Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20020924

Dossier : T-1166-01

OTTAWA (Ontario), le 24 septembre 2002

En présence de :         MONSIEUR LE JUGE MACKAY

ENTRE :

                                                        CHRISTINE K.E. SAUMURE

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                                   et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                      défendeur

VU la demande de contrôle judiciaire d'une décision du Tribunal des anciens combattants (révision et appel), datée du 10 avril 2001, refusant de réviser une décision du 30 juin 1999 qui rejetait l'appel interjeté par l'appelante contre une décision portant qu'elle n'avait pas droit à une pension en raison d'une invalidité qui serait résultée du service dans les Forces armées du Canada;

APRÈS avoir entendu les avocats des deux parties à Fredericton le 14 janvier 2002, date à laquelle la décision avait été réservée, et après avoir examiné leurs observations;

                                                                     ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.          La demande est accueillie.

2.          La décision du Tribunal des anciens combattants (révision et appel) datée du 10 avril 2001 est annulée et l'affaire est renvoyée au Tribunal pour nouvel examen, conformément aux motifs déposés avec la présente ordonnance et à la loi.

                                                                                                                               « W. Andrew MacKay »     

                                                                                                                                                               JUGE                      

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


Date : 20020924

Dossier : T-1166-01

Référence neutre : 2002 CFPI 998

ENTRE :

                                                        CHRISTINE K.E. SAUMURE

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                              - et -

                                           LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                      défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE MacKAY

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision du Tribunal des anciens combattants (révision et appel) (le Tribunal), datée du 10 avril 2001, par laquelle le Tribunal refusait la demande en révision d'une décision antérieure du 30 juin 1999, présentée par la demanderesse, Christine Saumure. Cette décision antérieure avait rejeté l'appel qu'elle avait interjeté contre une décision portant qu'elle n'avait pas droit à une pension pour certaines incapacités qui résulteraient de son service dans les forces armées canadiennes entre février 1985 et le 26 mars 1985.


Le contexte

[2]                 La demanderesse allègue avoir été victime, en mars 1985, d'une agression sexuelle par un caporal-chef, pendant qu'elle était postée comme recrue à la base des Forces canadiennes (BFC) Cornwallis (Nouvelle-Écosse). À l'époque de l'agression alléguée, Mme Saumure faisait l'objet d'une évaluation en vue d'une libération éventuelle, en raison de difficultés liées à son état de santé antérieur à la formation et, après l'agression alléguée, elle a été libérée le 26 mars 1985, avant d'avoir terminé sa formation de base.

[3]                 À l'époque, la demanderesse n'a signalé l'incident ni aux autorités militaires ni à la police. Le 20 mars 1985, Mme Saumure a signé un document intitulé [Traduction] « Déclaration sur l'état de santé au moment de la libération » , dans laquelle elle ne faisait mention d'aucune blessure ou maladie découlant de l'incident allégué. Elle prétend maintenant que, depuis 1985, par suite de l'agression, elle a connu des problèmes répétés de santé émotionnelle, qui lui ont causé divers problèmes de toxicomanie et d'alcoolisme, ainsi que des difficultés dans ses relations avec autrui.

[4]                 En décembre 1997, la demanderesse a déclaré l'incident allégué à la police militaire à la BFC Gagetown. Une enquête a été effectuée par la police militaire et la police de la ville de Saint John. Aucune accusation n'a été portée.


[5]                 Après avoir déclaré l'incident, Mme Saumure a présenté une demande de pension et elle a été traitée à la BFC Gagetown par le médecin militaire de la base, le Dr Randy B. Russell. Il a déclaré être d'avis qu'elle avait subi une agression au cours de sa carrière dans les forces armées et qu'il en est résulté une forme modifiée de syndrome de stress post-traumatique (SSPT).

[6]                 L'alinéa 21(2)a) de la Loi sur les pensions, L.R.C. (1985), ch. P-6, modifiée, dispose :


21. (2) En ce qui concerne le service militaire accompli dans la milice active non permanente ou dans l'armée de réserve pendant la Seconde Guerre mondiale ou le service militaire en temps de paix :

a) des pensions sont, sur demande, accordées aux membres des forces ou à leur égard, conformément aux     taux prévus à l'annexe I pour les             pensions de base ou supplémentaires, en cas d'invalidité causée par une blessure ou maladie - ou son aggravation - consécutive ou rattachée directement au service militaire;

21. (2) In respect of military service rendered in the non-permanent active militia or in the reserve army during World War II and in respect of military service in peace time,

(a) where a member of the forces suffers disability resulting from an injury or disease or an aggravation thereof that arose out of or was directly connected with such military service, a pension shall, on application be awarded to or in respect of the member in accordance with the rates for basic and additional pension set out in Schedule I;



[7]                 La demande de pension de la demanderesse a été refusée par un comité d'examen le 16 février 1999. Le comité a conclu que, malgré la suggestion du Dr Russell quant à l'état de la demanderesse et à sa cause, il n'y avait pas de preuve psychiatrique et, par conséquent, il y avait peu d'éléments de preuve convaincants pour établir que la demanderesse souffrait du SSPT. En outre, à supposer même que le comité d'examen aurait été convaincu que son état avait été causé par le viol comme elle le prétendait, il n'était pas clair qu'il était consécutif ou rattaché directement à son service militaire.

[8]                 La demanderesse a formé un appel, qui a été rejeté par le Tribunal le 30 juin 1999, essentiellement pour les mêmes raisons. Dans sa décision du 30 juin 1999, le Tribunal a indiqué :

[Traduction] Le Tribunal conclut, après examen du mémoire, qu'il n'y a pas de preuve psychiatrique ni d'autres éléments de preuve convaincants que la requérante souffre du SSPT. Le médecin de la BFC, le Dr R.B. Russell, a suggéré que l'appelante pourrait avoir une forme modifiée du syndrome du stress post-traumatique. Toutefois, à supposer même que l'appelante souffre du SSPT, on ne voit pas clairement comment elle en a été atteinte vu l'absence de preuve médicale et de toute autre preuve.

   

[9]                 À la suite de la décision du Tribunal le 30 juin 1999, la demanderesse a consulté un psychologue, M. Gary Fecteau, qui l'a rencontrée en entrevue à trois reprises, pour une durée totale de cinq heures et demie, à la fin de novembre et au début de décembre 2000. Le 21 février 2001, M. Fecteau a écrit au ministère des Anciens combattants une lettre à laquelle il a joint un rapport d'évaluation psychologique dans lequel il passait en revue les problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie de la demanderesse, sa tendance à être un bourreau de travail et ses difficultés à l'égard de l'intimité et de la maîtrise de la colère. Il décrivait divers tests qu'il lui avait administrés. M. Fecteau concluait que [traduction] « le type de symptômes [de la demanderesse] est caractéristique de l'inadaptation chronique et du changement de personnalité causé par le syndrome du stress post-traumatique » . La demanderesse a demandé au Tribunal de réexaminer sa décision du 30 juin 1999 en fonction de cette nouvelle preuve.


[10]            Dans sa décision du 10 avril 2001, qui est l'objet de la présente demande de contrôle judiciaire, le Tribunal a refusé de réexaminer sa décision du 30 juin 1999. Sans mettre en question la validité du diagnostic de SSPT posé par M. Fecteau, le Tribunal a conclu que la lettre ne constituait pas [traduction] « un nouvel élément de preuve susceptible de convaincre le Tribunal que l'état de l'appelante est rattaché au service d'une manière qui ferait naître un droit à pension » . La décision concluait que le Tribunal ne trouvait pas d'erreurs de fait ou de droit dans la décision du 30 juin 1999 et que, [traduction] « n'acceptant pas la lettre de M. Fecteau comme un élément de preuve nouveau et pertinent, puisqu'elle n'est que la confirmation du diagnostic, le Tribunal ne révisera pas de son propre chef sa décision antérieure » .

Les questions en litige

[11]            La demanderesse plaide que l'appréciation de la preuve par le Tribunal et sa conclusion que la lettre de M. Fecteau ne constituait pas une nouvelle preuve étaient manifestement déraisonnables, compte tenu des présomptions et des obligations du Tribunal définies dans la Loi. Dans ses observations écrites, la demanderesse fait également valoir que, compte tenu du nouvel élément de preuve présenté, la décision rendue par le Tribunal le 30 juin 1999 était manifestement déraisonnable. À l'audience, j'ai souscrit à l'observation du défendeur que cette dernière décision n'était pas en cause dans la présente demande, qui concerne la décision du 10 avril 2001, rejetant le rapport de M. Fecteau au motif qu'il ne constituait pas un nouvel élément de preuve.


Le Tribunal a-t-il conclu à tort que la lettre de M. Fecteau

ne constituait pas un nouvel élément de preuve dans la présente affaire?

[12]            Le paragraphe 32(1) de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), L.C. 1995, ch. 18, modifiée (la Loi ), prévoit notamment que, sur demande, un comité d'appel peut réexaminer une décision rendue par lui ou par un comité d'appel antérieur selon le paragraphe 29(1) lorsque de nouveaux éléments de preuve lui sont présentés.

[13]            Cette disposition a été examinée par le juge Teitelbaum dans la décision MacKay c. Le Procureur général du Canada (1997), 129 F.T.R. 286 au paragraphe 26, où il a appliqué le critère des « nouveaux éléments de preuve » qui avait été fixé par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Palmer et Palmer c. La Reine (1979), 106 D.L.R. (3d) 212 (C.S.C.) à la page 224 :   

1. On ne devrait généralement pas admettre une déposition qui, avec diligence raisonnable, aurait pu être produite au procès...

  

          2. La déposition doit être pertinente, en ce sens qu'elle doit porter sur une question décisive ou potentiellement décisive quant au procès.

  

3. La déposition doit être plausible, en ce sens qu'on puisse raisonnablement y ajouter foi, et

  

4. elle doit être telle que si l'on y ajoute foi, on puisse raisonnablement penser qu'avec les autres éléments de preuve produits au procès, elle aurait influé sur le résultat.

   

[14]            Dans la décision examinée, le Tribunal a cité le critère à quatre volets exposé dans la décision MacKay, précitée,puis a indiqué que la lettre de M. Fecteau [traduction] « ... ne constitue pas un élément de preuve nouveau et pertinent qui amènerait le Tribunal à une conclusion différente » . Le Tribunal a ajouté le commentaire que la lettre de M. Fecteau était fondée sur une histoire fournie par la demanderesse, qui n'était pas corroborée par le dossier, et que [traduction] « l'absence de preuve atteint la validité de cette opinion médicale et on ne peut donc la considérer comme ayant une valeur probatoire pouvant amener le Tribunal à conclure qu'il faudrait envisager un réexamen complet du fond de l'affaire » .

[15]            Bien que le Tribunal n'ait pas précisé auquel des quatre volets du critère il n'était pas satisfait en l'espèce, j'interprète sa décision comme indiquant que la lettre ne constituait pas une preuve crédible, à défaut de preuve à l'appui, et qu'on ne pouvait pas raisonnablement penser qu'elle aurait influé sur le résultat.

Le Tribunal a-t-il conclu à tort que la lettre ne constituait pas une preuve crédible?

[16]            S'agissant du troisième volet du critère relatif aux nouveaux éléments de preuve, exposé dans la décision MacKay, précitée, la demanderesse soutient qu'on pouvait raisonnablement ajouter foi au témoignage contenu dans la lettre de M. Fecteau, puisque le Tribunal ne disposait d'aucun élément de preuve indiquant que la demanderesse n'était pas atteinte du SSPT ou que le SSPT pourrait avoir une cause autre que l'agression sexuelle alléguée, survenue en 1985.


[17]            La demanderesse plaide également que le Tribunal a fait état à tort d'une correspondance concernant une enquête à la suite de la plainte formulée par la demanderesse en 1997, qui concluait qu'il n'y avait pas une preuve suffisante contre l'agresseur accusé pour obtenir une condamnation et qu'il n'y aurait donc pas de poursuite engagée. Cette référence, soutient-on, « a introduit » la norme de preuve du droit pénal, exigeant une preuve hors de tout doute raisonnable, au lieu de la norme du droit civil, qui consiste en la prépondérance de la preuve, sur le point que l'agression alléguée a eu lieu.

[18]            Selon la demanderesse, en s'appuyant sur cette lettre, qui exposait l'opinion du ministère public concernant une condamnation possible au criminel de l'auteur allégué de l'agression contre la demanderesse, le Tribunal a adopté implicitement la norme de preuve du droit pénal, la preuve hors de tout doute raisonnable, pour établir que la demanderesse avait fait l'objet d'une agression sexuelle par un membre des forces armées. Selon l'argumentation de la demanderesse, en agissant ainsi, le Tribunal a contrevenu aux obligations en matière d'interprétation que lui imposent les articles 3 et 39 de la Loi. Le premier de ces deux articles de la Loi prévoit que les dispositions de la Loi, ce qui comprend les dispositions relatives aux demandes de droit à pension, doivent « s'interpréter de façon large, compte tenu des obligations que le peuple et le gouvernement du Canada reconnaissent avoir à l'égard de ceux qui ont si bien servi leur pays et des personnes à leur charge » . L'article 39 de la Loi dispose :



39. Le Tribunal applique, à l'égard du demandeur ou de l'appelant, les règles suivantes en matière de preuve :

a) il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui-ci;

b) il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l'occurrence;

c) il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

39. In all proceedings under this Act, the Board shall

(a) draw from all the circumstances of the case and all the evidence presented to it every reasonable inference in favour of the applicant or appellant;

(b) accept any uncontradicted evidence presented to it by the applicant or appellant that it considers to be credible in the circumstances; and

(c) resolve in favour of the applicant or appellant any doubt, in the weighing of evidence, as to whether the applicant or appellant has established a case.


[19]            Le défendeur invoque la décision Hall c. Canada (Procureur général) (1998), 152 F.T.R. 58, dans laquelle Madame le juge Reed a conclu, au paragraphe 24, que les affirmations des médecins au sujet de la cause de la blessure du demandeur n'étaient pas crédibles en l'espèce, puisque les médecins intéressés n'avaient d'autre élément que le récit des événements du demandeur pour en venir à une conclusion au sujet de l'événement qui avait causé la blessure et que la description de l'événement donnée par le demandeur était contredite par la preuve documentaire qu'il avait lui-même signée au moment de sa libération du service militaire. Le défendeur soutient que les faits de l'espèce sont analogues à ceux de l'affaire Hall et que c'est donc à bon droit que le Tribunal a conclu qu'on ne pouvait raisonnablement ajouter foi à la lettre de M. Fecteau.


[20]            À mon avis, il existe des différences entre les faits de l'affaire Hall et les faits de l'espèce. Dans l'affaire Hall, il s'était écoulé quatre ans entre la date où le demandeur alléguait avoir subi l'accident ayant causé la blessure, en 1983-84, et la date à laquelle il a consulté un médecin pour la première fois, en 1987-88. Puis il s'était écoulé huit autres années, jusqu'en 1996, où son état a été diagnostiqué comme une déformation du rachis cervical. En l'espèce, la demanderesse a consulté un médecin pour la première fois au sujet de ses symptômes, diagnostiqués par la suite comme le SSPT, trouble psychologique ou psychiatrique, en 1997, au moment où elle a pris pleinement conscience pour la première fois de ses symptômes du SSPT, découlant de l'agression alléguée. De plus, la lettre de M. Fecteau, qui constitue de l'avis de la demanderesse, un nouvel élément de preuve, indique que, même en 1998, il se peut que la demanderesse ait encore été en voie d'accepter son état :

[traduction] ... J'ai rencontré Mme Saumure pour des consultations à court terme en 1998... J'ai été informé de son expérience de stress traumatique à l'occasion de ces consultations à cette époque. Toutefois, elle ne pouvait, à l'époque, avoir accès aux consultations et à la thérapie à long terme nécessaires pour des raisons financières et aussi peut-être parce qu'elle n'était pas prête à faire face aux questions émotives rattachées à cette expérience.

   

[21]            Pour le défendeur, on fait valoir qu'on ne peut raisonnablement ajouter foi à la lettre de M. Fecteau, c'est-à-dire qu'elle n'est pas crédible, pour les raisons suivantes :

·           elle ne renvoie pas aux dossiers du médecin de famille ni à une autre source d'information indépendante;

·           elle ne formule pas de commentaires sur le risque, le cas échéant, de souvenirs fictifs ou de fausse déclaration;

·           elle ne tire pas de conclusion expresse sur la crédibilité de l'histoire fournie par la demanderesse;

·           le rapport ne contient aucune preuve corroborant la version des événements donnée par la demanderesse;

·           la demanderesse a mis 12 ans à déclarer l'agression alléguée.

  

[22]            Je note simplement que le Tribunal n'a pas indiqué qu'il était troublé par la lettre de M. Fecteau pour l'une des raisons énumérées ci-dessus. Je ne puis supposer que le Tribunal a considéré ces arguments. En outre, à mon avis, il était manifestement déraisonnable pour le Tribunal de s'appuyer sur la norme de preuve du droit pénal pour décider s'il fallait accepter l'allégation de Mme Saumure que l'incident était survenu, particulièrement si l'on tient compte des obligations qu'impose au Tribunal, en matière d'interprétation, l'article 39 de Loi. Le Tribunal n'a pas indiqué clairement que la lettre de M. Fecteau n'était pas crédible. S'il avait tiré cette conclusion, il aurait indiqué clairement ses motifs.

Le Tribunal a-t-il conclu à tort que, si l'on ajoutait foi à la preuve, on ne

pouvait raisonnablement penser qu'elle aurait influé sur le résultat?

  

[23]            Si le Tribunal a conclu à tort que la lettre de M. Fecteau ne constituait pas une preuve crédible, à mon avis, on pouvait raisonnablement penser, si l'on y ajoutait foi, qu'elle aurait influé sur le résultat. La lettre de M. Fecteau décrit l'agression sexuelle que la défenderesse alléguait s'être produite à un moment où la demanderesse était encore membre des forces armées, ainsi que le SSPT qui s'en est ensuivi. Donc la lettre, si on y ajoutait foi, pouvait fournir la preuve que le SSPT de la demanderesse, dont l'existence n'a pas été mise en doute par le Tribunal, était consécutif ou rattaché à son service militaire, comme l'exige l'alinéa 21(2)a) de la Loi sur les pensions. Dans la décision Cummings c. Canada (Procureur général), (1998), 1 55 F.T.R. 306 (1re inst.), le juge Hugessen a annulé une décision du Tribunal rejetant un appel d'une femme qui avait été membre des forces armées et qui présentait une demande à raison d'une blessure provenant d'une agression survenue pendant qu'elle sommeillait dans une caserne au cours d'une affectation temporaire.

[24]            À mon avis, la conclusion du Tribunal que la lettre de M. Fecteau ne satisfaisait pas au critère applicable aux nouveaux éléments de preuve exposé dans la décision MacKay, précitée, était manifestement déraisonnable. Si la lettre en question était crédible, et qu'on y ajoutait foi, il est clair qu'elle aurait pu influer sur le résultat.

Conclusion

[25]            À mon avis, en toute déférence, le Tribunal a conclu à tort que la lettre de M. Fecteau n'était pas crédible pour le motif qu'il laissait supposer et a conclu à tort qu'on ne pouvait raisonnablement croire que la lettre, si on y ajoutait foi, ne pouvait influer sur le résultat. La décision du Tribunal est annulée et la demande est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvel examen.

[26]            Une ordonnance est prononcée en ce sens. Conformément à la présente décision, ce tribunal devra accepter que la lettre de M. Fecteau constitue un nouvel élément de preuve, qui n'a pas été pris en considération lorsque la décision antérieure du 30 juin 1999 a été rendue, et apprécier si la preuve fournie par cette lettre est crédible et, dans l'affirmative, si on peut


raisonnablement penser qu'elle pourrait influer sur le résultat lors du nouvel examen de la demande de pension présentée par la demanderesse.

                                                                           « W. Andrew MacKay »     

                                                                                                           JUGE                   

   

OTTAWA (Ontario)

24 septembre 2002

     

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

   

DOSSIER :                                      T-1166-01

INTITULÉ :                                     Christine K.E. Saumure c. Procureur général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :             Fredericton (Nouveau-Brunswick)

DATE DE L'AUDIENCE :            14 janvier 2002

MOTIFS DU JUGEMENT :         MONSIEUR LE JUGE MacKAY

DATE DES MOTIFS :                   23 septembre 2002

   

COMPARUTIONS :

M. Peter MacPhailPOUR LA DEMANDERESSE

Mme Leanne WrathallPOUR LE DÉFENDEUR

   

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Clark Drummie                                                                              POUR LA DEMANDERESSE

Saint John (Nouveau-Brunswick)

M. Morris Rosenberg                                                                     POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.