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Date : 20160727


Dossier : 16-T-19

Référence : 2016 CF 878

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 27 juillet 2016

En présence de monsieur le juge LeBlanc

ENTRE :

GORDON J. MCCANN

demandeur (requérant)

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]               Le demandeur sollicite une prorogation de délai pour déposer une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada [la Division d’appel] datée du 15 décembre 2015. La décision n’a pas accordé au demandeur l’autorisation d’interjeter appel d’une décision de la Division générale dudit Tribunal [la Division générale], datée du 28 mai 2015, dans laquelle sa demande de prestation d’invalidité [demande de PI] en vertu du Régime de pensions du Canada, L.R.C. (1985), ch. C-8 [RPC] a été rejetée.

[2]               La Division d’appel a conclu que l’appel du demandeur de la décision de la Division générale n’avait pas de chance raisonnable de succès. En effet, la Division générale avait précédemment conclu que le demandeur n’avait pas été en mesure de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il souffrait d’une invalidité grave et prolongée, au sens du RPC, au 31 décembre 2011 ou avant cette date, ce qui correspondait à sa période minimale d’admissibilité à une pension d’invalidité. Plus précisément, la Division générale a conclu que le demandeur était en mesure de travailler à cette date et a continué d’exercer un emploi véritablement rémunérateur jusqu’à sa retraite en janvier 2014.

[3]               Le demandeur, qui se représente seul, a tenté, avec l’aide du député de sa circonscription, de déposer son avis de demande de contrôle judiciaire de la décision de la Division d’appel le 25 janvier 2016. En raison d’une directive émise par la Cour le 1er février 2016, le dépôt dudit avis de demande a été refusé au motif qu’il a été reçu en dehors de la période de 30 jours prévue à l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7. Le 31 mai 2016, le demandeur a déposé son avis de requête en prorogation de délai. Le demandeur attribue son non-respect du délai prescrit à la formulation peu claire de la lettre d’accompagnement la décision de la Division d’appel, à la procédure d’envoi par la poste du gouvernement ainsi que les renseignements divergents qu’il a reçus de la part du personnel de la direction du Régime de pension du Canada.

[4]               Il est bien établi que pour que sa requête en prorogation de délai soit accueillie, un demandeur doit démontrer : i) que son intention de poursuivre la demande de contrôle judiciaire sous-jacente était constante; ii) que sa position dans cette instance est bien fondée; iii) que le défendeur ne subit pas de préjudice en raison du délai; iv) qu’il existe une explication raisonnable justifiant le délai (Canada (Procureur Général) c. Hennelly, 1999 CanLII 8190, (FCA), 167 FTR 158, 89 ACWS (3d) 376 [Hennelly]).

[5]               Le défendeur soutient que même si la Cour reconnaît que le demandeur a démontré une intention constante de poursuivre sa demande de contrôle judiciaire, qu’il existe une explication raisonnable justifiant le délai et que le défendeur ne subirait pas de préjudice si la prorogation de délai était accordée, accorder une prorogation de délai en l’espèce ne servirait pas les intérêts de la justice puisque la demande de contrôle judiciaire sous-jacente du demandeur n’est pas fondée et n’a donc aucune chance de succès.

[6]               À cet égard, le défendeur fait valoir que bien qu’il ait été soutenu que l’aspect fondamental du critère à quatre volets de la prorogation de délai est que justice soit rendue entre les parties et que, par conséquent, une prorogation de délai peut parfois être accordée même si l’un des quatre facteurs établis dans Hennelly n’est pas satisfait, la jurisprudence étaye un refus d’accorder une prorogation de délai sur le seul fondement de l’absence d’une cause défendable (voir Maqsood c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 309, aux paragraphes 12 à 14 [Maqsood]). Toutefois, le défendeur reconnaît qu’en définitive, le poids à accorder à chacun des quatre facteurs du critère variera en fonction de chaque cas, conformément à une approche souple et contextuelle (Canada (Procureur général) c. Blondahl, 2009 CF 118, 362 FTR 1, au paragraphe 12).

[7]                Les faits pertinents en l’espèce peuvent être résumés comme suit. La demande de PI a été déposée le 10 novembre 2011, lorsque le demandeur a eu 60 ans. Dans les documents accompagnant la demande de PI, le demandeur a indiqué qu’il continuait de travailler 8 heures par jour, 5 jours par semaine, à un salaire de 29 $ par heure. En janvier 2012, il a commencé à recevoir ses prestations de retraite anticipée du RPC. Le 16 février 2012, la demande de PI a été rejetée par la direction du RPC au motif qu’il n’a pas été jugé que le demandeur ne souffrait pas d’invalidité grave et prolongée, au sens du RCP, puisqu’il travaillait toujours en décembre 2011, dernière date à laquelle il aurait pu être réputé invalide étant donné qu’il a commencé à recevoir ses prestations de retraite anticipée au mois de janvier 2012. Cette décision a été confirmée après un nouvel examen le 20 juillet 2012.

[8]               En novembre 2012, le demandeur a fait appel du rejet de sa demande de PI auprès du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision. Son appel, entendu par la Division générale nouvellement formée, a été rejeté le 28 mai 2015. En réponse à une demande de renseignements supplémentaires de la Division générale, le demandeur a indiqué que son dernier jour de travail était le 31 janvier 2014. Comme indiqué précédemment, la Division générale a conclu que le demandeur ne pouvait pas être considéré comme étant invalide puisqu’il a continué d’exercer un [traduction] « emploi véritablement rémunérateur » en 2012 et 2013, soit deux ans après la dernière date à laquelle il pouvait être considéré être devenu invalide en vertu des règles relatives au RPC.

[9]               Le 28 juillet 2015, le demandeur a demandé l’autorisation d’interjeter appel de la décision de la Division générale auprès de la Division d’appel. Il a soutenu que la Division générale n’a pas tenu compte de la nature prolongée de son invalidité et que si la Division générale l’avait fait, elle aurait conclu que son invalidité était également grave. Il a fait valoir que ses antécédents médicaux ont permis de démontrer que son invalidité était prolongée et qu’elle ne pouvait être prolongée que si elle était également grave. Le demandeur a également soutenu que ses nouveaux dossiers médicaux permettent de démontrer que son état se détériore jour après jour. Enfin, le demandeur a soutenu que la Division générale n’a pas respecté les principes de justice naturelle en se prononçant à tort sur la nature grave et prolongée de son invalidité et en ne reconnaissant pas la gravité de ses problèmes de santé.

[10]           Comme il a été indiqué au début des présents motifs, la Division d’appel a rejeté la demande d’autorisation du demandeur au motif qu’elle n’avait pas de chance raisonnable de succès. Plus précisément, la Division d’appel a conclu que la Division générale n’a ni commis d’erreur de droit ni dérogé aux principes de justice naturelle en ne tenant pas compte de la nature prolongée de l’invalidité, puisque le critère permettant de déterminer l’invalidité est un critère à deux volets. Si un demandeur ne satisfait pas à l’un de ces volets du critère, qui exige que l’invalidité soit à la fois grave et prolongée, il ne remplira pas les conditions relatives à l’invalidité en vertu du RCP. La Division d’appel a également conclu que la Division générale n’a pas commis d’erreur en ne reconnaissant pas que l’invalidité du demandeur se détériore au fil du temps, puisque la Division générale devait déterminer si le demandeur pouvait être déclaré invalide d’ici à la période minimale d’admissibilité (au 31 décembre 2011), rendant ainsi sans importance le fait de déterminer si l’invalidité du demandeur s’est détériorée depuis.

[11]           La question en litige à trancher en l’espèce est de savoir si la demande de contrôle judiciaire du demandeur visant la décision de la Division d’appel est vouée à l’échec et si, par conséquent, la demande de prorogation de délai devrait être rejetée pour ce seul motif, et ce, même si la Cour retient par ailleurs, comme le défendeur, que le demandeur a démontré son intention constante de poursuivre sa procédure de contrôle judiciaire, qu’il y a une explication raisonnable justifiant le délai et que le défendeur ne subirait pas de préjudice si la prorogation de délai est accordée.

[12]           Selon l’article 58 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, L.C. 2005, ch. 34, une autorisation d’interjeter appel de décisions de la Division générale ne peut être accueillie que lorsqu’un demandeur convainc la Division d’appel que son appel a une « chance raisonnable de succès » pour l’un des trois motifs d’appel définis dans cette disposition, soit si : 1) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle; 2) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit; 3) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance (voir aussi : décision Canada (Attorney General) v O’Keefe, 2016 FC 503, aux paragraphes 36 et 37 [O’Keefe]; décision Belo-Alves c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1100, aux paragraphes 71 à 73).

[13]           Cette disposition de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, ainsi que les dispositions du RPC, auxquelles je vais me reporter plus loin dans les présents motifs, sont reproduites en annexe des présents motifs.

[14]           Les décisions de la Division d’appel d’accueillir ou de refuser une autorisation d’interjeter appel sont, pour leur part, susceptibles de révision par la Cour selon la norme de la décision raisonnable (O’Keefe, au paragraphe 17). Cela signifie que la Cour doit faire preuve d’une grande retenue à l’égard de telles décisions et que la Cour n’interviendra que si elles n’appartiennent pas aux issues possibles acceptables au regard des faits et du droit (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 47 [Dunsmuir]).

[15]           Par conséquent, afin de conclure que la demande de contrôle judiciaire du demandeur soulève une cause défendable, je dois conclure qu’il y a un certain fondement à sa déclaration selon laquelle la décision de la Division d’appel de refuser l’autorisation d’interjeter appel de la décision de la Division générale est déraisonnable. Malheureusement pour le demandeur, pour les motifs qui suivent, je ne peux pas conclure que tel est le cas.

[16]           Premièrement, exception faite de son désaccord avec les observations du défendeur selon lesquelles sa demande de contrôle judiciaire n’avait aucune chance de succès et de sa volonté de poursuivre et d’établir le bien-fondé de ses affirmations, le demandeur n’a pas fait état de motifs faisant valoir que sa demande est bien fondée et qu’elle justifie l’intervention de la Cour. Un examen des documents de la requête du demandeur démontre qu’il s’est appliqué à donner une explication raisonnable du retard du dépôt de sa demande de contrôle judiciaire et à démontrer son intention constante de poursuivre la procédure. Toutefois, rien dans ces documents n’explique en quoi la décision de la Division d’appel est erronée. En soi, ceci serait suffisant pour conclure que le demandeur n’a pas été en mesure d’établir le bien-fondé de son dossier, une condition pour accorder l’autorisation de prorogation de délai qu’il sollicite (arrêt Laurendeau c. Canada (Ministère de la citoyenneté et de l’immigration), 2003 CAF 445 au paragraphe 4; arrêt Dompierre c. Daubois inc., 2010 CAF 10, au paragraphe 3).

[17]           Deuxièmement, par suite de l’examen de l’ensemble du dossier devant moi, je conclus, en tout état de cause, que la demande de contrôle judiciaire sous-jacente du demandeur n’a aucune chance de succès sur le fond. En vertu de l’alinéa 42(2)a) du RPC, « une invalidité » est définie comme une invalidité physique ou mentale « grave » (c’est-à-dire si elle « rend la personne à laquelle se rapporte la déclaration régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice ») et « prolongée » (c’est-à-dire qu’elle est déclarée devoir « vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès »). Par conséquent, pour être admissible à la prestation d’invalidité du RPC, le demandeur devait démontrer qu’il souffre d’une invalidité à la fois « grave » et « prolongée », au sens de l’alinéa 42(2)a), au 31 décembre 2011 ou avant.

[18]           Pourquoi à cette date ou avant? Parce qu’aux termes des paragraphes 44(1) et 66.1(1) du RPC, une personne touchant une pension de retraite, comme c’était le cas du demandeur en janvier 2012, n’a pas droit à une prestation d’invalidité et doit, pour remplacer une prestation de retraite par une prestation d’invalidité, cette personne doit être réputée être devenue invalide avant le mois où elle a commencé à toucher sa prestation de retraite. Cette période est également appelée la période minimale d’admissibilité. En l’espèce, cette période était en décembre 2011.

[19]           La preuve non contestée présentée devant la Division générale et la Division d’appel démontre qu’au 31 décembre 2011 ou avant, le demandeur travaillait 40 heures par semaine au taux de 29 $ l’heure et qu’il a continué de travailler en 2012 et en 2013, où il a gagné le maximum des gains non ajustés ouvrant droit à pension, soit 50 100 $ et 51 100 $ respectivement, avant de prendre sa retraite en janvier 2014. Bien que la Division générale ait reconnu que le demandeur a bénéficié de plusieurs adaptations professionnelles en raison de ses limitations physiques (selon le dossier, le demandeur souffre de douleur débilitante, liée à un remplacement du genou, ainsi que d’arthrite aux deux chevilles et aux deux mains, en plus d’avoir lutté contre un cancer de la prostate), elle a conclu en fonction de la preuve qu’au 31 décembre 2011, l’invalidité du demandeur n’était pas « grave » au sens de l’alinéa 42(2)a) puisqu’il exerçait, à ce moment et pendant les deux années ultérieures, un emploi véritablement rémunérateur.

[20]           La Division d’appel n’a vu aucun motif d’interférer avec cette conclusion et je ne vois rien de déraisonnable dans cette décision puisque les observations à la base de la demande d’autorisation d’interjeter appel déposée par le demandeur à la Division d’appel ne sont valides ni en droit ni en fait.

[21]           D’une part, une personne est en droit de recevoir une prestation d’invalidité du RPC si son invalidité est à la fois « grave » et « prolongée ». Ces deux principes, bien que reliés, sont deux éléments distincts de la notion « d’invalidité » telle que définie par le RPC. Une invalidité peut être « grave » mais temporaire, ce qui ne déclenchera pas le droit à une prestation d’invalidité. De la même façon, une invalidité peut être « prolongée » sans être « grave » si la personne à l’égard de qui la décision est rendue demeure, malgré ses limitations, en mesure de poursuivre régulièrement une activité professionnelle véritablement rémunératrice, ce qui, une fois de plus, ne déclenchera pas le droit à une prestation d’invalidité.

[22]           Comme l’a noté la Division d’appel, la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Klabouch c. Canada (Développement social), 2008 CAF 33 [Klabouch] a conclu que ces deux éléments de la définition « d’invalidité » du RCP sont cumulatifs, « de sorte que si un demandeur ne satisfait pas à l’une ou l’autre condition, sa demande de pension d’invalidité en vertu du RPC sera rejetée » (Klabouch, au paragraphe 10). Ainsi, le fait de traiter d’un seul élément du critère et de ne pas rendre de conclusion sur le second, comme l’a fait la Division générale en l’espèce, ne constitue pas une erreur (Klabouch, au paragraphe 10). L’argument du demandeur selon lequel la Division d’appel aurait dû accueillir la demande d’autorisation d’interjeter appel en raison du défaut de la Division générale de tenir compte du volet « prolongée » du critère, puisque la preuve d’une invalidité « prolongée » est nécessairement la preuve d’une invalidité « grave », est donc voué à l’échec. Par conséquent, je suis convaincu que la conclusion de la Division d’appel selon laquelle cet argument n’avait pas de chance raisonnable de succès ne soulève aucune question défendable en contrôle judiciaire puisqu’elle n’est fondée ni en droit ni en fait.

[23]            D’autre part, il n’y a pas d’erreur défendable relativement à la conclusion de la Division générale selon laquelle l’invalidité du demandeur n’est pas « grave » puisqu’au moment de la période minimale d’admissibilité (décembre 2011) et pendant les deux années suivantes, le demandeur exerçait un emploi véritablement rémunérateur. Dans l’arrêt Atkinson c. Canada (Procureur général), 2014 CAF 187, la Cour d’appel fédérale a rappelé que pour constituer une invalidité grave au sens de l’alinéa 42(2)a) du RPC, une personne doit être incapable de poursuivre de façon régulière une activité professionnelle donnant droit à une rémunération substantielle, ce qui signifie qu’une personne doit plutôt être « incapable de détenir pendant une période durable une occupation réellement rémunératrice » (Atkinson, au paragraphe 37). Dans cette affaire, les gains qui s’établissaient de 43 000 $ à 45 000 $ entre 2009 et 2012 ont été considérés comme correspondant à « une occupation réellement rémunératrice », empêchant ainsi Mme Atkinson d’être considérée comme invalide en vertu du RPC malgré ses « graves incapacités physiques » (Atkinson, aux paragraphes 3 et 4). En l’espèce, je suis d’accord avec le défendeur que le salaire gagné par le demandeur de 2011 à 2013 repousse tout argument reposant sur le fait qu’il était invalide avant le mois décembre 2011 ou en décembre 2011. En d’autres mots, la Division d’appel pouvait raisonnablement décider de ne pas interférer avec cette conclusion de la Division générale. Par conséquent, je suis convaincu que cet élément de la décision de la Division d’appel ne soulève aucune question défendable dans le cadre d’un contrôle judiciaire puisqu’il n’est, une fois de plus, fondé ni en droit ni en fait.

[24]           Enfin, dans sa demande d’autorisation d’interjeter appel devant la Division d’appel, le demandeur a fait valoir qu’il y a des éléments de preuve démontrant que son état se détériore quotidiennement depuis qu’il a déposé sa première demande de prestation d’invalidité. C’est peut-être le cas. Toutefois, et même si cela est malheureux, je conclus que la Division d’appel pouvait raisonnablement conclure que cette preuve n’était pas pertinente à l’égard de ce que devait trancher la Division générale, c’est-à-dire si le demandeur était invalide au sens du RPC au moment de sa période minimale d’admissibilité le 31 décembre 2011. En fait, je considère qu’il s’agit de la seule conclusion qui s’offrait à la Division d’appel dans les circonstances puisque les états mental et physique du demandeur, à la date de la période et avant, étaient les uniques éléments dont la Division générale devait tenir compte aux fins d’une demande de prestation d’invalidité. Une fois de plus, la décision de la Division d’appel ne soulève pas à mon avis de question défendable en contrôle judiciaire.

[25]           Je comprends la situation du demandeur. Toutefois, je conclus, tout comme la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Maqsood, qu’en dépit de l’explication raisonnable du retard encouru pour le dépôt de la demande de contrôle judiciaire, du fait que le demandeur a démontré son intention constante de poursuivre cette demande et que le défendeur ne subirait pas de préjudice de ces délais, il s’agit d’une affaire où une prorogation de délai n’est pas justifiée puisqu’il n’existe aucun fondement permettant d’accueillir une telle demande. Pour moi, il s’agit de l’élément manifeste de Hennelly dans les circonstances de l’espèce.

[26]           Je suis bien conscient que le demandeur se représente seul et que cela a pu avoir un effet sur la façon dont ses observations ont été formulées tout au long de ce processus, y compris dans la présente instance. La loi est par contre la même pour tous et ne varie pas en fonction du choix d’une partie de se faire représenter par avocat ou de se représenter seule (Kalevar c. Parti Libéral du Canada, 2001 CFPI 1261 au paragraphe 24 et Cotirta c. Missinnipi Airways, 2012 CF 1262 au paragraphe 13, confirmée dans 2013 CAF 280). Le demandeur devait satisfaire un critère et, malheureusement pour lui, n’a pas été en mesure d’en démontrer l’élément le plus important, soit celui du bien-fondé de sa requête visant la décision de la Division d’appel. Sa requête de prorogation de délai est par conséquent rejetée.

[27]           Enfin, sur une note plus technique, le défendeur soutient que l’intitulé de la cause devrait être modifié pour y substituer le Procureur général du Canada comme défendeur. Le demandeur, dans ses documents déposés à la Cour le 18 juillet 2016 sous la forme de dossier de requête, souhaite obtenir la même modification puisqu’il reconnaît que « Prestation d’invalidité du Canada » n’est pas la dénomination appropriée du défendeur en l’espèce. L’intitulé de la cause est donc modifié en conséquence.

[28]           Le défendeur ne demande pas d’obtenir les dépens. Aucuns dépens ne seront adjugés.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

1.      La requête de prorogation de délai pour le dépôt d’une demande de contrôle judiciaire est rejetée, sans dépens.

2.      L’intitulé est modifié de façon à y substituer le procureur général du Canada à titre de défendeur.

« René LeBlanc »

Juge


ANNEXE

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, L.C. 2005, ch. 34

58 (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

58 (1) The only grounds of appeal are that

a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;

(a) the General Division failed to observe a principle of natural justice or otherwise acted beyond or refused to exercise its jurisdiction;

b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;

(b) the General Division erred in law in making its decision, whether or not the error appears on the face of the record; or

c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

(c) the General Division based its decision on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it.

(2) La division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

(2) Leave to appeal is refused if the Appeal Division is satisfied that the appeal has no reasonable chance of success.

(3) Elle accorde ou refuse cette permission.

(3) The Appeal Division must either grant or refuse leave to appeal.

(4) Elle rend une décision motivée par écrit et en fait parvenir une copie à l’appelant et à toute autre partie.

(4) The Appeal Division must give written reasons for its decision to grant or refuse leave and send copies to the appellant and any other party.

(5) Dans les cas où la permission est accordée, la demande de permission est assimilée à un avis d’appel et celui-ci est réputé avoir été déposé à la date du dépôt de la demande de permission.

(5) If leave to appeal is granted, the application for leave to appeal becomes the notice of appeal and is deemed to have been filed on the day on which the application for leave to appeal was filed.

Régime de pensions du Canada, L.R.C. 1985, ch. C-8

42(2) Pour l’application de la présente loi :

42(2) For the purposes of this Act,

a) une personne n’est considérée comme invalide que si elle est déclarée, de la manière prescrite, atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée, et pour l’application du présent alinéa :

(a) a person shall be considered to be disabled only if he is determined in prescribed manner to have a severe and prolonged mental or physical disability, and for the purposes of this paragraph,

(i) une invalidité n’est grave que si elle rend la personne à laquelle se rapporte la déclaration régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice,

(i) a disability is severe only if by reason thereof the person in respect of whom the determination is made is incapable regularly of pursuing any substantially gainful occupation, and

(ii) une invalidité n’est prolongée que si elle est déclarée, de la manière prescrite, devoir vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès;

(ii) a disability is prolonged only if it is determined in prescribed manner that the disability is likely to be long continued and of indefinite duration or is likely to result in death

[…]

[…]

44 (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie :

44 (1) Subject to this Part,

a) une pension de retraite doit être payée à un cotisant qui a atteint l’âge de soixante ans;

(a) a retirement pension shall be paid to a contributor who has reached sixty years of age;

b) une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui n’a pas atteint l’âge de soixante-cinq ans, à qui aucune pension de retraite n’est payable, qui est invalide et qui :

(b) a disability pension shall be paid to a contributor who has not reached sixty-five years of age, to whom no retirement pension is payable, who is disabled and who

(i) soit a versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité,

(i) has made contributions for not less than the minimum qualifying period,

(ii) soit est un cotisant à qui une pension d’invalidité aurait été payable au moment où il est réputé être devenu invalide, si une demande de pension d’invalidité avait été reçue avant le moment où elle l’a effectivement été,

(ii) is a contributor to whom a disability pension would have been payable at the time the contributor is deemed to have become disabled if an application for a disability pension had been received before the contributor’s application for a disability pension was actually received, or

(ii) soit est un cotisant à qui une pension d’invalidité aurait été payable au moment où il est réputé être devenu invalide, si une demande de pension d’invalidité avait été reçue avant le moment où elle l’a effectivement été,

(iii) is a contributor to whom a disability pension would have been payable at the time the contributor is deemed to have become disabled if a division of unadjusted pensionable earnings that was made under section 55 or 55.1 had not been made;

(iv) [Abrogé, 1997, ch. 40, art. 69]

(iv) [Repealed, 1997, c. 40, s. 69]

c) une prestation de décès doit être payée à la succession d’un cotisant qui a versé des contributions pendant au moins la période minimale d’admissibilité;

(c) a death benefit shall be paid to the estate of a deceased contributor who has made contributions for not less than the minimum qualifying period;

d) sous réserve du paragraphe (1.1), une pension de survivant doit être payée à la personne qui a la qualité de survivant d’un cotisant qui a versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité, si le survivant :

(d) subject to subsection (1.1), a survivor’s pension shall be paid to the survivor of a deceased contributor who has made contributions for not less than the minimum qualifying period, if the survivor

(i) soit a atteint l’âge de soixante-cinq ans,

(i) has reached sixty-five years of age, or

(ii) soit, dans le cas d’un survivant qui n’a pas atteint l’âge de soixante-cinq ans :

(ii) in the case of a survivor who has not reached sixty-five years of age,

(A) ou bien avait au moment du décès du cotisant atteint l’âge de trente-cinq ans,

(A) had at the time of the death of the contributor reached thirty-five years of age,

(B) ou bien était au moment du décès du cotisant un survivant avec enfant à charge,

(B) was at the time of the death of the contributor a survivor with dependent children, or

(C) ou bien est invalide;

(C) is disabled;

e) une prestation d’enfant de cotisant invalide doit être payée à chaque enfant d’un cotisant invalide qui :

(e) a disabled contributor’s child’s benefit shall be paid to each child of a disabled contributor who

(i) soit a versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité,

(i) has made contributions for not less than the minimum qualifying period,

(ii) soit est un cotisant à qui une pension d’invalidité aurait été payable au moment où il est réputé être devenu invalide, si une demande de pension d’invalidité avait été reçue avant le moment où elle l’a effectivement été,

(ii) is a contributor to whom a disability pension would have been payable at the time the contributor is deemed to have become disabled if an application for a disability pension had been received before the contributor’s application for a disability pension was actually received, or

(iii) soit est un cotisant à qui une pension d’invalidité aurait été payable au moment où il est réputé être devenu invalide, si un partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension n’avait pas été effectué en application des articles 55 et 55.1;

(iii) is a contributor to whom a disability pension would have been payable at the time the contributor is deemed to have become disabled if a division of unadjusted pensionable earnings that was made under section 55 or 55.1, had not been made;

(iv) [Abrogé, 1997, ch. 40, art. 69]

(iv) [Repealed, 1997, c. 40, s. 69]

f) une prestation d’orphelin doit être payée à chaque orphelin d’un cotisant qui a versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité;

(f) an orphan’s benefit shall be paid to each orphan of a deceased contributor who has made contributions for not less than the minimum qualifying period; and

g) une prestation après-retraite doit être payée au bénéficiaire d’une pension de retraite au titre de la présente loi ou d’un régime provincial de pensions.

(g) a post-retirement benefit shall be paid to a beneficiary of a retirement pension under this Act or under a provincial pension plan.

[…]

[…]

66.1 (1) Un bénéficiaire peut demander la cessation d’une prestation s’il le fait de la manière prescrite et, après que le paiement de la prestation a commencé, durant la période de temps prescrite à cet égard.

66.1 (1) A beneficiary may, in prescribed manner and within the prescribed time interval after payment of a benefit has commenced, request cancellation of that benefit.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

16-T-19

INTITULÉ :

GORDON J. MCCANN c. PRESTATION D’INVALIDITÉ CANADA

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE LEBLANC

DATE DES MOTIFS :

Le 27 juillet 2016

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Gordon J. McCann

POUR LE DEMANDEUR

(pour son propre compte)

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Gatineau (Québec)

Pour le défendeur

 

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