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Date : 20150413


Dossier : IMM‑608‑14

Référence : 2015 CF 451

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 13 avril 2015

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

TAMARA KOKAREVA

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

ORDONNANCE ET MOTIFS

(Ordonnance rendue à l’audience à Toronto (Ontario), le 8 avril 2015)

[1]               Tamara Kokareva [la demanderesse] a présenté une demande de contrôle judiciaire de la décision du 5 décembre 2013 par laquelle un agent des visas de l’ambassade du Canada à Ankara, en Turquie [l’agent], a rejeté la demande de visa de résidente temporaire de la demanderesse [la décision]. La demande de contrôle judiciaire est présentée en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27.

[2]               La demanderesse est résidente de Baku, en Azerbaïdjan, et est âgée de 78 ans. Elle a pris sa retraite de la profession d’enseignante de russe en 2010, mais continue d’enseigner le russe à titre de professeure particulière.

[3]               Le fils unique de la demanderesse est décédé en 1994 et son époux s’est éteint en 2000. Son unique petite‑fille vit en Russie. La demanderesse a deux sœurs, dont une habite en Allemagne et l’autre au Canada.

[4]               De 2010 à 2013, la demanderesse a présenté cinq demandes de visa en vue de visiter le Canada. Toutes ces demandes ont été rejetées. La cinquième demande, qui est l’objet de la décision, a été présentée le 2 décembre 2013 [la présente demande] et rejetée trois jours plus tard au motif que l’agent n’était pas convaincu que la demanderesse quitterait le Canada à la fin de sa période de séjour autorisée.

[5]               Dans la présente demande, la demanderesse expliquait qu’elle souhaitait visiter sa sœur et sa nièce, qu’elle prévoyait demeurer au Canada pour une période de trois mois et qu’elle disposait de 5 000 $ US pour son séjour. Le dossier certifié du tribunal comprend une lettre de la nièce canadienne de la demanderesse datée du 8 novembre 2013 et une lettre de l’employeur de la nièce de la demanderesse mentionnant que le salaire annuel de la nièce est de 88 000 $.

[6]               La nièce explique dans sa lettre que sa tante est fortement attachée à son domicile à Baku, en Azerbaïdjan, où elle possède une maison libre de dette et où sont situées les tombes de son mari et de son fils. Elle souligne que la demanderesse a une vie confortable à Baku, où elle reçoit, en plus de la sienne propre, la pension de son défunt époux, et qu’elle est très proche de sa petite‑fille qu’elle visite régulièrement en Russie.

[7]               La nièce mentionne aussi que même si la demanderesse et ses sœurs vivent dans des pays différents depuis de nombreuses années, elles sont restées très proches et se parlent au téléphone et par Skype.

[8]               Enfin, la nièce de la demanderesse indique qu’elle couvrira toutes les dépenses liées au voyage de sa tante, y compris le billet de retour et l’assurance maladie, et que sa tante est invitée à rester chez elle, où elle disposera de sa propre chambre avec salle de bain.

I.                   La décision

[9]               L’agent n’a pas soulevé de préoccupations quant à la crédibilité de la demanderesse ni de la nièce, mais n’était néanmoins pas convaincu que la demanderesse quitterait le Canada à la fin de sa période de séjour autorisée pour les motifs suivants :

                     Ses antécédents de voyage

                     Ses liens familiaux au Canada et dans son pays de résidence

                     L’objet de sa visite

                     Ses actifs personnels et sa situation financière

[10]           Les notes de l’agent donnent des renseignements additionnels sur la décision. Les passages pertinents sont les suivants :

[traduction]
Femme de 76 ans qui veut visiter ses nièces et sa sœur au Canada. Refus antérieurs déclarés […]

Sœurs de la DP vivent au Canada et en Allemagne depuis 1999 et 1997 respectivement. DP n’a jamais visité l’une ou l’autre précédemment. DP a une petite‑fille en Russie, ce qui garantit (selon l’hôtesse) que la DP retournera en Azerbaïdjan. Dossier montre fonds et actifs limités et DP prévoit passer trois mois au Canada. Fonds de 5000 $ US disponibles dans compte bancaire.

II.                Question en litige

[11]           La question en litige est celle de savoir si la décision est raisonnable.

III.             Analyse et conclusions

[12]           Dans mon examen de la question, je suis conscient des faibles exigences relatives aux motifs de la décision et de son caractère hautement discrétionnaire. Néanmoins, j’estime la décision déraisonnable pour les motifs suivants :

                          i.      Il semble que l’agent n’ait pas saisi l’importance de certains éléments de preuve. Par exemple, la demanderesse a divulgué le refus de ses demandes antérieures de visas de résidence temporaire. C’est une preuve de son honnêteté, et pourtant elle n’est apparemment pas crue quand elle affirme qu’elle rentrera chez elle après avoir visité le Canada. De même, l’agent n’a pas reconnu l’importance des visites effectuées par la demanderesse auprès de sa petite‑fille en Russie. Ils établissent une habitude de retour en Azerbaïdjan et montrent qu’elle a des parents proches près de chez elle.

                        ii.      L’agent a considéré l’absence de visites de sa sœur au Canada par la demanderesse comme un facteur défavorable, ce qui n’est pas raisonnable étant donné que le Canada a refusé de manière répétée de lui accorder un visa qui lui aurait permis d’effectuer une telle visite.

                      iii.      L’agent a aussi minimisé les actifs de la demanderesse, qui comprennent une maison familiale lui appartenant en propre.

                      iv.      L’agent a fait peu de cas des ressources réservées à sa visite par la demanderesse. Il ne fait aucune mention du soutien substantiel offert par la nièce canadienne de la demanderesse.

                        v.      L’agent a aussi fait peu de cas des liens de la demanderesse avec l’Azerbaïdjan. Elle y possède des liens professionnels, au nombre desquels son travail actuel de professeure particulière; elle y possède des liens familiaux et sociaux, au nombre desquels ses amis et sa petite‑fille; elle y possède des liens affectifs envers les tombes de son fils et de son mari; elle y possède des liens économiques dont l’agent ne fait aucune mention, qui comprennent sa propre pension et celle de son mari.

[13]           Pour tous ces motifs, j’accueille la demande de contrôle judiciaire.

[14]           Aucune question n’a été soumise pour certification en vue d’un appel.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que :

1.      La demande de contrôle judiciaire est accueillie et la décision est cassée;

2.      La demande de visa sera examinée à nouveau par un autre agent;

3.      La demanderesse peut présenter des documents additionnels aux fins du nouvel examen.

« Sandra J. Simpson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Loïc Haméon‑Morrissette


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑608‑14

 

INTITULÉ :

TAMARA KOKAREVA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 8 AVRIL 2015

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

juge SIMPSON

 

DATE DES MOTIFS :

Le 13 avril 2015

 

COMPARUTIONS :

Hart A. Kaminker

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Neeta Logsetty

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Hart A. Kaminker

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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