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Date : 20170817


Dossier : T-748-16

Référence : 2017 CF 772

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 17 août 2017

En présence de madame la juge Elliott

ENTRE :

WARD CHICKOSKI

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Le demandeur, M. Ward Chickoski (M. Chickoski), demande le contrôle judiciaire de la décision (la décision) rendue par la sous-ministre adjointe de la Direction générale des opérations réglementaires et des régions de Santé Canada, Anne Lamar (la SMA). La décision a rejeté le grief de M. Chickoski contre la décision de son supérieur immédiat d’alors, Peter Brander (M. Brander) de lui imposer un plan d’action d’amélioration du rendement (le plan d’action). Le grief de M. Chickoski comprenait également une plainte de violence dans le lieu de travail aux termes de la partie XX du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail, DORS/86‑304 (le Règlement SST), pris en vertu du Code canadien du travail, LRC (1985), c L‑2, étant donné que M. Chickoski allègue que le plan d’action faisait partie d’une campagne de harcèlement continue menée contre lui par M. Brander.

[2]  Le grief de M. Chickoski a été rejeté parce que la SMA a déterminé qu’elle n’avait pas compétence pour traiter le grief aux termes du paragraphe 208(2) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, LC 2003, c 22, article 2 (LRTSPF), qui prévoit que « [l]e fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel si un recours administratif de réparation lui est ouvert sous le régime d’une autre loi fédérale, à l’exception de la Loi canadienne sur les droits de la personne ».

[3]  M. Chickoski allègue que la décision était inéquitable sur le plan procédural parce que la SMA ne lui a pas donné l’occasion de se faire entendre officiellement avant de prendre sa décision. D’après lui, il était également injuste que la SMA ait reçu une note d’information qu’il n’a pas eu l’occasion de voir et que la décision soit identique à l’ébauche de réponse fournie en pièce jointe à la note d’information en question.

[4]  M. Chickoski allègue également que la décision était déraisonnable. La SMA a conclu que la procédure de plainte de violence dans le lieu de travail telle qu’elle est présentée dans le Règlement SST constitue « un recours administratif de réparation » conformément au paragraphe 208(2) de la LRTSPF, empêchant un fonctionnaire de présenter un grief individuel aux termes du paragraphe 208(1). M. Chickoski a déclaré que le Règlement SST ne permet aucun recours personnel : la réparation qu’il demande, y compris l’annulation du plan d’action, ne peut lui être accordée dans le cadre du Règlement SST. Par conséquent, aucun recours de réparation ne lui était ouvert.

[5]  M. Chickoski demande que la décision soit annulée ou, en guise de solution de rechange, qu’elle soit annulée et que l’affaire soit renvoyée pour nouvel examen par le même décideur avec les instructions que la Cour juge appropriées.

[6]  La demande de M. Chickoski est accueillie pour les motifs qui suivent. La décision est démunie d’analyse ou de motifs qui pourraient permettre à M. Chickoski ou à la Cour de comprendre pourquoi il a été décidé que le paragraphe 208(2) de la LRTSPF s’applique.

II.  Résumé des faits

[7]  M. Chickoski était employé en tant que directeur général régional, Région des Prairies pour Santé Canada durant toute la période en cause. Il a été fonctionnaire pendant plus de 25 années, au cours desquelles il a reçu un certain nombre de prix et d’évaluations positives.

[8]  En 2014, M. Brander est devenu le supérieur immédiat de M. Chickoski. Au cours de cette relation, M. Chickoski a reçu diverses critiques de la part de M. Brander pour lesquelles M. Chickoski a cherché des clarifications et des explications. Dans son grief, M. Chickoski a déclaré qu’il avait été victime de harcèlement et de violence dans le lieu de travail sous forme d’intimidation psychologique de la part de M. Brander, qui comprenait, notamment, le fait de le rabaisser et de l’humilier devant les autres. M. Chickoski a indiqué qu’il était inquiet de ne pas recevoir les commentaires constructifs nécessaires pour pouvoir améliorer son rendement.

[9]  Finalement, M. Chickoski est allé chercher de l’aide dans le cadre du Système de gestion informelle des conflits (SGIC) pour pouvoir comprendre à la fois la rétroaction qu’il recevait de M. Brander et les attentes qu’avait ce dernier envers lui. Lorsque cette démarche n’a pas mené à une résolution appropriée, M. Chickoski a amorcé un processus de « discussion dirigée » le 23 novembre 2015. Cette discussion n’a pas eu le succès désiré. Selon M. Chickoski, M. Brander a insisté pour dire que la communication avait été rompue. Le 16 décembre 2015, juste avant son départ en vacances, M. Chickoski a reçu de la part de M. Brander le plan d’action daté du 23 novembre 2015.

[10]  Selon M. Chickoski, le plan d’action est à la fois déraisonnable et incongru par rapport à son rendement réel. Il dit que ce plan d’action fait partie du harcèlement continu qu’il a subi et soutient qu’il est de nature disciplinaire. M. Chickoski conteste le plan d’action parce qu’il est contradictoire à une « évaluation des cadres tous azimuts », qui projette une lumière très positive sur M. Chickoski. Cette évaluation démontre qu’il est respecté par ses pairs, ainsi qu’honoré et apprécié par ses employés, qui le voient comme étant inclusif, d’un bon soutien et possédant une grande intégrité.

[11]  Le 5 janvier 2016, M. Chickoski a présenté un grief individuel alléguant que le fait d’imposer un plan d’action était une mesure disciplinaire ou une mesure disciplinaire déguisée, citant le comportement de violence dans le lieu de travail et de harcèlement continu de M. Brander envers lui. Faisant état de l’impact qu’a le comportement de M. Brander sur sa santé psychologique et sa sécurité, M. Chickoski a de plus fait valoir qu’il était victime de violence dans le lieu de travail conformément à la partie XX du Règlement SST.

[12]  M. Chickoski a demandé des mesures réparatrices dont :

  • - la nomination d’une personne compétente aux termes de l’article 20.9 du Règlement SST pour faire enquête sur ses allégations de violence dans le lieu de travail;

  • - l’annulation du plan d’action, avec la reconnaissance qu’il était déraisonnable;

  • - la confirmation que les mesures de M. Brander constituaient du harcèlement, étaient de nature disciplinaire et contrevenaient au Code de valeurs et d’éthique de la fonction publique et aux obligations de l’employeur en matière de santé et sécurité des employés;

  • - des mesures complètes de redressement, y compris une mesure de redressement pécuniaire pour compenser la détresse psychologique subite par M. Chickoski (M. Chickoski a retiré sa revendication initiale pour la compensation d’une sanction pécuniaire qu’il croit avoir subie).

[13]  Un certain nombre de courriels concernant le grief et les mesures de redressement à la disposition de M. Chickoski ont été échangés entre M. Chickoski et les représentants de Santé Canada en janvier et en février 2016.

[14]  Le 22 janvier 2016, le directeur général des ressources humaines de Santé Canada, Delroy Lawrence (M. Lawrence) a avisé M. Chickoski que son grief ne pouvait pas être accepté à cause de l’application du paragraphe 208(2) de la LRTSPF. M. Lawrence a proposé à M. Chickoski trois solutions : 1) déposer une plainte de violence dans le lieu de travail aux termes de la partie XX du Règlement SST; 2) déposer une plainte de harcèlement aux termes de la « Politique sur la prévention et la résolution du harcèlement » du Secrétariat du Conseil du Trésor; ou 3) déposer un grief individuel aux termes de l’article 208 de la LRTSPF. M. Chickoski a également été informé que s’il ne choisissait pas un mécanisme de redressement parmi les trois solutions proposées, son dossier de grief serait fermé et sa plainte serait traitée comme étant une allégation de violence dans le lieu de travail.

[15]  En réponse, M. Chickoski a exprimé son désaccord avec la conclusion selon laquelle il ne pouvait pas déposer à la fois un grief et une plainte de violence dans le lieu de travail; dans le cadre de cette plainte, il ne pouvait pas obtenir la même mesure corrective qu’il demandait dans son grief. M. Chickoski a réitéré sa demande que Santé Canada traite le grief dans les délais impartis.

[16]  Le 26 février 2016, M. Lawrence a répondu à M. Chickoski et a confirmé que son grief était traité comme une plainte de violence dans le lieu de travail, et n’avait pas encore été entendu.

[17]  Citant les efforts des représentants de Santé Canada pour résoudre les préoccupations de M. Chickoski en lui offrant des solutions de rechange, le 12 avril 2016, la SMA a rejeté le grief de M. Chickoski. M. Chickoski a reçu la décision de la SMA le 15 avril 2016, et a présenté une demande de contrôle judiciaire de la décision à notre Cour.

[18]  Le 24 juin 2016, le procureur général a demandé de radier la demande de M. Chickoski pour les motifs qu’il n’avait pas épuisé les mesures de redressement qui étaient à sa disposition, conformément à la partie XX du Règlement SST. Pour les motifs cités dans la décision 2016 CF 1043, le juge Leblanc a rejeté cette requête avec dépens contre le procureur général.

III.  La décision faisant l’objet du contrôle judiciaire

[19]  Le courriel de rejet de la demande de grief de M. Chickoski, daté du 22 janvier 2016, n’est pas sensiblement différent des déclarations faites et des motifs fournis dans la décision. Les parties pertinentes du courriel de M. Lawrence sont rédigées ainsi :

[traduction]

[…]

Vous avez présenté un grief individuel conformément à l’article 208 de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (LRTSPF). Dans votre grief, vous prétendez que votre gestionnaire vous harcèle et que ce harcèlement constitue de la violence dans le lieu de travail, conformément au Code canadien du travail, partie II, et plus précisément aux termes de la partie XX du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail.

Le paragraphe 208(2) de la LRTSPF expose les réserves suivantes sur le droit d’un employé à présenter un grief individuel :

Réserve

(2) Le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel si un recours administratif de réparation lui est ouvert sous le régime d’une autre loi fédérale, à l’exception de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Compte tenu de ceci, le grief que vous avez présenté le 5 janvier 2016 ne peut être accepté par l’employeur. Toutefois, il existe d’autres mesures à votre disposition […]

[Les trois autres mesures de redressement sont alors exposées.]

[20]  La décision a été présentée dans une lettre datée du 12 avril 2016, dont les parties pertinentes sont rédigées ainsi :

[traduction]

La présente est en réponse à votre grief présenté le 5 janvier 2016, dans lequel vous déclarez que les actes de votre supérieur immédiat constituent de la violence dans le lieu de travail conformément à la partie XX du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail.

Dans le but de vous aider à résoudre les préoccupations que vous avez soulevées dans votre grief, les représentants des ressources humaines ont, à la fois verbalement et par écrit, discuté de toutes les mesures de redressement qui sont à votre disposition, ainsi que d’autres mesures pour résoudre vos préoccupations. Étant donné votre choix de poursuivre une plainte de violence dans le lieu de travail, vos préoccupations sont examinées dans le cadre de ce processus.

[…]

À la lumière des dispositions du paragraphe 208(2) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral (LRTSPF), je n’ai pas d’autres choix que de rejeter votre grief. Il n’y aura pas de suite à votre demande de mesures de redressement et le bien-fondé de votre grief, tel qu’il a été présenté, ne sera pas examiné dans le cadre du processus de grief puisqu’il sera examiné dans le cadre du processus de plainte de violence dans le lieu de travail conformément à la partie XX du Règlement sur la santé et la sécurité au travail.

A.  La note d’information

[21]  Avant de rendre la décision, la SMA avait reçu une note d’information. Cette note faisait le résumé de la question, y compris les allégations particulières et les mesures de redressement que M. Chickoski demandait. Elle exposait également, en abrégé, l’ordre chronologique des événements à partir d’un incident qui a eu lieu en juin 2015 pendant une réunion du personnel au cours de laquelle M. Brander a fait un commentaire inapproprié. La note se termine en prenant acte de la réception d’un courriel daté du 18 mars 2016 de M. Chickoski au sous-ministre présentant le grief directement au dernier palier, courriel qui a ensuite été envoyé à la SMA en sa qualité d’autorité déléguée.

[22]  La note d’information indique également que M. Chickoski attendait de rencontrer la SMA pour discuter de son grief et que le processus de plainte de violence dans le lieu de travail était en cours. Diverses considérations ont été exposées, y compris un résumé du paragraphe 208(2) de la LRTSPF et une section intitulée [traduction] « Distinctions importantes sur la procédure relative à une plainte de violence dans le lieu de travail ».

[23]  En pièce jointe à la note d’information, il y avait des points de discussion sur la prochaine étape du processus – une rencontre avec M. Chickoski – ainsi qu’une ébauche de réponse rejetant le grief si la SMA était d’accord avec cette recommandation.

[24]  La note d’information indiquait ceci :

[traduction]

[L]’employeur soutient que le grief est prescrit par la loi. Le grief doit être rejeté et le bien-fondé ne doit pas être abordé.

[25]  Selon l’aperçu chronologique, cette position semble provenir du Secrétariat du Conseil du Trésor. L’entrée du 20 janvier 2016 dans la note d’information indique ce qui suit :

[traduction]

Le 20 janvier 2016 : le représentant de l’employeur du SCT a été consulté concernant le grief. Le SCT fait valoir que le grief et la plainte de violence dans le lieu de travail qui concerne la même question seraient prescrits par la loi conformément au paragraphe 208(2) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, et doivent être rejetés. Un grief ne peut être présenté si un recours administratif de réparation est prévu sous le régime d’une autre loi fédérale.

[26]  Le 8 avril 2016, avant que la décision ne soit envoyée à M. Chickoski, une conversation téléphonique a eu lieu entre M. Chickoski et la SMA. Lorsqu’on lui a demandé de préciser son grief, M. Chickoski a refusé de le faire étant donné qu’il n’était pas en présence de son représentant – M. Chickoski avait compris que ce devait être une discussion non officielle.

IV.  Questions en litige et norme de contrôle

A.  Questions en litige

[27]  Il n’est pas contesté que les questions en litige à examiner sont les suivantes :

  1. La décision a-t-elle été rendue de manière inéquitable sur le plan procédural?

  2. Si la décision était contraire à l’équité procédurale, était-elle raisonnable?

[28]  M. Chickoski soutient que la procédure employée pour en arriver à la décision était inéquitable à son égard sur le plan procédural. Il présente deux motifs pour son allégation : (1) il n’a pas eu l’occasion d’être entendu avant que la décision ait été rendue; (2) avant que la décision ait été rendue, il n’a pas eu connaissance de la note d’information sur laquelle la SMA s’appuie pour en arriver à la décision. Il fait valoir que l’occasion de pouvoir présenter des réponses aux questions soulevées dans la note d’information lui a été refusée.

[29]  M. Chickoski prétend que la décision est déraisonnable parce que les redressements demandés dans le grief ne peuvent être accordés dans le cadre de la partie XX du Règlement SST et, par conséquent, il n’y avait pas de « recours administratif de réparation » dont il pouvait se prévaloir comme le précise le paragraphe 208(2) de la LRTSPF.

B.  La norme de contrôle

[30]  Il n’est pas contesté que la norme de contrôle du bien-fondé de la décision, qui est une décision au dernier palier d’un grief individuel, est la norme de la décision raisonnable : Spencer c Canada (Procureur général), 2010 CF 33, aux paragraphes 23 à 32, 360 FTR 251, cité dans Price c Canada (Procureur général), 2015 CF 696, au paragraphe 31 [Price].

[31]  De même, il n’est pas contesté que la norme de contrôle pour les questions d’équité procédurale est la norme de la décision correcte : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43, [2009] 1 RCS 339; Price, au paragraphe 31. Le procureur général, citant Bergeron c Canada (Procureur général), 2015 CAF 160, 474 NR 366 [Bergeron], ajoute que la Cour d’appel fédérale a récemment indiqué que le droit n’est pas encore fixé en ce qui concerne la norme de contrôle pour l’équité procédurale et qu’il fallait faire preuve d’une certaine retenue.

V.  Dispositions législatives applicables

[32]  Des dispositions pertinentes extraites de la LRTSPF et de la partie XX du règlement SST sont exposées ci-dessous pour en faciliter la référence.

[33]  L’article 208 de la LRTSPF aborde les griefs individuels qui peuvent être présentés par un fonctionnaire. Dans le cadre de la présente demande, la partie la plus pertinente de l’article 208 est le paragraphe 208(2). Pour éclairer le contexte, les parties pertinentes du paragraphe 208(1) et le paragraphe 208(2) en entier sont reproduits :

Griefs individuels

Présentation

Droit du fonctionnaire

208 (1) Sous réserve des paragraphes (2) à (7), le fonctionnaire a le droit de présenter un grief individuel lorsqu’il s’estime lésé :

a) par l’interprétation ou l’application à son égard :

(i) soit de toute disposition d’une loi ou d’un règlement, ou de toute directive ou de tout autre document de l’employeur concernant les conditions d’emploi,

b) par suite de tout fait portant atteinte à ses conditions d’emploi.

Réserve

(2) Le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel si un recours administratif de réparation lui est ouvert sous le régime d’une autre loi fédérale, à l’exception de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

 

Individual Grievances

Presentation

Right of employee

208 (1) Subject to subsections (2) to (7), an employee is entitled to present an individual grievance if he or she feels aggrieved

(a) by the interpretation or application, in respect of the employee, of

(i) a provision of a statute or regulation, or of a direction or other instrument made or issued by the employer, that deals with terms and conditions of employment, or

(b) as a result of any occurrence or matter affecting his or her terms and conditions of employment.

Limitation

(2) An employee may not present an individual grievance in respect of which an administrative procedure for redress is provided under any Act of Parliament, other than the Canadian Human Rights Act.

[34]  La partie XX du Règlement SST contient des dispositions détaillées pour aborder la prévention de la violence dans le lieu de travail. La présente demande concernait principalement la définition de la violence dans le lieu de travail à l’article 20.2; toutefois, l’article 20.9, qui décrit le rôle de la personne compétente responsable d’enquêter sur les plaintes de violence dans le lieu de travail, expose comment les deux parties peuvent nommer une personne compétente et définir le rôle de celle-ci :

PARTIE XX

Prévention de la violence dans le lieu de travail

Interprétation

20.1 L’employeur qui s’acquitte des obligations qui lui sont imposées par la présente partie consulte le comité d’orientation ou, à défaut, le comité local ou le représentant, avec la participation du comité ou du représentant en cause.

20.2 Dans la présente partie, constitue de la violence dans le lieu de travail tout agissement, comportement, menace ou geste d’une personne à l’égard d’un employé à son lieu de travail et qui pourrait vraisemblablement lui causer un dommage, un préjudice ou une maladie.

Notification et enquête

20.9 (1) Au présent article, personne compétente s’entend de toute personne qui, à la fois:

a) est impartiale et est considérée comme telle par les parties;

b) a des connaissances, une formation et de l’expérience dans le domaine de la violence dans le lieu de travail;

c) connaît les textes législatifs applicables.

(2) Dès qu’il a connaissance de violence dans le lieu de travail ou de toute allégation d’une telle violence, l’employeur tente avec l’employé de régler la situation à l’amiable dans les meilleurs délais.

(3) Si la situation n’est pas ainsi réglée, l’employeur nomme une personne compétente pour faire enquête sur la situation et lui fournit tout renseignement pertinent qui ne fait pas l’objet d’une interdiction légale de communication ni n’est susceptible de révéler l’identité de personnes sans leur consentement.

(4) Au terme de son enquête, la personne compétente fournit à l’employeur un rapport écrit contenant ses conclusions et recommandations.

(5) Sur réception du rapport d’enquête, l’employeur :

a) conserve un dossier de celui-ci;

b) transmet le dossier au comité local ou au représentant, pourvu que les renseignements y figurant ne fassent pas l’objet d’une interdiction légale de communication ni ne soient susceptibles de révéler l’identité de personnes sans leur consentement;

c) met en place ou adapte, selon le cas, les mécanismes de contrôle visés au paragraphe 20.6(1) pour éviter que la violence dans le lieu de travail ne se répète.

PART XX

Violence Prevention in the Work Place

Interpretation

20.1 The employer shall carry out its obligations under this Part in consultation with and the participation of the policy committee or, if there is no policy committee, the work place committee or the health and safety representative.

20.2 In this Part, “work place violence” constitutes any action, conduct, threat or gesture of a person towards an employee in their work place that can reasonably be expected to cause harm, injury or illness to that employee.

Notification and Investigation

20.9 (1) In this section, competent person means a person who

(a) is impartial and is seen by the parties to be impartial;

(b) has knowledge, training and experience in issues relating to work place violence; and

(c) has knowledge of relevant legislation.

(2) If an employer becomes aware of work place violence or alleged work place violence, the employer shall try to resolve the matter with the employee as soon as possible.

(3) If the matter is unresolved, the employer shall appoint a competent person to investigate the work place violence and provide that person with any relevant information whose disclosure is not prohibited by law and that would not reveal the identity of persons involved without their consent.

(4) The competent person shall investigate the work place violence and at the completion of the investigation provide to the employer a written report with conclusions and recommendations.

(5) The employer shall, on completion of the investigation into the work place violence,

(a) keep a record of the report from the competent person;

(b) provide the work place committee or the health and safety representative, as the case may be, with the report of the competent person, providing information whose disclosure is not prohibited by law and that would not reveal the identity of persons involved without their consent; and

(c) adapt or implement, as the case may be, controls referred to in subsection 20.6(1) to prevent a recurrence of the work place violence.

VI.  La décision a-t-elle été rendue de manière inéquitable sur le plan procédural?

A.  N’y avait-il pas d’occasion d’être entendu?

[35]  M. Chickoski reconnaît qu’il a participé à ce qu’il dit être une conversation non officielle au téléphone avec la SMA avant que la décision ne soit rendue. Il affirme qu’on lui a dit qu’une discussion non officielle ne faisait pas partie du processus de grief. Il a déclaré avoir indiqué à ce moment-là qu’il n’était pas à l’aise pour préciser son grief parce qu’il n’avait pas de représentant avec lui, étant donné la nature non officielle de la conversation. Il a indiqué ne pas avoir eu l’occasion de faire des observations concernant l’interprétation du paragraphe 208(2).

[36]  M. Chickoski a dit que, parce que la décision a été rendue immédiatement après cette discussion non officielle, il n’a pas eu l’occasion d’être entendu et que, quoi qu’il en soit, la décision avait déjà été prise étant donné le contenu de la note d’information indiquant que le grief devait être rejeté.

[37]  Le procureur général affirme que M. Chickoski a eu l’occasion d’être entendu et a profité de cette occasion. Le dossier présenté devant la SMA compte un certain nombre d’observations et de courriels qui ont été échangés.

[38]  À propos d’une audience en personne, le procureur général cite Hegel c Canada (Procureur général), 2009 CF 329, au paragraphe 35, 352 FTR 22 [Hagel], pour proposer qu’aucune disposition ne donne lieu à une obligation de tenir une audience en personne et que l’intensité de l’obligation d’équité procédurale rattachée à une décision administrative se situait au bas de l’échelle.

B.  Était-il inéquitable sur le plan procédural de ne pas divulguer la note d’information avant que la décision ne soit prise?

[39]  Selon la décision Price, M. Chickoski allègue que lorsqu’une décision est prise en s’appuyant sur des documents et du matériel qui n’ont pas été divulgués à la personne concernée par la décision, il s’agit d’une violation du principe de l’équité procédurale. M. Chickoski ne savait pas à quelles attentes répondre pour présenter sa cause, parce que la note d’information ne lui avait jamais été divulguée.

[40]  M. Chickoski conteste également que la décision avait été prise avant la conversation téléphonique non officielle. De plus, la décision est tirée textuellement de la note d’information, qui considérait le grief prescrit par la loi et ordonnait de le rejeter.

[41]  Le procureur général précise que la décision Hagel établit que, lors de l’examen d’un grief au dernier palier, l’obligation d’équité procédurale se situe au bas de l’échelle. Par conséquent, M. Chickoski n’a pas eu la possibilité sur le plan procédural de commenter ou de consulter la note d’information préparée pour la SMA. Le procureur général cite également plusieurs décisions, y compris Agaou c Canada (Procureur général), 2015 CAF 29, [2016] 1 RCF 322, pour dire que le rapport d’une analyste qui ne fait état d’aucun élément matériel nouveau ne donne pas au demandeur le droit de fournir ses commentaires. Quoi qu’il en soit, si la SMA avait été en désaccord avec le rapport, elle aurait été libre de prendre une décision différente.

C.  Discussion

[42]  Le juge Stratas de la Cour d’appel fédérale a affirmé que le droit n’est pas encore « fixé » et « [n]ous sommes donc en présence d’une jurisprudence confuse » concernant la norme de contrôle à appliquer aux questions d’équité procédurale : Bergeron, aux paragraphes 67 et 71. Selon moi, étant donné la jurisprudence citée ci-dessous, la procédure suivie par la SMA était équitable envers M. Chickoski. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’aborder la « confusion ».

[43]  Essentiellement, M. Chickoski a indiqué qu’il ne savait pas à quelles attentes répondre pour présenter sa cause et qu’il n’avait pas pu faire valoir son point de vue. S’il en avait eu l’occasion, il aurait fourni des arguments supplémentaires.

[44]  Un examen du dossier confirme la position du procureur général et indique que les considérations exposées dans la note d’information et le motif du rejet du grief ont été transmis à M. Chickoski à plusieurs reprises avant que la décision soit prise. En fait, il a répondu en faisant valoir sa position plus d’une fois. À l’audience, l’avocat pour M. Chickoski a dit qu’il n’a pas fait d’observations concernant l’application du paragraphe 208(2) du Règlement SST, mais il est clair qu’il a été informé de cette position pour la première fois lorsqu’il a reçu le courriel du 22 janvier 2016 qui rejette son grief. Cela lui a encore été confirmé de nouveau le 26 février 2016 lorsque son grief n’a pas été entendu [traduction] « parce qu’il concerne des allégations pour lesquelles un autre processus administratif de réparation est prévu sous le régime du Code canadien du travail, partie II ».

[45]  En ce qui a trait à la note d’information, M. Chickoski a cité la décision Price pour dire que la décision devrait être annulée parce qu’elle ne lui avait pas été divulguée. Toutefois, dans la décision Price, la décision relative au grief a été annulée parce qu’elle s’appuyait sur des éléments de preuve qui n’avaient jamais été divulgués auparavant au plaignant, lesquels, dans le cas contraire, auraient pu changer l’approche du grief. En l’espèce, la note d’information donne un aperçu des allégations en cause, expose les mesures de réparation que demande M. Chickoski et donne une liste chronologique des événements, y compris la correspondance. La note d’information ne contenait aucune nouvelle information, ni nouvelle position ou nouveau raisonnement dont M. Chickoski n’avait pas eu connaissance.

[46]  Plusieurs courriels montrent que M. Chickoski connaissait les motifs du rejet de son grief et les raisons pour lesquelles il a été finalement rejeté. M. Chickoski a déposé son grief le 5 janvier 2016. Le 22 janvier 2016, il a reçu un courriel de M. Lawrence, à titre de décideur de premier palier, déclarant que son grief ne pouvait être accepté et indiquant l’existence de trois autres mesures de réparation dont il pouvait se prévaloir. Dans un courriel en date du 1er février 2016, M. Chickoski a répondu ce qui suit :

[traduction]

Je ne suis pas d’accord avec la conclusion que je ne peux pas poursuivre à la fois mon grief et ma plainte de violence dans le lieu de travail conformément à la partie XX du Règlement sur la santé et la sécurité au travail, étant donné qu’aux termes de la plainte de violence dans le lieu de travail, je ne peux pas obtenir la mesure de réparation que je demande dans mon grief ni d’ailleurs aucune autre réparation.

[47]  Le 7 mars 2016, après réception du courriel du 26 février 2016 confirmant que son grief ne se poursuivait pas, M. Chickoski a envoyé d’autres observations par courriel :

[traduction]

L’essentiel de mon grief comprend des réparations demandées pour traiter la mesure disciplinaire déguisée sinon explicite qui a entraîné à mon égard une sanction pécuniaire. Ces réparations sont une partie essentielle du grief. La plainte de violence dans le lieu de travail ne m’accordera pas des réparations réelles et bénéfiques pour redresser cette partie essentielle du grief ni d’ailleurs aucune autre réparation. Il n’y a pas de bien-fondé pour l’application du paragraphe 208(2) de la Loi sur les relations de travail et le secteur public fédéral par Santé Canada et la décision qui m’a été communiquée le 26 février n’est pas satisfaisante.

C’est pour ces motifs que je vais donc présenter mon grief au prochain palier du processus de grief.

[48]  Le courriel du 7 mars 2016 faisait partie d’un échange de courriels adressés au sous-ministre le 9 mars 2016. Selon la note d’information, le courriel du 7 mars a ensuite été envoyé par le sous-ministre à la SMA en tant qu’autorité déléguée. Bien que les présentations de M. Chickoski n’aient pas été précisément exposées dans la note d’information, elles avaient été clairement présentées à la SMA par l’entremise de l’échange de courriels qui constitue la pièce 6 de l’affidavit du 19 mai 2016 de M. Chickoski.

[49]  Par conséquent, selon moi, M. Chickoski connaissait les arguments qu’il devait présenter dès le 22 janvier 2016. Il a fait des observations en ce qui a trait au paragraphe 208(2) au moins à deux occasions. Ces observations étaient connues de la SMA. À cet égard, le processus était équitable sur le plan procédural. Cela est particulièrement le cas étant donné qu’il n’a pas droit à une audience en personne : Hagel, au paragraphe 35.

[50]  En pièce jointe à la note d’information se trouvait une ébauche de réponse proposée. La SMA a adopté l’ébauche de réponse sans la modifier et l’a émise comme étant la décision.

[51]  M. Chickoski n’a pas déterminé les arguments qu’il aurait fait valoir s’il avait reçu la note d’information avant que la décision n’ait été rendue. Il n’a pas non plus décelé quoi que ce soit dans la note d’information dont il n’était pas déjà au courant. Comme pour la décision Hagel, la note d’information présentée à la SMA résumait fidèlement le contexte du différend. Les arguments présentés par M. Chickoski avaient déjà été présentés à la SMA comme il est noté ci-dessus. Sa première observation était qu’il n’avait pas eu l’occasion de présenter des réponses au regard du paragraphe 208(2). Toutefois, M. Chickoski a exposé ses motifs de désaccord avec l’interprétation du ministère quant au paragraphe 208(2) de la LRTSPF et a exprimé son opinion que le Règlement SST ne fournit pas [traduction] « des réparations réelles et bénéfiques pour aborder sa plainte de violence dans le lieu de travail ».

[52]  Pour les mêmes motifs exposés ci-dessus, à savoir si M. Chickoski avait eu l’occasion d’être entendu et s’il connaissait les attentes par rapport à son cas, je ne suis pas arrivée à la conclusion qu’il y avait quoi que ce soit dans la note d’information qui a fait en sorte que la décision ait été rendue de manière inéquitable sur le plan procédural envers M. Chickoski.

[53]  J’en viens maintenant à la question de savoir si la décision était raisonnable.

VII.  La décision était-elle raisonnable?

[54]  Les qualités d’une décision sont bien connues : une décision est raisonnable si le processus décisionnel est justifié, transparent et intelligible et si la décision rendue appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit : Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47, [2008] 1 RCS 190 [Dunsmuir].

[55]  Dans le cadre d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, les motifs fournis par les décideurs doivent être examinés avec la conclusion. Bien que tous les arguments ou les détails n’aient pas à être documentés, les motifs devraient démontrer si la conclusion fait partie des issues possibles et acceptables. Essentiellement, les motifs devraient permettre à la Cour de révision de comprendre les motifs donnés à l’appui d’une décision et déterminer si elle appartient aux issues possibles acceptables. Si les motifs permettent cette analyse, les critères de l’arrêt Dunsmuir ont été remplis : Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, aux paragraphes 12 et 13, [2011] 3 RCS 708 [Nfld Nurses].

A.  Observations de M. Chickoski

[56]  M. Chickoski soutient que la décision comprend une conclusion implicite selon laquelle le Règlement SST lui offre une mesure de réparation. Il déclare que cette conclusion n’est pas raisonnable parce que le Règlement SST ne fournit aucune mesure de réparation personnelle; ces mesures sont conçues pour prévenir des récidives de violence dans le lieu de travail.

[57]  Le Règlement SST n’aborde que les préoccupations institutionnelles liées au lieu de travail. Il n’y a pas de droit de réparation à l’intention des plaignants. Lorsqu’un employeur reçoit le rapport et les recommandations d’une personne compétente déléguée pour enquêter la plainte de violence dans le lieu de travail, l’employeur doit adopter ou systématiquement mettre en œuvre des mesures de contrôle pour éliminer la violence et en prévenir la récidive. L’avocat de M. Chickoski compare le Règlement SST à un tigre édenté, puisque le processus n’oblige ni le plaignant, ni le défendeur, ni aucun des témoins à y participer.

[58]  Les réparations principales que demande M. Chickoski dans le cadre de son grief comprennent l’annulation du plan d’action et une compensation financière pour détresse psychologique subie. Ces réparations ne peuvent être accordées dans le cadre de la partie XX du Règlement SST. Ce fait a été exposé dans la note d’information qui détermine les différences suivantes entre le processus de grief et la procédure prévue à la partie XX du Règlement SST :

[traduction]

Distinctions importantes relativement à la procédure de plainte de violence dans le lieu de travail :

  Le plaignant n’a pas droit à une copie du rapport d’enquête;

  Pour y participer, toutes les parties doivent être d’accord que leurs identités soient divulguées à l’enquêteur et dans le rapport;

  Il n’y a pas de disposition prévoyant une réparation pour le plaignant.

[59]  M. Chickoski soutient que le fait d’accepter l’interprétation du paragraphe 208(2) de la LRTSPF mise en évidence dans la décision implique que les fonctionnaires victimes de violence et qui le rapportent aux termes de la partie XX seraient encore plus vulnérables parce qu’ils perdraient leur droit au grief conformément à la LRTSPF. En d’autres mots, si un fonctionnaire qui a été traité injustement dépose un grief et que le grief est accepté, alors l’employeur aura peut-être à indemniser ce fonctionnaire pour le traitement injuste. Mais si le même fonctionnaire est victime de la même injustice, mais qu’elle se définit comme de la violence dans le lieu de travail, alors en utilisant la présente interprétation du paragraphe 208(2), le fonctionnaire n’aurait aucun recours pour demander une compensation pour ce qui s’est passé s’il présente également un avis conformément à la partie XX du Règlement SST.

B.  Observations du procureur général

[60]  Le procureur général répond que le type de réparation ouverte dans le cadre de la partie XX du Règlement SST provient des conclusions et des recommandations effectuées par la personne compétente. L’avocat dit que la recommandation possible pourrait être l’annulation du plan d’action. Les recommandations obtenues seraient également abordées par un comité d’orientation, le comité local ou un représentant de santé et de sécurité, aux termes de l’article 20.1 et de l’alinéa 20.9(5)b) du Règlement SST.

[61]  De plus, lorsque l’enquête est terminée, l’employeur devra adapter le lieu de travail ou mettre en œuvre des mesures de contrôle pour prévenir la récidive de la violence dans le lieu de travail. Ces mesures de contrôle doivent être mises en œuvre dès que possible et au plus tard quatre-vingt-dix jours suivant le jour où le risque de violence dans le lieu de travail a été évalué. Après avoir mis en œuvre les mesures de contrôle, l’employeur doit établir les procédures pour le suivi et les mesures correctives. Le Code canadien du travail et le Règlement SST fournissent des réponses faites sur mesure pour répondre aux allégations de violence dans le lieu de travail, y compris un processus administratif qui protège la confidentialité de l’identité des personnes concernées.

[62]  Le procureur général note que dans l’arrêt Canada (Procureur général) c Alliance de la fonction publique du Canada, 2015 CAF 273, [2016] 3 RCF 33 [AFPC], le juge de Montigny a examiné l’article 20.9 du Règlement SST et a conclu que la partie XX est réparatrice et est conçue pour donner une solution de réparation aux fonctionnaires qui ont été victimes de violence dans le lieu de travail, dans le but que la situation soit abordée de manière appropriée par leur employeur. Par conséquent, il existe une procédure administrative de réparation qui est prévue aux termes d’une loi fédérale et par conséquent, permettre un processus de grief sur le bien-fondé serait contraire au paragraphe 208(2) de la LRTSPF.

[63]  Quant au caractère adéquat de la réparation fournie, le procureur général soutient que la Cour d’appel fédérale a déterminé que, si une procédure administrative de réparation est à la disposition d’un plaignant, ce processus doit être utilisé tant et aussi longtemps qu’il consiste en une véritable mesure de réparation. Il n’est pas nécessaire qu’il s’agisse d’un recours égal ou supérieur tant qu’il traite la plainte de manière raisonnable et efficace quant au fond du grief du fonctionnaire : Mohammed c Canada (Conseil du Trésor); Canada (Procureur général) c Boutilier; O’Hagan c Canada (Procureur général), [2000] 3 CF 27, au paragraphe 23, 181 DLR (4th) 590 (CA) [Boutilier].

[64]  De même, le procureur général cite une décision de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la Commission), concernant une plainte de santé et de sécurité d’un groupe d’employés d’un centre d’appel qui, entre autres réparations, demandaient une compensation au moyen du remboursement des congés de maladie. La Commission devait tenir compte du caractère « véritable et avantageux » du recours offert aux plaignants aux termes du Code canadien du travail étant donné qu’il ne prévoit pas de réparations potentielles. S’appuyant sur la décision Boutilier, la Commission a conclu que le processus de réparation pouvait aborder réellement et efficacement l’essentiel du grief. La Commission s’est appuyée sur le passage qui indiquait que « le recours administratif [est] différent, même s’il s’agit d’une “réparation moindre”, il n’en demeure pas moins un recours » : Alliance de la Fonction publique du Canada c Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2012 CRTFP 84, aux paragraphes 35 et 38.

[65]  L’argument du procureur général se résume ainsi :

[traduction]

[L]es questions soulevées dans le grief de M. Chickoski sont abordées sous le régime d’une loi conçue pour répondre aux allégations de violence dans le lieu de travail. Il s’agit de son recours administratif. Autrement, des décisions pour les mêmes questions risqueraient d’être rendues dans le cadre de différents tribunaux, augmentant le risque d’incohérence dans les décisions et qu’elles soient contraires au principe du caractère définitif.

[66]  Le procureur général l’énonce clairement. Le grief comprenait une plainte en réaction à la violence dans le lieu de travail à la suite de l’imposition du plan d’action. Le Règlement SST prescrit la procédure administrative de réparation qui est prévue dans le Code canadien du travail. Par conséquent, comme il est indiqué au paragraphe 208(2) de la LRTSPF, une procédure administrative de réparation est fournie dans le cadre d’une autre loi fédérale, autre que la Loi canadienne des droits de la personne. Ce qui veut dire que M. Chickoski ne peut pas présenter un grief individuel.

C.  Discussion

[67]  La définition de violence dans le lieu de travail se trouve à l’article 20.2 du Règlement SST.

20.2 Dans la présente partie, constitue de la violence dans le lieu de travail tout agissement, comportement, menace ou geste d’une personne à l’égard d’un employé à son lieu de travail et qui pourrait vraisemblablement lui causer un dommage, un préjudice ou une maladie.

20.2 In this Part, “work place violence” constitutes any action, conduct, threat or gesture of a person towards an employee in their work place that can reasonably be expected to cause harm, injury or illness to that employee.

1)  Il n’y a eu aucun examen pour établir que les allégations constituaient de la violence dans le lieu de travail

[68]  La manière dont un employeur doit traiter une allégation de violence dans le lieu de travail a été examinée par le juge de Montigny dans l’arrêt AFPC lorsqu’il a considéré si un employeur pouvait rejeter des plaintes qu’il considère comme non reliées à la violence dans le lieu de travail. Le juge de Montigny a noté que ce qu’un employé caractérise comme étant de la violence dans le lieu de travail n’est pas évident. Un employeur peut examiner une plainte en vue d’établir si, à première vue, les actes allégués correspondent à la définition de violence dans le lieu de travail. Pour y arriver, un employeur doit décider si le comportement particulier allégué était suffisamment grave dans les circonstances pour constituer de la violence dans le lieu de travail ou si la plainte est manifestement vexatoire ou frivole : AFPC, aux paragraphes 33 et 35.

[69]  Selon moi, avant de s’appuyer sur les dispositions du paragraphe 208(2) de la LRTSPF pour conclure qu’il n’y avait [traduction] « aucun autre choix que de rejeter le grief » et faire en sorte que la plainte soit instruite conformément à la partie XX du Règlement SST, la SMA aurait dû examiner la nature du grief déposé par M. Chickoski pour décider si ce grief permettait d’établir de la violence dans le lieu de travail. Le seuil pour arriver à une telle conclusion est très bas : AFPC, au paragraphe 34.

[70]  Il n’y a aucune preuve au dossier qu’un représentant de Santé Canada a effectué un examen des allégations de M. Chickoski pour voir si les actes de M. Brander pouvaient se caractériser ou non comme de la violence dans le lieu de travail conformément à la partie XX du Règlement SST. Il n’y a aucune preuve qu’un examen a été effectué pour déterminer si les allégations étaient frivoles ou s’il était manifeste et évident que les allégations constituaient de la violence dans le lieu de travail. Cette omission est importante. Sans avoir d’abord effectué un tel examen préliminaire, il n’est pas possible de conclure que les dispositions du paragraphe 208(2) de la LRTSPF s’appliquent à la présente situation. Si les allégations ont été examinées et il a été conclu qu’elles ne dépassent pas le seuil exposé dans l’arrêt AFPC, alors il n’y aurait aucune procédure administrative de réparation fournie aux termes d’une loi fédérale, étant donné qu’il n’y avait pas de violence dans le lieu de travail. Dans cette éventualité, le grief pourrait être instruit.

[71]  Un tel examen n’a pas à être exhaustif, mais la SMA aurait dû se pencher sur la question. Dans son grief, M. Chickoski a fourni des exemples précis des actes de M. Brander qui, selon ce qu’il allègue, constituait de la violence dans le lieu de travail et du harcèlement. Par exemple, traiter quelqu’un d’idiot devant les membres de son personnel ne semble-t-il pas être de l’intimidation psychologique à première vue? Suggérer à une personne de changer d’accompagnateur auprès de la haute direction de longue date ressemble-t-il à du harcèlement? Aucun de ces événements ne pourrait-il pas individuellement ou ensemble causer du tort, des blessures ou une maladie au fonctionnaire? Sinon, y avait-il d’autres événements, comme la création et la mise en œuvre du plan d’action ou les mots utilisés pour critiquer le plaignant pendant les rencontres bilatérales, qui auraient été suffisants d’un point de vue cumulatif pour inciter une enquête par une personne compétente afin de déterminer si les actes reprochés constituaient de la violence dans le lieu de travail?

[72]  Je ne suggère pas que les allégations présentées devant moi dépassent ou ne dépassent pas le seuil. Ce que je dis est que le fait de rejeter le grief de M. Chickoski lui occasionne des conséquences sérieuses. M. Chickoski a indiqué à son employeur qu’aucune réparation ne lui était personnellement ouverte et que la note d’information faisait état des distinctions en la matière. Dans ces circonstances, la SMA devait considérer si les allégations pouvaient constituer de la violence dans le lieu de travail.

[73]  Le fait que la SMA n’a pas examiné la possibilité que les allégations puissent raisonnablement causer du tort, des blessures ou une maladie à M. Chickoski n’est qu’une partie de la discussion sur le caractère raisonnable de la décision. Il y a des questions similaires dans le cadre de la discussion dans la décision quant à savoir de quel type de réparation, le cas échéant, pouvait se prévaloir M. Chickoski.

2)  La partie XX du Règlement SST fournit-elle un recours administratif de réparation?

[74]  Au cœur du litige entre les parties se trouve la question de savoir si le processus de plainte en réaction à la violence dans le lieu de travail exposé dans la partie XX du Règlement SST peut offrir une réparation à M. Chickoski.

[75]  M. Chickoski soutient qu’aucun des recours qu’il demande ne lui est offert dans le cadre de la procédure de la partie XX, étant donné que personne ne doit y participer et que l’employeur n’a qu’à mettre en œuvre des modifications systémiques pour prévenir la récidive de violence. M. Chickoski souligne en particulier qu’aucune réparation personnelle ne lui est offerte dans un tel processus. Le procureur général argumente que les réparations qui sont disponibles peuvent aborder la question sous-jacente de la violence dans le lieu de travail. Le procureur général fait également valoir qu’une enquête peut recommander l’annulation du plan d’action.

a)  La jurisprudence

[76]  Dans l’arrêt Byers Transport Ltd. c Kosanovich, [1995] 3 RCF 354, 126 DLR (4th) 679 (CA) [Byers Transport], le juge Strayer a tenu compte de l’alinéa 242(3.1)b) du Code canadien du travail, qui limite la compétence de l’arbitre à procéder à l’instruction de la plainte quand « la présente loi ou une autre loi fédérale prévoit un autre recours ». Comme l’indique le procureur général, le juge Strayer a conclu que les réparations découlant des recours ne doivent pas être exactement les mêmes, ni être égales ou supérieures pour que l’arbitre perde la compétence dont il est investi dans l’affaire en question. Fait important, le juge Strayer a ajouté que la procédure en question doit « certainement permettre à la même partie plaignante d’obtenir une véritable réparation » (au paragraphe 39; soulignement ajouté). Ce soulignement n’était pas présent dans l’arrêt Byers Transport, mais a été ajouté par la Cour d’appel fédérale dans la décision Boutilier (voir Boutilier, au paragraphe 4).

[77]  Dix ans après la publication de la décision Boutilier, la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Johal c Agence du revenu du Canada, 2009 CAF 276, 312 DLR (4th) 663 [Johal], a examiné le paragraphe 208(2) de la LRTSPF. La question soulevée dans l’affaire était de savoir si le paragraphe 208(2) empêchait deux employés de l’Agence du revenu du Canada de présenter des griefs individuels en raison des dispositions de recours prévus à l’article 54 de la Loi sur l’Agence du revenu du Canada, LC 1999, c 17 (LARC), qui prévoit un recours qui les empêchait de présenter des griefs conformément au paragraphe 208(1).

[78]  Dans cet arrêt, le juge Evans se fait l’écho d’une cour unanime et conclut que le libellé du paragraphe 208(2) était ambigu en anglais, mais que la version française de la disposition résout cette ambiguïté en précisant que « le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel en vertu du paragraphe 208(1) si un recours administratif de réparation lui est ouvert sous le régime d’une autre loi fédérale » : Johal, au paragraphe 34.

[79]  La Cour d’appel fédérale, tant dans l’arrêt Byers Transport que dans l’arrêt Johal, souligne qu’avant d’appliquer le paragraphe 208(2) pour empêcher qu’un grief individuel soit déposé aux termes du paragraphe 208(1), le recours administratif en question doit permettre « à la même partie plaignante d’obtenir une véritable réparation ».

[80]  Dans la décision Boutilier, le juge Linden a ajouté que le recours dans le cadre de l’autre processus administratif n’a pas à fournir une réparation égale ou supérieure, à la condition qu’il traite la plainte « de façon raisonnable et efficace quant au fond du grief de l’employé » : Boutilier, au paragraphe 23.

[81]  Le procureur général indique que le paragraphe 208(2) de la LRTSPF constitue un obstacle non discrétionnaire à l’instruction d’un grief lorsqu’un autre recours est ouvert. Le mot « ouvert » toutefois s’arrête à la nature du recours administratif requis pour supplanter le droit à un grief individuel. Les facteurs désignés dans les décisions Byers Transport, Boutilier et Johal se combinent pour énoncer les principes suivants qui aident à déterminer si une autre procédure administrative relève du paragraphe 208(2) de la LRTSPF :

  l’autre recours administratif de réparation n’a pas à fournir exactement les mêmes réparations;

  les réparations n’ont pas à être égales ou supérieures à celles qu’elles supplantent;

  les différences des réparations administratives, même si ces réparations sont moindres, ne les transforment pas en des non-réparations;

  L’autre recours doit :

(1) traiter la plainte de façon raisonnable et efficace

(2) quant au fond du grief de l’employé;

  Le recours administratif doit :

(1) permettre à la même partie plaignante

(2) d’obtenir une véritable réparation.

[82]  L’argument de M. Chickoski est que la procédure et la réparation prévues dans le Règlement SST ne traitent pas la plainte de façon raisonnable et efficace quant au fond de son grief étant donné que le recours est conçu pour répondre au problème à l’échelle organisationnelle et non sur le plan personnel. Par conséquent, ce recours ne permet pas à la même partie plaignante d’obtenir une véritable réparation.

b)  La SMA n’a pas tenu compte du recours ouvert à M. Chickoski aux termes de la partie XX

[83]  M. Chickoski conteste clairement la procédure en réaction à la violence dans le lieu de travail parce qu’elle ne permet pas de réparation à la partie plaignante. C’est la question principale qu’il a soulevée. Pourtant, la décision ne comporte pas d’analyse ni ne fait référence à la réparation qui lui est ouverte aux termes de la partie XX. La décision indique seulement ce qui suit :

[traduction]

[L]e bien-fondé de votre réclamation [...] sera traité dans le cadre du processus de plainte pour violence dans le lieu de travail conformément à la partie XX du Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail.

[84]  Cela indique au mieux que la SMA a conclu qu’il y a « une véritable réparation à la même partie plaignante » pour M. Chickoski. Malheureusement, il n’y a pas d’analyse qui permet de tirer cette conclusion. Aucun type de véritable réparation pour la même partie plaignante considéré par la SMA à l’égard de M. Chickoski n’est désigné. Le dossier n’indique pas non plus une telle mesure sous-jacente de redressement. Au contraire, la note d’information confirme qu’aux termes de la partie XX, « [i]l n’y a pas de disposition permettant à la même partie plaignante d’obtenir réparation ».

[85]  Une fois que l’employeur a déterminé que les allégations faites par M. Chickoski comprenaient une allégation de violence dans le lieu de travail, il semble qu’il était évident qu’il existait une autre procédure administrative, donc que le paragraphe 208(2) s’appliquait, et que le grief devait être rejeté.

[86]  Il n’est pas clair si la SMA croyait que le Règlement SST fournissait une véritable réparation à la même partie plaignante pour M. Chickoski. Il semble que la SMA a simplement accepté l’ébauche de réponse qui était en pièce jointe à la note d’information sans tenir compte si les dispositions du Règlement SST répondaient de façon raisonnable et efficace quant au fond du grief de M. Chickoski.

[87]  Les motifs sur le bien-fondé de la nature de la réparation ouverte à M. Chickoski aux termes de la partie XX sont complètement absents. Il n’y a ni analyse ni commentaire qui suggèrent que la SMA a tenu compte du paragraphe 208(2) de la LRTSPF dans le contexte des allégations de violence dans le lieu de travail, des réparations demandées par M. Chickoski et du recours employé conformément à la partie XX du Règlement SST. Combiné au fait que l’issue est complètement contraire à la présentation de M. Chickoski et qu’il est clairement indiqué dans la note d’information qu’il n’y a pas de réparation ouverte à M. Chickoski, le raisonnement ne permet pas à M. Chickoski ou à la Cour de comprendre pourquoi la conclusion a été tirée qu’un recours aux termes de la partie XX pouvait permettre à la même partie plaignante, soit M. Chickoski, d’obtenir une véritable réparation.

[88]  Les décisions Boutilier, Byers Transport et Johal exposent la nature du recours administratif et de la réparation requise dans l’autre procédure administrative afin de se conformer au paragraphe 208(2). Le manque d’explication dans la décision de la SMA sur ses motifs pour conclure que la partie XX fournit un recours administratif efficace et raisonnable ne répond pas au critère de l’arrêt Dunsmuir. La décision n’est pas raisonnable.

[89]  Bien que je doute sérieusement que les réparations ouvertes dans le cadre du Règlement SST soient capables de produire une véritable réparation à la même partie plaignante pour M. Chickoski, il n’est pas nécessaire que j’en arrive à cette conclusion. La décision est déraisonnable parce qu’elle est démunie d’analyse. Il est préférable que la SMA effectue cette analyse dans le cadre d’un réexamen avec des observations additionnelles des parties selon ce qu’elle juge approprié.

[90]  La demande est accueillie, la décision est annulée et l’affaire est renvoyée à la SMA ou au SMA en exercice, le cas échéant, pour nouvel examen conformément aux présents motifs.

VIII.  Dépens

[91]  Les parties se sont entendues pour des dépens de 3 900 $ payables à la partie qui a gain de cause. Elles se sont également entendues pour que le procureur général paie à M. Chickoski des dépens de 1 246,30 $ pour la requête instruite par le juge LeBlanc.

[92]  Comme la présente demande et la requête de M. Chickoski ont été accueillies devant le juge LeBlanc, le procureur général doit payer les deux mémoires de dépens immédiatement.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande est accueillie. L’affaire est renvoyée pour nouvel examen conformément aux présents motifs.

  2. Des dépens s’élevant à 3 900 $ pour la demande et la somme de 1 246,30 $ pour la requête rejetée par le juge LeBlanc doivent être payés immédiatement au demandeur.

« E. Susan Elliott »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 25e jour de mai 2020

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-748-16

 

INTITULÉ :

WARD CHICKOSKI c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDITION :

Le 5 décembre 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE ELLIOTT

 

DATE DES MOTIFS :

LE 17 août 2017

 

COMPARUTIONS :

John Paul Zubec

 

Pour le demandeur

 

Zorica Guzina

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kelly Santini, LLP

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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