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Date : 20010801

Dossier : T-2799-96

Référence neutre : 2001 CFPI 850

ENTRE :

                                                                      KIRKBI AG et

                                                               LEGO CANADA INC.

                                                                                                                                            demanderesses

                                                                              - et -

                                  RITVIK HOLDINGS INC./GESTIONS RITVIK INC.,

                                       et RITVIK TOYS INC./JOUETS RITVIK INC.

                                                                                                                                              défenderesses

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                        (Prononcés à l'audience à Ottawa,

                                                               le mercredi 1er août 2001)

LE JUGE HUGESSEN

[1]                 Par requête, les demanderesses sollicitent l'autorisation d'appeler dix témoins experts à l'instruction de la présente affaire.


[2]                 Lors d'une conférence préparatoire tenue en présence des avocats le 30 novembre 2000, l'affaire a été inscrite au rôle et elle se trouve actuellement sur la liste dressée pour une période de vingt journées d'audience commençant au milieu du mois de janvier 2002. À la même conférence préparatoire un certain nombre d'ordonnances ont été rendues au sujet de la préparation des documents, du dépôt d'éléments considérés comme ayant été lus et de l'échange des rapports d'experts, et des dates limites ont été fixées pour l'accomplissement de ces différentes étapes.

[3]                 Toujours au cours de cette conférence préparatoire, une ordonnance a aussi été prononcée pour autoriser chaque partie à appeler plus de trois, mais au plus cinq, témoins experts à l'instruction de l'action. Il y aurait peut-être lieu de glisser un mot d'explication à ce sujet. Au cours de la conférence préparatoire, des débats ont porté sur la question de savoir si c'était l'article 7 de la Loi sur la preuve au Canada qui s'appliquait ou la règle équivalente de la Loi sur la preuve de l'Ontario. Il y a eu aussi, d'après ce que je me souviens, bien que les avocats n'en soient pas certains, une certaine discussion sur le fait que, dans une ordonnance de confidentialité rendue antérieurement, le protonotaire Lafrenière avait mentionné la présence de trois experts de chaque côté et que cette ordonnance, au moins indirectement, limitait à ce nombre les témoins experts des parties.

[4]                 De toute façon, il est bien clair que, suivant l'ordonnance prononcée, chaque partie ne pouvait présenter plus de cinq témoins experts à l'instruction. Les demanderesses veulent maintenant que la Cour les autorise à en appeler davantage.

[5]                 Je tiens à souligner dès le départ que la présente requête, selon ma perception, n'est pas présentée en application de l'article 7 de la Loi sur la preuve au Canada[1]. Cet article, selon moi, confère à un juge le pouvoir discrétionnaire de permettre à une partie d'appeler plus que cinq témoins experts mais, d'après mon interprétation, pendant la conférence préparatoire, j'ai exercé ce pouvoir discrétionnaire après discussion avec les avocats. Les demanderesses signalent qu'il n'y a pas eu de requête à la conférence préparatoire, mais il n'était pas nécessaire qu'il y en ait. Une conférence préparatoire vise essentiellement à examiner des questions de cette sorte, à savoir le nombre de témoins, le nombre d'experts, le calendrier et ainsi de suite.

[6]                 Il s'ensuit donc qu'en fait, par la présente requête, on me demande de modifier une ordonnance que j'ai rendue à la conférence préparatoire. Incidemment, je devrais ajouter que, bien que l'ordonnance ait effectivement été prononcée à la conférence préparatoire, à la fin de novembre 2000, elle n'a été officiellement inscrite que deux semaines plus tard environ. L'ordonnance que j'ai signée a été rédigée par l'avocat des demanderesses, approuvée par les avocats des défenderesses et transmise à la Cour.

[7]                 La règle qui s'applique à la modification d'une ordonnance de la Cour est exposée dans la règle 399[2]. L'avocat des demanderesses avance que la règle 399 ne s'applique pas à une ordonnance de mise au rôle ou à une ordonnance relative à la gestion de l'instance et que ces ordonnances sont toujours modifiées. Je ne souscris pas entièrement à cette proposition. Il est certainement vrai que les ordonnances relatives à la gestion de l'instance et les ordonnances de mise au rôle, et peut-être même les ordonnances prononcées aux conférences préparatoires, peuvent être modifiées, mais, selon moi, une ordonnance de la Cour ne peut être modifiée que par l'exercice des pouvoirs conférés à la règle 399. Je partage cependant l'opinion de l'avocat des demanderesses selon laquelle les exigences minimales pour accepter de modifier une ordonnance de mise au rôle sont beaucoup moins élevées si cette ordonnance ne sert pas à établir des droits et qu'habituellement, il s'agit d'une ordonnance purement procédurale ou quelque chose d'approchant. D'autres ordonnances peuvent être modifiées en raison de changements ou des circonstances et il n'est pas nécessaire d'user d'une très grande force persuasive pour convaincre la Cour qu'il est indiqué de modifier une décision antérieure prise en fonction de l'état du dossier à ce moment-là.


[8]                 Il n'en reste pas moins que, selon moi, cela ne règle pas la question en faveur des demanderesses. J'estime que c'est l'intégrité même du processus de conférence préparatoire qui est réellement en litige en l'espèce. Lorsqu'ils arrivent aux conférences préparatoires, les avocats sont censés être prêts pour l'instruction. Lorsqu'ils arrivent à ces conférences, ils sont censés connaître leur cas, savoir quels témoins ils vont appeler et, surtout, savoir combien de temps il leur faudra. La présente Cour a mis sur pied un système de fixation des dates pour les procès et ce système est très important tant pour la Cour que pour les avocats. En échange, il faut que les avocats qui se présentent à la conférence préparatoire soient prêts à affirmer à la Cour que le nombre de témoins qu'ils se proposent d'appeler représente effectivement le nombre de témoins qu'ils vont appeler.


[9]                 Bien sûr, il est possible que les circonstances changent et il est toujours possible de modifier une ordonnance du genre de celle qui a été rendue en l'espèce afin d'augmenter le nombre de témoins experts susceptibles d'être appelés (et, par le fait même, de prolonger le procès étant donné que j'ai beaucoup de mal à croire que l'interrogatoire et le contre-interrogatoire de cinq témoins experts ne prendraient pas beaucoup moins de temps que l'interrogatoire et le contre-interrogatoire des dix témoins experts que les demanderesses se proposent maintenant d'appeler). Toutefois, pour convaincre la Cour de modifier une ordonnance du genre de celle qui nous occupe en l'espèce, il faut lui soumettre des éléments établissant que les circonstances ont changé. Or, le présent dossier ne contient aucun élément à cet effet. Tout ce qu'indique l'affidavit déposé, c'est que les demanderesses ont maintenant l'intention d'appeler dix témoins experts plutôt que les cinq qu'elles avaient dit avoir l'intention d'appeler. À mon avis, c'est insuffisant. Cela ne suffit certainement pas à justifier que je modifie l'ordonnance qui a été prononcée et en fonction de laquelle la préparation des parties en vue de l'instruction est bien avancée. Les rapports des experts des demanderesses doivent être signifiés dans un peu plus de six semaines, les défenderesses sont censées répondre à ces rapports un petit mois plus tard et les rapports de réfutation des demanderesses doivent être déposés un autre mois après cela. Il est trop tard, maintenant, pour dire qu'elles veulent appeler dix experts plutôt que les cinq qu'elles avaient d'abord dit à la Cour avoir l'intention d'appeler.

[10]            Par conséquent, je rejette la requête avec dépens.

                                                                                                                                                                                                                                               

                                                                                                                                                                 Juge                       

Ottawa (Ontario)

le 1er août 2001

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                                                                      COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                 AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

N º DE DOSSIER :                                             T-2799-96

INTITULÉ DE LA CAUSE :              KIRKBI AG ET AL. c. RITVIK HOLDINGS INC.

LIEU DE L'AUDIENCE :                                            Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                                            le 1er août 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS par le juge Hugessen, en date du 1er août 2001

ONT COMPARU :

Robert McFarlane                                                             POUR LA DEMANDERESSE

Ronald Dimock                                                                 POUR LES DÉFENDERESSES

et Henry Lue

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

BERESKIN AND PARR                                                 POUR LES DEMANDERESSES

Toronto (Ontario)

DIMOCK STRATTON AND CLARIZIO                    POUR LES DÉFENDERESSES

Toronto (Ontario)



[1]

7. Lorsque, dans un procès ou autre procédure pénale ou civile, le poursuivant ou la défense, ou toute autre partie, se propose d'interroger comme témoins des experts professionnels ou autres autorisés par la loi ou la pratique à rendre des témoignages d'opinion, il ne peut être appelé plus de cinq de ces témoins de chaque côté sans la permission du tribunal, du juge ou de la personne qui préside.

7. Where, in any trial or other proceeding, criminal or civil, it is intended by the prosecution or the defence, or by any party, to examine as witnesses professional or other experts entitled according to the law or practice to give opinion evidence, not more than five of such witnesses may be called on either side without the leave of the court or judge or person presiding

[2]

399. (2) La Cour peut, sur requête, annuler ou modifier une ordonnance dans l'un ou l'autre des cas suivants:

a) des faits nouveaux sont survenus ou ont été découverts après que l'ordonnance a été rendue;

b) l'ordonnance a été obtenue par fraude.

399. (2) On motion, the Court may set aside or vary an order

(a) by reason of a matter that arose or was discovered subsequent to the making of the order;

or

(b) where the order was obtained by fraud.

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