources et de réviser ces données pour présenter un document compréhensible (remarque : l'avocat des demanderesses a soutenu que cette tâche aurait dû faire l'objet d'une preuve par affidavit, mais l'avocat de la défenderesse a répondu que ce travail était manifestement nécessaire). Elle a ajouté que cet interrogatoire préalable (pour lequel 18,3 heures sont réclamées) était un interrogatoire majeur en soi et non un simple suivi.

[52]            La défenderesse a repris le même argument dans le cas des 11,5 heures (96 questions) et souligné que le juge a reconnu dans l'ordonnance que cette façon de procéder permettrait de diminuer le temps des témoins qui sont cadres. Elle a abondé dans le même sens dans le cas des dix heures réclamées (49 questions) et précisé que les demanderesses ont mis l'accent sur l'élaboration du dessin d'Interface. De l'avis de la défenderesse, je devrais tirer une conclusion défavorable du fait que les demanderesses n'ont présenté aucune preuve concernant le travail qu'elles ont accompli dans le cadre de ces interrogatoires écrits. La défenderesse a formulé le même argument dans le cas des 6,4 heures (98 questions) et des trois autres heures (39 questions). Selon elle, ce dernier interrogatoire portait sur le droit de Milliken d'alléguer une atteinte au droit d'auteur relativement aux origines artistiques du dessin Mangrove ainsi que sur des détails entourant la façon dont Milliken aurait acquis des droits sur le dessin, laquelle question représente un élément clé de la décision du juge de première instance. Ce n'est qu'à l'instruction que les dernières révélations concernant ces questions ont été présentées en preuve et ont considérablement atténué la qualité qu'avaient les demanderesses pour poursuivre leur cause d'action. De l'avis de la défenderesse, ces faits démontrent que le ratio que proposent les demanderesses et qui donne lieu à un plafond ne correspond pas aux frais raisonnables qu'entendait accorder le juge de première instance, et il en est de même dans le cas de l'heure et demie réclamée (29 questions).



[53]            En ce qui a trait aux 18,3 heures, les demanderesses ont fait valoir que l'ordonnance du 11 mars 1998 est inhabituelle, parce qu'elle portait sur une activité normalement couverte par l'article 9, frais de présence aux interrogatoires. L'ordonnance visait à accorder une indemnisation raisonnable, tant au plan des heures que des montants. Selon les demanderesses, les fourchettes relatives aux articles 8 et 9 représentent une limite touchant les dépens partie-partie et ne permettent pas de réclamer des frais avocat-client, ce que la défenderesse sollicite en réalité. Il n'est pas raisonnable de réclamer18,3 heures, pour 47 questions écrites supplémentaires, compte tenu des neuf heures consacrées aux quelque 909 questions posées à M. Casselman lors de son interrogatoire oral. La preuve révèle des révisions répétées à l'égard desquelles des frais excessifs ont été réclamés pour le travail d'un avocat adjoint, de sorte que je devrais imposer un plafond. Les demanderesses ont fait valoir que des inscriptions semblables à celles qui figurent pour la date du 14 juin 1996 (pièce O jointe à l'affidavit de Mutchler), [traduction] « longues conférences téléphoniques... au sujet de l'évolution du dossier et de la stratégie à adopter ainsi qu'au sujet des questions en suspens... préparation des réponses aux questions en suspens, lettre à ... » représentent un travail non pertinent pour lequel un nombre d'heures exagéré est réclamé. De l'avis des demanderesses, il ne serait pas raisonnable d'accorder des milliers de dollars dans une adjudication de dépens partie-partie pour quelques questions complémentaires et il conviendrait d'accorder une indemnité correspondant à 47/909 de celle que j'ai attribuée au titre des articles 8 et 9 dans le cas de M. Casselman. Les demanderesses ont ajouté que la répartition demeure un facteur à prendre en compte pour ces articles et qu'il convient d'utiliser la même formule que celle qui a été employée pour les interrogatoires préalables oraux.

[54]            Les demanderesses ont invoqué le même argument pour les 11,5 heures (total de 1 168 questions verbales) et ont proposé une indemnité correspondant à 96/1168 de celle que j'ai accordée au titre des articles 8 et 9 dans le cas de MM. Davidson et Yates. Les demanderesses n'étaient pas d'accord avec l'argument de la défenderesse selon lequel ces interrogatoires préalables écrits ont remplacé les interrogatoires oraux parce que, s'ils avaient été tenus sous forme verbale, le nombre d'heures réclamé au titre de l'article 9 aurait été nettement inférieur aux 11,5 heures mentionnées. Cependant, il convient d'ajouter quelques dollars pour tenir compte du travail de préparation (article 8). Les demanderesses ont invoqué le même argument pour les dix heures et ont proposé une indemnité correspondant à 49/909 de celle que j'ai accordée au titre des articles 8 et 9. Dans la mesure où l'avocat ne fait que transcrire ce que lui dit le client, il est déraisonnable d'accorder dix heures pour 49 questions alors qu'il aurait fallu un peu moins d'une heure pour poser ces mêmes questions verbalement. Les demanderesses ont allégué que leur propre temps de préparation n'est pas pertinent, parce qu'elles n'ont pas obtenu les dépens et ne sont donc pas tenues de prouver ce que la défenderesse doit démontrer.


[55]            Les demanderesses ont formulé le même argument pour les 6,4 heures, les 3 heures et l'heure et demie et ont proposé une indemnité correspondant respectivement à 98/909, 39/1168 et 19/1168 de celle que j'ai accordée au titre des articles 8 et 9. Elles ont précisé que, étant donné que l'ordonnance ne comporte aucune mention de l'article 27 et de sa fourchette de 1 à 3 unités, je possède le pouvoir discrétionnaire nécessaire pour appliquer une autre formule, y compris des fractions d'unité et un nombre d'heures inférieur à celui qui est réclamé, afin d'atteindre le résultat raisonnable visé par l'ordonnance. Selon les demanderesses, ce dernier argument ne constitue pas une solution de rechange à leur formule proportionnelle susmentionnée, mais démontre plutôt que, pour chaque interrogatoire préalable écrit, la formule proportionnelle a uniquement pour effet de fixer un plafond et que l'indemnité que j'accorde pourrait être nettement inférieure. Ainsi, pour les trois heures et une indemnité approximative de 2 800 $ pour MM. Davidson et Yates au titre des articles 8 et 9, le plafond équivaudrait à 39/1168 de 2 800 $, soit 93 $, mais je pourrais accorder un montant nettement inférieur.

TAXATION


[56]            J'ai du mal à accepter la proposition des demanderesses, parce que le temps nécessaire à la préparation d'un interrogatoire préalable peut varier selon les circonstances. De plus, j'aurais pensé que le calcul de l'indemnité au titre de l'article 8, qui représente un montant global ne tenant pas vraiment compte des différences de temps d'un cas à l'autre, donnerait lieu à un pourcentage inférieur pour les frais partie-partie à celui des frais avocat-client comparativement à l'article 9, qui est fondé sur un nombre d'unités pour chaque heure se rapprochant peut-être dans certains cas de la valeur marchande des services d'avocats, selon l'expérience de l'avocat concerné ou selon la région où le service est rendu. L'ordonnance ne comporte aucune allusion à des dépens avocat-client, mais d'aucuns pourraient soutenir que des dépens de cette nature ont effectivement été accordés par cette ordonnance. Cependant, la requête comportait un renvoi explicite à l'article 27. De plus, aucun élément de cette requête ou de l'affidavit à l'appui n'indique que l'ordonnance sollicitée était punitive, le facteur associé dans presque tous les cas à l'octroi de frais avocat-client, même s'il appert du dossier que les demanderesses étaient conscientes des faiblesses de leur cause. Par ailleurs, aucun élément du dossier ne donne à penser que l'expression [traduction] « raisonnablement consacrée » de l'ordonnance avait pour effet de restreindre la défenderesse à des dépens partie-partie. À mon avis, la fourchette prévue au Tarif pour l'article 8 ne donne généralement pas lieu à la norme habituellement perçue comme la norme désirable pour des dépens partie-partie, soit un pourcentage allant de 35 p. 100 à 50 p. 100 des frais avocat-client réels.


[57]            Dans l'ordonnance, le caractère raisonnable était lié à un nombre d'unités pour chaque heure, mais non à un montant global. La réclamation distincte que les demanderesses ont formulée pour le 14 juin 1996 est intéressante, parce que le travail concernant « l'évolution du dossier et la stratégie à adopter » , joint au travail relatif aux interrogatoires préalables écrits, pour lesquels un nombre total de 3,5 heures est réclamé, est probablement un travail de préparation de l'instruction habituellement associé à l'article 13 et n'est pas visé par l'ordonnance. Il y a également lieu de se demander si ce facteur a été pris en compte dans le calcul des 18,3 heures réclamées. Plusieurs tâches, notamment en ce qui concerne les requêtes, les entrevues des témoins, l'avis de demande d'admission, la modification des actes de procédure, sont mentionnées un peu partout dans les factures et sont également classées avec les tâches relatives aux interrogatoires préalables écrits sans que l'on sache vraiment jusqu'à quel point il y a eu répétition. Les taux horaires moyens facturés s'élèvent à 200 $, 315 $, 335 $, 322 $ et 342 $, qu'il s'agisse ou non de travaux liés aux interrogatoires préalables.


[58]            L'ordonnance représentait un écart par rapport à la restriction qui s'applique habituellement à l'article 8, préparation, et qui interdit de calculer les dépens en fonction d'un taux horaire. De plus, je ne crois tout simplement pas que les frais liés aux interrogatoires préalables écrits peuvent se comparer aisément à ceux de la préparation des interrogatoires oraux et de la présence à ceux-ci. Contrairement à ce qui a été fait pour les interrogatoires oraux, aucune répartition n'a été faite pour ces services dans le mémoire de frais. Même si je comprends que les demanderesses s'en tiennent à leur position exposée ci-dessus quant à la répartition relative aux interrogatoires préalables oraux, le résultat m'apparaît trop restrictif. J'admets toutefois qu'il y a lieu de tenir compte de la répartition et j'attribue des nombres d'unités en conséquence. Dans les circonstances de la présente affaire, j'accorderai un nombre d'unités et d'heures permettant d'atteindre le résultat global visé par la présente ordonnance en ce qui concerne les travaux dont les services confondus étaient habituellement liés tant à l'article 8, préparation, qu'à l'article 9, comparutions, ainsi qu'en ce qui concerne les travaux constituant des services supplémentaires de la nature du suivi des questions en suspens. C'est un résultat qui est supérieur aux dépens partie-partie habituels, mais inférieur aux dépens avocat-client. Voici ce que j'accorde : a) quant à la réclamation de 18,3 heures, 2 unités pour chaque heure pour 14 heures; b) quant à la réclamation de 11,5 heures, 3 unités pour chaque heure pour 8,5 heures; c) quant à la réclamation de 10 heures, 3 unités pour chaque heure pour sept heures; d) quant à la réclamation de 6,4 heures, 3 unités pour chaque heure pour quatre heures; e) quant à la réclamation de trois heures, 3 unités pour chaque heure pour deux heures; f) quant à la réclamation de 1,5 heure, 3 unités pour chaque heure pour 1,5 heure.

Article 5 :        Préparation des demanderesses relativement à leur requête datée du 28 mai 1996 en vue de contraindre J. Casselman à répondre aux questions de l'interrogatoire préalable : requête accueillie avec dépens le 10 juin 1996 (T-3016-92), 6 unités réclamées (3 - 7)

Article 6 :        Comparution, 3 unités réclamées (1 - 3)

[59]            Les demanderesses ont soutenu que ces requêtes ne sont habituellement pas complexes, mais nécessitent une préparation intensive qui justifie l'octroi d'un nombre d'unités se rapprochant du nombre maximal prévu au Tarif et réclamé en l'espèce. La défenderesse a fait valoir que la réclamation devrait être abaissée à 3 unités dans le cas de l'article 5, parce que la préparation se limitait à une simple énumération des questions auxquelles le témoin avait refusé de répondre. Elle a admis les quatre heures réclamées pour la comparution, mais a proposé que le nombre d'unités pour chaque heure soit abaissé à 2, parce que les questions étaient simples, de sorte que la présence d'un avocat en second suffisait. Selon cette suggestion, l'indemnité s'élèverait à 1 100 $ pour cette requête, ce qui est comparable à la somme globale de 1 000 $ relative aux honoraires (lequel montant est inclus dans le mémoire de dépens des demanderesses et pourrait, comme les avocats en ont convenu, faire partie du montant total taxé), ainsi qu'aux débours à taxer, qui a été accordée aux demanderesses à l'égard de la requête de la défenderesse datée du 3 juin 1996 au sujet du « refus » de répondre aux questions de l'interrogatoire préalable.


TAXATION

[60]            J'estime que la préparation nécessitait davantage qu'une simple énumération des questions laissées sans réponse. J'accorde respectivement 5 unités et 2 unités pour chaque heure dans le cas des articles 5 et 6.

Article 5 :        Préparation des demanderesses en vue de leur requête en jugement sommaire datée du 23 septembre 1996, laquelle a été accueillie en partie le 2 décembre 1996 avec dépens (T-3016-92), 6 unités réclamées (3 - 7)

Article 8 :        Préparation des demanderesses en vue du contre-interrogatoire de J. Casselman sur l'affidavit qu'il a fait sous serment le 11 octobre 1996 (T-3016-92), 5 unités réclamées (3 - 7)

Article 9 :        Présence à l'interrogatoire du 25 octobre 1996, 3 unités réclamées (1 - 3)


[61]            Les demanderesses ont soutenu que cet événement était important, parce qu'il a empêché qu'une partie de la demande reconventionnelle de la défenderesse soit prescrite, de sorte qu'il convient d'accorder 6 unités pour la préparation relative à la requête, compte tenu, notamment, du fait que la défenderesse consent à 3 unités pour chaque heure au titre de l'article 6 (comparution) pour ce qui est des frais accordés aux demanderesses dans la requête en jugement sommaire (les demanderesses ont obtenu les dépens relatifs à la requête de la défenderesse en vue de déposer l'affidavit de I. Bialowas, qui a été entendue en même temps). En ce qui a trait à cette requête, les avocats se sont entendus sur les montants relatifs à plusieurs débours, dont le retrait d'une réclamation se rapportant à la transcription de l'audience. La défenderesse a réitéré l'objection qu'elle avait déjà formulée au sujet des frais de la reliure (montant de 28,60 $) et souligné que les cabinets d'avocats ne sont pas des centres d'affaires offrant des services de photocopie, de télécopie et de reliure. De l'avis de la défenderesse, il suffit d'accorder 5 unités, parce que l'affidavit à l'appui était une simple compilation des éléments de preuve recueillis au cours de l'interrogatoire préalable. Les demanderesses ont consenti à l'octroi de 2 unités pour chaque heure au titre de l'article 9 et proposé 3 unités dans le cas de l'article 8, compte tenu de la longueur de l'affidavit. Pour sa part, la défenderesse a proposé 2 unités pour l'article 8, étant donné que le contre-interrogatoire a eu lieu dans le cadre d'une téléconférence qui n'a duré qu'une demi-heure et non l'heure réclamée.

TAXATION

[62]            J'accorde respectivement 6 unités, 3 unités et 2 unités pour chaque heure (à raison d'une heure) pour les articles 5, 8 et 9. De plus, j'accorde un montant de 18 $ pour les frais de reliure contestés que les demanderesses réclament.

Article 4 :        Préparation des demanderesses en vue de la requête qu'elles ont présentée par écrit le 1er août 1995 afin de réunir les dossiers de la Cour T-3016-92 et T-1212-95, laquelle requête a été accordée le 10 août 1995, aux fins des interrogatoires préalables et de l'instruction, les dépens devant suivre l'issue de la cause, 3 unités réclamées (2 - 4)

[63]            Les demanderesses ont réduit leur réclamation à 2 unités et proposé une répartition de 50 p. 100. Pour sa part, la défenderesse a suggéré une répartition de 33 p. 100, selon son argument fondé sur les causes d'action qui est décrit plus haut.

TAXATION

[64]            J'accorde 2 unités en fonction d'une répartition de 33 p. 100.


Article 10 :      Préparation des demanderesses à la conférence préparatoire tenue le 21 mars 1997, 5 unités réclamées (3 - 6)

Article 11 :      Présence à la conférence préparatoire, 3 unités réclamées (1 - 3)

Article 10 :      Préparation de la défenderesse à la conférence préparatoire tenue le 21 mars 1997, 5 unités réclamées (3 - 6)

Article 11 :      Présence à la conférence préparatoire, 3 unités réclamées (1 - 3)

[65]            Les avocats ont convenu que je devrais accorder le même nombre d'unités à chaque partie au titre de l'article 11. De l'avis de la défenderesse, plusieurs questions visées par la Règle 263 ont nécessité une préparation approfondie, mais la Cour a empêché les parties de discuter d'un règlement en fixant simplement une date d'instruction. La défenderesse a proposé 3 unités pour la réclamation des demanderesses au titre de l'article 10. Elle a soutenu que la réclamation de deux heures des demanderesses en ce qui a trait à l'article 11 devrait se limiter à 0,1 heure, soit le temps qu'elle-même réclame. La défenderesse a également demandé que 100 p. 100 des dépens correspondants lui soient accordés ou, à tout le moins, qu'ils soient répartis selon une proportion de 67 p. 100 en sa faveur, compte tenu des arguments qu'elle a déjà invoqués à ce sujet. Les demanderesses ont admis que l'octroi de 3 unités est justifié en ce qui concerne sa réclamation à l'article 10 et ont ajouté qu'il convient d'accorder 3 ou 4 unités à la défenderesse pour la réclamation correspondante de celle-ci. Elles ont demandé qu'une répartition de 50 p. 100, étant donné qu'elles ont dû se préparer à ce stade pour deux causes d'action que la défenderesse n'avait pas encore abandonnées et qui ont finalement été tranchées en leur faveur, ce qui devrait atténuer l'importance du succès que la défenderesse a remporté quant aux deux causes d'action relatives au droit d'auteur.


[66]            Les avocats se sont entendus sur les débours réclamés dans le mémoire de frais des demanderesses, sauf en ce qui a trait aux montants de 33,75 $ et 19,75 $ se rapportant aux photocopies. Les demanderesses ont proposé un montant de 20 $. Soulignant à nouveau la courte durée de la conférence, la défenderesse a suggéré une somme de 10 $.

TAXATION

[67]            J'accorde respectivement 3 unités et 1 unité pour chaque heure aux deux parties au titre des articles 10 et 11, compte tenu d'une répartition de 67 p. 100 en faveur de la défenderesse. La conférence a duré quatre minutes. Les avocats se sont probablement inscrits auprès du greffier de la Cour avant le début. J'accorde 0,30 heure. Les demanderesses ont réclamé certains débours deux fois (pour tenir compte de la répartition), soit une fois à l'égard de la demande reconventionnelle et une autre à l'égard du dessin industriel, mais admettent qu'un seul ensemble de débours s'applique. J'accorde un montant de 20 $ pour les photocopies, compte tenu d'une répartition de 33 p. 100.

Article 12 :      Avis de la défenderesse demandant l'admission de faits daté du 27 octobre 1997, 3 unités réclamées (1 - 3)

Article 12 :      Avis de la défenderesse demandant l'admission de documents daté du 27 octobre 1997, 2 unités réclamées (1 - 3)


[68]            Les avocats se sont entendus sur la répartition de 40 p. 100 réclamée (six faits sur 15) en ce qui a trait à l'avis demandant l'admission de faits. La défenderesse a réduit sa réclamation à deux unités dans le cas de ce document. Les demanderesses ont soutenu qu'il convient d'accorder 1 unité ou 2, en raison du nombre peu élevé de faits en cause. La défenderesse a ramené à 79 p. 100 la répartition de 84 p. 100 qu'elle réclamait en ce qui a trait à l'avis demandant l'admission de documents (soit de 16 à 15 documents sur 19) et plaidé en faveur de l'octroi des 2 unités qu'elle réclamait, en raison des décisions qu'elle a dû prendre au sujet des documents à inscrire sur la liste. Les demanderesses ont répondu que 1 seule unité suffisait, parce qu'il s'agissait d'une simple nomenclature de documents.

TAXATION

[69]            J'accorde respectivement 2 unités et 1 unité pour l'avis demandant l'admission de faits et l'avis demandant l'admission de documents.

Article 5 :        Préparation de la défenderesse à la requête des demanderesses datée du 16 mai 1997 en vue de poser une question fondée sur la Règle 474 (T-3016-92), laquelle requête a été rejetée avec dépens le 19 juin 1997, 6 unités réclamées (3 - 7)

Article 6 :        Comparution le 19 juin 1997, 3 unités réclamées (1 - 3)


[70]            La défenderesse a demandé l'autorisation d'ajouter ces articles à son mémoire de frais en fonction d'une position subsidiaire par rapport à son argument décrit ci-dessus au paragraphe [15] au sujet du sens des mots « avec dépens » . En effet, elle n'a pas réclamé de dépens au titre de ces articles, parce que cette attitude aurait été incompatible avec la position qu'elle a fait valoir plus haut au sujet du droit des demanderesses à des dépens. Si je tranche la question qui précède en faveur des demanderesses, je devrais permettre l'ajout de ces deux articles en conséquence. Cette question a nécessité une préparation des documents de réponse, un contre-interrogatoire et une comparution d'une heure, en plus des débours de 600 $ pour le billet d'avion et les taxis.

[71]            Les demanderesses ont souligné que la décision Diagiandomenico, précitée, n'était pas pertinente, parce que les dépens engagés dans cette affaire n'ont pas été débattus à la fin d'une requête, comme c'est le cas en l'espèce. L'intention ici était d'accorder des dépens indépendamment du résultat de l'instruction. Les demanderesses ont admis les débours de 600 $, mais soutenu que je devrais accorder 3 ou 4 unités seulement au titre de l'article 5, parce que la requête était simple. Le même argument s'applique à l'article 6, parce que cette requête portait simplement sur des questions déjà débattues au sujet de la demande de jugement sommaire, de sorte qu'il suffit d'accorder 1 unité pour chaque heure.

TAXATION

[72]            J'accorde respectivement 5 unités et 1 unité pour chaque heure au titre des articles 5 et 6.

Article 13a) : Préparation de la défenderesse à l'instruction, 5 unités réclamées (2 - 5)

Article 13b) : Préparation de la défenderesse à l'instruction, pour chaque jour de présence après le premier jour, 3 unités réclamées (2 - 3)

Article 13a) : Préparation des demanderesses à l'instruction (T-3016-92), 5 unités réclamées (2 - 5)

Article 13a) : Préparation des demanderesses à l'instruction (T-1212-95), 3 unités réclamées (2 - 5)

[73]            La défenderesse a soutenu que la répartition ne s'applique pas à sa préparation relative à l'instruction, parce qu'elle a eu gain de cause dans l'action principale concernant l'atteinte au droit d'auteur. Selon la défenderesse, l'instruction, au cours de laquelle les demanderesses ont présenté sept témoins, portait sur des questions de droit complexes ayant donné lieu à une audience de deux jours par la Cour d'appel fédérale, qui ne siège habituellement pas aussi longtemps. Les frais réclamés sont nettement inférieurs au montant que le client a effectivement payé.

[74]            Les demanderesses ont invoqué leurs arguments précédemment exposés au sujet de la répartition dans le cas de la réclamation de la défenderesse au titre de l'article 13. Elles ont fait valoir que, même si les questions de droit débattues dans le litige étaient intéressantes, l'affaire était somme toute assez simple comparativement à une affaire concernant la validité d'un brevet, par exemple, de sorte qu'il suffit d'accorder respectivement 3 unités et 2 unités pour les réclamations présentées aux articles 13a) et 13b). Le montant réel facturé au client n'est pas important, parce qu'il ne s'agit pas d'une taxation de dépens avocat-client.


[75]            Les demanderesses m'ont demandé de leur accorder ce que j'accorde à la défenderesse en ce qui concerne leurs deux réclamations au titre de l'article 13a). À leur avis, la défenderesse ne fait que formuler une hypothèse lorsqu'elle soutient plus loin que l'avocat n'a pas tenu compte de la provision pour frais dans la lettre d'offre du 29 avril 1997 dans laquelle les demanderesses ont proposé le rejet de la demande reconventionnelle sans frais. Étant donné que cette offre n'a pas été acceptée, les demanderesses ont dû consacrer beaucoup de temps à la préparation de la partie de l'instruction concernant le recours en injonction possible.

[76]            La défenderesse s'est opposée à ce que je me fonde sur l'indemnité que je lui accorde pour sa réclamation au titre de l'article 13a) pour déterminer l'indemnité correspondante à attribuer aux demanderesses dans le dossier T-3016-92, parce que la seule question qui restait à trancher à l'instruction dans la demande reconventionnelle était le recours en injonction, qui ne nécessitait pas une préparation approfondie. La demande reconventionnelle était une question tellement mineure entre les parties que la défenderesse n'a pas tenu compte de la possibilité d'éviter les frais que représentait la proposition de règlement des demanderesses (rejet sans frais) lorsqu'elle a consenti à l'ordonnance rejetant la demande reconventionnelle avec dépens qui a finalement été rendue le 17 novembre 1997. Reprenant son argument exposé ci-dessus, la défenderesse a proposé 2 unités pour la réclamation des demanderesses au titre de l'article 13a), préparation (T-1212-95). De plus, elle a proposé une répartition de 50 p. 100 et les demanderesses ont consenti à cette proposition, parce qu'elles ont eu gain de cause uniquement sur la question du dessin industriel et non sur celle du droit d'auteur.


[77]            Quant aux débours de 6 168,25 $ associés à la préparation de la défenderesse à l'instruction, les avocats se sont entendus sur tous les montants réclamés, sauf en ce qui a trait au montant de 2 771,68 $ se rapportant aux photocopies. La défenderesse a souligné que ce montant avait été calculé en fonction d'un tarif de 0,25 $ la page pour des copies destinées à son propre usage ainsi qu'à celui de la Cour et des demanderesses. Ces photocopies comprenaient un certain nombre d'autorités qui n'ont finalement pas été utilisées, mais qu'il était prudent d'avoir sous la main au cas où se produirait un événement nécessitant leur consultation dans une juridiction éloignée du domicile des avocats. Ces copies comprenaient également les mémoires des étudiants et les documents relatifs aux interrogatoires préalables et à la production. L'avocat supervisant la cause a examiné les documents reproduits pour s'assurer qu'ils étaient pertinents et raisonnables. Les demanderesses ont reconnu que la défenderesse a agi avec prudence en veillant à ce que tous les documents nécessaires soient disponibles, mais ont proposé que le montant soit ramené à 2 000 $, qui correspond à peu près à la somme qu'elles ont dépensée.


[78]            Comme elles l'avaient fait pour certains autres éléments des honoraires d'avocats, les demanderesses ont inscrit les débours associés à la préparation de l'instruction une fois pour la demande reconventionnelle (T-3016-92) et une autre pour la cause d'action relative au dessin industriel (T-1212-95) afin d'invoquer la répartition. La défenderesse s'est opposée à tous ces montants, soit les frais du témoin expert C. MacKenzie (9 543,01 $) et du témoin B. MacFarlane (2 268 $), ainsi qu'à plusieurs autres débours totalisant 5 236,25 $ (photocopies, mise à la poste, reliure, diapositives, recherche en direct, messagerie, kilométrage, frais de production, taxis, télécopies, téléphone, photographies, épreuves, reproductions et copies couleurs/grand format, ces quatre derniers éléments se rapportant aux pièces déposées à l'instruction). La défenderesse a soutenu que ces frais ne concernent pas la demande reconventionnelle et que la répartition de 33 p. 100 réclamée à leur égard n'est pas valide. Ils représentent en réalité les dépens inutiles des demanderesses que celles-ci réclament sous le couvert de la demande reconventionnelle, c'est-à-dire que les frais relatifs aux pièces déposées à l'instruction, comme les photographies (1 193,64 $) et les épreuves (92,61 $), ainsi que les débours de M. MacFarlane concernent tous l'action principale relative au droit d'auteur, mais non la demande reconventionnelle. La défenderesse a proposé une répartition de 5 p. 100 à l'égard de ces débours, mais a précisé qu'aucun montant ne devrait être accordé en ce qui concerne M. MacFarlane, parce qu'il n'avait rien à voir avec la demande reconventionnelle.


[79]            La défenderesse a soutenu que l'état de compte de M. MacKenzie devrait être abaissé à 500 $, parce qu'il n'indique pas la répartition du travail entre la demande principale relative au droit d'auteur et la demande reconventionnelle. De plus, il fait état d'un billet de train aller-retour (93,12 $) pour un déplacement entre Florence et Rome qui n'est pas relié au litige et dont le montant est inclus à titre d'équivalent du prix d'un billet d'avion non réclamé dans l'état de compte. La défenderesse a fait valoir qu'elle n'est pas tenue de payer les montants qui auraient pu être exigibles, c'est-à-dire des montants hypothétiques. Elle a précisé que l'affidavit de son expert ne renfermait que quelques pages peu détaillées et que les annexes de cet affidavit se composaient simplement de documents produits entre les parties. La réclamation de son expert, soit une préparation de neuf jours pour une comparution d'une journée, est exagérée, étant donné que son témoignage portait sur l'action principale relative au droit d'auteur, pour laquelle les demanderesses n'ont pas obtenu de frais. Selon la défenderesse, même si les demanderesses ont consenti à retirer la réclamation d'honoraires de 1 500 $US pour le témoignage de cet expert devant la Cour, cette concession ne résout pas le problème d'absence de preuve concernant les autres éléments de l'état de compte de cet expert qui ne sont pas attribuables à la demande reconventionnelle.

[80]            La défenderesse a formulé une objection similaire en ce qui a trait à la cause d'action relative au dessin industriel. Les pièces déposées à l'instruction, comme les photocopies couleurs, ne peuvent porter sur la question du dessin industriel, puisque la preuve relative à ce dernier aspect se composait de documents en noir et blanc, tandis que celle qui concernait la principale demande relative au droit d'auteur se composait de documents en couleurs. Elle a précisé que la demande relative au dessin industriel n'était pas en litige après les cinq premières minutes de l'instruction. Tant M. MacKenzie que M. MacFarlane ont témoigné au sujet des principales questions relatives au droit d'auteur, mais non au sujet du dessin industriel, parce que le juge de première instance a rendu un jugement sur consentement sur ce dernier aspect au début de l'instruction, de sorte qu'aucune des parties ne devrait obtenir de dépens pour la comparution.


[81]            En ce qui a trait à la demande reconventionnelle, les demanderesses ont fait valoir que la position susmentionnée de la défenderesse constitue un nouvel argument concernant la répartition. Selon elles, la préparation de l'instruction couvrait la préparation jusqu'au début de celle-ci et englobait nécessairement la demande reconventionnelle, la demande relative au dessin industriel et les demandes portant sur le droit d'auteur. En conséquence, le montant de 500 $ que propose la défenderesse à l'égard de M. MacKenzie n'est pas raisonnable. Les demanderesses ont allégué qu'il serait raisonnable d'accorder un montant de 3 600 $US pour les neuf jours de préparation et les frais de déplacement de cet expert aux fins d'une comparution d'une journée à la Cour; toutefois, elles ont convenu de retirer le montant de 1 500 $US réclamé pour sa journée de comparution, lequel montant n'est pas attribuable à la demande reconventionnelle. Les avocats des deux parties ont convenu que quelques-uns des travaux mentionnés dans le reste de l'état de compte de cet expert étaient attribuables à la demande reconventionnelle. Les demanderesses ont fait valoir que leur argument exposé ci-dessus au sujet de la répartition s'applique dans ce cas-ci.


[82]            En ce qui a trait à la cause d'action relative au dessin industriel, les demanderesses ont fait valoir que le témoignage de M. MacFarlane aurait été pertinent, de sorte que la réclamation du montant de 2 168 $ représentant le prix du billet d'avion qu'il a dû acheter pour se rendre à l'endroit de l'instruction était justifiée. La défenderesse a reconnu dans certains de ses documents que M. MacFarlane avait témoigné au sujet de la façon dont le contrat relatif à la fourniture de dalles de moquette à l'aéroport de Calgary avait été obtenu ainsi qu'au sujet de l'évolution du dessin Milliken commandé pour l'aéroport. M. MacFarlane a reçu une assignation à témoigner et, étant donné qu'aucun règlement n'a été conclu à l'égard de l'une ou l'autre des différentes réclamations avant le matin de l'instruction, il devait venir. Les demanderesses ont admis que, si le règlement avait été conclu plus tôt, c'est-à-dire la semaine précédente, aucun montant ne pourrait être exigé au titre du témoignage de cette personne relativement à la question du dessin industriel. Cependant, étant donné que le règlement a été conclu tardivement, les frais de ce témoin sont taxables et sont assujettis à la répartition susmentionnée. Les demanderesses ont admis que les photocopies couleurs et les autres documents couleurs ne portaient vraisemblablement pas sur le dessin industriel.

TAXATION

[83]            À mon avis, la préparation relative à l'ensemble du litige a été plus ardue que l'instruction elle-même. Examinées individuellement, les mesures interlocutoires n'étaient peut-être pas les questions les plus difficiles; cependant, ensemble, elles ont compliqué la préparation de la cause. À l'inverse, elles ont permis d'isoler et de définir les questions à trancher à l'instruction. Voici un extrait du paragraphe [7] de la décision Bruce Starlight, précitée :

Le Tarif prévoit une indemnisation partielle en établissant une liste, non nécessairement exhaustive, de services distincts que les avocats rendent pendant un litige. Les Règles visent à faire ressortir les questions pertinentes et à écarter celles qui ne le sont pas. Par exemple, les étapes des actes de procédures et de la communication de la preuve peuvent impliquer des opérations complexes de définition et de synthèse, simplifiant ainsi les questions à instruire. Ainsi, chaque article est taxable en fonction de ses propres circonstances et il n'est pas nécessaire d'utiliser le même nombre d'unités pour chaque service rendu. Si les services s'évaluent en fonction d'un nombre d'heures, le même nombre d'unités ne doit pas nécessairement être accordé pour chaque heure, particulièrement si les caractéristiques de l'audience ont varié pendant sa durée. Dans le présent mémoire de frais, le nombre minimal d'unités pour l'article 5 et le nombre maximal d'unités pour l'article 6 sont des résultats possibles. Pour quelques articles à la fourchette peu étendue, comme l'article 14, il faut établir des distinctions générales relativement au choix de la position retenue dans la fourchette.



[84]            J'accorde respectivement 5 unités et 3 unités pour chaque journée pour les articles 13a) et 13b) du mémoire de frais de la défenderesse. Compte tenu du fondement des mémoires de frais sur ce point, j'étais d'abord enclin à appliquer la répartition de la façon indiquée plus haut, du moins jusqu'à la première journée de l'instruction inclusivement, après laquelle seule la cause d'action concernant l'atteinte au droit d'auteur demeurait en litige. Toutefois, les facteurs de la répartition qui s'appliquent sur ce point sont différents de ceux qui concernent les interrogatoires préalables, du moins dans le cas du mémoire de frais des demanderesses, parce que celles-ci ont fait une réclamation au titre de la préparation de l'instruction dans les dossiers T-3016-92 et T-1212-95 pour chacune des causes d'action de la demande reconventionnelle et du dessin industriel, tandis que la défenderesse n'a fait qu'une seule réclamation à cet égard pour les deux dossiers (qui avaient été réunis aux fins de l'instruction). Dans leur mémoire de frais, les demanderesses ont indiqué que chaque élément de la réclamation formulée à l'article 13a) était assujetti à la répartition. Étant donné que la défenderesse ne l'a pas fait pour l'article 13a) ou 13b), il est permis de présumer que sa préparation portait explicitement sur le droit d'auteur et je n'ai aucune raison d'en douter. En conséquence, je refuse d'appliquer la répartition au mémoire de frais de la défenderesse. Les adjudications de dépens se rapportant aux causes d'action du droit d'auteur, du dessin industriel et de la demande reconventionnelle sont indépendantes les unes des autres. Les demanderesses ne pouvaient prendre à la légère la partie de la demande reconventionnelle de la défenderesse qui concernait l'injonction. Cependant, cette cause d'action n'exigeait pas nécessairement de leur part une préparation équivalente à celle de la défenderesse. La demande reconventionnelle (T-3016-92) et la cause d'action relative au dessin industriel (T-1212-95) ont été tranchées sur consentement le premier jour de l'instruction. J'invoque le même raisonnement dans le cas du mémoire de frais des demanderesses et je refuse d'appliquer la répartition, du moins en ce qui a trait aux honoraires, parce que j'estime que la répartition ne donnerait pas lieu à une indemnisation équitable, notamment en ce qui concerne la demande reconventionnelle, qui constitue essentiellement une action indépendante. Dans ces circonstances, j'accorde 2 unités sans répartition au titre de l'article 13a) dans chacun des dossiers T-3016-92 et T-1212-95.

[85]            La preuve présentée dans le cas du montant de 2 771,68 $ réclamé pour les photocopies est loin d'être claire. L'affidavit de Mutchler ne donne pas à penser qu'il s'agit de copies supplémentaires généralement considérées comme inutiles dans le contexte de dépens partie-partie, c'est-à-dire pour le client. Il y a une différence entre la préparation d'autorités pour plaider une cause d'action réglée au début de l'instance et la préparation d'autorités devant servir de complément aux autorités principales. J'accorde un montant de 2 200 $.


[86]            Dans la mesure où il est pertinent en l'espèce, j'applique à l'état de compte de l'expert, M. MacKenzie, le raisonnement que j'ai invoqué dans la décision Merck & Co. Inc. et al. c. Apotex Inc., [2002] A.C.F. n ° 1116 (O.T.), confirmée par [2002] A.C.F. n ° 1357 (C.F. 1re inst.), et dans la décision Bayer AG et al. c. Apotex Inc. et al, [2002] A.C.F. n ° 1693 (O.T.). Un règlement peut survenir pratiquement dès le moment où les parties entrent dans la salle d'audience. Je conviens donc avec les demanderesses qu'il était prudent, voire essentiel de leur part de se préparer à l'égard des différentes causes d'action, quel qu'en soit le résultat. Certains frais, comme le coût des billets d'avion, peuvent être répartis après coup, mais au moment du paiement, la partie à un litige ne pourrait habituellement pas demander au transporteur aérien de faire une ventilation du montant en fonction des différentes causes d'action. Il n'y a aucune façon simple de trancher la réclamation contestée de 17 047,26 $ du mémoire de frais des demanderesses. À mon avis, la position de la défenderesse est logique, mais les réductions qu'elle propose sont peut-être exagérées. Dans les circonstances, j'estime qu'un résultat raisonnable pour l'ensemble des causes d'action du dessin industriel et de la demande reconventionnelle est un montant de 5 800 $, lequel montant tient également compte des facteurs liés à la répartition.

Article 14a) : Présence à l'instruction du premier avocat de la défenderesse, 3 unités réclamées (2 - 3)

Article 14b) : Présence à l'instruction du second avocat : 50 p. 100 du calcul relatif à l'article 14a), conformément à l'ordonnance datée du 11 mars 1998

[87]            La défenderesse a soutenu que les frais qu'elle réclame sont justifiés par le fait que l'instruction a duré quatre jours, y compris deux journées de plaidoirie, au cours desquels il a été nécessaire de contre-interroger des témoins ordinaires et des témoins experts et d'examiner les nuances entre les différents témoignages concernant l'acquisition du dessin en litige ainsi que les déductions à tirer au sujet de la date de création, lesquelles questions étaient les principaux points en litige à l'instruction. Les demanderesses ont invoqué leur argument exposé ci-dessus pour l'article 13, soit le fait qu'il ne s'agissait pas de la question la plus complexe dans le contexte du niveau de frais prévu à la colonne III, et ont proposé 2 unités pour chaque heure à l'égard des 28 heures réclamées. Les demanderesses ont retiré leur objection à la réclamation prévue à l'article 14b).

[88]            En ce qui a trait aux débours connexes de 6 708,49 $, les avocats des deux parties se sont entendus sur tous les montants, sauf les sommes de 373 $, 273,66 $ et 78,02 $ réclamées respectivement pour la location d'une imprimante, la location d'un véhicule automobile et l'essence. La défenderesse a soutenu que les imprimantes à trois entraîneurs de 1997 étaient encombrantes et qu'il n'était pas facile de les transporter entre Toronto et Ottawa. De plus, il aurait été difficile de les débrancher, de les emballer correctement et de les rebrancher. De l'avis de la défenderesse, les demanderesses admettent implicitement par leur position que l'utilisation d'une imprimante était autorisée et que seul le montant est contesté. Il aurait coûté davantage que le montant de 200 $ proposé ci-dessous par les demanderesses pour expédier les documents à l'endroit de l'instruction. La défenderesse a ajouté qu'il a été nécessaire de louer un véhicule automobile pour se rendre à des centres de services ouverts le soir, notamment pour la reliure, ainsi que pour transporter les documents.

[89]            Les demanderesses ont répliqué que la location d'une imprimante fait partie des frais généraux d'un cabinet d'avocats et qu'il aurait été possible d'utiliser le véhicule automobile loué pour transporter l'imprimante. Elles ont ajouté qu'il aurait été moins coûteux d'expédier dix boîtes de documents que de louer un véhicule et de payer l'essence et les repas du chauffeur. Les demanderesses ont proposé un montant total de 200 $ sous cette rubrique.


TAXATION

[90]            Il ne s'agit pas d'un élément pour lequel l'octroi de 2 ou 3 unités pour chaque heure traduit le mieux l'indemnité partielle en l'espèce. J'accorde respectivement 12 heures et 16 heures à raison de 3 et 2 unités pour chaque heure dans le cas de la réclamation prévue à l'article 14a). L'indemnité accordée au titre de l'article 14b) doit être calculée en conséquence. En ce qui a trait aux trois postes de débours en litige, je ne suis pas convaincu que le montant de 200 $ est un résultat réaliste et raisonnable et j'accorde les montants réclamés. Je rejette les arguments relatifs aux frais généraux, comme je l'ai fait plus haut en ce qui a trait à la reliure.

Article 4 :        Préparation de la défenderesse à l'égard de sa requête datée du 6 mars 1998 en vue d'obtenir des directives pour l'officier taxateur, laquelle requête a été accueillie le 11 mars 1998, 3 unités réclamées (2 - 4)

Article 5 :        Préparation de la défenderesse à la requête des demanderesses datée du 10 mars 1998 au sujet des dépens inutiles, laquelle requête a été rejetée le 24 avril 1998, 6 unités réclamées (3 - 7)

Article 6 :        Comparution le 3 avril 1998, 3 unités réclamées (1 - 3)

[91]            Dans le cas de l'article 4, la défenderesse a soutenu que l'attribution de 2 unités serait trop minime et déraisonnable, comparativement à 3 unités, compte tenu du montant réel qu'il en a coûté au client. Pour leur part, les demanderesses ont proposé 2 unités, parce qu'il s'agissait d'une question routinière.


[92]            Dans le cas des articles 5 et 6, la défenderesse a fait valoir que, étant donné que l'avocat des demanderesses a informé la Cour et la défenderesse, dans ses remarques préliminaires au début de l'instruction, que si ses clientes n'avaient pas gain de cause, elles demanderaient les dépens inutiles engagés, cette requête et l'ordonnance s'y rapportant constituaient une suite de l'instance, c'est-à-dire qu'elles faisaient partie de l'instruction et du jugement. Dans son ordonnance datée du 11 mars 1998, la Cour a réexaminé les conditions du jugement daté du 5 février 1998 et a rejeté avec dépens l'action des demanderesses dans le dossier T-3016-92, sous réserve de toute autre ordonnance qui serait rendue au sujet des dépens inutiles conformément à l'ordonnance datée du 17 novembre 1997, par suite des modifications apportées à la défense. Selon la défenderesse, il ressort de l'ensemble de ces décisions qu'elle a obtenu ses frais à l'égard de la requête relative aux dépens inutiles. Aux paragraphes [12] et [13] de ses motifs datés du 24 avril 1998, la Cour a refusé de blâmer une partie défenderesse aux prises avec des demanderesses qui ont procédé à l'instruction malgré la connaissance qu'elles avaient des graves lacunes de leur cause.

[93]            Quant aux articles 5 et 6, les demanderesses ont allégué que l'ordonnance « supplémentaire » mentionnée dans l'ordonnance du 11 mars 1998 était, en réalité, l'ordonnance du 24 avril 1998 par laquelle aucuns dépens n'ont été accordés. Cela signifierait que les mots [traduction] « sous réserve de » figurant dans l'ordonnance du 11 mars 1998 sous-entendaient une décision distincte quant aux dépens et empêchaient l'application de l'ordonnance en question à la requête relative aux dépens inutiles, qui a été présentée de façon distincte par rapport à l'instruction. Les demanderesses rappellent qu'aucuns dépens n'ont été attribués dans l'ordonnance du 24 avril 1998; elles admettent toutefois que, si des dépens sont accordés à la défenderesse, les débours connexes réclamés devraient être accordés.


TAXATION

[94]            Il convient de se reporter à l'extrait qui suit des motifs de l'ordonnance de la Cour en date du 24 avril 1998 pour comprendre le sens de la phrase de l'ordonnance du 11 mars 1998 [traduction] « l'action des demanderesses dans le dossier T-3016-92 est rejetée avec dépens, sous réserve de toute autre ordonnance concernant les dépens inutiles » :

[7]            Les dépens inutiles sont ceux qui sont consacrés à des activités rendues inutiles par suite de l'amendement recherché, parce qu'une question a été retirée, abandonnée ou autrement rendue théorique. L'expression est bien illustrée par l'exemple suivant, qu'a donné le juge Bouck dans Cominco Limited v. Westinghouse Canada Limited et al. :

[TRADUCTION] Par exemple, il se peut qu'en plein milieu d'une instance, le demandeur modifie complètement sa cause fondée sur la négligence pour la fonder sur l'abus de confiance. Pour répondre à cette nouvelle allégation, il se peut que le défendeur ait à réviser entièrement sa défense et à procéder à de nouveaux interrogatoires préalables. Il se peut que l'ancienne défense et l'ancien examen préalables soient devenus inutiles; le défendeur aura alors droit aux frais de ces procédures parce qu'il a dû engager des dépenses pour se défendre contre des allégations de négligence que le demandeur a subséquemment abandonnées et remplacées par des allégations d'abus de confiance. C'est comme si la cause en négligence du demandeur avait été rejetée ou interrompue et qu'une nouvelle action en abus de confiance avait été introduite.

Mais certains amendements n'établissent pas une demande entièrement nouvelle. Il arrive souvent qu'après que le demandeur a modifié sa déclaration, le défendeur n'ait pas besoin de modifier sa défense. S'il est nécessaire de procéder à un nouvel examen préalable, ce ne peut être que pour une fin limitée, et la majeure partie sinon la totalité de l'examen préalable antérieur peut encore être utile. En ce sens, les frais de l'examen préalable antérieur n'auraient pas été complètement " inutiles ". Seule une partie de ceux-ci auraient été perdus.

[8]            Les dépens inutiles doivent être distingués des frais principaux d'un amendement et des frais accessoires à celui-ci qui sont engagés à compter de l'amendement et qui font partie de l'octroi de dépens à l'issue du procès. Ainsi qu'il est dit dans Cominco :


[TRADUCTION] ...Il semble que l'expression " dépens inutiles " est souvent incluse dans une ordonnance où une partie obtient une suspension d'instance ou la permission d'amender, ou les deux. Cette expression semble aussi viser la même chose qu'une ordonnance pour les " frais principaux et accessoires " relatifs à une suspension ou à un amendement, selon le cas.

Tous frais engagés par le défendeur à compter de l'amendement sembleraient généraux; c'est-à -dire qu'ils suivent l'issue du procès. Dans ce cas, si les demandeurs obtiennent gain de cause, ces frais lui sont adjugés. Si c'est le défendeur qui gagne, ces frais lui reviennent. Naturellement, toutes ces ordonnances relèvent du pouvoir discrétionnaire du juge du procès.

                                                                                      [Citations omises]


[95]            Cet extrait affaiblit la position de la défenderesse, parce qu'il semble indiquer que les dépens inutiles ne font pas partie des dépens attribués à l'issue de l'instruction. En d'autres termes, les dépens inutiles sont différents des dépens attribués à l'issue de l'instruction, parce qu'ils sont associés à un seul événement, c'est-à-dire un ajournement ou une modification, survenue à un moment précis du litige, mais non aux différents événements qui se sont produits pendant celui-ci, soit la rédaction des actes de procédure, les interrogatoires préalables, la préparation de la cause et la comparution à l'instruction, et qu'englobe l'adjudication des dépens à l'issue de l'instruction. Ainsi, les dépens inutiles consécutifs à une modification concernent des travaux qui ont été faits avant la modification et qui sont devenus inutiles par suite de celle-ci. Les travaux exécutés après la modification ne font pas partie de ces travaux « inutiles » , mais sont plutôt englobés dans les travaux accomplis tout au long du litige. Les dépens associés à ces travaux ultérieurs sont des frais généraux et non des dépens inutiles et peuvent être recouvrés en dernier ressort dans le cadre d'une adjudication des dépens à l'issue de l'instruction. Envisagée d'un point de vue plus simple, une requête relative à des dépens inutiles est une mesure interlocutoire et non une mesure faisant partie de l'ensemble des événements de l'instruction. Étant donné qu'elles sont accessoires à l'instruction, les requêtes interlocutoires peuvent être présentées après celle-ci et le sont parfois. Les événements qui en constituent le fondement sont différents de ceux de l'instruction. L'ordonnance muette quant aux dépens ne comporte pas l'élément visible devant nécessairement caractériser l'exercice du pouvoir que la Cour possède au sujet des dépens en vertu de la Règle 400(1). Je refuse d'accorder les dépens réclamés aux articles 5 et 6. En ce qui concerne l'article 4, je pense que l'avocat des demanderesses a tout simplement oublié qu'il ne s'était pas opposé aux dépens parce qu'il n'en était pas question non plus dans l'ordonnance du 11 mars 1998. Je suis très réticent à modifier un règlement intervenu entre les parties ou même une allégation quant à l'absence de position. Cependant, lorsque ces mesures ne me laissent aucun pouvoir, je ne puis agir. Il m'arrive parfois d'accorder un montant pour ce type de réclamation lorsque j'estime que d'autres éléments non réclamés auraient pu avoir été ajoutés au mémoire de frais à titre de montants comparables. Le mémoire de frais présenté en l'espèce était détaillé, mais il y a vraisemblablement d'autres éléments qui ne sont pas réclamés et qui pourraient contrebalancer ce montant, en l'occurrence, les dépens de la cause accordés le 24 mars 1994 dans une ordonnance sur consentement (T-3016-92) sommant la défenderesse de signifier son affidavit de documents. Dans les circonstances, j'accorde le minimum, soit 2 unités.

Article 19 :      Mémoire des faits et du droit de la défenderesse (A-120-98 et A-121-98) : appel des demanderesses à l'encontre du jugement de première instance rejeté avec dépens le 26 janvier 2000, 7 unités réclamées (4 - 7)


Article 22a) : Comparution de la défenderesse en appel, 3 unités réclamées (2 - 3)

[96]            La défenderesse a demandé les nombres maximums d'unités prévus au Tarif, compte tenu du fait que le litige portait sur des sommes élevées et sur des arguments de droit complexes qui ont donné lieu à une audience d'une durée de deux jours, alors que les audiences en appel durent habituellement une journée ou une demi-journée. Les mémoires des faits et du droit des deux parties étaient volumineux et, dans ses motifs, la Cour a consacré plusieurs pages à l'examen de questions comme l'absence de preuve directe concernant la date de création du dessin en litige et la portée de la protection législative des droits. Les demanderesses ont accepté les 14,5 heures réclamées au titre de l'article 22a) et proposé une réduction à 2 unités pour chaque heure, puisqu'il ne s'agissait pas de l'affaire la plus complexe qui soit aux fins de la détermination des dépens selon la colonne III du Tarif. La durée de l'audience n'était pas pertinente aux fins des dépens. Les demanderesses ont invoqué les mêmes motifs pour proposer 5 unités en ce qui a trait à l'article 19. Les avocats des deux parties se sont entendus sur une somme de 2 671,58 $ pour les débours.

TAXATION

[97]            J'accorde 5 unités pour l'article 19. Dans le cas de l'article 22a), j'accorde 8,5 heures à raison de 3 unités pour chaque heure et six heures à raison de 2 unités pour chaque heure.


Doublement des dépens en vertu de la Règle 420

[98]            Au paragraphe 35 de ses observations écrites, la défenderesse a résumé la correspondance échangée au sujet du règlement :

[traduction]                                            . . .

a)              Offre du 25 avril 1997 dans laquelle la défenderesse a proposé le règlement de toutes les réclamations de Milliken dans les deux actions pour une somme de 60 000 $, y compris les dépens, la défenderesse s'engageant par le fait même à s'abstenir de fabriquer et de vendre les dalles de moquette en litige et à se désister de sa demande reconventionnelle et les parties devant s'échanger des renonciations mutuelles...;

b)             Offre du 29 avril 1997 dans laquelle les demanderesses ont proposé que la défenderesse paie une somme de 350 000 $ ainsi que leurs dépens partie-partie et se désiste de sa demande reconventionnelle... et

c)              Lettre du 12 novembre 1997 dans laquelle les demanderesses ont évalué la somme qu'elles pourraient recouvrer à un montant oscillant entre 550 000 $ et 875 000 $, sans tenir compte des intérêts avant jugement pour la période postérieure à l'année 1997 ou des intérêts après jugement. Cette somme comprend des dépens taxables selon un montant nettement supérieur à 100 000 $, y compris l'instruction...

Remarque :        L'offre du 29 avril 1997 comprenait une condition selon laquelle la demande reconventionnelle devait être rejetée sans dépens.


[99]            La défenderesse a allégué que l'offre de règlement du 25 avril 1997 devrait s'appliquer aux fins de l'octroi du double des dépens en vertu de la Règle 420. Les demanderesses n'ont reçu aucune indemnité comparable au montant de 60 000 $ et, sous réserve du montant de leurs frais taxés, l'offre de la défenderesse était plus favorable que le montant du jugement. La défenderesse a souligné que les parties ont réglé la responsabilité de celle-ci en ce qui a trait à la contrefaçon du dessin industriel à une somme de 13 820,30 $, de laquelle devaient être déduits les frais taxés que les demanderesses seraient tenues de lui verser. Les demanderesses ont réglé ou admis tellement de postes de dépens au cours de l'audience relative à la taxation que le total ne peut dépasser 60 000 $. En conséquence, la défenderesse a droit au double des dépens en vertu de la Règle 420(2) pour la période allant du 25 avril 1997 jusqu'à la date du jugement.

[100]        La défenderesse a cité les paragraphes 12 et 13 des motifs de l'ordonnance daté du 24 avril 1998 (dépens inutiles), où la Cour critique les demanderesses parce qu'elles ont procédé à l'instruction malgré les lacunes sérieuses que comportait leur cause, et a fait valoir que les offres de règlement déraisonnables de celles-ci, qui dépassaient 900 000 $, justifient l'approbation du double des dépens en faveur de la défenderesse, qui a présenté des offres de règlement beaucoup plus raisonnables.


[101]        De plus, la défenderesse a ajouté que les demanderesses ont tort d'invoquer des facteurs comme le pouvoir discrétionnaire et l'équité, parce que la Règle 420 est une règle impérative qui donne à la défenderesse le droit de doubler ses dépens en l'absence, comme c'est le cas en l'espèce, d'une ordonnance contraire de la Cour. La Règle 420 ne permet pas à un officier taxateur de rendre des ordonnances de cette nature. De l'avis de la défenderesse, l'arrêt Camco Inc. et al. c. Whirlpool Corporation et al. (1999) 85 C.P.R. (3d) 129 (C.A.F.), que les demanderesses ont invoqué, appuie effectivement sa thèse, de sorte que les demanderesses auraient dû faire connaître leur position au sujet de l'octroi du double des dépens au juge de l'instruction. Selon la défenderesse, le libellé de la Règle 407 sous-entend que la Cour et l'officier taxateur sont deux entités distinctes et cette même distinction ressort du texte utilisé à certains articles du Tarif au sujet des honoraires d'avocats comme les mots de l'article 14b), « ...second avocat, lorsque la Cour l'ordonne... » . Si la position des demanderesses qui est exposée ci-dessous est bien fondée, l'officier taxateur aurait le pouvoir de taxer des dépens autres que les dépens prévus à la colonne III du Tarif. Subsidiairement, la défenderesse a fait valoir que, si j'en arrive à la conclusion que j'ai le pouvoir de refuser de doubler les dépens en vertu de la Règle 420, je ne devrais pas refuser de le faire, parce qu'aucun stigmate ne se rattache à la défenderesse du fait qu'elle a consenti au jugement. Selon la conclusion découlant inévitablement du raisonnement des demanderesses, le juge de l'instruction n'aurait pas accordé de dépens à la défenderesse pour la principale cause d'action relative au droit d'auteur.


[102]        Pour leur part, les demanderesses ont répliqué que les dépens relèvent entièrement du pouvoir discrétionnaire de la Cour et que l'octroi du double des dépens qui est prévu à la Règle 420 n'est pas automatique : Sanmammas Compania Maritima c. « Netuno » (1995), 102 F.T.R. 181, au paragraphe 28 (C.F. 1re inst.), et Camco Inc., décision précitée. Le mot « Cour » englobe les officiers taxateurs et ceux-ci peuvent donc refuser de doubler les dépens. Les demanderesses ont souligné que le présent litige portait sur trois conflits différents : les allégations des demanderesses quant à l'atteinte à leur droit d'auteur et à la contrefaçon de leur dessin industriel et la demande reconventionnelle de la défenderesse au sujet de son droit d'auteur. Au début de l'instruction, la défenderesse a consenti à un jugement tant pour la question du dessin industriel que pour celle de sa demande reconventionnelle, ce qui signifie qu'elle n'a pas eu gain de cause dans deux des trois différends. C'est le contexte dans lequel les paragraphes [12] et [13] des motifs de l'ordonnance datée du 24 avril 1998 (dépens inutiles) devraient être lus. Les demanderesses ont souligné qu'en définitive, seule la défenderesse avait violé des droits de propriété intellectuelle, soit un dessin industriel, et qu'il serait donc inéquitable d'enrichir l'auteur d'une contrefaçon en lui accordant le double de ses dépens, étant donné, surtout, que ce résultat donnerait lieu à un montant équivalant à environ cinq fois le montant convenu au titre des dommages-intérêts en fonction du jugement relatif au dessin industriel.

TAXATION


[103]        Selon les définitions figurant respectivement aux articles 4 et 5.1 de la Loi sur la Cour fédérale ainsi qu'à la Règle 2 des Règles de la Cour fédérale (1998), la « Cour » et l' « officier taxateur » sont des entités bien distinctes. En conséquence, je n'ai pas le pouvoir de rendre l'ordonnance « contraire » prévue par la Règle 420. Les décisions que les demanderesses ont citées appuieraient dans l'ensemble une requête visant à obtenir une ordonnance « contraire » en vertu de la Règle 420, laquelle n'est pas de mon ressort. Les parties qui ont gain de cause n'ont pas besoin de directives explicites dans les adjudications de dépens pour solliciter le double de leurs frais en vertu de la Règle 420. L'adjudication des dépens par la Cour en vertu de la Règle 400(1) déclenche automatiquement l'application de la Règle 420, dont le libellé est impératif, mais l'officier taxateur a encore le pouvoir discrétionnaire de refuser de doubler les dépens, lorsqu'une offre n'était pas réaliste ou ne pouvait être évaluée de façon convenable; voir, par exemple, Caricline Ventures Ltd. c. ZZTY Holdings Limited et al, [2002] A.C.F. 1524 (O.T.). Les offres de règlement font état de différences frappantes entre les montants que les parties ont proposés. Dans les circonstances du présent litige, cela ne signifie pas que la position de la défenderesse était insoutenable. En conséquence, la défenderesse a droit au double de ses dépens pour la période allant du 25 avril 1997 au 5 février 1998, conformément à la Règle 420(2)b).

[104]        Le mémoire de dépens de la défenderesse, présenté au montant de 97 930,63 $, est taxé à la somme de 72 774,45 $, et celui des demanderesses, qui a été présenté au montant de 36 955,91 $, est taxé au montant de 19 110,36 $. Les parties ont convenu que la loi intitulée Alberta Judgment Interest Act s'appliquerait. Les dates pertinentes aux fins de l'application de cette loi au mémoire de frais des demanderesses sont la période allant du 7 septembre 1994 jusqu'à la date du recouvrement en ce qui a trait aux frais de l'appel (A-590-93) et le 5 février 1998 dans le cas des dépens de l'action. Les dates pertinentes aux fins de l'application de cette loi au mémoire de frais de la défenderesse sont la période allant du 26 janvier 2000 jusqu'à la date du recouvrement quant aux frais de l'appel (A-120-98 et A-121-98) et la période allant du 5 février 1998 jusqu'à la date du recouvrement dans le cas des dépens de l'action.

    « Charles E. Stinson »             

Officier taxateur

Vancouver (C.-B.)

Le 28 octobre 2003

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier,. trad. a., LL.L.


                                       COUR FÉDÉRALE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                 T-3016-92

INTITULÉ DE LA CAUSE:                           MILLIKEN & COMPANY et

MILLIKEN INDUSTRIES OF CANADA LTD.

c.

INTERFACE FLOORING SYSTEMS

(CANADA) INC.

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Toronto (Ont.)

DATES DES AUDIENCES :                          les 15 novembre 2001, 14 décembre 2001 et 6 juin 2002

MOTIFS DE LA TAXATION

DES DÉPENS :         CHARLES E. STINSON

DATE DES MOTIFS :                                     le 28 octobre 2003

COMPARUTIONS:

James E. Mills                                                     POUR LES DEMANDERESSES

Michael E. Charles                                               POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Gowling Lafleur Henderson LLP                                      POUR LES DEMANDERESSES

Ottawa (Ont.)

Bereskin & Parr                                                   POUR LA DÉFENDERESSE

Toronto (Ont.)


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