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Date : 20041222

Dossier : T-1230-02

Référence : 2004 CF 1774

Ottawa (Ontario), le 22 décembre 2004

En présence de Madame la juge Heneghan

ENTRE :

                                    L'ORDRE DES PODOLOGUES DE L'ONTARIO

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                                CANADIAN PODIATRIC MEDICAL ASSOCIATION

                                                                                                                                      défenderesse

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

INTRODUCTION

[1]                L'Ordre des podologues de l'Ontario (Ordre) demande le contrôle judiciaire de la décision du registraire des marques de commerces (registraire) de publier la marque « PODIATRIST » comme marque officielle conformément à la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13, modifiée (la Loi). La demande de publication a été présentée par la Canadian Podiatric Medical Association (CPMA). L'Ordre recherche la réparation suivante :


a)              une ordonnance d'annulation de la décision du registraire;

b)              une ordonnance déclarant que la décision du registraire était nulle ou illégale;

c)              une ordonnance déclarant que l'avis public paru dans le Journal des marques de commerce du 5 septembre 2001 suite à la décision du registraire ne faisait naître aucun des droits ou interdictions prévus à l'article 9 de la Loi sur les marques de commerce;

d)              une ordonnance enjoignant au registraire des marques de commerce de publier un avis dans le Journal des marques de commerce concernant les ordonnances demandées en b) et c) ci dessus;

e)              au besoin, une ordonnance rendue en vertu du paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales prorogeant le délai de dépôt de la présente demande jusqu'à la date de signification de l'avis de demande ou toute autre date, s'il le faut, pour que la présente demande soit instruite;

f)              au besoin, une ordonnance rendue en vertu de la règle 306 ou de la règle 312 des Règles de la Cour fédérale (1998), permettant au demandeur de déposer et de signifier des éléments de preuve complétant le dossier dont était saisi le registraire des marques de commerce;

g)              ses dépens relatifs à la présente instance;

h)              toute autre réparation que son avocat peut solliciter et que la Cour juge à propos d'accorder.

CONTEXTE

[2]                Le 5 février 2001, la CPMA a demandé que le registraire donne un avis public de son emploi et de son adoption de la marque « PODIATRIST » comme une marque officielle pour des services, conformément au sous-alinéa 9(1)n)(iii) de la Loi. Le registraire a publié un rapport de l'examinateur le 16 mars 2001 dans lequel il est dit que la CPMA n'était pas selon toute vraisemblance une autorité publique aux fins de la Loi au motif qu'elle n'était pas assujettie à un degré suffisant de contrôle gouvernemental.


[3]                La CPMA a fourni des renseignements supplémentaires pour répondre à cette critique. Ultérieurement, l'examinateur a retiré l'objection. Le 5 septembre 2001, le registraire a donné avis public de l'adoption et de l'emploi de la marque « PODIATRIST » comme une marque officielle de la CPMA.

[4]                L'Ordre a déposé le 31 juillet 2002 une demande de contrôle judiciaire. Le 14 août 2002, la CPMA a demandé que des directives soient données quant à la façon de procéder, indiquant que la demande de contrôle judiciaire avait été déposée après la période de trente jours prévue au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, modifiée.

[5]                Aux termes de la directive émise le 15 août 2002, la Cour a enjoint à la CPMA de déposer son avis de comparution au plus tard le 16 août 2002. La CPMA l'a fait le 15 août 2002.

LES PARTIES

[6]                L'Ordre est l'organisme de réglementation des podologues et des podiatres en Ontario, selon la définition de la loi applicable, à savoir la Loi de 1991 sur les podologues, 1991, L.O., ch. 20. Il est aussi assujetti à la Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées, L.O. 1991, ch. 18.

[7]                La CPMA est une association professionnelle privée qui a été constituée en société sans but lucratif en vertu de lettres patentes en 1924 sous l'appellation « The Canadian Association of Chiropodists » . En 1958, suite à une modification de nom, elle est devenue l' « Association canadienne de podiatrie » . En 1996, le nom est à nouveau changé et devient celui que l'on connaît aujourd'hui. Il s'agit d'un organisme national qui a des membres en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario, au Québec, en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador. En Colombie-Britannique et en Alberta, les membres de l'association provinciale de réglementation sont tenus d'être membres de la CPMA. L'adhésion est facultative dans le cas des membres des organismes provinciaux de réglementation en Ontario et au Québec. Étant donné qu'il n'y a que des podiatres en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador, respectivement, ces personnes ont été acceptées comme membres de la CPMA.

[8]                La CPMA est régie par ses statuts. Ces derniers sont entérinés par les membres sans qu'il y ait participation gouvernementale.

LA PREUVE


[9]                Les éléments de preuve présentées à l'appui de la présente demande consistent en une copie authentifiée du dossier du Bureau des marques de commerce relativement à la marque officielle « PODIATRIST » , l'affidavit de Mme Carol Shapiro, souscrit le 9 septembre 2002, et l'affidavit du Dr Robert Chelin, souscrit le 24 octobre 2002. Les souscripteurs d'affidavit ont été contre-interrogés relativement à leurs affidavits respectifs en décembre 2002 et les transcriptions de ces contre-interrogatoires sont comprises dans le dossier de la demande. En outre, la CPMA a présenté au titre de nouveaux éléments de preuve une copie authentifiée d'une marque officielle pour « PODIATRIST » qui a été accordée à l'Ordre suite à la publication de la marque officielle qui fait l'objet du présent litige, et une copie authentifiée d'une demande de marque de commerce récemment annoncée pour « PODIATRIST'S SECRET » .

[10]            Les documents dont était saisi le registraire consistaient en la demande de marque aux termes du sous-alinéa 9(1)n)(iii), présentée par un avocat dans une lettre datée du 5 février 2001. La lettre donne quelques renseignements de base relativement à la création de la CPMA et décrit cette dernière comme étant le seul organisme représentant les intérêts de la médecine podiatrique aux niveaux national et international. Elle dit que ses activités sont menées au profit de la population canadienne comme en font foi ses efforts pour faire appliquer des normes professionnelles uniformes d'un bout à l'autre du pays. La lettre renvoie également à divers comités de la CPMA et signale le pouvoir, dans les statuts, de créer un comité des affaires gouvernementales.


[11]            La lettre renvoie aussi aux activités de consultation de la CPMA, y compris son implication indirecte auprès de l'industrie de l'assurance au Canada par l'entremise d'un comité de liaison de l'assurance qui participe aux travaux de la Canadian Health and Life Insurance Association (CHLIA), et son rôle en tant que représentante des podiatres canadiens dans le cadre des négociations visant à modifier l'Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d'Amérique et le gouvernement du Mexique, le 17 décembre 1992, [1994] 32 R.T. Ca. No 2, I.L.M. 289 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) (l'ALÉNA) avec l'American Podiatric Medical Association et le Mexique. La lettre traite également de la Fédération internationale des podologues (FIP) qui invite le Canada à adhérer par l'entremise de la CPMA.

[12]            Se fondant sur ces observations, la CPMA s'est présentée elle-même comme une autorité publique et a dit avoir droit à [traduction] « la protection conférée par le sous-alinéa 9(1)n)(iii) de la Loi » . Parmi les pièces jointes à cette lettre, il y avait un extrait de la Classification nationale des professions (la CNP) concernant la profession de podiatre au Canada, un exemplaire d'une lettre non datée de Développement des ressources humaines Canada (DRHC) au sujet de la mobilité interprovinciale des travailleurs et de l'Accord sur le commerce intérieur, ainsi qu'une copie d'une lettre du 27 janvier 1995 de DRHC à la CPMA dans laquelle on demandait des renseignements au sujet des perspectives de carrière pour les podiatres au Canada suite à une demande d'emploi d'un podiatre américain dans une clinique d'Edmonton.

[13]            Dans une lettre du 16 mars 2001, l'examinatrice a répondu et fait savoir qu'à son avis, la CPMA n'avait pas qualité d'autorité publique. Sa lettre dit notamment ce qui suit :

[traduction] La documentation produite n'établit pas que la partie requérante est une autorité publique étant donné qu'elle ne semble pas être assujettie à un degré suffisant de contrôle gouvernemental. À cet égard, j'attire votre attention sur la décision Association olympique canadienne, 67 CPR (2d) 59, à la page 69 :


[traduction] « D'après les autorités précitées, il semble que l'un des éléments dont les tribunaux ont tenu compte dans la détermination du caractère public d'un organisme est le degré de contrôle exercé par le gouvernement compétent. »

La seule mention faite dans votre correspondance au sujet du contrôle gouvernemental a trait au fait que la partie requérante est un organisme sans but lucratif et qu'il y a eu des consultations entre la partie requérante et divers organismes gouvernementaux. Cela n'est pas considéré suffisant pour conclure que la partie requérante est une autorité publique.

[14]            L'avocat a répondu par lettre datée du 28 juin 2001 et il a répété, en partie, un certain nombre des arguments présentés dans la demande du 5 février 2001 relative au degré de contrôle gouvernemental qui s'appliquait à la CPMA, à savoir la réglementation par le gouvernement des organismes sans but lucratif en général, et les diverses activités de consultation entre la CPMA et des ministères.

[15]            En outre, la réponse apportait les précisions suivantes au sujet de la relation entre la CPMA et les organismes provinciaux de réglementation, notamment :

[traduction] Depuis l'envoi de notre lettre du 5 février 2001, le Canada fait maintenant partie de la FIP, par l'entremise de la CPMA. En outre, nous signalons que la CPMA est le seul organisme cadre ou de coordination concernant la profession médicale podiatrique dans plusieurs provinces, notamment la Colombie-Britannique, l'Alberta et le Québec. Dans chacune de ces provinces, l'organisme de réglementation (c.-à-d. d'attribution des permis) et l'association professionnelle ne forment qu'une organisation. L'association professionnelle de l'Ontario est membre de la CPMA également. Le Manitoba et la Saskatchewan ont également demandé d'adhérer à la CPMA. Le Manitoba est en train d'adopter de nouvelles lois tendant à réglementer la médecine podiatrique. L'organisme de réglementation (sans but lucratif) dans cette province sera chargé d'attribuer les permis et de faire appliquer la loi. Le président de chaque organisation provinciale membre est un vice-président exécutif de la CPMA.

[16]            L'on a fait remarquer que le versement d'honoraires aux podiatres par les gouvernements [traduction] « représente un degré important de contrôle gouvernemental sur les médecins et, partant, la CPMA » .

[17]            Le 5 septembre 2001, la publication de la marque officielle « PODIATRIST » était faite dans le Journal des marques de commerce.

[18]            Selon les éléments de preuve présentés par Mme Shapiro, l'Ordre réglemente l'exercice de la podologie en Ontario. Jusqu'en 1993, les membres de l'Ordre étaient autorisés à se décrire soit comme « podologues » , soit comme « podiatres » . La désignation avait rapport à leur formation. Cependant, depuis 1993, aucun membre de l'Ordre ne peut utiliser le terme « podiatre » ; l'emploi de ce terme est limité aux personnes qui détenaient cette désignation avant 1993.

[19]            Mme Shapiro a traité du rôle de l'Ordre en tant qu'organisme de réglementation en Ontario pour la profession de podologue. Le « Code des professions de la santé » (le Code), promulgué aux termes de la Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées, précitée, est intégré à la Loi de 1991 sur les podologues, précitée. Selon l'article 3 du Code, l'objectif de l'Ordre, de même que des autres ordres nommés dans cette disposition, est de réglementer l'exercice de la profession.

[20]            L'article 1 et le paragraphe 2(2) de la Loi de 1991 sur les podologues, précitée, définissent « profession » comme étant la profession de podologue. L'article 3 définit la catégorie des podiatres. L'article 4 précise le champ d'application de l'exercice de la podologie. Le paragraphe 5(2) traite de l'exercice de la podologie. Si l'on compare les articles 4 et 5, le champ d'application de la podologie est plus vaste que l'exercice de la podologie étant donné que les podiatres sont autorisés à communiquer un diagnostic et à pratiquer des incisions dans le tissu sous-cutané et le tissu osseux.

[21]            Selon la Loi de 1991 sur la podologie, précitée, l'utilisation du terme « podiatre » pour décrire une personne exerçant en tant que podiatre se limite aux personnes qui étaient membres de la catégorie des podiatres au 31 juillet 1993. Le paragraphe 3(1) de la Loi précise la catégorie de podiatres avec l'admission limitée imposée par le paragraphe 3(2) comme suit :


Podiatres

3. (1) Est constituée une catégorie de membres appelés podiatres.

Podiatrists

3. (1) There shall be a class of members called podiatrists.

Admission limitée dans la catégorie

3(2) Nul ne peut venir s'ajouter à la catégorie de membres appelés podiatres après le 31 juillet 1993.

Limitation on class

3(2) No person shall be added to the class of members called podiatrists after the 31st day of July, 1993.


[22]            Mme Shapiro a parlé dans son témoignage des mesures prises par l'Ordre pour appliquer cette restriction. Selon son expérience, si elle était mise au courant de l'emploi du terme « podiatre » par une personne non autorisée, l'Ordre lui enverrait une lettre lui demandant de « cesser et de s'abstenir » .

[23]            Elle a décrit la CPMA comme une association nationale de podiatres dont l'objet est de promouvoir les intérêts de ses membres, sans exercer une fonction de réglementation. Elle a reconnu que la promotion et la protection de ses intérêts peuvent coïncider avec la promotion du bien public.

[24]            L'Ordre crée des normes d'exercice pour ses membres et prévoit un code de déontologie. Il est régi par un conseil formé de six podologues élus, de trois podiatres élus et de sept personnes du public qui sont nommées pour le lieutenant-gouverneur en conseil, et de deux universitaires nommés. Au 9 septembre 2002, l'Ordre comptait 317 podologues et 88 podiatres. Entre la fin de décembre 2001 et septembre 2002, le nombre de podiatres avait diminué, passant de 91 à 88.

[25]            Mme Shapiro a dit dans son témoignage qu'elle a pour la première fois appris que le CPMA avait présenté une demande de marque de commerce pour le terme « PODIATRIST » en juin 2002. Le 27 juin 2002, elle a retenu les services d'un avocat pour effectuer une recherche des marques de commerce et elle a été informée le 2 juillet 2002 que la CMPA avait provoqué la publication d'un avis aux termes de l'article 9. Suite à une réunion avec l'exécutif de l'Ordre le 12 juillet 2002, elle a chargé un avocat de déposer la présente demande de contrôle judiciaire.


[26]            Le Dr Chelin est le président de la CPMA et il occupe ce poste depuis 1998. Il a le titre de docteur en médecine podiatrique. Dans son affidavit, il a donné quelques renseignements de base sur l'évolution de la CPMA et sur ses activités. Il a décrit la CPMA comme le moteur de l'élaboration de politiques publiques d'un bout à l'autre du Canada concernant le rôle des podiatres. À l'occasion, Santé et Bien-être social Canada et DRHC, ainsi que l'industrie de l'assurance, ont consulté la CPMA.

[27]            La CPMA a également eu des consultations avec des organisations parallèles aux États-Unis d'Amérique et au Royaume-Uni. En outre, le Dr Chelin est un membre de la FIP et il a représenté la CPMA à des réunions internationales.

[28]            Le Dr Chelin a reconnu que la CPMA est indépendante de l'Ordre, qui exerce un pouvoir de réglementation sur les podiatres en Ontario. En même temps, dans le cadre de son contre-interrogatoire, il a dit que la CPMA exerçait un certain pouvoir sur cette profession, et ce, de la façon suivante :

[traduction]

58.

...

A.             Je dirais que la réponse est en quelque sorte non. Nous avons un quelconque pouvoir prévu par la loi par l'entremise de nos membres.

Trois de nos membres font partie du conseil de l'Ordre, ils sont membres de la CPMA et membres de l'OPMA, et de toute évidence nous avons indirectement - nous avons.des membres qui font partie du conseil de l'Ordre, si on a besoin de nous, qui ont une forme de contrôle sur les activités de l'Ordre.

En fait, le président sortant de l'Ordre des podologues de l'Ontario était un - je ne sais pas s'il était ou s'il est toujours - un podiatre.

59. Q.      Est-ce que la CPMA fait étalage de son pouvoir légal de réglementer les podiatres en Ontario?


A.             Non.

60. Q.      Parce qu'elle n'a aucun pouvoir légal de réglementer les podiatres en Ontario.

R.             Parce qu'aucune organisation nationale n'a de pouvoir de réglementation prévu par une loi pour réglementer ses membres.

Il se trouve que notre pouvoir de réglementation nous vient de la somme de nos éléments. Tous nos partenaires, d'une façon ou d'une autre, ont un pouvoir de réglementation dans leur province. En fait, ...

[29]            Il a fait remarquer que le registraire de l'organisme de réglementation en Alberta est le trésorier de la CPMA, un vice-président est le président de l'organisme de réglementation au Québec et un autre vice-président est le registraire en Colombie-Britannique. Il soutient que la présence de ses personnes confère un aspect de réglementation aux activités de la CPMA.

[30]            En réponse à une question portant sur les avantages que procure à la CPMA l'obtention d'une marque officielle, le Dr Chelin a répondu que la marque officielle permet à la CPMA de faire des démarches auprès des gouvernements là où il y a des podiatres qui ne sont pas inscrits. Il a dit ce qui suit :

[traduction]

131. Q.    Vous croyez que vous pouvez maintenant intenter une poursuite afin d'empêcher des gens de faire cela, de donner l'impression d'être ce que vous venez de décrire?

R.             Là où il n'existe pas de réglementation, nous sommes convaincus que nous avons certainement une possibilité de nous présenter devant les gouvernements et de les sensibiliser à ce que nous avons, et à ce que nous sommes, et il y a des gens dans ces provinces qui constituent un danger pour le public quant à nous.

132. Q.    Donc, nous dites-vous que vous pouvez intervenir là où le gouvernement n'exerce pas...


R.             Eh bien, que diriez-vous de conseiller?

133. Q.    - - - de contrôle sur ces personnes?

R.             Que diriez-vous de les conseiller et de les orienter? Je ne peux pas dire -- nous ne pouvons pas arrêter les gouvernements. Personne parmi nous ne peux arrêter les gouvernements, mais nous pouvons certainement faire savoir ce que nous pensons.

Nous allons agir publiquement et s'il arrive que le public en subisse un préjudice, qu'il en soit ainsi, nous vous en avions prévenu.

[31]            Le Dr Chelin ne croit pas que le fait que la CPMA détienne cette marque ait une incidence sur l'Ordre, en tant qu'organisme de réglementation en Ontario. Il a dit ce qui suit :

[traduction]

143. Q.    Eh bien, tout ce que je dis vraiment -- et je ne pense pas que nous soyons en désaccord -- est que votre adoption de la marque en vertu de l'article 9 touche l'Ordre.

R.             Je ne le pense pas.

144. Q.    Vous ne croyez pas que cela touche d'une façon quelconque l'Ordre?

R.             Je pense que nos membres en Ontario peuvent plus ou moins s'organiser, et s'ils ont un problème, ils ont certainement un grand frère pour les aider dans une situation quelconque.

Je ne sais pas s'il y aura une situation quelconque, je n'en prévois pas. Je crois comprendre que ces deux organisations et les deux professions collaborent dans la province pour parvenir au meilleur règlement du problème au pays.

Et -- vous savez, ils vont régler leur propre problème. Donc, je ne pense pas que nous empiétions sur l'Ordre, mais regardons la situation comme ceci, je veux dire, vous venez de parler de chevauchement...

145. Q.    Oui.

A.             - - -tout a un chevauchement, le gouvernement crée le chevauchement. Le gouvernement crée un chevauchement dans les soins de santé, chez les podiatres, au moment où nous nous parlons, il en est de même pour les dermatologues, pour les médecins, pour les infirmiers et infirmières.

Le chevauchement est essentiellement un système de freins et de contrepoids qui nous permet de rester tous en place.


[32]            Le Dr Chelin a parlé du rôle de la CPMA pour ce qui est de promouvoir la formation de ses membres. Il existe un fonds de formation qui est financé au moyen d'une cotisation annuelle des membres. La cotisation a été de 100 $ par année par membre de 1985 à 2000, année où elle a été réduite à 50 $.

[33]            Il a parlé d'une « voie hiérarchique » par laquelle les membres du conseil exécutif font rapport à leurs organisations professionnelles respectives, comme suit :

[traduction]

211. Q.    On dirait que vous dites que le conseil exécutif pourrait tout simplement décider de le faire sans...

R.             Non. Je pense que le conseil exécutif en fait certainement rapport aux conseils provinciaux et ces derniers en font rapport au conseil exécutif. N'oubliez pas, c'est ainsi que fonctionne la voie hiérarchique.

Il faut que le conseil exécutif fasse rapport. Le président de chaque organisation provinciale fait partie du conseil d'administration. Chaque président doit faire rapport sur tout à une réunion ou par un appel conférence, selon le moyen utilisé, à son exécutif au niveau local, et le tout revient au conseil exécutif au niveau national.

Donc, aucune décision n'est prise de façon indépendante habituellement, sans suivre la bonne voie hiérarchique lorsqu'il s'agit de prendre une décision.

212. Q.    Alors, la décision est prise par le conseil exécutif, n'est-ce pas?

R.             Après confirmation par les conseils provinciaux.

[34]            La CPMA fait la promotion de certains produits. Le Dr Chelin a dit que la CPMA donne son « sceau » d'approbation pour des produits qui sont, à son avis, [traduction] « d'un emploi sûr pour le public » .

[35]            La CPMA fonctionne par l'entremise de comités. L'exécutif peut décider de créer un comité. Il n'existe aucun mandat officiel pour la création de comités. Ces derniers comprennent notamment un comité de liaison avec les assureurs et un comité chargé de la brochure.

[36]            En outre, la CPMA peut décider de relever une personne de sa qualité de membre, sans qu'il y ait de limite à son pouvoir discrétionnaire à cet égard. Si un membre est destitué, il n'a aucun droit d'appel.

[37]            La CPMA répond aux demandes de renseignements du grand public. Il n'existe aucune politique écrite pour ce qui est de répondre aux demandes de renseignements.


[38]            Selon le Dr Chelin, le gouvernement du Canada a invité la CPMA à participer à des « protocoles d'affinité » relativement aux négociations en vue de modifier l'ALÉNA. Apparemment, cette invitation a été faite à la suggestion de l'American Podiatric Medical Association, qui représente les podiatres aux États-Unis. On a demandé à la CPMA de participer en tant qu'organisation-ressource. Cependant, le Dr Chelin a dit clairement que les protocoles d'affinité étaient entre des organisations nationales. Ce n'était pas un problème pour les gouvernements du Canada et des États-Unis, mais c'en était un pour les organisations nationales.

[39]            La CPMA a été incitée à examiner la question de l'obtention d'une marque officielle suite à la participation du Dr Chelin à une rencontre internationale en Europe où la question a fait l'objet de discussions. La décision de demander la marque officielle a été prise au niveau exécutif, sans consultation des membres. Cependant, la CPMA a consulté son homologue américaine. La CPMA a décidé de demander la marque officielle comme moyen pour [traduction] « protéger les droits des podiatres au Canada » .

[40]            Lors du contre-interrogatoire du Dr Chelin, la CPMA utilisait le code de déontologie d'une organisation parallèle, l'American Podiatric Medical Association. La rédaction d'un code de déontologie pour la CPMA allait être menée à bonne fin, sous réserve d'autres arguments présentés au Conseil de la CPMA.

[41]            Les biens de la CPMA, dans l'éventualité d'une liquidation, seraient répartis entre ses membres, et non distribués au grand public.

[42]            La fonction de formation de la CPMA est en voie d'être transférée à un comité distinct, à savoir le « Canadian Podiatric Education Fund » . Le Dr Chelin a expliqué comme suit la raison d'être de cette démarche :


[traduction]

332.

...

R.             Cette demande a été présentée au gouvernement du Canada, les statuts sont en cours de rédaction -- on est en train d'y mettre la touche finale, cela fait une année qu'on s'y emploie par l'entremise d'avocats, et je sais que certaines parties -- je ne peux pas vous dire quelle est la situation exacte puisque cela fait de deux à trois que je n'ai pas eu de rapports.

Mais je sais qu'ils étaient -- l'intention était d'obtenir l'approbation du gouvernement fédéral pour pouvoir accréditer des écoles de podologie, la formation continue en podologie, créer un examen national à l'intention des podiatres au pays là où l'on souhaite un examen national canadien et non américain, et aider les étudiants avec...

Je veux dire, le financement des étudiants pour ce qui est des prêts et de tout le reste passerait alors du CPEF au sein de la CPMA plutôt qu'à la CCPME de sorte que ce serait indépendant, les personnes seraient nommées de façon séparée et je crois que leurs statuts prévoient aussi qu'il y aura des profanes dans cette structure organisationnelle.

[43]            La CPMA encourage ses membres à utiliser le terme « podiatre » . Elle est aussi censée « permettre » d'utiliser ce titre et en refuser l'utilisation. Le Dr Chelin a expliqué de quelle façon la CPMA pourrait refuser la permission d'employer le terme comme suit :

[traduction]

338. Q.    Pourriez-vous leur refuser la permission?

R.             Techniquement, je suppose que conformément à la marque, nous pourrions, mais je pense certainement -- vous savez, nous, en tant qu'organisation, nous, en tant que profession.

339. Q.    Si l'on s'attarde à la période précédant la publication de l'avis en vertu de l'article 9, est-ce que la CPMA pouvait refuser la permission?

R.             Oui.

340. Q.    Comment?


R.             Nous pouvions demander à nos membres, à toutes les personnes au niveau provincial chargées de la réglementation et peut-être discuter avec tous ces gens des problèmes en ce concerne la permission d'utiliser le terme « podiatre » et ils ont les pouvoirs.

341. Q.    Est-ce que la CPMA contrôle ses associations membres?

R.             Non. Certainement qu'ils prennent notre opinion d'expert et toute notre sagesse en considération.

[44]            Cependant, en réponse à une question ultérieure, il a indiqué que la CPMA n'avait pas le pouvoir de réglementer l'utilisation du terme en Ontario :

[traduction]

346. Q.    Ma question est la suivante : Est-ce que la CPMA a le pouvoir, en vertu des droits conférés par l'article 9, en supposant qu'ils sont valides, d'empêcher les gens, des particuliers, d'utiliser le terme « podiatre » en Ontario?

A.             La loi a empêché quiconque d'utiliser le terme « podiatre » , essentiellement, en raison de la législation. En ce qui...

347. Q.    Quelle législation?

R.             La Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées.

348. Q.    Ma question est la suivante : Est-ce que la CPMA affirme qu'en vertu des droits que lui confère l'article 9, en supposant qu'ils sont valides, elle a le pouvoir d'empêcher des personnes d'utiliser le terme « podiatre » en Ontario?

R.             Je répondrais non.

349. Q.    Pourquoi pas?

A.             C'est ce que je dirais à moins que les podiatres en Ontario nous informent du contraire.

En fin de compte, les podiatres en Ontario doivent être d'accord pour qu'en Ontario, quelqu'un puisse utiliser le mot « podiatre » jusqu'à ce que nous soyons tous morts.

[45]            Dans son affidavit, le Dr Chelin traite des façons dont la CPMA a adopté et employé la marque officielle « PODIATRIST » . Jointe au titre de la pièce « T » à son affidavit se trouvait une brochure produite par l'Ontario Podiatric Medical Association (l' « OPMA » ) en 1996. Il a dit que le comité chargé de la brochure de la CPMA a consulté l'OPMA pour la production de cette brochure. Il a également ajouté que la CPMA ne contrôle pas la façon dont l'OPMA emploie le terme « PODIATRIST » .

[46]            La pièce « U » jointe à l'affidavit du Dr Chelin est un supplément du National Post du 25 mai 2002, p. JV1. Cet article a également été produit par l'OPMA. Selon le Dr Chelin, il considère ces emplois du terme par l'OPMA comme des « exemples » de la façon dont la CPMA a employé la marque. Il a également fait remarquer que la CPMA [traduction] « a pratiquement financé » la publication de la pièce « T » . Il reconnaît que l'emploi de la marque dans la pièce « U » est fait par l'OPMA, qui a produit cet article.

[47]            Par la suite, le Dr Chelin a dit que le gouvernement de l'Ontario, et non l'Ordre, contrôle l'emploi du terme « podiatre » . Le gouvernement, et non l'Ordre, peut modifier les règles concernant l'emploi du terme.


[48]            La CPMA, selon le Dr Chelin, exerce une fonction de réglementation par le biais des activités de ses membres qui réglementent la profession dans leurs provinces respectives. L'adhésion à la CPMA est obligatoire en Colombie-Britannique et en Alberta. Le Dr Chelin a expliqué la situation comme suit :

[traduction]

422. Q.    Non, ma question est la suivante : est-ce que la liste des membres de la CPMA est publique? Est-elle privée ou non?

R.             C'est disponible sur notre site Web.

423. Q.    Je ne pense pas que ce soit sur le site Web.

R.             Si vous consultez le site Web et cliquez sur OPMA, vous l'obtiendrez par l'entremise de l'OPMA.

424. Q.    Et vous allez obtenir les membres de l'OPMA.

R.            Mais les membres de l'OPMA sont les membres de la CPMA. Nous tournons en rond sur ce sujet. Les membres de l'APA sont membres de - - - vous savez, tout d'abord...

425. Q.    Et ils sont automatiquement membres?

A.             En C.-B., en Alberta, ils sont automatiquement membres. Au Québec, ce n'est pas le cas. En Ontario, ce n'est pas obligatoire.

En C.-B. et en Alberta, la loi vous oblige à être membre de votre association provinciale.

[49]            La liste des membres de la CPMA est donnée sur le site Web. Le Dr Chelin a décrit cette liste comme un document public. En Ontario, l'adhésion à l'OPMA n'est pas obligatoire, mais tous les membres de l'OPMA sont membres de la CPMA d'après les statuts de l'OPMA. L'adhésion aux associations provinciales est obligatoire en Alberta et en Colombie-Britannique. En réponse à la question 440, il a dit ce qui suit :


[traduction]

440. Q.    Donc, selon vous, chaque podiatre qui est membre de la CPMA...

R.             - - -est un membre de son association provinciale ou organisme de réglementation -- peu importe ce que vous voulez l'appeler, parce que les différentes provinces lui donnent un nom différent -- sont membres de leur organisation provinciale avant de l'être de l'organisation nationale, sauf, et les exceptions à la règle sont les provinces où il n'y a aucune association, parce qu'il n'y a pas suffisamment de personnes pour qu'une personne crée une association.

QUESTIONS EN LITIGE ET ARGUMENTS

[50]            La présente demande soulève cinq questions. Il s'agit de savoir si l'Ordre a la qualité pour déposer la présente demande, si la demande de contrôle judiciaire a été présentée en dehors des délais prescrits, si le registraire a commis une erreur en statuant que la CPMA est une autorité publique au sens de la Loi, et si la CPMA a adopté et employé la marque « PODIATRIST » . En outre, il y a la question de la norme de contrôle applicable, à savoir si la norme de la décision raisonnable simpliciter s'applique ou la norme de la décision correcte.

[51]            L'Ordre soutient qu'il est dans son droit parce que, conformément à son statut d'organisme de réglementation des podologues et des podiatres en Ontario, il est « directement touché » par la décision du registraire de permettre à la CPMA de publier, au titre de marque officielle, la marque « PODIATRIST » . À cet égard, l'Ordre se fonde sur la décision de la Cour fédérale FileNET Corp. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (2001), 13 C.P.R. (4th) 402 (1re inst.).

[52]            L'Ordre soutient qu'il a présenté le dépôt de la présente demande de contrôle judiciaire dans un délai de trente jours à compter de la date à laquelle il a été mis au courant de la publication de « PODIATRIST » comme marque officielle. En conséquence, il soutient que la présente demande a été amorcée dans le délai prescrit dans la Loi sur les Cours fédérales, précitée, pour présenter une demande de contrôle judiciaire. Subsidiairement, l'Ordre soutient que la Cour a le pouvoir discrétionnaire de prolonger la période et qu'il a satisfait au critère selon lequel le pouvoir discrétionnaire peut être exercé en sa faveur.

[53]            L'Ordre soutient que la CPMA ne satisfait pas aux critères d'une autorité publique et il se fonde, à cet égard, sur les décisions FileNET, précitée, et Congrès juif canadien c. Chosen People Ministries, Inc. (2002), 19 C.P.R. (4th) 186, (1re inst.), conf. (2003), 27 C.P.R. (4th) 193 (C.A.F.).

[54]            Enfin, l'Ordre soutient que la CPMA n'a pas prouvé l'adoption et l'emploi de la marque « PODIATRIST » . Tout ce qu'elle a démontré, c'est l'emploi par l'OPMA.

[55]            La CPMA affirme que l'Ordre n'a pas qualité parce que l'emploi du titre « podiatre » est en voie d'être éliminé graduellement en Ontario. L'ordre n'est pas directement touché par la décision du registraire. En outre, il soutient que l'Ordre n'a pas démontré que la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire pour prolonger le délai.

[56]            Elle soutient en outre que dès que le registraire a eu décidé que la CPMA était une autorité publique, il n'avait aucun pouvoir discrétionnaire résiduel de refuser la publication de la marque. Elle soutient aussi que la décision quant au statut de la CPMA, en tant qu'autorité publique, devrait faire l'objet d'un contrôle en fonction de la norme de la décision raisonnable simpliciter puisqu'il n'y a avait pas suffisamment de nouveaux éléments de preuve qui auraient eu un effet sur la décision du registraire.

DISCUSSION

[57]            La présente demande concerne la décision du registraire de publier la marque « PODIATRIST » en tant que marque officielle en vertu du sous-alinéa 9(1)n)(iii) de la Loi qui prévoit ce qui suit :


9. (1) Nul ne peut adopter à l'égard d'une entreprise, comme marque de commerce ou autrement, une marque composée de ce qui suit, ou dont la ressemblance est telle qu'on pourrait vraisemblablement la confondre avec ce qui suit :

...

9. (1) No person shall adopt in connexion with a business, as a trade-mark or otherwise, any mark consisting of, or so nearly resembling as to be likely to be mistaken for,

...

n) tout insigne, écusson, marque ou emblème :

...

(n) any badge, crest, emblem or mark

...

(iii) adopté et employé par une autorité publique au Canada comme marque officielle pour des marchandises ou services,

à l'égard duquel le registraire, sur la demande de Sa Majesté ou de l'université ou autorité publique, selon le cas, a donné un avis public d'adoption et emploi;

(iii) adopted and used by any public authority, in Canada as an official mark for wares or services, in respect of which the Registrar has, at the request of Her Majesty or of the university or public authority, as the case may be, given public notice of its adoption and use;


[58]            Dans l'arrêt Techniquip Ltd. c. Assoc. olympique canadienne. (1998), 80 C.P.R. (3d) 225 (1re inst.), confirmé par (1999), 3 C.P.R. (4th) 298 (C.A.F.), à la page 233 de la décision en première instance, la Cour a décrit l'objet de l'article 9 comme suit :

À mon avis, l'article 9 a pour objet de supprimer des divers secteurs d'activité ou du commerce toutes les sortes de marques énumérées plus haut. Suivant cette disposition, nul ne peut tirer profit d'un symbole public bien connu et respecté, ni l'adopter pour ses propres marchandises ou services. Ces emblèmes, insignes ou écussons sont associés à des institutions publiques qui ne prennent aucune part aux différents secteurs d'activité ou au commerce, mais qui sont néanmoins réputées être revêtues de respectabilité, de crédibilité et d'autres vertus civiques. En un sens, cette disposition veille à ce que ces symboles ne deviennent pas le gage d'une entreprise ou d'un secteur d'activité donné.

[59]            L'effet de l'avis public donné en vertu de la présente disposition a été décrit par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Ordre des architectes de l'Ontario c. Assn. of Architectural Technologists of Ontario (2002), 19 C.P.R. (4th) 417 (C.A.F.) à la page 429 comme suit :

L'avis public donné conformément au sous-alinéa 9(1)n)iii) a un effet important, celui d'empêcher d'autres personnes, à partir de cette date, d'employer toute marque, « comme marque de commerce ou autrement » , qui est susceptible d'être confondue avec la marque officielle (article 11), sauf pour les marchandises ou services porteurs de la marque avant la date de l'avis public de la marque officielle : Association olympique canadienne c. Konica Canada Inc., [1992] 1 C.F. 797, aux par. 21 à 23 (C.A.). De plus, le registraire ne peut refuser de donner avis public d'adoption et emploi d'une marque comme marque officielle pour des marchandises ou services pour le motif qu'elle est simplement descriptive, qu'elle ne permet pas de distinguer les marchandises ou services de l'autorité publique ou qu'elle est susceptible d'être confondue avec la marque d'un tiers. De fait, le registraire n'a virtuellement pas le pouvoir discrétionnaire de refuser de donner avis public d'adoption et emploi d'une marque comme marque officielle, une fois que l'auteur de la demande établit qu'il a satisfait aux critères de la loi : Mihaljevic c. British Columbia (1988), 22 F.T.R. 59, aux pp. 88 et 89, conf. par (1990), 34 C.P.R. (3d) 54 (C.A.F.).


[60]            La CPMA a demandé la publication d'une marque officielle en sa capacité d'autorité publique. L'examinatrice a d'abord rejeté la prétention de la CPMA d'être une autorité publique, mais après réception d'autres arguments, elle a changé d'idée. La question maintenant est de savoir si la reconnaissance de la CPMA en tant qu'autorité publique est solide. Étant donné qu'il y a de nouveaux éléments de preuve qui ont été présentés à l'appui de la présente demande et dont le registraire n'avait pas été saisi, la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte. À cet égard, voir Congrès juif canadien, précité, à la page 192, où la Cour a dit ce qui suit :

21. Dans l'arrêt Molson Breweries c. John Labatt Ltd., [2000] 3 C.F. 145 (C.A.), la Cour d'appel fédérale a indiqué que la norme appropriée applicable aux décisions du registraire lorsqu'il existe une preuve nouvelle est celle de la décision correcte. L'arrêt Molson établit que lorsqu'une preuve additionnelle aurait pu avoir un effet sur les conclusions du registraire ou sur l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le juge de première instance doit en venir à ses propres conclusions en ce qui concerne l'exactitude de la décision du registraire, ce qui signifie que la tenue d'un nouveau procès est alors appropriée.

[61]            Ni les affidavits de Mme Shapiro et du Dr Chelin, respectivement, ni la transcription des contre-interrogatoires n'avaient été présentés au registraire lorsque la marque a été publiée. Ces affidavits et transcriptions des contre-interrogatoires constituent de « nouvelles preuves » qui, à mon avis, auraient eu un effet sur la décision du registraire. En conséquence, la norme de la décision correcte doit être appliquée.


[62]            Il se dégage de l'examen du dossier du Bureau des marques de commerce que l'importante différence l'entre les arguments initiaux et les arguments supplémentaires concernant le statut de la CPMA en tant qu'autorité publique est le degré de contrôle gouvernemental dont elle fait l'objet. À l'origine, les observations relatives au fait que la CPMA avait été créée par lettres patentes et avait été, périodiquement, consultée par le gouvernement fédéral sur des questions ayant trait aux possibilités d'emploi, aux négociations visant à modifier l'ALÉNA et à Santé et Bien-être social Canada.

[63]            Les arguments supplémentaires commençaient par la genèse de la CPMA attestée par les lettres patentes, mais faisaient ensuite état de la composition de l'Association, celle-ci comprenant des organismes provinciaux de réglementation, ainsi que du versement d'honoraires aux podiatres par les gouvernements.

[64]            Selon l'affidavit du Dr Chelin, ces organismes provinciaux de réglementation sont membres de la CPMA, à savoir L'Ordre des podiatres du Québec, l'Alberta Podiatric Medical Association et la British Columbia Association of Podiatrists. Il a témoigné que [traduction] « les groupes provinciaux représentant la profession de podiatre au Manitoba et en Saskatchewan ont demandé d'adhérer à la CPMA » . Lorsqu'il a souscrit son affidavit, il n'existait aucun organisme provincial à Terre-Neuve-et-Labrador, en Nouvelle-Écosse ou à l'Île-du-Prince-Édouard qui représentait les « intérêts » des podiatres.

[65]            Lors de son contre-interrogatoire, le Dr Chelin a laissé entendre que les fonctions de réglementation exercées par certains membres de la CPMA conféraient une fonction de réglementation à la CPMA. À mon avis, cette déclaration est sans fondement. Les éléments de « contrôle gouvernemental » qui caractérisent une autorité publique ont été abordés dans l'arrêt Ordre des architectes de l'Ontario, précité, à la page 436 comme suit :


Une comparaison avec la Loi sur les architectes met en évidence les modes de contrôle gouvernemental souvent prévus dans les lois ontariennes qui créent des organismes professionnels autonomes. Par exemple, l'article 6 accorde au ministre concerné le pouvoir d'examiner les activités du Conseil de l'OAO, de demander au Conseil d'entreprendre les activités que le ministre estime nécessaires et souhaitables pour réaliser l'objet de la Loi, et de conseiller le Conseil relativement à l'application de la Loi. De plus, le Conseil a le pouvoir d'établir des règlements avec l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil: paragraphe 7(1). Le lieutenant-gouverneur en conseil a aussi le pouvoir de nommer trois à cinq membres du Conseil (alinéa 3(2)b)), un membre du comité des plaintes (alinéa 29(1)b)) et du comitéde discipline (alinéa 33(1)b)), ainsi que le conseiller médiateur (alinéa 31(1)).

[66]            L'adhésion à la CPMA est régie par l'article III, section 1 des statuts. L'article III, 1), A dispose :

[traduction]

A. La qualité de membre actif peut être accordée à quiconque :

(i) affiche une moralité irréprochable,

(ii) est le titulaire d'un doctorat en médecine podiatrique, autorisé par la loi à exercer la podiatrie dans une province du Canada qui a une loi relative à l'exercice de la profession de podiatre et à la délivrance de permis d'exercice à ce titre,

(iii) a soumis à l'approbation du conseil exécutif de l'association une demande,

a) est membre en règle de l'association de podiatrie de la province dans laquelle il exerce, ou

b) réside dans une province du Canada qui n'a pas de loi relative à l'exercice de la profession de podiatre et à la délivrance de permis d'exercice, et est un membre en règle de l'association de podiatrie reconnue de cette province; ou est dûment qualifié et autorisé par la loi à exercer la podiatrie dans un État des États-Unis d'Amérique.

c) La qualité de membre actif ne peut être obtenue qu'au moyen de l'adhésion à l'association provinciale de podiatrie compétente, de la présentation d'une demande à cette association et du versement des cotisations par ladite association là où le requérant est titulaire d'un permis et exerce la podiatrie à moins qu'il n'existe pas d'association provinciale.

[67]            Il n'existe aucune limite au pouvoir discrétionnaire du conseil exécutif de la CPMA pour ce qui est de décider de suspendre ou de révoquer l'adhésion. Il n'existe aucun droit de contrôle judiciaire. Le Dr Chelin a dit que la CPMA a des exigences « d'adhésion rigoureuses » , selon ce qui est indiqué au paragraphe 20 de son affidavit :

[traduction]

20.            La CPMA a des exigences d'adhésion strictes. L'article III des statuts de la CPMA précise que les membres de la CPMA doivent être membres en règle de leur association provinciale de podiatrie, que la province ait ou non une loi relative à l'exercice de la podiatrie et à la délivrance de permis d'exercice. Ou bien, le membre de la CPMA doit être dûment qualifié et être autorisé par la loi à exercer la podiatrie dans un État des États-Unis d'Amérique.

[68]            À mon avis, une exigence d'adhésion à une « association » provinciale de podiatrie qui peut exercer ou ne pas exercer de pouvoir de réglementation ne permet pas de conclure que la CPMA est une autorité publique. Il se dégage de l'examen de l'affidavit du Dr Chelin et de la transcription de son contre-interrogatoire que la CPMA s'acquitte plutôt du rôle d'une association professionnelle qui fait la promotion des intérêts de ses membres ou qui fait des démarches dans l'intérêt de ses membres sans être assujettie à un contrôle gouvernemental.


[69]            Selon la décision de la Cour d'appel fédérale Ordre des architectes de l'Ontario, précitée, les caractéristiques déterminantes essentielles d'une autorité publique aux termes de la Loi sont le contrôle gouvernemental et le bien public. Au moment où le registraire a décidé de publier la marque officielle, on tenait compte d'un critère en trois volets, énoncé dans l'arrêt Registraire des marques de commerce c. Association olympique canadienne, [1983] 1 C.F. 692. Ce critère a été analysé dans le jugement Assoc. des Grandes Soeurs de l'Ontario c. Les Grands Frères du Canada (1997), 75 C.P.R. (3d) 177, à la page 215, comme suit :

La première est de savoir si, aux fins de l'article 9 de la Loi, les parties au présent litige sont des « autorités publiques » . Dans l'arrêt Canada (Registraire des marques de commerce) c. Assoc. olympique canadienne, s'exprimant au nom d'un collège de trois juges de la Cour d'appel fédérale, le juge Urie adopte implicitement le moyen selon lequel, pour être considéré comme une autorité publique, un organisme doit avoir une obligation envers le public en général, être soumis au contrôle public dans une mesure importante, et ses bénéfices doivent obligatoirement profiter à l'ensemble du public et non pas servir un intérêt privé...

[70]            Dans l'arrêt Ordre des architectes de l'Ontario, précité, la Cour d'appel fédérale a refondu le critère en celui de contrôle gouvernemental et d'intérêt public. À mon avis, les éléments de preuve ne corroborent pas la conclusion voulant que la CPMA soit une autorité publique.

[71]            Il n'existe aucune élément de preuve selon lequel le gouvernement du Canada peut procéder à un contrôle ou « intervenir » dans les activités de la CPMA. Les biens de la CPMA ne sont pas à la disposition du public advenant sa liquidation conformément à la législation applicable. Les affaires de la CPMA ne sont pas assujetties à un règlement ou à un contrôle prévu par une loi. Les conclusions de la Cour dans le jugement Congrès juif du Canada, précité, à la page 199, en première instance, sont à propos ici :

La CPM n'est soumise à aucun contrôle public similaire ou analogue. Ce n'est pas le gouvernement qui veillerait à la disposition de ses biens. La CPM n'est pas financée par le gouvernement du Canada ou des États-Unis et n'est nullement soumise au contrôle public de quelque manière que ce soit.

Au contraire, comme l'avocat du CJC l'a affirmé, le gouvernement canadien ne peut intervenir de quelque façon que ce soit dans la gestion d'églises ou d'organismes caritatifs comme la CPM.


[72]            En outre, je vois un problème dans la conclusion du registraire selon laquelle la CPMA a établi l'adoption et l'emploi de la marque officielle « PODIATRIST » . Selon le contre-interrogatoire du Dr Chelin, la brochure intitulée « What You Should Know About Podiatrists » au titre de la pièce « T » de son affidavit a été produite par l'OPMA, mais avec les conseils et le financement de la CPMA. L'article publié dans le National Post, produit au titre de la pièce « U » était entièrement l'oeuvre de l'OPMA. L'emploi par l'OPMA n'est pas l'adoption et l'emploi par la CPMA.

[73]            Par conséquent, je conclus que le registraire a commis une erreur en reconnaissant la CPMA en tant qu'autorité publique. Elle n'a pas cette qualité et n'a pas droit à la protection de la Loi.

[74]            Je vais maintenant examiner les questions de la qualité pour agir et du délai.

[75]            La question de la qualité pour agir se pose parce que l'Ordre n'était pas une partie à la décision du registraire. Le paragraphe 18.1(1) de Loi sur les Cours fédérales, précitée, dit ceci :


18.1 (1) Une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par quiconque est directement touché par l'objet de la demande.

18.1 (1) An application for judicial review may be made by the Attorney General of Canada or by anyone directly affected by the matter in respect of which relief is sought.


[76]            La CPMA soutient que parce que l'emploi du terme « podiatre » en Ontario est désormais limité aux personnes qui ont été membres de la catégorie des podiatres jusqu'au 31 juillet 1993, l'Ordre, en tant qu'organisme de réglementation, n'est pas une personne « directement touché(e) » par la décision du registraire qui est en litige. Elle soutient également que le gouvernement de l'Ontario, et non pas l'Ordre, contrôle l'emploi du terme « podiatre » et laisse entendre que cet élément de contrôle milite encore plus contre une conclusion voulant que l'Ordre ait qualité pour agir.

[77]            Je rejette cet argument. Je conviens que le gouvernement de l'Ontario contrôle en bout de ligne l'emploi du terme « podiatre » , mais je fais remarquer que, dans la mesure où le gouvernement de l'Ontario a adopté la Loi de 1991 sur les podologues, précitée, et la Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées, précitée, il a donné à l'Ordre le pouvoir de réglementer l'emploi du terme aux fins de ces lois.

[78]            L'Ordre est l'organisme de réglementation en Ontario en ce qui concerne les professionnels mentionnés dans la Loi de 1991 sur les podologues, précitée. Sur cette base, il est directement touché par la publication de la marque officielle « PODIATRIST » . Le nombre de personnes dans la catégorie des podiatres, conformément au paragraphe 3(2) de cette loi, diminue peut-être, mais au moment de la souscription de l'affidavit de Mme Shapiro, il y avait encore 88 membres de cette catégorie assujettis au pouvoir de réglementation de l'Ordre. À mon avis, l'Ordre a qualité pour déposer la présente demande.


[79]            Il reste la question du délai. La présente demande de contrôle judiciaire a été déposée le 31 juillet 2002, près de 11 mois après la publication de la marque officielle, mais dans un délai de trente jours à compter de la date à laquelle l'Ordre a été mis au courant de cette publication, selon les éléments de preuve présentés par Mme Shapiro.

[80]            Le paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée, accorde un délai de trente jours pour le dépôt d'une demande de contrôle judiciaire. Il prévoit ce qui suit :


(2) Les demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours qui suivent la première communication, par l'office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance au bureau du sous-procureur général du Canada ou à la partie concernée, ou dans le délai supplémentaire qu'un juge de la Cour fédérale peut, avant ou après l'expiration de ces trente jours, fixer ou accorder.

18.1(2) An application for judicial review in respect of a decision or an order of a federal board, commission or other tribunal shall be made within 30 days after the time the decision or order was first communicated by the federal board, commission or other tribunal to the office of the Deputy Attorney General of Canada or to the party directly affected by it, or within any further time that a judge of the Federal Court may fix or allow before or after the end of those 30 days.


[81]            À quelle date est-ce que cette période de trente jours a commencé? Dans l'affaire Magnotta Winery Corp. c. Vintners Quality Alliance of Canada (2000), 1 C.P.R. (4th) 68 (1re inst.), la Cour a traité de la question du délai et de savoir si une prorogation de délai devrait être accordée.


[82]            Dans cette affaire, le registraire a donné avis de la marque dans le Journal des marques de commerce du 27 mai 1998. Les demanderesses en ont été informées le 20 août 1998 et ont communiqué immédiatement avec la défenderesse pour signifier leur opposition à ce qu'une marque officielle lui soit attribuée. Par la suite, les demanderesses ont sollicité une directive de la Cour quant à la bonne façon de procéder pour contester la décision du registraire.

[83]            À la page 78, la Cour a fait les observations suivantes concernant l'ignorance des demanderesses quant à la publication de la marque officielle :

...Je ne qualifierais pas le fait que Magnotta n'ait pas pris connaissance de l'avis de publication dans le Journal des marques de commerce du 27 mai 1998 comme un « manque de vigilance » comme le soutient l'avocate de la VQA. La VQA a, dans une certaine mesure, eu recours à un subterfuge pour demander et obtenir la publication de l'avis d'adoption et d'emploi du mot ICEWINE comme sa marque officielle, sans en aviser Magnotta. Ce n'est pas tout le monde ni tous les avocats qui vérifient continuellement les publications dans le Journal des marques de commerce, particulièrement s'ils n'ont aucune raison de soupçonner que ce journal peut renfermer des renseignements qui les concernent ou qui concernent la situation de leurs clients ; si la VQA n'est pas une autorité publique, l'avocat de Magnotta ne pouvait pas s'attendre à y trouver ce genre de renseignement. Il est indiqué que les avis dans ce journal sont des avis publics adressés à tous, mais il faut certainement qu'il existe une probabilité raisonnable que la personne à qui l'avis est ainsi donné s'attend àtrouver des renseignements pertinents àsa situation dans le journal avant qu'elle puisse supposer qu'il s'agit d'un avis qui s'adresse à elle.

[84]            La Cour a également examiné les facteurs à prendre en considération pour accorder une prorogation de délai, à savoir une explication raisonnable pour le retard à présenter la demande de contrôle judiciaire, la diligence après avoir été informé de la décision, le préjudice en cas d'interdiction de contester la décision, et une « cause défendable à faire valoir » .


[85]            Dans la présente affaire, je ne suis pas convaincue que je devrais conclure que la décision a été communiquée pour la première fois à l'Ordre le 2 juillet 2002, compte tenu de la mention dans la décision Magnotta, précitée, que l'avis dans le Journal des marques de commerce est un avis public adressé à tous. Cependant, à mon avis, il convient en l'espèce d'exercer le pouvoir discrétionnaire, conformément aux dispositions du paragraphes 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée, de proroger le délai pour déposer la demande de contrôle judiciaire.

[86]            Contrairement aux faits de l'affaire Apv Canada Inc. et autres c. Ministre du Revenu national (2001), 208 F.T.R. 81 (1re inst.), où la Cour a refusé d'octroyer une prorogation de délai en raison de la preuve insuffisante de l'intention constante de poursuivre la demande après un retard de huit années, le retard dans la présente affaire est de quelque dix mois.

[87]            Je suis convaincue que l'Ordre a fourni une explication raisonnable pour son retard à faire valoir sa demande. Selon le Dr Chelin, le conseil exécutif de la CPMA n'a procédé à aucune consultation au sujet de la décision de demander une marque officielle, sauf auprès de l'American Podiatric Medical Association.

[88]            L'Ordre n'a pas tardé à exercer un recours. Mme Shapiro a mandaté un avocat pour effectuer une recherche sur les marques de commerce et elle a fait rapport au conseil de l'Ordre dès qu'elle a reçu les résultats de la recherche le 2 juillet 2002. La décision d'aller de l'avant a été prise le 12 juillet 2002 et l'avocat a reçu la directive d'introduire une instance. La présente demande a été présentée 31 juillet 2002. À mon avis, ces démarches étaient raisonnables et établissent la « diligence raisonnable » dans la poursuite de la demande.

[89]            L'Ordre subira un préjudice si la décision est confirmée. L'Ordre, et non pas la CPMA, réglemente la profession de podiatre. Ce pouvoir s'applique sans doute uniquement à la province d'Ontario, et non au pays, mais il est quand même important. De même, le fait que le nombre de podiatres en Ontario diminue ne modifie en rien le fait qu'il y a encore des podiatres qui exercent en Ontario et qui sont assujettis au pouvoir de réglementation du demandeur. L'Ordre est une personne « directement » touchée par l'octroi d'une marque officielle à la CPMA.

[90]            Enfin, l'Ordre a soumis une « cause défendable à faire valoir » . Selon la décision Ordre des architectes de l'Ontario, précitée, à la page 64, il faut se garder de donner au sous-alinéa 9(1)(n)(iii) un sens extensif lorsqu'il s'agit de reconnaître une autorité publique.

[91]            À mon avis, reconnaître la CPMA en tant qu'autorité publique en se fondant sur ses activités décrites dans les éléments de preuve présentés, en particulier le contre-interrogatoire du Dr Chelin, serait donner un sens extensif à la notion d' « autorité publique » . La CPMA est une association professionnelle, faisant des démarches auprès de divers organismes, dont le gouvernement fédéral, au nom de ses membres. Il ne s'agit pas d'un organisme de réglementation. La simple présence en son conseil exécutif de personnes employées par des organismes provinciaux de réglementation ne peut pas donner et ne donne effectivement pas de pouvoir de réglementation à la CPMA. Les associations provinciales sont assujetties aux lois provinciales et exercent leur autorité dans les limites des provinces.

[92]            Il est exagéré et irréaliste de dire que ces pouvoirs de réglementation sont « en quelque sorte » exercés par la CPMA. À mon avis, l'examinatrice a eu raison à l'origine de rejeter la demande de publication de la marque « PODIATRIST » comme marque officielle. Les renseignements supplémentaires fournis par la CPMA dans la lettre du 28 juin 2001 ajoutaient des précisions quant aux activités de la CPMA, mais ne soulèvent pas de questions ayant un effet sur l'issue de la cause. La CPMA ne satisfait pas aux critères d'une « autorité publique » et il s'agit là de l'importante question en litige soulevée dans la demande de contrôle judiciaire de l'Ordre.

CONCLUSION

[93]            La demande de contrôle judiciaire est accueillie et les dépens sont adjugés au demandeur.

[94]            La décision du registraire est annulée et l'avis public de la marque officielle « PODIATRIST » est inopérant quant à tout droit ou à toute interdiction prévus aux articles 9 et 11 de la Loi.

                                        ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est accueillie et les dépens sont adjugés au demandeur.


La décision du registraire est annulée et l'avis public de la marque officielle « PODIATRIST » est inopérant quant à tout droit ou à toute interdiction prévus aux articles 9 et 11 de la Loi.

                                                                                   _ E. Heneghan _                 

                                                                                                     Juge                          

Traduction certifiée conforme

________________________

Richard Jacques, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                           T-1230-02

INTITULÉ :                                                          ORDRE DES PODOLOGUES DE L'ONTARIO c. CANADIAN PODIATRIC MEDICAL ASSOCIATION

DATE DE L'AUDIENCE :                                  Le 26 avril 2004

LIEU DE L'AUDIENCE :                                    Toronto (Ontario)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET

ORDONNANCE :                                                La juge Heneghan

DATE :                                                                  le 22 décembre 2004

COMPARUTIONS :

Mark L. Robbins                                                     Pour le demandeur

Janet M. Fuhrer                                                       Pour la défenderesse

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mark L. Robbins                                                     Pour le demandeur

Bereskin & Parr

Scotia Plaza, 40e étage

40, rue King Ouest

Toronto (Ontario)

M5H 3Y2

Janet M. Fuhrer                                                       Pour la défenderesse

Ridout & Maybee LLP

150, rue Metcalfe

19e étage

Ottawa (Ontario)

K2P 1P1

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