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Date : 20151030


Dossier : T-1018-15

Référence : 2015 CF 1234

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 30 octobre 2015

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

demandeur

et

AMDOCS CANADIAN MANAGED SERVICES INC.

défenderesse

ORDONNANCE ET MOTIFS

I.                   INTRODUCTION

[1]               La Cour est appelée à trancher une demande présentée au titre de l’article 231.7 de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (la LIR), visant l’obtention d’une ordonnance obligeant la défenderesse, Amdocs Canadian Managed Services Inc (ACMS), à fournir au demandeur ou à ses fonctionnaires l’accès, l’aide, les renseignements et les documents demandés en vertu de l’article 231.1 de la LIR.

II.                LE CONTEXTE

[2]               ACMS est constituée sous le régime de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, LRC 1985, c C-44, et appartient au groupe d’entreprises Amdocs, qui fournit des logiciels et des services connexes à plus de 250 fournisseurs de services dans le domaine des communications, des médias et du divertissement dans plus de 80 pays. ACMS fournit des services de technologie de l’information à des entreprises de télécommunications, ce qui comprend la comptabilisation des recettes, la facturation et le suivi, l’intégration de plateformes logicielles et la mise à jour de logiciels.

[3]               ACMS fait l’objet d’une vérification pour ses années d’imposition 2011 et 2012. La vérification a commencé en novembre 2013 et est menée par l’Agence du revenu du Canada (ARC), qui cherche à déterminer si ACMS s’est acquittée des obligations qui lui incombent au titre de la LIR et si elle a correctement déclaré ses revenus de toutes provenances et si ses demandes de déductions étaient justifiées.

[4]               L’ARC tente de mener trois vérifications : une vérification du prix de transfert (la VPT), une vérification du revenu de source canadienne, et une vérification du revenu étranger accumulé, tiré de biens (la VREATB).

A.                La vérification du prix de transfert

[5]               Pour ce qui est de la VPT, le délai pour la délivrance d’un avis de nouvelle cotisation à ACMS pour l’année d’imposition 2011 est mars 2016. Le délai pour la délivrance d’un avis de nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 2012 est mars 2017.

[6]               La VPT a pour but de déterminer si ACMS a effectué ses opérations transfrontalières, auxquelles étaient parties des sociétés non résidentes, conformément au principe de la pleine concurrence. Si les opérations n’ont pas été effectuées à un prix de pleine concurrence, ACMS encourt des pénalités, un redressement du prix de transfert ainsi que l’établissement d’une cotisation en conséquence.

[7]               En mars 2014, l’ARC a envoyé seize demandes pour obtenir des documents dans le cadre de la VTP. À ce jour, ACMS n’a pas répondu de façon satisfaisante à trois de ces demandes (IM1-2, IM1-10 et IM1-12), ce qu’elle explique notamment ainsi : les renseignements ne sont pas disponibles, l’ARC n’y a pas droit ou ACMS ne les fournira pas.

[8]               La demande IM1-2 exigeait un organigramme des responsabilités détaillé de chacune des entités du groupe Amdocs ayant été partie à des opérations réciproques avec ACMS.

[9]               La demande IM1-10 exigeait des états financiers et des documents de travail détaillés d’Amdocs Management Limited comportant des précisions sur les centres de regroupement de coûts et toutes les entités auxquelles les coûts ont été attribués.

[10]           La demande IM1-12 exigeait des états financiers détaillés pour Amdocs Inc et des documents de travail détaillés expliquant les frais de soutien administratif.

B.                 La vérification du revenu de source canadienne

[11]           Six demandes relatives à la vérification du revenu de source canadienne ont été envoyées le 26 janvier 2015, le 4 mars 2015 et le 16 avril 2015. ACMS y a répondu à la satisfaction du demandeur et elles ne sont plus en cause en l’espèce.

C.                 La vérification du revenu étranger accumulé, tiré de biens

[12]           L’ARC a envoyé trois demandes relatives à la VREATB le 18 juillet 2014. ACMS y a répondu à la satisfaction du demandeur et elles ne sont plus en cause en l’espèce.

III.             LA QUESTION EN LITIGE

[13]           Le demandeur a soulevé une seule question en l’espèce : le ministre peut-il, en vertu de l’article 231.7 de la LIR, contraindre ACMS à répondre aux demandes en suspens – IM1-2, IM1-10 et IM1-12 – et à fournir les livres, registres et documents demandés?  

IV.             LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[14]           Les dispositions suivantes s’appliquent en l’espèce : 

Enquêtes

Inspections

231.1 (1) Une personne autorisée peut, à tout moment raisonnable, pour l’application et l’exécution de la présente loi, à la fois :

231.1 (1) An authorized person may, at all reasonable times, for any purpose related to the administration or enforcement of this Act,

a) inspecter, vérifier ou examiner les livres et registres d’un contribuable ainsi que tous documents du contribuable ou d’une autre personne qui se rapportent ou peuvent se rapporter soit aux renseignements qui figurent dans les livres ou registres du contribuable ou qui devraient y figurer, soit à tout montant payable par le contribuable en vertu de la présente loi;

(a) inspect, audit or examine the books and records of a taxpayer and any document of the taxpayer or of any other person that relates or may relate to the information that is or should be in the books or records of the taxpayer or to any amount payable by the taxpayer under this Act, and

[…]

[…]

Ordonnance

Compliance order

231.7 (1) Sur demande sommaire du ministre, un juge peut, malgré le paragraphe 238(2), ordonner à une personne de fournir l’accès, l’aide, les renseignements ou les documents que le ministre cherche à obtenir en vertu des articles 231.1 ou 231.2 s’il est convaincu de ce qui suit :

231.7 (1) On summary application by the Minister, a judge may, notwithstanding subsection 238(2), order a person to provide any access, assistance, information or document sought by the Minister under section 231.1 or 231.2 if the judge is satisfied that

a) la personne n’a pas fourni l’accès, l’aide, les renseignements ou les documents bien qu’elle en soit tenue par les articles 231.1 ou 231.2;

(a) the person was required under section 231.1 or 231.2 to provide the access, assistance, information or document and did not do so; and

b) s’agissant de renseignements ou de documents, le privilège des communications entre client et avocat, au sens du paragraphe 232(1), ne peut être invoqué à leur égard.

(b) in the case of information or a document, the information or document is not protected from disclosure by solicitor-client privilege (within the meaning of subsection 232(1)).

V.                LES ARGUMENTS

A.                Le demandeur

(1)               Les exigences du paragraphe 231.7(1)

[15]           Le demandeur soutient que les trois conditions prévues au paragraphe 231.7(1) de la LIR ont été remplies et qu’il serait donc judicieux que la Cour ordonne à ACMS de donner réponse aux demandes en suspens en fournissant les livres, registres et documents exigés. 

[16]           En premier lieu, ACMS est une personne tenue au titre du paragraphe 231.1(1) de fournir un accès, de l’aide, des renseignements ou des documents. L’ARC a envoyé les demandes à ACMS en 2014 et en 2015 par application du paragraphe 231.1(1), relativement à une vérification visant les années d’imposition 2011 et 2012 d’ACMS (plus précisément, relativement à la VPT).

[17]           En deuxième lieu, ACMS n’a pas répondu aux demandes du ministre visant l’obtention de livres, de registres et de documents. Elle a eu depuis mars 2014 pour obtempérer, ce qui est un délai raisonnable. Il ne revient pas à ACMS de déterminer si une vérification est nécessaire; ce pouvoir discrétionnaire est réservé au ministre.

[18]           En troisième lieu, les renseignements et les documents visés ne sont pas protégés par le privilège des communications entre client et avocat.

[19]           Par conséquent, le demandeur demande les mesures suivantes : une ordonnance prononcée en vertu de l’article 231.7 de la LIR obligeant ACMS à fournir à M. Morris Zambon, ou à tout autre fonctionnaire autorisé de l’ARC, les livres, registres et documents exigés au titre de l’alinéa 231.1(1)a) dans les quatorze jours suivant l’ordonnance de la Cour; une ordonnance autorisant le ministre à signifier l’ordonnance à ACMS par signification à personne conformément à l’article 130 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106; les dépens de la demande et toute autre mesure que la Cour estime appropriée.

(2)               Demandes en suspens

[20]           AMCS a donné réponse aux demandes en suspens à deux occasions distinctes en juillet et en août 2015. Le demandeur a convenu que ces réponses répondaient adéquatement aux demandes envoyées dans le cadre de la vérification du revenu de source canadienne et de la VREATB.

[21]           Le demandeur soutient toutefois qu’il n’a pas été répondu de façon satisfaisante aux demandes envoyées dans le cadre de la VPT.

[22]           Le fonctionnaire de l’ARC Morris Zambon a affirmé par affidavit que les demandes suivantes étaient toujours en suspens en date du 27 août 2015 et font donc l’objet de la présente demande :

-          IM1-2, qui exige un organigramme des responsabilités pour le groupe Amdocs et pour laquelle ACMS n’a pas fourni les documents exigés;

-          IM1-10, qui exige les documents de travail d’Amdocs Management Ltd et pour laquelle ACMS a fourni des renseignements incomplets et sommaires seulement, sans les documents de travail détaillés ni les documents justificatifs;

-          IM1-12, qui exige les documents de travail d’Amdocs Inc et pour laquelle ACMS n’a pas fourni les documents exigés.

[23]           La demande IM1-2 exige un organigramme des responsabilités de chacune des organisations composant le groupe Amdocs, lequel devrait comprendre le nom et le titre des employés de niveau supérieur, le service auquel ils appartiennent et une description de leurs fonctions. L’organigramme fourni par ACMS à ce jour ne contient pas les renseignements demandés. ACMS a été informée des lacunes dans une lettre datée du 27 août 2015.

[24]           Pour ce qui est de la demande IM1-10, ACMS n’a fourni que des renseignements sommaires et non pas les documents de travail détaillés, les documents justificatifs et les autres renseignements à l’appui exigés. La réponse demeure donc incomplète.

[25]           En ce qui concerne la demande IM1-12, ACMS n’a pas fourni les documents de travail détaillés expliquant les frais de soutien administratifs attribués à ACMS que le demandeur a exigés.

[26]           L’ARC a fait savoir qu’elle prévoit établir une nouvelle cotisation à l’égard d’ACMS pour les années d’imposition 2011 et 2012 en fonction des renseignements dont elle dispose, avant l’échéance des délais de prescription applicables. Selon l’ARC, il ne s’agit pas de la façon de faire idéale, car elle préfère établir des nouvelles cotisations en fonction de renseignements et de documents complets, mais elle le fera afin de protéger sa position relativement aux cotisations.  

B.                 ACMS

[27]           ACMS affirme qu’elle a déployé des efforts importants et a répondu à toutes les demandes de renseignements qui font l’objet de la présente procédure. Bien que les documents demandés ne soient pas en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde, elle a néanmoins pris tous les moyens raisonnables pour obtenir les renseignements et les fournir à l’ARC.

(1)               Les exigences du paragraphe 231.7(1)

[28]           ACMS soutient, relativement aux conditions qui doivent être remplies avant que la Cour puisse lui ordonner de fournir des livres, registres et documents demandés au titre de l’article 231.1, que le critère énoncé à l’alinéa 231.7(1)b) n’est pas pertinent. Elle affirme avoir fourni les renseignements demandés par le ministre. En conséquence, les conditions, qui doivent être « remplies de façon claire » selon la jurisprudence, n’ont pas été remplies de manière à rendre possible une ordonnance en vertu de l’article 237.1 : Canada (Ministre du Revenu national) c Chamandy, 2014 CF 354, aux paragraphes 35 et 41 (Chamandy); Canada (Ministre du Revenu national) c Lee, 2015 CF 634, au paragraphe 25 (Lee).

[29]           ACMS fait valoir que les documents fournis à l’ARC sont suffisamment détaillés et pleinement conformes à la norme de la pleine concurrence. Plus précisément, comme il est indiqué dans les affidavits de Michael Buchheit, elle a notamment fourni à l’ARC les renseignements qui suivent en réponse aux demandes que le demandeur considère comme étant en suspens :

IM1-2

        Un organigramme des responsabilités du groupe Amdocs ayant pris part aux opérations avec ACMS, préparé par Amdocs Management Ltd, lequel précise le nom et le poste des hauts dirigeants du groupe d’entités Amdocs concernant ACMS et les fonctions de chaque service, envoyé par courriel le 5 août 2015;

        Un organigramme des responsabilités révisé, préparé par Amdocs Management Ltd en réponse à la demande de l’ARC visant un organigramme plus détaillé, dans lequel figure le nom et le titre de tous les employés principaux des personnes morales du groupe Amdocs ayant été partie à des opérations réciproques avec ACMS, envoyé le 26 août 2015. À cet organigramme était jointe une explication précisant que deux des entités visées par la demande n’étaient pas incluses parce que l’une n’est pas une personne morale distincte (Amdocs Development, Guernsey) et l’autre n’a fait affaire que de façon très mineure avec ACMS (Amdocs UK Ltd);

IM1-10

        Des documents, exigés d’Amdocs Management Ltd, qui contenaient une analyse détaillée des frais de gestion facturés par Amdocs Management Ltd et la méthode d’attribution intersociétés de ces dépenses entre les entités du groupe Amdocs, envoyés par courriel le 17 juillet 2015;

        Une explication du contenu de ces documents a été fournie lors d’une conférence téléphonique tenue le 31 juillet 2015;

IM1-12

        Des documents, fournis sur demande par Amdocs Inc., notamment des documents de travail détaillés expliquant les frais de soutien administratif facturés à ACMS, envoyés par courriel le 24 juillet 2015;

        Des états financiers pour l’année d’imposition d’Amdocs Inc. se terminant le 30 septembre 2012, envoyés par courriel le 27 août 2015. Des états financiers ont donc été fournis pour les années d’imposition se terminant le 30 septembre 2010, le 30 septembre 2011 ainsi que le 30 septembre 2012.

[30]           ACMS soutient que le demandeur ne s’est pas acquitté de son fardeau de prouver que les documents exigés n’ont pas déjà été fournis.

[31]           À titre subsidiaire, ACMS soutient que ce qui a été fourni à l’ARC à ce jour est suffisant pour permettre à cette dernière d’établir une cotisation et que la Cour ne devrait pas exercer son pouvoir discrétionnaire pour rendre l’ordonnance demandée.

[32]           ACMS affirme que, si l’ARC a besoin de clarifications au sujet des documents mentionnés ci-dessus, elle peut demander des précisions, mais que rien ne justifie que la Cour rende une ordonnance en vertu de l’article 231.7 pour la production d’autres documents. Elle soutient qu’il n’est pas raisonnable pour le demandeur d’exiger une ordonnance, car celui‑ci ne lui a pas fourni les renseignements qui, de l’aveu même de l’ARC, sont nécessaires pour qu’elle puisse se conformer aux demandes.

(2)               Il n’y a pas lieu d’ordonner à ACMS de faire quelque chose dont elle est incapable

[33]           ACMS soutient qu’elle est incapable de fournir des renseignements ou des documents additionnels en réponse aux demandes IM1-2, IM1-10 et IM1-12. Ces demandes visent des documents qui, s’ils existent, ne se trouvent pas au Canada. ACMS fait valoir que rien dans les articles 231.1 et 231.7 n’impose au contribuable l’obligation de fournir des documents qui ne sont pas en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde, ni n’oblige le contribuable résidant au Canada à obtenir des documents d’une société non résidente ou d’une entité étrangère qu’il ne contrôle pas.

[34]           L’alinéa 231.1 (1)d) exige du contribuable qu’il fournisse « toute l’aide raisonnable » pour l’exécution de l’article 231.1. Cependant, le paragraphe 231.5(2) prévoit en partie que quiconque est tenu par l’article 231 de faire quelque chose doit le faire, sauf impossibilité. On prévoit donc expressément une exception précisant que le contribuable n’est pas tenu à l’impossible.

[35]           ACMS soutient que la situation en l’espèce n’est pas sans rappeler l’affaire sur laquelle s’est penchée la Cour fédérale dans la décision Canada (Revenu national) c Dropsy, 2009 CF 820 (Dropsy), dans laquelle M. Dropsy a été jugé non coupable d’outrage au tribunal même s’il n’avait pas produit les documents exigés par l’ARC, parce que ceux‑ci n’étaient pas en sa possession ou sous sa garde et qu’il avait fait tout en son possible pour les obtenir. Selon la défenderesse, bien que la décision Dropsy traite d’une audience où le défendeur devait se justifier à la suite d’une ordonnance prononcée contre lui, il convient en l’espèce que l’ordonnance ne soit pas rendue, car elle aurait pour effet de placer ACMS dans la même position que M. Dropsy. ACMS fait valoir que, comme ce dernier, elle se trouverait « bien malgré [elle], dans l’impossibilité de se conformer à l’ordonnance » : Dropsy, précitée, au paragraphe 29.

[36]           ACMS affirme que, dans le cas où la Cour serait convaincue que le demandeur s’est acquitté de façon claire de son fardeau de prouver qu’ACMS était tenue au titre de l’article 231.1 de produire les documents exigés, la Cour devrait utiliser son pouvoir discrétionnaire afin de ne pas rendre l’ordonnance demandée.

[37]           ACMS affirme qu’elle a déployé des efforts considérables afin d’obtenir les renseignements exigés par l’ARC et qu’elle a produit ce que lui ont fourni les entités affiliées non résidentes. Elle ne peut être tenue de produire ce qui n’est pas en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde, conformément à l’article 231.1 de la LIR. De plus, elle ne peut être contrainte de créer des documents qui n’existent pas déjà.

(3)               Dépens

[38]           ACMS soutient que M. Buchheit a reçu un courriel le 31 juillet 2015 de Julia Huang de l’ARC, dans lequel il était indiqué que l’ARC s’entretiendrait avec M. Buchheit le 4 août 2015 au sujet du prix de transfert. Mme Huang a fait savoir qu’elle ne serait pas en mesure de discuter le 4 août, mais qu’elle travaillerait sur une demande détaillée qu’elle enverrait dans la semaine suivante afin de permettre à ACMS de se conformer à la demande de l’ARC. ACMS affirme n’avoir jamais reçu cette autre demande.

[39]           ACMS soutient que la présente demande devrait être rejetée. Pour ce qui est des dépens, elle demande une ordonnance adjugeant des dépens fixes de 5 000 $. L’avocat d’ACMS a précisé que la défenderesse attendait une demande de clarification de l’ARC, qui, selon cette dernière, est nécessaire afin de permettre à ACMS de répondre aux demandes. Il a proposé que la présente audience soit reportée jusqu’à ce qu’ACMS ait eu la possibilité raisonnable d’examiner cette demande de clarification éventuelle et d’y répondre. Parce que la présente demande a été présentée prématurément, ACMS a engagé des frais inutiles et le demandeur devrait en subir les conséquences, c’est-à-dire payer les dépens.

(4)               Production additionnelle

[40]           ACMS soutient que, dans le cas où la Cour accueillerait la demande, elle devrait disposer de trente jours pour se conformer à l’ordonnance exigeant la production d’autres documents ou renseignements.

VI.             ANALYSE

A.                La situation générale

[41]           À la date de l’audience sur la présente demande, les demandes en suspens à la source du litige entre les parties sont les suivantes :

a)      Demande IM1-2 envoyée le 24 mars 2014 – organigramme des responsabilités;

b)      Demande IM1-12 envoyée le 24 mars 2014 – états financiers et documents de travail d’Amdocs Inc;

c)      Demande IM1-10 envoyée le 24 mars 2014 – états financiers et documents de travail d’Amdocs Management Ltd.

[42]           Toutes ces demandes en suspens se rapportent à la VPT, qui a pour objet d’établir si ACMS a effectué ses opérations transfrontalières impliquant des sociétés non résidentes apparentées conformément au principe de la pleine concurrence en 2011 et 2012.

B.                 L’impasse

[43]           Depuis l’envoi des demandes, les parties ont beaucoup discuté et ACMS a tenté (parfois lentement et parfois avec réticence) de s’y conformer, mais des questions pour l’instant sans réponse doivent être examinées dans le cadre de la présente demande. 

C.                 IM1-2

[44]           L’ARC cherche encore à obtenir un organigramme des responsabilités détaillé pour chacune des sociétés du groupe Amdocs qui ont été parties à des opérations réciproques avec ACMS.

[45]           ACMS soutient qu’elle ne possède pas ni n’a sous son contrôle d’organigramme des responsabilités des sociétés du groupe Amdocs qui ont été parties à des opérations réciproques avec elle. Cependant, elle a demandé à Amdocs Ltd de fournir un tel organigramme et, le 5 août 2015, elle a fourni l’organigramme qu’elle avait obtenu aux fonctionnaires compétents de l’ARC. Elle affirme que cet organigramme, dont une version révisée a été envoyée le 26 août 2015, est suffisant pour que l’ARC puisse commencer sa VPT parce qu’il comporte le nom et le poste des hauts dirigeants des entités du groupe Amdocs concernées, ainsi que les fonctions des services concernés.

[46]           L’ARC affirme que l’organigramme fourni par ACMS ne répond pas adéquatement à la demande parce qu’elle a exigé pour chacune des sociétés concernées au sein du groupe Amdocs un organigramme qui présente, pour chacune d’elle, le président, le PDG, chaque service et ses fonctions, ainsi que le nom des employés de niveau supérieur. Le demandeur soutient que, compte tenu de l’objectif de la VPT, soit de découvrir si les sommes facturées à l’ACMS sont raisonnables et conformes au principe de la pleine concurrence, l’organigramme fourni par ACMS ne lui permet pas de mener les enquêtes pertinentes et de commencer son analyse.

[47]           Dans son affidavit supplémentaire du 28 août 2015, M. Buchheit (le responsable de la fiscalité chez Amdocs Inc) explique la situation du point de vue d’ACMS :

[traduction]

IM1-2

10.       En ce qui concerne la demande IM1-2, présentée par lettre datée du 7 août 2015 de Frank Chan et de Julia Huang, l’ARC a exigé un organigramme des responsabilités complet pour chaque société du groupe Amdocs ayant été partie à des opérations réciproques avec ACMS.

11.       Selon la lettre de M. Chan et de Mme Huang, les huit sociétés suivantes (appelées collectivement le groupe Amdocs) avaient fait des opérations transfrontalières avec ACMS :

Amdocs Software Systems Ltd., en Irlande

Amdocs Development Limited, à Chypre

Amdocs Inc., aux États-Unis

Amdocs UK Ltd., au Royaume-Uni

Canadian Directory Technology Ltd., aux États-Unis

Amdocs (Brazil) LTDA, au Brésil

Amdocs Champaign Inc., aux États-Unis

Amdocs Development, à Guernsey

12.       Amdocs Inc. m’a informé qu’il n’existe pas d’organigramme des responsabilités du type exigé par l’ARC.

13.       En outre, ACMS n’a pas de tel organigramme en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde.

14.       Cependant, dans le but de répondre à l’ARC, Amdocs Management Ltd. a créé l’organigramme des responsabilités ci-joint, la pièce « A ».

15.       Selon ce que je comprends, je crois que l’ARC demande un organigramme des responsabilités dans le but de mener des entrevues avec des employés du groupe Amdocs dans le cadre de sa vérification. Je crois que les renseignements fournis dans la pièce « A » suffisent pour permettre à l’ARC de commencer un processus d’entrevue utile avec le groupe Amdocs, étant donné que l’organigramme des responsabilités contient le nom et le titre de chaque employé principal des personnes morales du groupe Amdocs ayant pris part à des opérations réciproques avec ACMS au cours des années d’imposition en cause. En particulier, la pièce « A » donne le nom et le titre de tous les employés principaux de chaque entité mentionnée ci-dessus, à l’exception d’Amdocs Development à Guernsey et d’Amdocs UK Ltd.

16.       Le mercredi 26 août 2015, à 11 h 26, j’ai envoyé par courriel à M. Zambon l’organigramme des responsabilités ci-joint, la pièce « A ».

17.       Le 27 août 2015, Frank Chan et Julia Huang de l’ARC m’ont envoyé une lettre indiquant que l’organigramme des responsabilités que j’avais envoyé à M. Zambon comportait des lacunes. La lettre exigeait un organigramme comprenant tous les services par fonction au sein des entités, le nom et le titre de la personne responsable de chacun des services, le nom et titre des principaux employés dans les services, le nombre d’employés par service, une description des fonctions des services ainsi qu’une description des rôles et responsabilités des principaux employés dans les services. Une copie de la lettre qu’on m’a envoyée est jointe en tant que pièce « B ».

18.       Amdocs Limited m’a informé qu’il n’existe pas d’organigramme des responsabilités répondant à la description demandée et que, par conséquent, cet organigramme n’est pas en la possession, sous l’autorité ou sous la garde d’ACMS.

19.       En outre, il serait quasi impossible de préparer un organigramme tel que celui demandé. La structure organisationnelle du groupe Amdocs ne correspond pas toujours à celle des personnes morales. Le groupe Amdocs est une structure matricielle dans laquelle les liens hiérarchiques peuvent passer d’une entité à l’autre, en fonction des activités opérationnelles en cause. Il n’y a pas de services en tant que tels comme dans les structures pyramidales de personnes morales. Par conséquent, l’organigramme des responsabilités n’aurait pas nécessairement pour cadre les personnes morales.

20.       L’organigramme de la pièce « A » a été préparé en tenant compte de la structure du groupe Amdocs décrite ci-dessus. L’organigramme nomme les présidents de divisions, les vice‑présidents, les directeurs et les chefs d’unités opérationnelles des différentes entités disposant de pouvoirs décisionnels exécutifs relativement aux clients canadiens du groupe Amdocs. Il nomme également les personnes ayant eu affaire à des comptes canadiens en particulier (par exemple, Bell Canada et Rogers). Aucune des personnes nommées dans l’organigramme n’est basée au Canada. Je crois que cet organigramme aidera l’ARC à reconnaître les personnes ayant des renseignements pouvant être pertinents concernant les années d’imposition visées par la vérification.

21.       Le vendredi 28 août 2015, à 11 h 38, j’ai envoyé à M. Zambon un courriel expliquant la structure organisationnelle du groupe Amdocs. Une copie de ce courriel se trouve ci-jointe, en tant que pièce « C ».

22.       En plus de ce qui précède, deux choses sont à souligner. D’abord, comme je l’ai expliqué à M. Zambon, Amdocs Development, à Guernsey, n’est pas une personne morale, elle fait partie d’Amdocs Development Limited, à Chypre. Ensuite, selon ce que je comprends, aucun renseignement n’a été fourni relativement à Amdocs UK Ltd, parce que celle-ci n’a facturé à ACMS que 1 669 $ en 2011 et 2 355 $ en 2012.

[48]           L’ARC répond à ceci que, selon ce que laisse entendre M. Buchheit, il existe une sorte d’organigramme, même si ce n’est pas celui que demande l’ARC, et qu’il est tout simplement illogique qu’un vaste groupe international d’entreprises puisse fonctionner sans organigramme informant chacun des responsabilités des autres et précisant les liens hiérarchiques.

[49]           Il n’y a aucune raison de mettre en doute la bonne foi de M. Buchheit dans cet affidavit. Il n’a pas été contre-interrogé à ce sujet. Le demandeur demande à la Cour de déduire des paragraphes 12 et 13 ainsi que des paragraphes 17 et 18 qu’ACMS peut avoir accès à un organigramme qui existe et le fournir. Cependant, il n’a pas demandé n’importe quel organigramme pouvant exister; il a demandé un organigramme qui contient les renseignements précisés dans la lettre envoyée le 27 août 2015 par M. Frank Chan et Mme Julia Huang. ACMS a fait des efforts raisonnables pour trouver un tel organigramme, mais il n’en existe pas. Si le demandeur voulait n’importe quel organigramme en existence, il aurait simplement dû le demander.

[50]           Ce dont le demandeur était à la recherche est exposé en détail dans la lettre envoyée par M. Chan et Mme Huang de l’ARC, datée du 27 août 2015 :

[traduction]

La présente concerne la demande IM1-2 visant un « organigramme des responsabilités détaillé pour CHACUNE des sociétés du groupe Amdocs ayant été partie à des opérations réciproques avec ACMS » qui a été décrit ainsi dans notre lettre datée du 7 août 2015 :

ACMS doit fournir un organigramme des responsabilités complet pour chaque société au sein du groupe Amdocs qui a été partie à des opérations réciproques avec ACMS. Veuillez noter que, selon les T106 au dossier, les sociétés suivantes (numéros 1 à 7) ont effectué des opérations transfrontalières avec ACMS. Selon la balance de vérification, la société numéro 8 ci‑dessous a également effectué des opérations avec ACMS :

1. Amdocs Software Systems Ltd, en Irlande

2. Amdocs Development Limited, à Chypre

3. Amdocs Inc., aux États‑Unis

4. Amdocs UK Ltd., au Royaume‑Uni

5. Canadian Directory Technology Ltd., aux États‑Unis

6. Amdocs (Brazil) LTDA, au Brésil

7. Amdocs Champaign Inc., aux États‑Unis

8. Amdocs Development, à Guernsey

Fourni à ce jour

Nous avons examiné l’organigramme fourni le 26 août 2015 que l’on peut brièvement décrire comme un organigramme global pour le groupe de sociétés Amdocs qui comporte une description des opérations de chaque entité et le nom d’un employé pour chaque entité.

Commentaire de l’ARC sur ce qui a été fourni :

Le document ci-dessus comporte des lacunes dans la mesure où il ne contient pas les renseignements qui constituent un organigramme des responsabilités en bonne et due forme.

Demande en suspens de l’ARC

Investopedia définit le terme organigramme de la façon suivante :

[traduction]

Schéma décrivant la structure interne d’une société. L’organigramme est la manière la plus commune d’illustrer la structure d’une organisation. Il donne un aperçu des rôles, des responsabilités et des liens hiérarchiques des personnes au sein de l’organisation.

En tant que tel, l’organigramme des responsabilités détaillé de chaque entité doit, au minimum, montrer tous les services par fonction que compte l’entité, le nom et le titre de la personne responsable de chaque service, le nom et le titre des employés principaux des services, le nombre d’employés par service, une description des fonctions des services ainsi qu’une description des rôles et responsabilités des employés principaux des services. 

[Caractère gras dans l’original.]

[51]           M. Buchheit nous dit qu’il [traduction« n’existe pas d’organigramme des responsabilités répondant à la description demandée et que, par conséquent, cet organigramme n’est pas en la possession, sous l’autorité ou sous la garde d’ACMS ».

[52]           Il semble ressortir de la preuve devant moi que l’ARC a exigé quelque chose de bien précis qu’ACMS était incapable de fournir. L’ARC soutient que le groupe Amdocs doit posséder un organigramme quelconque, sans quoi il ne pourrait pas fonctionner. Cependant, si je comprends bien la demande présentée dans la lettre de M. Chan et de Mme Huang citée ci-dessus, l’ARC ne demande pas n’importe quel organigramme disponible; elle demande un organigramme dressé d’une manière particulière et comportant des renseignements précis. C’est cela qu’ACMS affirme ne pas être en mesure de fournir parce que ce document n’existe pas.

[53]           Il n’apparaît pas clairement si l’ARC demande également qu’ACMS crée un organigramme dans la forme demandée s’il n’en existe pas déjà un. Cependant, si l’ARC demande la création d’un tel organigramme, elle ne l’a pas énoncé clairement dans sa demande et elle n’a pas précisé pour quel motif ou par quel pouvoir la Cour pourrait ordonner la création d’un tel organigramme. Comme je l’ai mentionné ci‑dessus, je n’ai aucune raison de douter de M. Buchheit lorsqu’il affirme qu’un tel document n’existe pas. Il n’a pas été contre‑interrogé sur son affidavit, de sorte qu’on ne peut savoir pourquoi le document n’existe pas ou s’il existe un autre organigramme qui pourrait être fourni.

D.                IM1-12

[54]           La demande IM1-12 soulève une question semblable, bien que de portée beaucoup plus restreinte. Il ressort du dossier qu’ACMS a à ce jour fourni les états financiers d’Amdocs Inc pour les années fiscales se terminant le 30 septembre 2010, le 30 septembre 2011 et le 30 septembre 2012, ainsi que certains renseignements portant sur les frais de soutien administratif. Il reste donc la demande visant des documents de travail supplémentaires expliquant les frais de soutien administratif attribués à ACMS.

[55]           Dans son affidavit supplémentaire du 28 août 2015, M. Buchheit a abordé ces sujets de la façon suivante :

[traduction]

33.       ACMS n’a en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde aucun document de travail sur les frais de soutien administratif qui lui ont été attribués. Cependant, les documents de travail qui ont été fournis à l’ARC précisent quels services ont été fournis par Amdocs Inc et le pourcentage du temps des employés consacré à des activités pour ACMS. Le pourcentage de temps a ensuite été multiplié par le salaire, les avantages sociaux et les coûts liés aux installations.

[56]           Les renseignements fournis proviennent d’Amdocs et sont rédigés ainsi :

[traduction]

Vous nous avez demandé de fournir des détails sur les frais qui vous ont été facturés pour les services de soutien administratif au cours de la période s’étendant d’avril 2010 à mars 2012. En conséquence, nous aimerions clarifier ce qui suit :

1. La soussignée, Amdocs Inc, une société basée aux États‑Unis, a fourni des services de soutien administratif à Amdocs Canadian Managed services Inc. (ACMS) à l’appui des activités d’ACMS (les Services).

2. Les Services étaient nécessaires et essentiels à l’exercice des activités commerciales d’ACMS. Ils ont été fournis directement par Amdocs Inc.

3. Comme le précise l’entente, puisqu’ACMS n’emploie pas de personnel consacré aux services de soutien administratif, les Services fournis consistaient en des services de soutien et des services administratifs concernant notamment la comptabilité, les comptes créditeurs, la rémunération, la trésorerie, la fiscalité, les déplacements, l’immigration, l’approvisionnement, l’immobilier, les installations, la TI et les RH. Ces services représentent les services de base dont ACMS a besoin pour fonctionner sur le plan administratif. Ils n’incluent pas le type de gestion ou de services de haut niveau fournis par Amdocs Management Ltd. Amdocs Inc et les autres sociétés du groupe américain consomment également les services plus onéreux d’Amdocs Management Ltd.

4. En contrepartie de la prestation des Services, nous avons facturé à ACMS les frais engagés pour leur exécution.

5. Le calcul des frais est fondé sur le temps passé par les différents membres du personnel administratif aux activités d’ACMS. Le pourcentage a été déterminé en demandant aux gestionnaires de remplir une feuille de temps pour les activités régulières de leurs employés. Les résultats ont ensuite été utilisés afin d’attribuer les coûts appropriés. Consultez l’annexe A pour les résultats de l’attribution du temps.

Les frais sont ensuite calculés en additionnant les montants de la rémunération annuelle des employés concernés à ceux des avantages et des coûts d’installation. Cette étape est effectuée par le groupe de la rémunération, qui donne ensuite les sommes à facturer. Voir l’annexe B.

[57]           L’ARC se plaint que ces renseignements comportent des lacunes en ce sens qu’elles expliquent l’attribution des frais de soutien administratif, mais pas la façon dont ils sont calculés. L’annexe A et l’annexe B de la lettre du 22 juillet 2015 montrent que le total des frais de soutien administratif facturés avant l’attribution est de 7 565 619, 87 $, dont 1 583 686,34 $ sont attribués à ACMS pour une facturation mensuelle de 130 000,00 $. Cependant, rien dans les renseignements ne montre quels services ont été en fait fournis et combien a été attribué pour chaque service. Par conséquent, il n’est pas possible d’examiner les frais de soutien administratif relativement au principe de la pleine concurrence.

[58]           M. Buchheit a affirmé clairement, et je n’ai aucune raison d’en douter, que [traduction] « ACMS n’a en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde aucun document de travail sur les frais de soutien administratif qui lui ont été attribués ». Il me semble également qu’ACMS a déployé des efforts raisonnables pour répondre à cet aspect de la demande IM1‑12.

E.                 IM1-10

[59]           La demande IM1-10 pose une difficulté semblable. Dans ce cas, il s’agit de frais de gestion facturés par Amdocs Management Ltd à ACMS. La méthode utilisée est exposée dans une lettre du 10 juillet 2015 d’Amdocs Management Ltd :

[traduction]

Objet : Détails sur la facturation pour les services fournis dans le cadre d’une entente datée du 2 juillet 2003 (l’Entente)

Vous nous avez demandé de fournir des détails sur les frais qui vous ont été facturés pour divers services rendus au cours de la période s’étendant d’avril 2010 à mars 2012 (la période). Nous aimerions donc apporter les précisions suivantes :

1. La soussignée, Amdocs Management Limited (AML), est une société basée au Royaume-Uni qui exerce ses activités par l’intermédiaire de son siège social au Royaume-Uni ainsi que par une succursale située en Israël.

2. Au cours de la période, AML a fourni divers services professionnels à Amdocs Canadian Managed Services Inc. (ACMS), en appui aux activités d’ACMS (les services).

3. ACMS avait besoin des services, car ils étaient essentiels à ses activités commerciales permanentes. Ils ont été fournis par AML directement ou par des sous-traitants embauchés par AML au besoin. En outre, AML a employé du personnel à la haute direction, à la direction des ventes et de la commercialisation, à la direction des finances, au développement des affaires, aux services juridiques et aux services administratifs au Royaume-Uni et en Israël durant toute la période afin de fournir les services aux différentes filiales du groupe Amdocs, y compris ACMS.

4. Comme le prévoyait l’entente, les services étaient constitués principalement des activités suivantes :

a. Services financiers – Aide pour les questions de comptabilité et de finance complexes, notamment la comptabilisation des produits, les politiques financières et les rapports financiers.

b. Services de ressources humaines – Aide pour l’établissement des politiques de RH, les niveaux de rémunération, le recrutement et les avantages sociaux des employés.

c. Services de commercialisation et de développement des affaires – Développement de stratégies commerciales à l’échelle du groupe et à l’échelle locale et préparation de plans de commercialisation et de documents destinés au marché local.

d. Services juridiques – Aide pour diverses questions juridiques, notamment la rédaction et la négociation de contrats du client et du vendeur.

e. Services liés aux fusions et aux acquisitions – Aide globale concernant les fusions, les acquisitions et les restructurations.

f. Services de soutien fiscal – Services de planification et de consultation en matière fiscale.

5. En contrepartie de la prestation des services, nous avons facturé à ACMS, ainsi qu’aux autres sociétés du groupe Amdocs ayant eu recours aux services, des frais généralement calculés comme le remboursement des dépenses de fonctionnement d’AML plus une majoration de 7,5 % (le coût + 7,5 %). Il faut également souligner que les services de tiers qui nous ont été facturés ont été transférés aux sociétés du groupe au prix coûtant, c’est‑à-dire sans majoration, de sorte que la majoration de nos frais s’élève en fait à moins de 7,5 %. En outre, les frais que nous avons facturés ne couvrent pas toutes nos dépenses de fonctionnement (par exemple, les dépenses relatives à la rémunération en actions n’ont pas été incluses dans les coûts de base). [Souligné dans l’original.]

6. Étant donné qu’AML fournit des services semblables à d’autres sociétés du groupe Amdocs, AML attribue les frais aux différentes sociétés du groupe de la façon expliquée ci-dessous, de sorte que chaque société du groupe ayant recours aux services se voit facturer seulement sa part proportionnelle des coûts.

7. La répartition des frais se fait par l’application d’une formule d’attribution distincte et appropriée pour chaque groupe ou « bassin » de coûts, selon la nature des coûts.

8. Au cours de la période en cause, les formules d’attribution respectives sont calculées annuellement à partir des résultats de fin d’année du groupe Amdocs (l’année se termine le 30 septembre) et des facteurs financiers respectifs touchant chaque bassin de coûts. Une fois que les facteurs financiers pertinents sont définis, la part proportionnelle attribuée à ACMS (et à chaque autre société du groupe) est calculée en divisant les facteurs financiers applicables seulement à ACMS par les facteurs financiers du groupe Amdocs dans son ensemble.

L’annexe A ci-jointe explique le mécanisme d’attribution.

Veuillez noter que plusieurs facteurs servent au calcul, lesquels doivent être pris en compte lorsque l’on compare les sommes facturées et les montants inscrits dans les états financiers d’ACMS, notamment :

a. L’année fiscale d’Amdocs Limited (la société mère du groupe) ainsi que celle d’AML se terminent le 30 septembre, alors que celle d’ACMS se termine le 31 mars.

b. Amdocs Limited prépare ses états financiers conformément aux principes comptables généralement reconnus (PCGR) suivis aux États‑Unis. Afin que toutes les sociétés du groupe se trouvent en terrain égal (afin que les pommes soient comparées avec des pommes), les formules d’attribution sont appliquées en fonction des états financiers de chaque société ajustés selon les PCGR américains, c’est‑à‑dire en « liasses d’informations financières » utilisées à des fins de consolidation, plutôt que des états financiers exigés par les lois locales.

c. La devise fonctionnelle d’Amdocs Limited, ainsi que celle d’AML, est le dollar américain. Cette devise est utilisée à des fins de consolidation et sert également à la facturation des frais par AML à ACMS et aux autres sociétés du groupe. Toutefois, les rapports d’ACMS exigés par la loi sont dans la devise locale (le dollar canadien).

9. À votre demande, nous avons résumé, à l’annexe B, les frais facturés à ACMS et le total des frais qu’a facturés AML à toutes les autres entités du groupe Amdocs au cours de la période en cause.

Veuillez noter que les factures sont envoyées mensuellement en fonction d’un rajustement pour les mois précédents. Par conséquent, il y a des divergences de date lorsqu’on examine une période de facturation donnée.

[60]           Les dernières précisions apportées par M. Buchheit à ce sujet dans son affidavit supplémentaire du 28 août 2015 sont les suivantes :

[traduction]

23. Pour ce qui est de la demande IM1-10, comme je l’ai dit dans les paragraphes 15 à 17 du premier affidavit, j’y ai répondu en envoyant à M. Zambon, dans un courriel daté du 17 juillet 2015, les documents joints à mon premier affidavit en tant que pièce « D ».

24. Comme je l’ai dit au paragraphe 17 de mon premier affidavit, dans le cadre d’une conférence téléphonique tenue le 31 juillet 2015, j’ai expliqué à M. Zambon que la pièce « D » présentait une analyse détaillée des frais de gestion facturés par Amdocs Management Limited et la méthode d’attribution de ces dépenses entre les membres du groupe Amdocs.

25. ACMS n’a en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde aucun autre document de travail, document justificatif ou autre renseignement lié aux frais de gestion facturés par Amdocs Management Limited.

26. J’ai été informé par Amdocs Management Limited que, à part les documents de travail déjà fournis et les documents de travail qui présentent une ventilation des frais de gestion entre d’autres entités du groupe Amdocs ayant recours aux services d’Amdocs Management Limited, il n’existe aucun autre document de travail concernant les frais de gestion facturés par Amdocs Management Limited au groupe Amdocs.

27. On m’a dit que les frais de gestion d’Amdocs Management Limited sont calculés selon une entente de « prix de revient majoré » dans le cadre de laquelle ses dépenses telles qu’inscrites dans ses états financiers (moins les frais de rémunération en actions) sont attribuées aux autres membres du groupe Amdocs.

28. Je crois que l’explication complète sur l’attribution figure à la pièce « D » de mon premier affidavit.

29. Enfin, je pense que les documents fournis par ACMS à l’ARC sont suffisamment détaillés et montrent clairement que le principe de la pleine concurrence est respecté.

[61]           L’ARC se plaint que les renseignements fournis, y compris les données des feuilles de calcul jointes à la lettre d’Amdocs Management Ltd du 10 juillet 2015, ne révèlent pas ce qui entre dans les sommes payées par ACMS. Nous disposons seulement de documentation sommaire, sans les documents de travail, documents justificatifs ou autres renseignements nécessaires pour évaluer si les sommes facturées et payées constituent des dépenses raisonnables ou si ACMS ne fait que payer la facturer sans faire de vérification.

[62]           De toute façon, nous savons par M. Buchheit qu’ACMS n’a pas en sa possession, sous son autorité ou sous garde d’autres documents qui seraient des documents de travail, des documents justificatifs ou d’autres renseignements liés aux frais de gestion facturés par Amdocs Management Ltd à ACMS et qu’Amdocs Management Ltd a aussi fait savoir qu’elle a déjà fourni tout ce qu’elle pouvait relativement à cette question. Il n’y a aucune raison de douter de M. Buchheit ni de croire qu’ACMS n’a pas déployé des efforts raisonnables pour obtenir les renseignements demandés dans la demande IM1-10.

F.                  Le droit

[63]           La Cour doit trancher une demande sommaire présentée en application de l’article 231.7 de la LIR pour l’obtention d’une ordonnance obligeant ACMS à fournir les documents exigés par le ministre en vertu de l’article 231.1 de la LIR.

[64]           Comme la juge MacTavish l’a récemment souligné dans la décision Chamandy, précitée, le ministre doit satisfaire à trois (3) conditions pour que la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire d’accorder une ordonnance en vertu de l’article 231.7 de la LIR :

[27]      Premièrement, la Cour doit être convaincue que la personne contre laquelle l’ordonnance est sollicitée « n’a pas fourni l’accès, l’aide, les renseignements ou les documents [demandés par le ministre] bien qu’elle en soit tenue par les articles 231.1 ou 231.2 » : alinéa 231.7(1)a).

[28]      Deuxièmement, la Cour doit être convaincue que la personne était tenue de fournir les renseignements ou documents demandés par le ministre, mais qu’elle ne l’a pas fait : alinéa 231.7(1)a).

[29]      Enfin, la Cour doit être convaincue que « le privilège des communications entre client et avocat [au sens de la Loi] […] ne peut être invoqué à [l’]égard » des renseignements ou des documents demandés : alinéa 231.7(1)b).

[…]

[35]      De graves conséquences peuvent découler du non-respect d’une ordonnance de production, y compris des amendes et/ou l’emprisonnement. Par conséquent, la Cour a indiqué dans l’affaire SML Operations qu’elle n’exercerait pas son pouvoir discrétionnaire d’ordonner la production des documents que le ministre cherche à obtenir à moins d’être convaincue que les conditions de l’article 231.7 de la LIR ont été « remplies de façon claire » : au paragraphe 15.

Voir également la décision Lee, précitée, aux paragraphes 24 et 25.

[65]           Il ressort clairement du dossier dont je dispose que les documents exigés ne sont pas protégés par le privilège.

G.                ACMS a-t-elle fourni les documents demandés par le ministre?

[66]           ACMS soutient que le ministre ne s’est pas acquitté « de façon claire » de son fardeau de prouver qu’elle n’avait pas déjà fourni les documents exigés ou, à titre subsidiaire, que les documents fournis à ce jour ne permettent pas à l’ARC d’effectuer la VPT.

[67]           En effet, ACMS demande à la Cour de conclure que le ministre possède déjà ce qu’il faut pour effectuer la VPT. Cependant, comme l’a indiqué le ministre, et comme l’a récemment souligné le juge Campbell dans la décision Canada (Revenu national) c BP Canada Energy Company, 2015 CF 714, au paragraphe 23, il incombe au ministre d’établir tant la portée de la vérification que les documents nécessaires pour effectuer la vérification. Il ne revient pas à ACMS de déterminer ce dont le ministre a besoin pour effectuer la vérification.

[68]           Dans l’arrêt Saipem Luxembourg S.V. c Canada (Douanes et Revenu), 2005 CAF 218, aux paragraphes 33 à 36, la Cour d’appel fédérale établit clairement ce qui suit :

[33]      L’Agence justifie la portée de la mise en demeure en disant qu’elle a besoin de tous les documents de Saipem pour entreprendre une vérification portant sur les renseignements soumis par Saipem. Cette position est bien résumée au paragraphe 29 de l’Exposé de faits et du droit de l’Agence :

[traduction]

Dans la présente affaire, le ministre cherche à obtenir des renseignements pour entreprendre une vérification générale des affaires de l’appelant pour les années 1999 et 2000, afin de déterminer sa dette fiscale canadienne, le cas échéant. Comme le dit la décision McKinlay, l’un des objectifs d’une vérification est de vérifier les renseignements. Le fait que les renseignements ont été fournis par le contribuable ou peuvent provenir d’une autre source est hors de propos. Il est dans l’intérêt de l’ACDR, pour vérifier la dette fiscale de l’appelant, de forcer l’appelant à produire ses livres et ses registres. Tous les livres et les registres de l’appelant sont pertinents à une vérification même si certains d’entre eux servent uniquement à vérifier, après examen, qu’ils n’ont aucun effet sur la dette fiscale canadienne de l’appelant.

[34]      La question que doit trancher la cour de révision n’est pas le caractère raisonnable de l’intention de l’Agence d’entreprendre une vérification, mais le caractère raisonnable de la mise en demeure, compte tenu de la décision de l’Agence quant à la nécessité d’une vérification. L’argument de Saipem selon lequel l’Agence aurait pu obtenir les documents qu’elle recherchait en délivrant une mise en demeure relative à des catégories précises de documents nous amène à mettre en question le caractère raisonnable d’une vérification. En l’absence de quelque preuve de mauvaise foi ou d’un autre motif répréhensible, le caractère approprié d’une vérification se situe en dehors du mandat confié à la Cour par le paragraphe 231.6(5).

[35]      Par conséquent, la question est la suivante : l’intention de l’Agence d’entreprendre une vérification à l’endroit de Saipem justifie‑t‑elle le besoin de décerner une mise en demeure visant la totalité des registres de Saipem? Un examen assez poussé mène à se demander si l’on peut vraiment entreprendre une vérification en se fondant uniquement sur les documents fournis par la personne faisant l’objet de la vérification, sans avoir la possibilité de vérifier l’existence d’autres documents. En pratique, la question se pose rarement, car je suis persuadé que la plupart des entreprises recevant une mise en demeure semblable à celle de la présente affaire acceptent l’offre de l’Agence de considérer leur consentement à une vérification sur les lieux comme une conformité suffisante à la mise en demeure. Mais le caractère de la mise en demeure doit être évalué en fonction de ses modalités, et non selon une autre méthode de conformité.

[36]      C’est la prérogative de l’Agence de décider si elle va entreprendre une vérification, et la forme que va prendre cette vérification. Comme les documents en question sont de, par leur nature, tenus en dehors du Canada, l’Agence ne peut, pour les obtenir, que décerner la mise en demeure qu’elle a décernée en l’espèce. S’il en résulte une vérification qui ne satisfait pas aux normes régulières de l’Agence, c’est néanmoins la meilleure vérification que peut entreprendre l’Agence dans les circonstances. Aussi, je conclus que la décision de l’Agence d’entreprendre une vérification justifie la portée de la mise en demeure signifiée à Saipen par le ministre.

[69]           En outre, la Cour suprême du Canada, en confirmant deux décisions de la Cour de l’Échiquier, Provincial Paper, Limited c Minister of National Revenue, [1955] Ex CR 33, [1954] CTC 367, et Western Leaseholds Limited c Minister of National Revenue, [1958] Ex CR 277, [1958] CTC 257, dans l’arrêt Western Minerals Ltd c Minister of National Revenue, [1962] RCS 592, à la page 596, précise clairement ce qui suit :

[traduction]

Les conclusions tirées dans la première de ces deux décisions et appliquées dans la seconde sont énoncées avec justesse dans la note liminaire :

Conclusions : Il n’appartient ni à la Cour ni à qui que ce soit de déterminer avec quelle intensité doit être examinée la déclaration de revenu du contribuable dans un cas donné. Il s’agit d’une décision qui relève exclusivement du ministre, qui agit par l’intermédiaire de fonctionnaires compétents.

2. Ni la loi ni aucun autre instrument ne fixe, de façon expresse ou tacite, les exigences essentielles de l’établissement d’une cotisation. Il appartient exclusivement au ministre de décider de la façon dont il évaluera et établira la responsabilité du contribuable dans un cas donné. Il lui revient de déterminer la portée de l’enquête qu’il doit faire, si enquête il doit y avoir.

3. Le ministre peut très bien conclure que la déclaration de revenu d’un contribuable représente une déclaration exacte de ses revenus et ne vérifier que le calcul de l’impôt et, sans autre examen ou enquête, déterminer l’obligation fiscale en conséquence. Le cas échéant, on ne peut affirmer qu’il n’a pas établi de cotisation.

Je suis tout à fait d’accord avec ces affirmations.

[70]           Selon le dossier dont je dispose, le ministre a demandé des renseignements supplémentaires au cours des discussions et des échanges avec ACMS, et il agissait ainsi entièrement dans le cadre de ses pouvoirs et en conformité avec la jurisprudence citée ci‑dessus. Toute vérification demeure un travail en cours tant qu’elle n’est pas achevée, et le ministre a le droit de demander d’autres documents au besoin. En outre, comme il a été mentionné ci-dessus et dans les affidavits du fonctionnaire de l’ARC Morris Zambon, le chargé de dossiers importants de la Direction de la vérification travaillant au dossier en cause, les renseignements fournis ne permettent pas à l’ARC de trouver réponse aux questions relatives aux principes de la pleine concurrence qui sont au centre de la VPT. Par conséquent, je suis d’avis que le ministre a établi qu’ACMS n’a pas fourni la documentation exigée et n’a pas répondu de façon satisfaisante aux demandes IM1‑2, IM1‑10 ou IM1‑12.

H.                ACMS est-elle tenue au titre de l’article 231.1 de fournir les documents demandés par le ministre?

[71]           À mon avis, c’est la seule question que la Cour doit trancher en l’espèce. Comme il a été mentionné ci-dessus, les parties se sont efforcées de parvenir à une production entière, mais elles se sont trouvées dans une impasse parce qu’ACMS n’avait pas les documents demandés et n’était pas en mesure de les obtenir des autres entités du groupe Amdocs. Il se peut que les documents en cause existent, mais rien ne le prouve. Par conséquent, la question que soulève l’espèce est celle de savoir quelles sont les obligations statutaires d’ACMS dans cette situation.

[72]           Tout d’abord, je n’ai aucune raison de mettre en doute le témoignage de M. Buchheit, par lequel il est établi ce qui suit : 

a)    pour ce qui est de la demande IM1-2 et de l’organigramme des responsabilités, [traduction] « ACMS n’a pas de tel organigramme en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde » et Amdocs Inc. l’a informé [traduction] « qu’il n’existe pas d’organigramme des responsabilités du type exigé par l’ARC »;

b)    pour ce qui est de la demande IM1-10, [traduction] « ACMS n’a en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde aucun autre document de travail, document justificatif ou autre renseignement lié aux frais de gestion facturés par Amdocs Management Limited » et Amdocs Management Limited l’a informé que :  

[traduction]

« à part les documents de travail déjà fournis et les documents de travail qui présentent une ventilation des frais de gestion entre d’autres entités du groupe Amdocs ayant recours aux services d’Amdocs Management Limited, il n’existe aucun autre document de travail concernant les frais de gestion facturés par Amdocs Management Limited au groupe Amdocs »;

c)    pour ce qui est de la demande IM1-12, [traduction] « ACMS n’a en sa possession, sous son autorité ou sous sa garde aucun document de travail sur les frais de soutien administratif qui lui ont été attribués ».

[73]           Si l’ARC cherchait à obtenir n’importe quel organigramme des responsabilités pouvant exister pour le groupe Amdocs, alors elle aurait dû le demander. La demande IM1-2 visait un organigramme comportant des renseignements précis, et il semble, selon la preuve dont je dispose, que l’organigramme dans la forme demandée n’existe pas. Il ressort également de la preuve que les documents exigés dans les demandes IM1-10 et IM1-12 n’existent pas non plus ou ne sont pas à la disposition d’ACMS. Il se peut qu’il s’agisse de documents qui auraient dû exister et qu’ACMS aurait dû intégrer à ses registres et livres de comptes, en application du paragraphe 230(1) de la LIR :

[…] dans la forme et renfermant les renseignements qui permettent d’établir le montant des impôts payables en vertu de la présente loi, ou des impôts ou autres sommes qui auraient dû être déduites, retenues ou perçues.

Cependant, la présente demande a été présentée au titre des articles 231.7 et 231.1 de la LIR. La Cour est donc appelée à décider si elle doit utiliser le pouvoir discrétionnaire que lui confère l’article 231.7 afin d’ordonner la production de documents qui ne sont pas en la possession, sous l’autorité ou sous la garde d’ACMS et qui peut-être n’existent même pas. Le ministre n’a pas invoqué l’article 231.6 dans sa demande. Si les documents exigés par le ministre en l’espèce existent réellement, ceux-ci, selon la preuve devant moi, se trouvent à l’étranger. Toutefois, il n’a pas été prouvé qu’ils existent, du moins pas dans la forme exigée par le ministre. Si le ministre devait conclure que ces documents existent hors du Canada, il pourrait alors invoquer l’article 231.6 de la LIR.

[74]           Le ministre n’a pas non plus demandé à la Cour d’ordonner à ACMS de créer les documents qui n’existent pas, même s’il s’agit d’une mesure possible au titre de l’article 231.7. Le ministre peut, en vertu du paragraphe 230(3) de la LIR, préciser quels registres ou livres de comptes ACMS doit tenir afin de satisfaire à ses obligations en application du paragraphe 230(1) de la LIR, mais la Cour n’est pas saisie de cette question. Le ministre pourra exercer ce pouvoir s’il le juge indiqué.

[75]           Par conséquent, la Cour se trouve devant les faits suivants : selon l’alinéa 231.7d), ACMS était tenue de donner accès aux renseignements exigés en vertu de l’article 231.1, mais, selon la preuve dont je suis saisi, ACMS n’était pas en possession de ces renseignements et n’avait pas le pouvoir de les acquérir à supposer qu’ils existassent ailleurs. La LIR ne prévoit pas la création de documents qui n’existent pas. Ce qui n’existe pas ne peut être produit. L’exception prévue au paragraphe 231.5(2) s’applique en l’espèce, car ACMS était tout simplement incapable de faire tout ce qu’on exigeait d’elle au titre de l’article 231.

[76]           Le paragraphe 231.5(2) de la LIR oblige ACMS à faire ce qu’elle est tenue de faire « par le paragraphe (1) ou les articles 231.1 à 231.4 […] sauf impossibilité ». J’en conclus, à partir de la preuve dont je dispose, qu’ACMS a déployé des efforts raisonnables pour obtenir les documents en cause, mais qu’elle n’est pas en mesure de fournir les autres documents et renseignements exigés par le ministre dans les demandes IM1-2, IM1-10 et IM1-12. Pour cette raison, il ne sert à rien d’ordonner à ACMS de faire quelque chose qu’elle est incapable de faire et je choisis de ne pas exercer le pouvoir discrétionnaire que me confère le paragraphe 231.7(1) pour accorder au ministre les mesures demandées en l’espèce.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.      La demande d’ordonnance du ministre est rejetée, avec dépens en faveur de la défenderesse.

« James Russell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross, traductrice-conseil


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T -1018-15

 

INTITULÉ :

MINISTER OF NATIONAL REVENUE v AMDOCS CANADIAN MANAGED SERVICES INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 29 septembre 2015

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE :

LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 30 octobre 2015

 

COMPARUTIONS :

Margaret J. Nott

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Glenn Ernst

Jordan Scopa

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER­ :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Goodmans s.r.l.

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

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