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Date : 20020305

Dossier : T-2360-00

TORONTO (ONTARIO), LE 5 MARS 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGEMcKEOWN

ENTRE :

                                                        CISTEL TECHNOLOGY INC.

                                                                                                                                             Demanderesse

                                                                              - et -

                                      LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA

                                                                                                                                                     Défendeur

                                                                     ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est rejetée. La Cour ordonne cependant au défendeur de ne pas divulguer les pièces justificatives de paiement et les formulaires de demande/ d'autorisation de travaux. Le document confidentiel du défendeur doit être rendu public. Les dépens sont adjugés au défendeur à raison de 75 %.

« W.P. McKeown »

ligne

                                                                                                                                                                 Juge

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.


Date : 20020305

Dossier : T-2360-00

Référence neutre : 2002 CFPI 253

ENTRE :

                                                        CISTEL TECHNOLOGY INC.

                                                                                                                                               Demanderesse

                                                                              - et -

                                      LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA

                                                                                                                                                       Défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE McKEOWN


[1]                 La demanderesse a déposé une demande de contrôle judiciaire à l'encontre de la décision du 5 décembre 2000 de M. Pierre Tessier, analyste principal intérimaire, Division de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels, Service correctionnel du Canada, de communiquer toutes les factures, exception faite des taux personnels et des journées travaillées de même que des montants attribués à chaque individu pour les services fournis par la demanderesse, Cistel Technology inc. La demanderesse demande à la Cour de rendre une ordonnance afin que seuls le nom de Cistel et le prix total du contrat soient divulgués en réponse à la demande d'information déposée en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

[2]                 La principale question en litige, en l'espèce, est de décider si les documents en cause sont exemptés de communication en vertu de l'alinéa 20(1)b) de la Loi sur l'accès à l'information. La Cour doit également décider si les pièces justificatives de paiement et les formulaires de demande/d'autorisation de travaux du Service correctionnel du Canada sont visés par cette demande.

LES FAITS

[3]                 Cistel Technology inc. (Cistel) fournit du personnel dans le domaine des technologies de l'information pour exécuter des travaux en vertu de divers contrats et offres à commandes. Lorsqu'un contrat ou une offre à commandes est attribué à Cistel, elle établit sa facture au nom de l'organisation bénéficiaire de ses services. Les factures de Cistel indiquent le nom et le niveau du poste des employés qui exécutent le travail, leur taux journalier, leur nombre de jours de travail au cours du mois dans le cadre d'un projet et le total des frais facturés pour la période.

[4]                 Au printemps 1998, Cistel a été sélectionnée pour conclure trois offres à commandes avec le Service correctionnel du Canada (SCC).


[5]                 Le 7 septembre 2000, une demande a été déposée au Bureau de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels du SCC dans le but d'obtenir [traduction] « une copie de toutes les factures portant sur des services fournis par Cistel Technology Inc. au Service correctionnel du Canada depuis 1997 jusqu'à ce jour » . Le 24 novembre 2000, Cistel a avisé le SCC que les renseignements faisant l'objet de la demande étaient confidentiels et que leur divulgation permettrait à ses concurrents de déterminer ses coûts et son pourcentage de marge bénéficiaire pour les services visés par ces offres à commandes. Cistel a fait valoir qu'elle subirait un préjudice parce que ses concurrents disposeraient de suffisamment d'information pour leur permettre d'offrir de meilleures propositions sur le marché en général, et plus particulièrement, dans le cadre des futures demandes de propositions. En outre, la divulgation des taux de l'entrepreneur pourrait avoir une incidence sur les négociations que pourrait mener Cistel dans l'avenir avec ses sous-traitants et ses employés.

[6]                 Par lettre du 5 décembre 2000, Cistel a été informée de la décision du SCC de divulguer une partie des renseignements que Cistel estimait exemptés en vertu de la Loi sur l'accès à l'information (la Loi). En annexe à la lettre, le SCC avait joint une copie des documents originaux dans lesquels étaient surlignés les renseignements qui, selon le SCC, étaient exemptés en vertu de la Loi. Le SCC a accepté de ne pas divulguer les taux journaliers, le nombre de jours de travail de chaque employé affecté au projet au cours du mois et le montant total facturé, ventilé par employé.


ANALYSE

[7]                 Cistel prétend que parmi les documents produits par le défendeur, les pièces justificatives de paiement et les formulaire de demande/d'autorisation de travaux ne sont pas visés par la demande. Je suis d'accord. À mon avis, compte tenu des faits de l'espèce, ces documents ne sont pas des factures et il n'est pas nécessaire de les communiquer pour répondre à la demande d'information.

[8]                 Par conséquent, il reste à déterminer si les factures sont confidentielles, même si les taux journaliers par employé, le nombre de jours de travail de chaque employé affecté au projet au cours du mois et les montants relatifs à chaque employé sont supprimés, tel que convenu par le défendeur. La demanderesse s'appuie sur l'alinéa 20(1)b) de la Loi pour affirmer que les factures sont exemptées. Cette disposition est ainsi libellée :


20. (1) Le responsable d'une institution fédérale est tenu, sous réserve des autres dispositions du présent article, de refuser la communication de documents contenant :

...

b) des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques fournis à une institution fédérale par un tiers, qui sont de nature confidentielle et qui sont traités comme tels de façon constante par ce tiers;

20. (1) Subject to this section, the head of a government institution shall refuse to disclose any record requested under this Act that contains

...

(b) financial, commercial, scientific or technical information that is confidential information supplied to a government institution by a third party and is treated consistently in a confidential manner by the third party;


[9]                 Pour interpréter et appliquer cette disposition, la Cour doit également tenir compte de l'objet de la Loi, énoncé au paragraphe 2(1) :



2. (1) La présente loi a pour objet d'élargir l'accès aux documents de l'administration fédérale en consacrant le principe du droit du public à leur communication, les exceptions indispensables à ce droit étant précises et limitées et les décisions quant à la communication étant susceptibles de recours indépendants du pouvoir exécutif.

2. (1) The purpose of this Act is to extend the present laws of Canada to provide a right of access to information in records under the control of a government institution in accordance with the principles that government information should be available to the public, that necessary exceptions to the right of access should be limited and specific and that decisions on the disclosure of government information should be reviewed independently of government.


[10]            La jurisprudence établit clairement que toute exception au droit d'accès doit être limitée et spécifique. Le critère de preuve applicable aux demandes d'exception est la prépondérance des probabilités. Le fardeau repose sur la partie qui s'oppose à la communication.

[11]            La décision Air Atonabee Limited c. Canada (Ministre des Transports) (1987) 27 F.T.R. 194 (C.F. 1re inst.) définit quatre conditions à respecter pour qu'une telle exception puisse être accordée. L'information doit être :

a) de nature financière, commerciale, scientifique ou technique;

b) de nature confidentielle;

c) fournie à une institution fédérale par un tiers;

d) traitée de manière confidentielle de façon constante par ce tiers.


En l'espèce, ce sont les conditions b) et d) qui sont en cause. La loi dit clairement qu'on doit pouvoir établir objectivement qu'une information est réellement confidentielle. L'affidavit du demandeur affirmant qu'une information est confidentielle ne suffit pas. Rien dans la facture n'indique qu'elle est de nature confidentielle et comme nous l'avons mentionné précédemment, le défendeur a déjà accepté de supprimer de la facture les taux, le nombre de jours et le montant facturé pour chaque employé. Il est facile pour les autres entreprises de ce secteur d'activité de découvrir les noms des employés de soutien ayant travaillé pour Cistel et par conséquent, on ne peut prétendre en aucune manière que cette information est confidentielle. Le montant total facturé pour une période d'un mois ne sera pas d'une grande utilité aux concurrents. Aucune personne raisonnable ne pourrait conclure que les renseignements en cause sont confidentiels.

[12]            En outre, la demanderesse ne m'a pas convaincu que l'information était traitée de manière confidentielle, et ce, de façon constante. Un affidavit du chef de la direction de la demanderesse affirme que l'information était traitée de manière confidentielle, mais il ne fait aucunement état des moyens pris à cet égard. Aucune facture ne porte la mention « confidentiel » et l'affidavit n'expose aucun fait qui indique comment la demanderesse aurait traité cette information de manière confidentielle de façon constante. Une simple affirmation dans un affidavit, sans qu'aucune preuve substantielle directe ne soit produite sur la manière dont la demanderesse aurait traité cette information comme confidentielle, n'est pas suffisante pour justifier l'application d'une exception.


[13]            Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. La Cour ordonne cependant au défendeur de ne pas divulguer les pièces justificatives de paiement et les formulaires de demande/d'autorisation de travaux. Le document confidentiel du défendeur doit être rendu public. Même si la demanderesse a obtenu gain de cause en ce qui a trait au retrait des pièces justificatives de paiement et des formulaires de demande/d'autorisation de travaux, ce n'était pas là un élément important de la question en litige en l'espèce. Les dépens sont donc adjugés au défendeur à raison de 75 %.

  

« W.P. McKeown »

ligne

                                                                                                                                                                 Juge

TORONTO (ONTARIO)

Le 5 mars 2002

  

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.


                        COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                      Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                        T-2360-00

INTITULÉ :                                   CISTEL TECHNOLOGY INC.

                                                                                                                                               Demanderesse

- et -

                                                                                   

LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA

                                                                                                                                                       Défendeur

DATE DE L'AUDIENCE :            27 FÉVRIER 2002

LIEU DE L'AUDIENCE :            OTTAWA (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE McKEOWN

DATE DES MOTIFS :         5 MARS 2002

COMPARUTIONS :         Douglas Brown

Pour la demanderesse

Susanne Pereira

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     NELLIGAN, O'BRIEN, PAYNE

Avocats

1900-66, rue Slater

Ottawa (Ontario)

K1P 5H1

Pour la demanderesse

Ministère de la Justice

Édifice commémoratif de l'Est, 2e étage

284, rue Wellington       

Ottawa (Ontario)

K1A 0H8

Pour le défendeur


COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

     Date : 20020305

             Dossier : T-2360-00

ENTRE :

CISTEL TECHNOLOGY INC.

                                                               Demanderesse

- et -

SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA

                                                                       Défendeur

                                                            

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                            

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