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Date : 20141205


Dossier : T‑1435‑12

Référence : 2014 CF 1173

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 5 décembre 2014

En présence de monsieur le juge Campbell

ENTRE :

BUFFALO POINT COTTAGERS

ASSOCIATION INC.

demanderesse

et

PREMIÈRE NATION DE BUFFALO POINT et

BUFFALO POINT DEVELOPMENT CORP.

LTD.

défenderesses

et

COMMISSION DE LA FISCALITÉ DES PREMIÈRES NATIONS

intervenante

ORDONNANCE ET MOTIFS

I.                   Aperçu de la décision

[1]               Les terres de réserve de la Première nation de Buffalo Point sont situées dans le coin sud‑est de la province du Manitoba, le long des rives du lac des Bois. C’est là que vivent les membres de la Première nation, et c’est aussi là que des propriétaires de chalets non autochtones résident en permanence ou viennent séjourner à des fins récréatives sur des terres de réserve dont la Première nation dispose à des fins de location. Pendant de nombreuses années, ensemble, ces deux groupes ont entretenu des rapports positifs et productifs.

[2]               La Première Nation de Buffalo Point agit en justice par l’entremise de la personne morale qu’elle possède en propriété exclusive, la Buffalo Point Development Corp. Ltd. (la Première nation et sa personne morale seront désignées ensemble comme « Buffalo Point » dans les présents motifs). Buffalo Point est la bailleresse des terres de réserve. La demanderesse agit à titre de représentante autorisée de propriétaires de chalets qui sont des locataires des terres. La relation entre Buffalo Point et les propriétaires de chalets s’est développée pour répondre à un besoin commun d’établir une entente financière fiable entre la bailleresse et les locataires.

[3]               En tablant sur la bonne foi et la confiance de part et d’autre, à partir de 1999, des ententes ont été conclues pour partager les coûts de fonctionnement annuels. La dernière entente a été conclue en 2008 (l’entente de 2008). Aux termes de cette entente, les propriétaires de chalets s’engageaient à défrayer 55 % des coûts, étant entendu qu’aucun régime d’impôt foncier ne serait imposé à l’avenir. L’entente de 2008 établissait un processus selon lequel les propriétaires de chalets paieraient des frais annuels en fonction du coût de services courants comme l’entretien des routes, le déneigement et l’entretien des installations récréatives. Aux fins de la présente demande, il importe de mentionner qu’aucuns frais scolaires n’étaient imposés parce que Buffalo Point n’exploitait pas d’école.

[4]               En 2005, la Loi sur la gestion financière des premières nations, LC 2005, c 9 (la Loi) a été adoptée. Cette loi habilitait Buffalo Point à remplacer le régime convenu de partage des coûts par un régime législatif d’impôt foncier, et Buffalo Point a signalé son intention de se prévaloir de cette possibilité. C’est la Commission de la fiscalité des premières nations (la Commission) qui applique la Loi, et, dès 2010, les propriétaires de chalets ont commencé à consulter la Commission au sujet des répercussions que la mise en œuvre d’un régime fiscal par Buffalo Point pourrait avoir sur leurs droits de tenure à bail. À cette époque, les propriétaires de chalets ont informé le personnel de la Commission qu’en vertu de l’entente de 2008, une entente venait tout juste d’être conclue concernant les frais annuels qu’ils devraient payer pour les deux années suivantes, et ils ont demandé à ce que leurs préoccupations concernant l’effet perturbateur de l’imposition d’une taxe soient examinées. Le personnel de la Commission a assuré les propriétaires de chalets que la transition vers un régime fiscal serait réussie et que la Commission travaillerait avec Buffalo Point afin de résoudre toute préoccupation.

[5]               Néanmoins, après de nombreuses consultations, le 25 juin 2012, aux termes d’une seule et même décision, la Commission a agréé six textes législatifs en matière fiscale proposés par Buffalo Point, soit : la Buffalo Point First Nation Property Assessment Law, 2011; la Buffalo Point First Nation Property Assessment Amendment Law, 2012; la Buffalo Point First Nation Property Taxation Law, 2011; la Buffalo Point First Nation Property Taxation Amendment Law, 2012; la Buffalo Point First Nation Annual Rates Law, 2012; et la Buffalo Point First Nation Expenditure Law, 2012.

[6]               Le remplacement forcé du régime de partage des coûts par le régime d’impôt foncier n’a pas été bien accueilli par les propriétaires de chalets parce que, selon eux, ils perdaient injustement le contrôle financier de leurs taux de location et la stabilité financière dont ils avaient joui sous le régime de partage des coûts. En conséquence, pour tenter de recouvrer ce contrôle, les propriétaires de chalets ont cherché à obtenir justice en intentant deux recours parallèles devant les tribunaux.

[7]               Le premier recours est une action intentée devant la Cour du Banc de la Reine du Manitoba par laquelle les propriétaires de chalets cherchent à faire exécuter une clause d’arbitrage stipulée dans l’entente de 2008. Le deuxième recours est la présente demande, qui conteste la décision de la Commission mettant en œuvre le régime fiscal à l’égard des terres louées aux propriétaires de chalets.

A.                L’objet de la demande des propriétaires de chalets

[8]               Aux termes de la présente demande, les propriétaires de chalets attaquent directement l’agrément par la Commission de l’ensemble du régime fiscal proposé par Buffalo Point, en soulevant une série détaillée de questions de fond et de questions procédurales concernant l’application de la Loi par la Commission. Le présent avis de demande comporte un résumé clair des motifs invoqués par les propriétaires de chalets au soutien de leur demande d’annulation de la décision de la Commission :

[traduction]

a. La PNBF [Première nation de Buffalo Point] a pris les mesures nécessaires, à partir de 1976, pour agir comme bailleresse des lots de chalet loués aux propriétaires de chalets, dont la plupart ont depuis construit des chalets et d’autres améliorations sur les lots de chalet.

b. Les propriétaires de chalets ont été incités à conclure leurs baux en partie sur la foi de déclarations expresses faites soit par la PNBP, soit par la BPDC [Buffalo Point Development Corp.], soit par ces deux entités, selon lesquelles les paiements annuels demeureraient inférieurs aux taxes foncières imposées dans d’autres territoires parce que la PNBP n’exploite pas d’école ni de système scolaire.

c. La demanderesse a négocié avec la PNBP et/ou la BPDC une série d’ententes relatives aux paiements annuels qui s’accordaient avec les déclarations de la PNBP et la BPDC.

d. Les textes législatifs attaqués agréés par la CFPN [Commission de la fiscalité des premières nations] font fi des droits légaux de la demanderesse et des propriétaires de chalets ou passent outre à ces droits en privant la demanderesse et les propriétaires de chalets des avantages découlant des obligations de la PNBP et de la BPDC envers eux, lesquels droits et avantages ont été convenus par toutes les parties à la suite de négociations en bonne et due forme et ont été accordés à titre onéreux.

e. La PNBP et/ou la BPDC ont expressément déclaré à la demanderesse pendant de nombreuses années que la PNBP ne mettrait en œuvre aucun régime d’impôt foncier. En outre, lorsque la PNBP a entamé le processus de mise en œuvre des textes législatifs attaqués, elle a déclaré expressément et publiquement à la demanderesse qu’aucun paiement ne serait exigé des propriétaires de chalets en rapport avec des écoles. La CFPN était parfaitement au courant de ces déclarations à l’époque où elle a rendu sa décision agréant les textes législatifs attaqués.

f. Malgré les assurances données, la PNBP a soumis à l’agrément de la CFPN le texte législatif sur les taux, qui fixait un taux par mille de 30,97. Ce taux est le même que celui qui est appliqué dans le territoire voisin de la municipalité rurale de Piney, qui applique un taux correspondant à la somme de deux catégories distinctes de taxes : premièrement, le taux par mille fixé par la municipalité rurale de Piney, qui est de 13,12, et qui correspond à des taxes perçues pour payer des services fournis par la municipalité; deuxièmement, le taux par mille de la taxe scolaire perçue par la commission scolaire locale pour financer des écoles et un système scolaire, qui est de 17,85. Il en résulte un taux par mille combiné total de 30,97.

g. La CFPN a agréé le texte législatif sur les taux malgré qu’elle savait, d’une part, que la PNBP avait déclaré à la demanderesse qu’elle n’inclurait pas de coûts liés à des écoles, et d’autre part, que la demanderesse se fiait à cette déclaration. La CFPN n’a rien fait pour dissiper la croyance de la demanderesse à cet égard.

h. La CFPN a agréé le texte législatif sur les taux en sachant que la PNBP n’exploite pas de système scolaire ni même d’école. Ce faisant, la CFPN a dérogé à ses propres normes, qui visent à faire en sorte que le taux d’imposition fixé par une première nation corresponde à celui de territoires comparables qui offrent des services similaires. La CFPN a permis à la PNBP d’appliquer un taux d’imposition qui n’est pas établi en fonction du coût des services qu’elle fournit aux contribuables.

i. En même temps que les textes législatifs attaqués, la PNBP a soumis à la CFPN un projet de « Taxpayer Representation to Council Law, 2012 » qui, s’il avait été agréé, aurait donné à la demanderesse et aux propriétaires de chalets un moyen de participer au régime fiscal. La CFPN n’a pas agréé ce texte législatif ni aucun texte législatif similaire relatif à la représentation des contribuables, dérogeant ainsi à sa mission consistant notamment à concilier les droits de la PNBP, de la demanderesse et des propriétaires de chalets. Il en résulte que la demanderesse et les propriétaires de chalets sont privés du droit de participer au régime fiscal. Les propriétaires de chalets sont imposés sans représentation ni participation.

j. La CFPN a omis de s’assurer que la PNBP agissait en conformité avec les exigences de la Loi sur la gestion financière des premières nations (la Loi) et, en particulier, en conformité avec les exigences de l’article 6 de cette loi, lorsqu’elle a agréé des modifications aux textes législatifs sur l’évaluation et sur l’imposition. La demanderesse a pris connaissance de ces modifications seulement après qu’elles furent agréées par la CFPN.

k. Les textes législatifs attaqués prévoient une taxe sur les améliorations apportées aux lots de chalet. La CFPN a agréé cette mesure malgré que celle‑ci n’ait aucun fondement légal. En effet, la Loi ne confère pas le pouvoir d’imposer une taxe sur autre chose qu’un intérêt foncier.

Tel qu’il appert du paragraphe d des motifs, les propriétaires de chalets soutiennent que, puisque le régime passe outre aux droits légaux des propriétaires de chalets découlant de l’entente de 2008 négociée avec Buffalo Point, la Commission était tenue de prendre cette réalité en compte et d’y donner effet au moment de décider d’agréer ou non le régime fiscal, mais elle a omis de le faire.

[9]               De plus, les propriétaires de chalets formulent des arguments fondés sur l’équité au soutien de leur prétention selon laquelle des présentations inexactes des faits et des erreurs relatives à des preuves attribuables au personnel de la Commission lors de la mise en œuvre du régime fiscal commandent que la décision faisant l’objet du présent contrôle soit annulée.

[10]           Comme on pourrait s’y attendre, la préoccupation principale des propriétaires de chalets relativement à la mise en œuvre du régime fiscal est l’augmentation des coûts de location annuels imposés qui en résulte. À cet égard, la demande porte principalement sur un aspect précis du régime fiscal soumis à l’agrément de la Commission, soit la Buffalo Point First Nation Annual Rates Law, 2012 (texte législatif sur les taux annuels).

B.                 L’objet de la Loi et le régime qui en résulte

[11]           Le recours des propriétaires de chalets s’inscrit dans le contexte d’un changement fondamental expliqué dans le préambule de la Loi, qui est cité à l’ANNEXE A des présents motifs, et dans des observations, adaptées comme suit, présentées par les avocates de la Commission, qui ont comparu pour le compte de la Commission, agissant à titre d’intervenante dans le cadre de la présente demande :

[traduction]

1. La présente demande est présentée par des contribuables sur des terres de réserve qui contestent des décisions portant agrément des textes législatifs d’une première nation en matière d’impôt foncier. L’intervenante, qui est l’auteure de ces décisions, n’abordera pas la question du bien‑fondé des décisions faisant l’objet du présent contrôle; elle expliquera le régime législatif en cause et le rôle du tribunal dans le cadre de ce régime et exprimera son point de vue au sujet de la norme de contrôle qu’il convient d’appliquer.

2. La taxation est un des pouvoirs inhérents d’un gouvernement. Les gouvernements des premières nations exercent ce pouvoir inhérent. Des régimes d’impôt foncier fondés sur une évaluation de la valeur des propriétés sont mis en œuvre par des administrations taxatrices (premières nations ou administrations locales) pour percevoir des recettes requises pour fournir des services aux collectivités et à leurs membres. Des recettes adéquates sont essentielles au fonctionnement d’un gouvernement, à la prestation de services et au développement des infrastructures.

3. Des lois fédérales reconnaissent les pouvoirs de taxation des premières nations et en permettent l’exercice. L’article 83 de la Loi sur les Indiens, LRC 1985, c I‑5, et, de manière plus complète, la Loi sur la gestion financière des premières nations, LC 2005, c 9 (la LGFPN ou la Loi), créent un cadre à l’intérieur duquel les premières nations exercent leurs pouvoirs existants.

4. Les gouvernements des premières nations ne sont pas la même chose que les administrations locales – leurs pouvoirs ont des sources différentes. Alors que les administrations locales possèdent uniquement les pouvoirs que les assemblées législatives provinciales leur délèguent, les droits à l’autonomie gouvernementale des premières nations renvoient à des droits et des responsabilités qui existaient avant la promulgation des lois fédérales et qui ne dépendent pas de ces lois.

5. Les tribunaux judiciaires ont régulièrement reconnu l’importance des pouvoirs de taxation dans le contexte de l’autonomie gouvernementale des premières nations, et ils ont régulièrement reconnu que les pouvoirs de taxation constituent un des pouvoirs réglementaires les plus importants dont les bandes ont besoin pour défrayer les coûts qu’ils doivent assumer en tant que gouvernements de leur territoire.

6. En permettant aux premières nations d’exercer leurs pouvoirs de taxation, l’intention du législateur fédéral était de contribuer à la réalisation des objectifs de l’autonomie gouvernementale.

7. Le gouvernement d’une première nation a le pouvoir de faire des lois; et c’est le conseil de la première nation qui élabore et adopte les lois relatives aux impôts fonciers. L’agrément d’un texte législatif en matière d’impôt foncier par la Commission de la fiscalité des premières nations (la CFPN ou la Commission) donne force de loi au texte législatif de la première nation. C’est seulement après l’agrément de la Commission que le texte législatif entre en vigueur.

8. La CFPN est organisme indépendant créé par une loi qui joue un rôle unique dans le domaine des impôts fonciers prélevés par les premières nations – il est investi de plusieurs responsabilités, dont développer les capacités des gouvernements des premières nations, faciliter le règlement des différends, remplacer le ministre des Affaires indiennes (le ministre) en ce qui a trait à l’agrément des textes législatifs des premières nations, promouvoir des régimes fiscaux crédibles qui sont transparents et qui attirent des investissements sur les terres de réserve, examiner les plaintes relatives aux textes législatifs des premières nations, et rendre des ordonnances remédiatrices lorsqu’il y a lieu.

9. La CFPN doit approuver le texte législatif que lui soumet le conseil d’une première nation lorsque ce texte législatif est conforme à toutes les exigences législatives et réglementaires. L’appréciation de la conformité du texte législatif d’une première nation à ces exigences est une question mixte de fait et de droit, et il s’agit d’un exercice qui cadre parfaitement avec la fonction centrale et les compétences spécialisées de la CFPN. En conséquence, la CFPN estime que la Cour devrait appliquer la norme de la décision raisonnable lorsqu’elle contrôlera les décisions de la CFPN d’agréer des textes législatifs qui sont visées par la présente demande.

[…]

58. La LGFPN confère à la Commission le pouvoir d’agréer les textes législatifs sur les recettes locales des premières nations et, ce faisant, de leur donner force de loi. Ce pouvoir comprend le pouvoir d’agréer des modifications aux textes législatifs des premières nations et l’abrogation de ces textes législatifs. La Commission a le pouvoir de rendre des décisions au sujet de la conformité à la Loi, aux normes et aux règlements. Ce type de décision cadre parfaitement avec les compétences spécialisées de la Commission.

59. Au moment où la CFPN a été constituée, l’organisme qui l’avait précédé avait près de 20 ans d’expérience touchant les politiques et les textes législatifs des premières nations en matière d’impôt foncier. Ce corpus de connaissances et d’expérience, combiné aux connaissances et à l’expérience exigées de chaque commissaire nommé, confère à la CFPN des compétences et une expérience spécialisées relativement aux questions qui concernent la taxation foncière des premières nations.

60. Les normes établies par la Commission en vertu du paragraphe 35(1) de la LGFPN font partie intégrante du cadre réglementaire et traduisent à la fois les connaissances spécialisées des commissaires et les compétences de la Commission. Déterminer si les textes législatifs sur les recettes locales soumises par les premières nations sont conformes aux normes, quant à la forme et quant au fond, constitue une des évaluations auxquelles la Commission doit procéder dans l’exercice de sa fonction d’examen et d’agrément des textes législatifs.

61. Les normes sont établies par la Commission pour favoriser la réalisation des objets de la Loi, notamment assurer l’intégrité du régime d’impôt foncier des premières nations et aider les premières nations à parvenir à la croissance économique en générant des recettes locales stables. Ces normes sont adoptées en vertu d’une habilitation législative expresse, et elles sont censées guider les législateurs des premières nations afin que ceux‑ci élaborent des textes législatifs qui s’accordent avec les exigences et les objectifs de la Loi. Étant donné que les normes établies par la Commission sont des exigences réglementaires auxquelles les textes législatifs doivent satisfaire pour pouvoir entrer en vigueur, ces normes se distinguent des lignes directrices ou des politiques telles que, par exemple, les circulaires d’information sous le régime de la Loi de l’impôt sur le revenu.

62. Les dispositions de fond comprises dans les normes témoignent des compétences spécialisées de la Commission en matière de taxation foncière et dans l’exercice de ses fonctions centrales sous le régime de la LGFPN. Ces dispositions donnent corps aux objectifs de la LGFPN en favorisant des régimes de taxation foncière qui sont transparents, elles procurent une certitude aux contribuables, et elles s’harmonisent avec les régimes d’impôts et d’évaluations foncières provinciaux pertinents.

63. La LGFPN confère à la CFPN le pouvoir d’examiner et d’agréer des textes législatifs, mais la CFPN n’a pas le pouvoir de promulguer elle‑même des textes législatifs ni de contraindre une première nation à en promulguer. La CFPN exerce son pouvoir d’examiner et d’agréer les textes législatifs sur les recettes locales d’une première nation seulement lorsqu’une première nation choisit d’adhérer au régime législatif de la LGFPN, qu’elle est ajoutée à l’annexe de la LGFPN, puis qu’elle soumet un texte législatif sur les recettes locales à la CFPN aux fins d’examen et d’agrément.

64. Le paragraphe 31(3) de la LGFPN dispose que, lorsqu’il est conforme au cadre législatif, la Commission « agrée » le texte législatif. Cela renforce l’appui de la Loi aux pouvoirs de taxation des premières nations. La Commission n’a pas le pouvoir de refuser son agrément pour quelque motif que ce soit si le texte législatif soumis est conforme à toutes les exigences législatives. La prise en compte de quoi que ce soit d’autre que les dispositions de la Loi, des règlements et des normes serait étrangère à la fonction d’agrément des textes législatifs de la Commission et déborderait le cadre de cette fonction. La Commission est disponible pour aider les contribuables et les gouvernements des premières nations à s’entendre en ce qui concerne la taxation foncière sur des terres de réserve, mais elle n’a pas le pouvoir de refuser d’agréer un texte législatif dans des circonstances où une telle entente fait peut‑être encore défaut.

65. Bien que la Commission doive prendre en compte toutes les observations qu’elle reçoit en vertu de l’alinéa 7b) de la LGFPN, la Loi ne précise pas que la Commission doit adopter quelque procédure particulière que ce soit pour recueillir ces observations. Par exemple, le législateur fédéral n’a pas cru bon d’exiger que la Commission, dans le cadre de son processus d’examen et d’agrément de textes législatifs, tienne une audience pour recueillir les observations des contribuables. Le choix du législateur fédéral au plan procédural se justifie puisque la tâche de la Commission consiste à évaluer si le texte législatif est conforme aux exigences et, le cas échéant, à l’agréer. Par contraste, dans le contexte d’un examen en vertu de l’article 33 de la LGFPN (lorsque la question consiste à déterminer si une première nation a omis de se conformer à la LGFPN ou à ses règlements, ou si une première nation a mal ou injustement appliqué un texte législatif), un règlement établit des procédures, et notamment l’audition de la plainte par la Commission.

66. Lorsqu’il est demandé à la Commission d’exempter des exigences législatives un projet de modification d’un texte législatif, la Commission a le pouvoir d’exempter un projet de modification des exigences en matière d’avis prévues au paragraphe 6(1) et des exigences en matière de renseignements à fournir prévues au paragraphe 8(1) de la Loi « si elle [la Commission] estime que la modification n’est pas importante » (paragraphes 6(2) et 8(2)). La Loi ne précise pas quelles modifications sont « importantes », et il revient à la Commission de procéder à cette qualification, qui relève de sa sphère de connaissances distinctive. À cette fin, les procédures d’agrément des textes législatifs de la Commission établissent le processus à suivre et précisent les critères à prendre en compte aux fins de ces exemptions (voir les procédures d’agrément des textes législatifs, aux articles 7 et 8).

(Mémoire des faits et du droit de l’intervenante, la Commission de la fiscalité des premières nations)

[12]           Plus précisément, la présente demande oblige à prendre en compte trois éléments importants de la Loi, soit l’article 29, l’article 31 et les paragraphes 35(1) et (2), qui sont cités à l’ANNEXE B.

C.                 Les attentes des propriétaires de chalets

[13]           En ce qui concerne les textes législatifs fiscaux soumis aux fins d’agrément par Buffalo Point, la mission de la Commission consistait à s’assurer qu’il était satisfait à ses normes et, le cas échéant, à agréer les textes législatifs fiscaux présentés, en vertu du paragraphe 31(3) de la Loi. Il ressort clairement de cette disposition que la Commission a un pouvoir réel à l’égard du processus d’agrément puisqu’elle établit les normes auxquelles il doit être satisfait. Toutefois, en vertu du paragraphe 31(2), la Commission est tenue de prendre en compte les objections concernant la conformité aux normes, mais s’il est satisfait aux normes, la Commission n’a pas le pouvoir de donner de suite à ces objections.

[14]           En opposition directe à la mission de la Commission, dans le cadre du processus de consultation qui a précédé la décision de la Commission, les propriétaires de chalets ont présenté une mission très différente et incompatible : veiller à ce que les textes législatifs fiscaux de Buffalo Point ne soient pas agréés ou à ce que, s’ils étaient agréés, ils répondent aux attentes des propriétaires de chalets. D’ailleurs, la présente demande des propriétaires de chalets visant à faire annuler la décision de la Commission repose notamment sur cette conception de la mission de la Commission.

[15]           À la lumière de cette divergence de conception de la mission de la Commission, à mon avis, la présente demande est fondée sur des attentes déraisonnables à l’égard de l’exercice par la Commission de sa fonction d’agrément des textes législatifs fiscaux de Buffalo Point.

D.                Résultat

[16]           Lorsqu’elle a agréé le régime d’impôt foncier, la Commission a interprété la Loi, qui est sa loi constitutive. En conséquence, j’estime que la norme de contrôle applicable à la décision de fond de la Commission est la norme de la décision raisonnable (voir : Front des artistes canadiens c Musée des beaux‑arts du Canada, 2014 CSC 42, au paragraphe 13).

[17]           Pour les motifs exposés ci‑après, je conclus que la décision de fond de la Commission satisfait à cette norme, et il n’y a aucun manquement à l’obligation d’équité envers les propriétaires de chalets. Par conséquent, la présente demande doit être rejetée.

II.                Questions tranchées

A.                La prise en compte de l’entente de 2008 par la Commission

[18]           Comme nous le verrons dans l’analyse qui suit, le dossier comporte une abondance d’éléments de preuve qui démontrent que le personnel de la Commission était au courant des préoccupations des propriétaires de chalets au sujet du passage du régime conventionnel au régime fiscal et qu’il a travaillé fort à la réalisation des objectifs de conciliation et de règlement des différends au profit des propriétaires de chalets et de Buffalo Point en conformité avec les alinéas 29b) et c) de la Loi, dans le cadre d’un dialogue à trois voix constant.

[19]           Les propriétaires de chalets soutiennent que, néanmoins, le dossier ne comporte aucun élément de preuve, mis à part le contenu de la décision elle‑même, qui démontre que les commissaires eux‑mêmes étaient au courant des préoccupations des propriétaires de chalets et qu’ils les ont prises en compte lorsqu’ils ont rendu les décisions faisant l’objet du présent contrôle. Je rejette cet argument pour deux raisons. Premièrement, le dossier est incomplet parce que les propriétaires de chalets n’ont pas présenté de requête en vertu de l’article 317 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, en vue d’obtenir des documents pertinents au regard de la présente demande qui étaient en la possession exclusive de la Commission afin d’étayer leur argument au moyen d’éléments de preuve, plutôt que de l’appuyer par des spéculations. Deuxièmement, à mon avis, étant donné que la Commission est un tribunal spécialisé investi de responsabilités décisionnelles très importantes, il est présumé que les commissaires possèdent les connaissances que possède le personnel de la Commission, à moins que l’on puisse trouver des éléments de preuve qui réfutent cette présomption. Or, il n’y a aucune contre‑preuve semblable.

[20]           En vertu du paragraphe 31(3) de la Loi, les attentes des propriétaires de chalets ne pouvaient tout simplement pas être satisfaites. La seule question dont la Commission était saisie était celle de savoir si les textes législatifs fiscaux proposés par Buffalo Point étaient conformes aux normes de la Commission. Il est clair que la Commission n’avait pas le pouvoir d’assujettir son agrément à des conditions ni de refuser son agrément s’il était satisfait aux normes.

[21]           En conséquence, étant donné les contraintes imposées par la Loi, je conclus que la prise en compte de l’entente de 2008 par la Commission était raisonnable. La Cour du Banc de la Reine du Manitoba s’est saisie de la question des répercussions légales de l’entente de 2008 sur le régime fiscal imposé par la Loi, et les propriétaires de chalets peuvent donc s’en remettre à ce tribunal pour que celui‑ci tranche la question qui les préoccupe le plus.

B.                 L’examen par la Commission du texte législatif de Buffalo Point sur les taux : le fond

[22]           Tout au long du processus ayant mené à l’imposition du régime fiscal, comme on peut le comprendre, les propriétaires de chalets ont plaidé vigoureusement en faveur d’un taux d’imposition qui ferait en sorte que les taxes soient comparables à celles payées en vertu de l’accord relatif au partage des coûts prévu à l’entente de 2008. De fait, ils ont cru fermement que ce résultat était possible, et ils l’ont proposé chaque fois qu’ils en ont eu l’occasion. En partant de l’hypothèse que le taux d’imposition choisi serait celui de la municipalité rurale de Piney (la MR de Piney), qui est adjacente aux terres données à bail, mais qui impose une taxe scolaire, les propriétaires de chalets ont fait preuve de cohérence dans leur argument et leur attente selon lesquels, étant donné que Buffalo Point ne fournit pas de services scolaires, le taux de la MR de Piney devait être rajusté. Au cours du processus de consultation entre les propriétaires de chalets, Buffalo Point et la Commission, le personnel de la Commission et Buffalo Point se sont dits en faveur de ce résultat.

[23]           Toutefois, il n’a pas pu être donné suite à cette attente pour les raisons suivantes.

[24]           En vertu de l’alinéa 35(1)a) de la Loi, la Commission a établi les Normes relatives aux lois sur les taux d’imposition des premières nations (2011) (normes relatives aux textes législatifs sur les taux). L’article 5 des normes relatives aux textes législatifs sur les taux comporte des dispositions relatives à la « Fixation des taux – première année d’imposition ». Puisque les propriétaires de chalets n’étaient pas assujettis à une autorité fiscale antérieure, Buffalo Point était tenue d’appliquer les mêmes taux d’imposition que ceux d’un « territoire de référence », que les normes définissent comme une « [a]dministration taxatrice qu’une première nation indique à la Commission aux fins de l’établissement des taux d’imposition et de la comparaison des normes relatives aux services locaux ». Ainsi, le choix par Buffalo Point de la MR de Piney comme territoire de référence ne permettait pas l’adaptation de son taux par mille, par exemple, en excluant la portion relative à la taxe scolaire.

[25]           Par suite du choix par Buffalo Point de la MR de Piney comme territoire de référence et de l’agrément par la Commission du texte législatif sur les taux d’imposition, le taux par mille de 30,97 de la MR de Piney a été appliqué aux terres louées aux propriétaires de chalets. Étant donné qu’ils s’attendaient à ce qu’il n’y ait aucune taxe scolaire, les propriétaires de chalets ont vigoureusement contesté ce résultat. Toutefois, j’estime que le choix de la MR de Piney géographiquement adjacente était raisonnable et que son approbation par la Commission était raisonnable parce que, bien que la définition de « territoire de référence » exige une comparaison des normes relatives aux services locaux lors de la fixation du taux d’imposition, rien n’exige que soit choisi un territoire qui fournit exactement les mêmes services, à supposer que cela soit même possible.

[26]           D’entrée de jeu, les propriétaires de chalets se sont opposés au régime fiscal parce qu’ils seraient tenus de payer beaucoup plus au titre de leurs baux que le montant de la part des coûts qu’ils avaient l’habitude de payer en vertu de l’entente de 2008. D’ailleurs, il est un fait acquis aux débats, et qui milite contre la consternation des propriétaires de chalets quant aux coûts accrus qu’ils seraient tenus de payer sous le régime fiscal, à savoir : dans le texte législatif sur les taux que la Commission a agréés, Buffalo Point a fait beaucoup d’efforts pour atténuer ces coûts, et ce, à l’avantage des propriétaires de chalets.

[27]           Bien que le taux par mille proposé par Buffalo Point et agréé par la Commission ait été celui de la MR de Piney, soit 30,97, on voit bien l’effort d’atténuation de Buffalo Point lorsque l’on considère la taxe que les propriétaires de chalets ont effectivement été tenus de payer pour la première année du régime fiscal. Par application de l’article 6 des normes relatives aux textes législatifs sur les taux, le montant payé pour la première année doit être le montant payé pour la deuxième année et pour toutes les années subséquentes, et, en‑dehors de circonstances extraordinaires, le compte de taxes ne peut pas augmenter au cours d’une année donnée de plus que le taux d’inflation national annuel. Ainsi, pour la première année – soit 2012 –, étant donné que les propriétaires de chalets ont obtenu un crédit appréciable sur leur compte de taxes et ont seulement payé 48 % de ce qui aurait été exigé autrement, ce crédit a résulté en un taux d’imposition réel de 16,4 par mille, et en un taux d’imposition réel de 17 par mille payé en 2013 à cause d’une augmentation du taux d’inflation, et de 18,4 par mille en 2014.

[28]           Cet état de fait enlève beaucoup de poids à l’argument des propriétaires de chalets selon lequel l’imposition du régime fiscal leur a causé un préjudice important.

C.                 L’examen par la Commission du texte législatif de Buffalo Point sur les taux : le processus

[29]           Dans la présente demande, les propriétaires de chalets soutiennent que les déclarations erronées faites par le personnel de la Commission les ont induits en erreur, et que, par conséquent, la décision faisant l’objet du présent contrôle devrait être annulée en raison d’un manquement de la Commission à l’obligation d’équité qu’elle avait envers les propriétaires de chalets et en vertu de laquelle elle devait leur communiquer des renseignements exacts.

[30]           Les développements qui suivent décrivent une suite d’événements qui établit deux faits : il y a eu de nombreux échanges entre les propriétaires de chalets, Buffalo Point et le personnel de la Commission, en conformité avec la mission de la Commission énoncée à l’article 29 de la Loi; et le personnel de la Commission et Buffalo Point ont fait des déclarations trompeuses. Le dossier ne comporte aucun élément de preuve démontrant que ces déclarations ont été faites autrement que de bonne foi.

[31]           En novembre 2010, M. Robert Beaudry, un membre du personnel de la Commission, a exprimé son avis à M. Lee Delorme, président de l’organisation demanderesse, selon lequel tout régime fiscal futur préserverait l’entente de 2008.

[32]           En date du 31 mars 2011, la Commission était parfaitement au courant de la préoccupation des propriétaires de chalets concernant la mise en œuvre du texte législatif sur les taux, y compris l’élément correspondant à la taxe scolaire. À cette date, M. Delorme a rencontré deux membres du personnel de la Commission, soit M. Beaudry et M. Jerome Pillon, qui lui ont expliqué qu’ils avaient réalisé une évaluation fiscale pour Buffalo Point au terme de laquelle ils avaient conclu que 700 000 $ pourraient être perçus si l’impôt foncier proposé comprenait une taxe scolaire. M. Delorme a trouvé cette déclaration surprenante puisqu’aucun des renseignements que les propriétaires de chalets avaient communiqués à la Commission ne disait que les services comprenaient une école. En conséquence, M. Delorme a clairement fait savoir que les propriétaires de chalets s’opposaient à l’inclusion de toute taxe scolaire (affidavit de Lee Delorme, au paragraphe 21; pièce 14 jointe à l’affidavit de M. Delorme).

[33]           Le 9 juin 2011, M. Beaudry et M. Pillon ont assuré les propriétaires de chalets qu’il n’y avait aucune possibilité que la Commission inclue une taxe scolaire dans leurs cotisations fiscales. Comme résultat de cette déclaration, entre autres choses, les propriétaires de chalets ont officiellement décidé d’appuyer le nouveau régime fiscal (affidavit de M. Delorme, aux paragraphes 24 et 25; pièce 16 jointe à l’affidavit de M. Delorme).

[34]           La Commission a ensuite demandé une rencontre avec les propriétaires de chalets pour leur expliquer le régime fiscal proposé. Des représentants de Buffalo Point et de la Commission ont pris la parole lors d’une assemblée publique locale à laquelle ont assisté environ 140 propriétaires de chalets le 10 juin 2011, et au cours de laquelle les déclarations suivantes ont été faites au sujet des textes législatifs fiscaux proposés :

[traduction]

a. Ils allaient imposer des taux par mille comparables à ceux de la [municipalité rurale] adjacente de Piney, et les propriétaires de chalets ne seraient tenus de payer aucune taxe scolaire de quelque nature que ce soit;

b. En vertu des nouveaux textes législatifs, les droits des propriétaires de chalets seraient comparables, sinon supérieurs, à ce que prévoyaient leurs conventions de bail existantes;

c. la taxe proposée serait appliquée de manière non discriminatoire à tous les intérêts à Buffalo Point, y compris les propriétaires de chalets, toutes les terres possédées par des Autochtones (encore une fois, on disait qu’il s’agissait d’une première au Canada), tous les lots vacants à vendre ainsi que tout lot qui serait développé à l’avenir;

d. les contribuables seraient protégés par une « loi sur la représentation des contribuables » (LRC), qu’on disait être obligatoire lors de la mise en œuvre des textes législatifs fiscaux proposés.

(affidavit de M. Delorme, au paragraphe 26; pièce 17 jointe à l’affidavit de M. Delorme)

Lors d’une rencontre ultérieure entre des représentants des propriétaires de chalets et Buffalo Point le 7 septembre 2011, les propriétaires de chalets se sont clairement fait dire que les textes législatifs proposés adopteraient le taux par mille de la MR de Piney, qui était de 12,4, en excluant la taxe scolaire (affidavit de M. Delorme, au paragraphe 32; pièce 21 jointe à l’affidavit de M. Delorme). Et lors d’un échange entre M. Pillon et l’avocat des propriétaires de chalets le 31 octobre 2011, il a été confirmé que Buffalo Point maintenait sa position selon laquelle ses projets de textes législatifs fiscaux fixeraient un taux par mille comparable à celui de la MR de Piney, à l’exclusion de la taxe scolaire (affidavit de M. Delorme, au paragraphe 37; pièce 25 jointe à l’affidavit de M. Delorme).

[35]           Toutefois, le 8 mai 2012, en contradiction directe avec les déclarations faites auparavant, M. Pillon a dit à M. Delorme que Buffalo Point pouvait imposer une taxe scolaire (affidavit de M. Delorme, au paragraphe 48; pièce 35 jointe à l’affidavit de M. Delorme). Tel que mentionné, le 25 juin 2011, la Commission a approuvé six textes législatifs fiscaux soumis par Buffalo Point, dont le texte législatif sur les taux, qui adoptait un taux par mille de 30,97. 

[36]           En outre, comme question de processus, tel que mentionné dans les motifs exposés au soutien de la présente demande, une loi sur la représentation en matière fiscale (LRF) était attendue, mais elle n’a pas été mise en vigueur. Les propriétaires de chalets considéraient que la LRF était d’une importance vitale parce qu’elle assurerait une certaine représentation dans le contexte de l’application du régime fiscal.

[37]           Les propriétaires de chalets ont été avisés à tort qu’une LRF était obligatoire en vertu de la Loi. En effet, l’alinéa 5(1)c) de la Loi énonce clairement qu’une première nation peut faire des lois « concernant la procédure par laquelle les intérêts des contribuables peuvent lui être présentés ». Ainsi, la Loi n’exige nullement qu’une première nation adopte une LRF, la mise en œuvre d’une telle loi étant purement facultative.

[38]           En ce qui concerne les déclarations trompeuses clairement faites pour tenter de concilier, d’une part, l’entente de 2008 des propriétaires de chalets et leurs intérêts relatifs au taux par mille, et d’autre part, les responsabilités de Buffalo Point, à mon avis, l’argument des propriétaires de chalet concernant un manquement à une obligation d’équité ne saurait être retenu. Bien que la Commission, par l’entremise de son personnel, ait manqué à son obligation envers les propriétaires de chalets de leur communiquer des renseignements exacts, à mon avis, mis à part des attentes déçues qui sont fort compréhensibles, il n’y a aucun élément de preuve qui indique que les propriétaires de chalets se sont fiés à ces déclarations à leur détriment. Par conséquent, étant donné qu’il n’y a aucun détriment, je conclus qu’aucune réparation ne peut être accordée.

D.                Erreur décisionnelle de la Commission

[39]           La décision du 25 juin 2012 faisant l’objet du présent contrôle a été rendue, comme on pourrait s’y attendre, au terme d’un processus décisionnel mené de concert par sept commissaires au sujet de cinq textes législatifs fiscaux qui a débouché sur une seule et même décision. Dans le cas de chacun de ces textes législatifs, le texte a été proposé aux fins d’agrément, les documents au soutien de son agrément ont été présentés, une motion a été faite en faveur de son agrément, puis, lors d’un vote enregistré, la motion a été adoptée sans exposé de motifs. Dans le cas de chaque texte, l’obligation de la Commission consistait à déterminer s’il était satisfait à la norme pertinente. À mon avis, l’adoption de chaque texte législatif fiscal constitue une conclusion selon laquelle il a été satisfait à la norme pertinente, et, en conformité avec le paragraphe 31(3) de la Loi, l’agrément requis a été donné.

[40]           Les propriétaires de chalets soutiennent que cette forme de prise décision est déficiente parce qu’elle ne comporte pas de motifs et il est impossible de savoir quels facteurs ont été pris en compte pour arriver à celle‑ci. Il appert que les propriétaires de chalets s’attendaient à ce que la décision prenne la forme des décisions qui sont normalement rendues au terme d’un litige contesté. C’est‑à‑dire qu’après que des éléments de preuve contradictoires eurent été présentés, des conclusions de fait seraient tirées, les faits seraient examinés en regard du droit applicable, puis une décision motivée serait rendue. À mon avis, il s’agit d’une attente déraisonnable à l’égard de la décision prise en vertu du paragraphe 31(3) de la Loi. Comme je l’ai déjà mentionné, lorsque cette disposition est appliquée, la seule décision qui doit être prise concerne la question de savoir si un texte législatif fiscal donné est conforme aux normes de la Commission. Étant donné l’obligation décisionnelle que la loi impose à la Commission et les procédures d’agrément établies par la Commission, à mon avis, les objections des propriétaires de chalet sont mal fondées.

[41]           Le processus en place, qui a été suivi en l’espèce relativement à chaque texte législatif agréé, est le suivant : un membre du personnel de la Commission examine la documentation concernant un texte législatif proposé, après quoi un [traduction] « formulaire d’examen technique » est rempli dans lequel un avis est exprimé au sujet de la conformité du texte législatif proposé aux exigences de la Loi et aux normes de la Commission; et le formulaire est ensuite présenté à la Commission pour examen. Si la Commission est convaincue qu’il a été satisfait aux normes, il n’y a rien qui empêche la Commission de donner son agrément.

[42]           Les propriétaires de chalets soutiennent que des irrégularités se sont produites au cours de ce processus d’agrément et que ces irrégularités ont eu une incidence sur les agréments donnés.

[43]           Premièrement, les propriétaires de chalets soulèvent une question au sujet de la séquence des étapes du processus d’agrément. En l’espèce, l’analyse technique des textes législatifs proposés de Buffalo Point a été effectuée et signée avant que les commissaires se rencontrent pour rendre une décision. Il est clair que l’analyse technique comportait un avis donné aux commissaires et que ceux‑ci pouvaient se fonder sur cet avis pour rendre une décision.

[44]           Deuxièmement, en ce qui concerne aussi bien les textes législatifs relatifs aux évaluations que les textes législatifs en matière de taxation, l’examen technique a mené à la conclusion que ces textes ne satisfaisaient pas aux normes de la Commission. En conséquence, Buffalo Point devait corriger les problèmes relevés, puis soumettre de nouveau les textes législatifs aux fins d’agrément. La Commission a agréé les textes législatifs modifiés, qu’elle a exemptés des dispositions relatives aux avis habituels après avoir conclu que les modifications n’étaient pas importantes, comme elle était habilitée à le faire en vertu du paragraphe 6(2) de la Loi. En conséquence, les problèmes ont été corrigés et les textes législatifs modifiés ont été adoptés.

[45]           Néanmoins, comme on peut le comprendre, le processus menant à l’agrément des textes législatifs modifiés a occasionné des délais, qui ont causé une perturbation du cycle habituel d’émission des avis de cotisation aux propriétaires de chalets. Les propriétaires de chalets soutiennent que cela leur a causé un préjudice parce qu’ils ont dû payer leurs taxes avant d’avoir eu la possibilité de contester leurs évaluations. J’estime que cet argument est sans fondement parce qu’il n’a jamais fait aucun doute que les propriétaires de chalets pouvaient contester leurs évaluations dans tous les cas.

[46]           À mon avis, aucune des préoccupations exprimées, ni prises individuellement ni prises ensemble, n’étaye la conclusion selon laquelle une erreur susceptible de contrôle a été commise.

[47]           À mon avis, l’agrément de chaque texte législatif fiscal constitue une conclusion selon laquelle il a été satisfait à la norme pertinente, et, comme l’alinéa 31(3) de la Loi l’exige, l’agrément requis a été régulièrement donné. En conséquence, je conclus que la décision de la Commission était raisonnable.

E.                 La prise en compte des observations finales des propriétaires de chalets par la Commission

[48]           Le 14 mai 2012, M. Delorme a reçu un avis l’informant que Buffalo Point avait adopté les textes législatifs fiscaux le 25 octobre 2011 et que ceux‑ci avaient été envoyés à la Commission aux fins d’agrément. En conséquence, l’avocat des propriétaires de chalets a envoyé une lettre à la Commission, datée du 24 mai 2012, reproduite intégralement à l’ANNEXE C des présents motifs, dans laquelle des préoccupations d’ordre financier étaient exposées en rapport avec les textes législatifs proposés. En particulier, la lettre évoquait la question de la taxe scolaire, et elle énonçait deux demandes :

[traduction]

Aux termes de l’analyse préliminaire du régime d’impôt foncier proposé, l’effet ultime de la proposition semble être un jeu à somme nulle pour [Buffalo Point]. […] Puisque l’entente juridique de 2008 se compare favorablement aux taux d’imposition de la MR, puis le seul résultat est en fait de réduire les taxes prélevées sur les chalets plus vieux et de moindre valeur et de transférer un fardeau fiscal plus important aux chalets de construction plus récente et plus dispendieux, avec comme résultat un jeu à somme nulle. Les calculs précités ne comprennent pas une composante relative à une taxe scolaire puisque les représentants de la [Commission] ont assuré l’association que le projet de régime d’impôt foncier envisagé par la Première nation de Buffalo Point ne comportait pas de composante relative à une taxe scolaire.

[…]

Compte tenu des commentaires qui précèdent, nous recommandons, pour le compte de notre cliente, que les mesures suivantes soient envisagées.

1. Que le gel convenu des frais d’entretien annuels soit respecté et honoré pour l’année financière 2012/2013.

2. Que l’application des projets de loi sur l’impôt foncier et de loi sur l’évaluation foncière soit suspendue jusqu’à la tenue d’une réunion ou d’une série de réunions qui seraient administrées par un facilitateur ou un médiateur professionnel, afin qu’il y ait une compréhension claire de tous les avantages et les désavantages d’un régime d’impôt foncier proposé par rapport à l’entente juridique de 2008. Cette rencontre ou cette série de rencontres devrait réunir tous les intéressés, c’est‑à‑dire des représentants de la BPCOA, le chef et le conseil, des représentants des résidents autochtones et des représentants de la CFPN.

[Non souligné dans l’original.]

[49]           Il ne fait aucun doute que la Commission a pris connaissance de la lettre parce que celle‑ci figure parmi les documents que la Commission a communiqués dans le cadre de la présente demande (copie certifiée du dossier du tribunal, aux pages 107b à 110). De plus, la lettre est mentionnée expressément dans la décision faisant l’objet du présent contrôle, et les recommandations formulées sont citées expressément. Néanmoins, les propriétaires de chalets soutiennent qu’il y a eu un manquement à l’équité découlant du fait que, dans la décision, la Commission n’a pas fait un exposé complet traitant de la question de la taxe scolaire ou des recommandations précitées.

[50]           À mon avis, étant donné le caractère obligatoire de l’objet et du régime de la Loi décrits plus haut, j’estime que l’obligation d’équité de la Commission envers les propriétaires de chalets se situait au bas de l’échelle.

[51]           En ce qui concerne la question de la taxe scolaire, la décision cite l’observation que M. Beaudry a faite à la Commission selon laquelle les propriétaires de chalets bénéficiaient d’une réduction de 48 % du fardeau fiscal imposé pour la première année d’imposition, et [traduction] « cela traduit concrètement l’intention de la Première nation de tempérer les répercussions pour les contribuables de la transition d’un régime de frais de service à un régime d’impôt foncier » (décision, à la page 14). Et, en ce qui concerne la recommandation, étant donné les nombreuses consultations entre les propriétaires de chalets, Buffalo Point et la Commission, qui avaient débuté bien avant l’étape de la prise de décision par la Commission en vertu de la Loi, j’estime qu’il n’était pas déraisonnable que la Commission n’accède pas aux demandes des propriétaires de chalets et que cela ne constitue pas un manquement à l’obligation d’équité. À ce stade, tous les arguments des propriétaires de chalets avaient déjà été présentés, et un processus de médiation n’aurait pas pu avoir d’incidences sur l’obligation légale de la Commission de procéder à l’examen des textes législatifs fiscaux de Buffalo Point aux fins d’agrément.

III.             Conclusion

[52]           En somme, je conclus que les attentes des propriétaires de chalets sont déraisonnables lorsqu’elles sont appréciées au regard d’attentes réalistes et raisonnables découlant de la Loi.

[53]           Plus précisément, en ce qui concerne les préoccupations des propriétaires de chalets relatives à une perte de contrôle perçue à la suite de l’imposition du régime fiscal, sous le régime fiscal, les propriétaires de chalets pourront s’adresser à la Commission pour que celle‑ci exerce son contrôle sur la conduite de Buffalo Point en matière fiscale en vertu du paragraphe 33(3) de la Loi. Cette disposition permet à la Commission de prendre des mesures contraignantes si une première nation ne respecte pas ses obligations en vertu de la Loi. À l’avenir, c’est cette forme de contrôle à laquelle les propriétaires de chalets pourront avoir accès.

[54]           À mon avis, la décision faisant l’objet du présent contrôle est raisonnable à tous égards.


ORDONNANCE

LA COUR STATUE que :

1.                  La présente demande est rejetée.

2.                  J’adjuge les dépens aux défenderesses, payables par la demanderesse.

« Douglas R. Campbell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


ANNEXE A

Loi sur la gestion financière des premières nations, LC 2005, c 9

Préambule

Attendu :

que le gouvernement du Canada a adopté une politique aux termes de laquelle il est reconnu que le droit inhérent à l’autonomie gouvernementale constitue un droit ancestral et que cette politique prévoit des négociations portant sur l’autonomie gouvernementale;

que la présente loi n’a pas pour but de définir la nature et l’étendue de tout droit à l’autonomie gouvernementale ou d’anticiper l’issue des négociations portant sur celle‑ci;

que l’établissement d’institutions autochtones nationales bénéficiera aux premières nations qui choisissent d’exercer une compétence relative à l’imposition foncière sur les terres de réserve;

que d’autres gouvernements au Canada bénéficient de ce levier de développement économique que représentent les recettes fiscales foncières et d’autres recettes locales utilisées pour contracter des emprunts sur les marchés financiers en vue de l’établissement d’infrastructures publiques;

que les régimes d’impôts fonciers des réserves devraient tenir compte à la fois des intérêts des contribuables qui vivent dans une réserve et des droits des membres des collectivités des premières nations;

que les premières nations ont entrepris une initiative par suite de laquelle la Loi sur les

Indiens a été modifiée en 1988 de façon qu’elles puissent exercer leur compétence relative aux impôts fonciers dans les réserves et que la Commission consultative de la fiscalité indienne a été créée pour les aider à exercer cette compétence;

qu’en 1995, la First Nations Finance Authority Inc. a été constituée en personne morale afin d’émettre des débentures au moyen des recettes fiscales foncières et d’offrir des possibilités d’investissement;

qu’en 1999, les premières nations et le gouvernement du Canada ont reconnu les avantages de l’établissement d’institutions par voie législative dans le cadre de systèmes globaux de gestion financière;

que les premières nations ont entrepris une initiative qui a mené à l’élaboration de la présente loi,

First Nations Fiscal Management Act, SC 2005, c 9

Preamble

Whereas the Government of Canada has adopted a policy recognizing the inherent right of self‑government as an aboriginal right and providing for the negotiation of self‑government;

Whereas this Act is not intended to define the nature and scope of any right of self‑government or to prejudge the outcome of any self‑government negotiation;

Whereas the creation of national aboriginal institutions will assist first nations that choose to exercise real property taxation jurisdiction on reserve lands;

Whereas economic development through the application of real property tax revenues and other local revenues to support borrowing on capital markets for the development of public infrastructure is available to other governments in Canada;

Whereas real property taxation regimes on reserves should recognize both the interests of on‑reserve taxpayers and the rights of members of first nations communities;

Whereas first nations led an initiative that resulted in 1988 in an amendment to the Indian Act so that their jurisdiction over real property taxation on reserve could be exercised and the Indian Taxation Advisory Board was created to assist in the exercise of that jurisdiction;

Whereas, in 1995, the First Nations Finance Authority Inc. was incorporated for the purposes of issuing debentures using real property tax revenues and providing investment opportunities;

Whereas, by 1999, first nations and the Government of Canada recognized the benefits of establishing statutory institutions as part of a comprehensive fiscal management system;

And whereas first nations have led an initiative culminating in the introduction of this Act;

 


ANNEXE B

29. La Commission a pour mission:

a) de protéger l’intégrité du régime d’imposition foncière des premières nations et de promouvoir une vision commune de ce régime à travers le Canada, compte tenu des différences entre les régimes provinciaux en la matière;

b) de veiller à ce que le régime d’imposition foncière des premières nations fonctionne de manière à concilier les intérêts des contribuables avec les responsabilités assumées par les chefs et les conseils dans la gestion des affaires des premières nations;

c) de prévenir ou de résoudre promptement les différends portant sur l’application des textes législatifs sur les recettes locales;

d) d’aider les premières nations à exercer leur compétence en matière d’imposition foncière sur les terres de réserve et à développer leur capacité à gérer leurs régimes fiscaux;

e) d’offrir de la formation aux administrateurs fiscaux des premières nations;

f) d’aider les premières nations à atteindre un développement économique durable par la perception de recettes locales stables;

g) d’encourager la transparence du régime d’imposition foncière des premières nations de façon à garantir la prévisibilité aux contribuables;

h) de favoriser la compréhension des régimes d’imposition foncière des premières nations;

i) de conseiller le ministre quant au développement du cadre dans lequel les textes législatifs sur les recettes locales sont pris.

[. . .]

31. (1) La Commission examine tous les textes législatifs sur les recettes locales.

Observations écrites

(2) Avant d’agréer un texte législatif sur les recettes locales, la Commission prend en compte, en conformité avec les règlements éventuellement pris en vertu de l’alinéa 36(1)b), les observations qui lui sont présentées par les membres de la première nation dans le cadre de l’alinéa 7b) ainsi que par les autres personnes qui ont des intérêts ou des droits d’occupation, de possession ou d’usage sur les terres de réserve de la première nation.

Agrément

(3) Sous réserve de l’article 32, la Commission agrée les textes législatifs sur les recettes locales qui sont conformes à la présente loi et aux règlements éventuellement pris en vertu de celle‑ci, ainsi qu’aux normes établies en vertu de la présente loi.

Registre

(4) La Commission tient un registre de tous les textes législatifs qu’elle agrée en vertu du présent article et de tous les textes législatifs pris en vertu de l’article 9.

[. . .]

35. (1) La Commission peut établir des normes, dans la mesure où elles ne sont pas incompatibles avec les règlements, en ce qui concerne

a) la forme et le contenu des textes législatifs sur les recettes locales;

b) les mesures de contrôle d’application à inclure dans ces textes législatifs;

c) les critères applicables à l’agrément des textes législatifs pris en vertu de l’alinéa 5(1)d);

d) la forme dans laquelle les renseignements visés à l’article 8 doivent lui être fournis.

Procédure

(2) La Commission peut établir la procédure applicable dans les domaines suivants :

a) la présentation pour agrément des textes législatifs sur les recettes locales;

b) l’agrément de ces textes législatifs;

c) la prise en compte des intérêts des contribuables dans ses décisions;

d) le règlement des différends avec les premières nations quant à l’imposition des intérêts et des droits sur les terres de réserve.

29. The purposes of the Commission are to

(a) ensure the integrity of the system of first nations real property taxation and promote a common approach to first nations real property taxation nationwide, having regard to variations in provincial real property taxation systems;

(b) ensure that the real property taxation systems of first nations reconcile the interests of taxpayers with the responsibilities of chiefs and councils to govern the affairs of first nations;

(c) prevent, or provide for the timely resolution of, disputes in relation to the application of local revenue laws;

(d) assist first nations in the exercise of their jurisdiction over real property taxation on reserve lands and build capacity in first nations to administer their taxation systems;

(e) develop training programs for first nation real property tax administrators;

(f) assist first nations to achieve sustainable economic development through the generation of stable local revenues;

(g) promote a transparent first nations real property taxation regime that provides certainty to taxpayers;

(h) promote understanding of the real property taxation systems of first nations; and

(i) provide advice to the Minister regarding future development of the framework within which local revenue laws are made.

[. . .]

31. (1) The Commission shall review every local revenue law.

Written submissions

(2) Before approving a local revenue law, the Commission shall consider, in accordance with any regulations made under paragraph 36(1)(b), any representations made to it under paragraph 7(b) in respect of the law by members of the first nation or others who have interests in the reserve lands of the first nation or rights to occupy, possess or use those lands.

Local revenue law approval

(3) Subject to section 32, the Commission shall approve a local revenue law that complies with this Act and with any standards and regulations made under this Act.

Registry

(4) The Commission shall maintain a registry of every law approved by it under this section and every financial administration law made under section 9.

[. . .]

35. (1) The Commission may establish standards, not inconsistent with the regulations, respecting

(a) the form and content of local revenue laws;

(b) enforcement procedures to be included in those laws;

(c) criteria for the approval of laws made under paragraph 5(1)(d); and

(d) the form in which information required under section 8 is to be provided to the Commission.

Procedures

(2) The Commission may establish procedures respecting

(a) submission for approval of local revenue laws;

(b) approval of those laws;

(c) representation of taxpayers’ interests in the decisions of the Commission; and

(d) resolution of disputes with first nations concerning the taxation of rights and interests on reserve lands.


ANNEXE C

[TRADUCTION]

Duboff Edwards Haight & Schachter

Law Corporation

Le 24 mai 2012

COMMISSION DE LA FISCALITÉ DES PREMIÈRES NATIONS

321‑345 Yellowhead Highway

Kamloops (Colombie‑Britannique) V2H IH1

Madame, Monsieur,

Objet : Opposition au texte législatif sur l’impôt foncier de la Première nation de Buffalo Point

Notre cabinet agit pour le compte de la Buffalo Point Cottage Owners Association (BPCOA) [association des propriétaires de chalets de Buffalo Point].

Pour le compte de notre cliente, nous vous écrivons au sujet du projet de texte législatif sur l’impôt foncier (TLIF) de la Première nation de Buffalo Point. L’association a su reconnaître les avantages d’un régime d’impôt foncier officiel de son point de vue, mais il y a plus de désavantages que d’avantages, et, pour le compte de notre cliente, nous exprimons maintenant l’opposition officielle de notre cliente au TLIF adopté par le chef et le conseil de la Première nation de Buffalo Point (PNBP).

Les principaux motifs d’opposition seront exposés dans les paragraphes qui suivent.

1.         Maintien du gel de deux ans.

Comme la PNBP le sait fort bien, la PNBP et la BPCOA ont convenu d’un gel de deux ans des frais d’entretien annuels pour les années financières 2011/2012 et 2012/2013, et la BPCOA s’oppose vigoureusement à toute tentative de la Première nation d’annuler ce règlement négocié. Le TLIF doit respecter les ententes en vigueur qui portent sur le même objet, et le TLIF ne doit pas être utilisé comme moyen de renier les engagements de la PNBP. La BPCOA a été entraînée de force dans une discussion publique sur l’impôt foncier des Autochtones, avec comme conséquence que les discussions concernant ce projet de texte législatif sont maintenant en train de devenir de notoriété publique, et aucune des parties n’a quoi que ce soit à gagner dans ce processus.

2.         Respect des règles et règlements de 2008.

Au cours des 11 dernières années, la BPCOA a dû négocier deux ententes juridiques avec la PNBP afin de maintenir une forme de processus démocratique au sein de la collectivité de Buffalo Point; la première fois lors de la négociation de l’entente de cogestion de 2000, et la deuxième fois lors de l’adoption des règles et règlements de 2008. En réponse aux désaccords concernant les travaux d’amélioration de la lagune et le réseau d’égouts commercial en 2007, l’association a dépensé environ 12 000 $ pour faire rédiger l’entente de 2008 comme moyen de renforcer le processus démocratique à Buffalo Point. Lors de la rédaction de cette entente juridique de 2008, la BPCOA a convenu de payer 55 % de tous les coûts d’entretien (une augmentation par rapport à sa part originale de 50 %), étant entendu que la PNBP n’instaurerait pas de régime d’impôt foncier autochtone par la suite. À l’heure actuelle, les membres de la BPCOA sont extrêmement mécontents du fait que la PNBP envisage également de miner cette entente et d’en faire fi. Le processus d’établissement du budget prévu par les règles et règlements de 2008 a bien servi la Première nation et la PNBP au fil des ans, et, lors de la dernière ronde de négociations, il était notoire que l’association était seulement en désaccord avec environ 50 000 $ à 100 000 $ des dépenses annuelles. L’ancien chef des opérations, Wyman Sangster, de la PNBP avait confirmé ce fait à plusieurs occasions, notamment la dernière fois lors d’une séance de discussion ouverte avec les propriétaires de chalets et des représentants de la CFPN le 10 juin 2011. Lorsque l’association et la Première nation ont conclu leur ronde de négociations budgétaires, il a été convenu collectivement que les coûts d’entretien totaux s’élevaient à environ un peu plus de 370 000 $, dont la BPCOA payait environ 250 000 $. Lorsque l’on considère les sommes que les Affaires autochtones attribuent chaque année à la PNBP pour l’entretien des routes, des égouts et des aqueducs (environ 237 000 $ pour l’année financière 2010), il est évident que les pressions financières auxquelles la Buffalo Point Development Corporation est confrontée ne sont pas reliées aux frais d’entretien annuels.

La tentative de la PNBP de renier le gel de deux ans et l’entente juridique de 2008 ne fait que réduire ce qui reste de la bonne volonté qui existe avec les propriétaires de chalets et réduit l’inclination des membres de l’association à faire affaire avec les entreprises de Buffalo Point.

3.         Considérations financières relatives à un projet de régime d’impôt foncier.

Aux termes de l’analyse préliminaire du régime d’impôt foncier proposé, l’effet ultime de la proposition semble être un jeu à somme nulle pour la BPDC. L’effet net ou la contribution nette globale des propriétaires de chalets semble être négligeable. D’après des discussions avec les représentants de la CFPN, il appert que tout impôt foncier envisagé doit être comparable à celui de la municipalité voisine. Dans ce cas‑ci, la municipalité rurale de Piney. L’entente juridique de 2008 se compare favorablement aux taux d’imposition de la MR de Piney. Par exemple, pour l’année financière 2011, le taux par mille résidentiel de la MR était de 14,89. Toutes les MR dans la province du Manitoba sont tenues d’utiliser 45 % des valeurs évaluées des habitations pour déterminer le compte de taxes annuel. Ainsi, une propriété résidentielle évaluée à 100 000 serait imposée à un taux annuel de 670 $. Une propriété résidentielle évaluée à 150 000 $ serait imposée à un taux annuel de 1 005 $. Une propriété résidentielle évaluée à 200 000 $ serait imposée à un taux annuel de 1 340 $. D’après nos discussions avec M. Sansgster, nos clients anticipent que la valeur moyenne des chalets se situera aux environs de 150 000 à 175 000 $. Puisque l’entente juridique de 2008 se compare favorablement aux taux d’imposition de la MR, puis le seul résultat est en fait de réduire les taxes prélevées sur les chalets plus vieux et de moindre valeur et de transférer un fardeau fiscal plus important aux chalets de construction plus récente et plus dispendieux, avec comme résultat un jeu à somme nulle. Les calculs précités ne comprennent pas une composante relative à une taxe scolaire puisque les représentants de la CFPN ont assuré l’association que le projet de régime d’impôt foncier envisagé par la Première nation de Buffalo Point ne comportait pas de composante relative à une taxe scolaire.

Il importe également de garder à l’esprit que les budgets annuels sont le facteur déterminant de tout taux d’imposition envisagé. La dynamique de l’administration d’une municipalité rurale comptant 12 collectivités distinctes et comportant 250 milles de routes de gravier et plusieurs dépotoirs est sensiblement plus exigeante et beaucoup plus dispendieuse que l’administration d’un site de villégiature unique comportant de 6 à 10 milles de routes et un dépotoir. Il se pourrait bien que le budget de la PNPB à l’avenir résulte en un taux par mille inférieur.

La CFPN exige également que les augmentations annuelles des impôts fonciers ne dépassent pas le taux d’inflation annuel ou l’Indice des prix à la consommation, qui était de 2,4 % pour l’année 2011. L’entente juridique de 2008 se compare favorablement à cette politique aussi, c’est‑à‑dire que les membres de la BPCOA ont fait l’objet de cotisations arbitraires de 5 % pour chacune des années 2009‑2010 et 2010‑2011 et de zéro pour cent pour les deux années suivantes, ce qui revient à 2,5 % par année.

En outre, l’impôt foncier envisagé est non discriminatoire en ce qu’il assujettit tous les résidents et toutes les entreprises au sein de la collectivité de Buffalo Point à un impôt foncier. En quoi l’inclusion d’environ 200 lots non vendus, de tous les Autochtones et de toutes les entreprises de BP ajoute quoi que ce soit au montant que les propriétaires de chalets paient actuellement?

4.         Recommandations.

Il est évident que la PNBP a ce désir de renier le gel convenu de deux ans de l’impôt foncier et l’entente juridique de 2008 en proposant ce régime d’impôt foncier. La PNBP croit que le régime d’impôt foncier permettra à la PNBP d’augmenter arbitrairement l’évaluation annuelle de jusqu’à trois fois ce qu’elle est aujourd’hui, ce qui n’est clairement pas le cas d’après les discussions que la BPCOA a eues avec des représentants de la CFPN. On me dit que des représentants de l’association se sont fait dire expressément que l’impôt foncier envisagé ne serait pas une « vache à lait » pour la BPDC. On me dit également que M. Sangster a aussi dit à des représentants de l’association que la CFPN avait donné à la PNPB une sorte d’évaluation des recettes potentielles qui, jusqu’à présent, n’a pas été divulguée à la BPCOA. Lors de discussions avec des représentants de la CFPN, ceux‑ci ont assuré la BPCOA que l’impôt foncier envisagé par BP serait comparable à celui de la MR de Piney et que les augmentations annuelles des impôts fonciers seraient assujetties aux plafonds prévus par les lignes directrices relatives à l’IPC annuel. Il est clair que la relation a été éprouvée au cours de la dernière année à cause de ces discussions relatives aux finances, mais on ne trouve jamais de solution viable lorsque le dialogue est suspendu et que des positions intransigeantes sont prises. Lorsque le gel de deux ans a été convenu, il était clairement entendu que les parties reverraient les postes du budget de l’Annexe A au cours de l’année suivante pour réévaluer les postes qui faisaient l’objet de désaccords et qui correspondaient seulement à des sommes d’environ 50 000 $ à 100 000 $.

Compte tenu des commentaires qui précèdent, nous recommandons, pour le compte de notre cliente, que les mesures suivantes soient envisagées.

1.                  Que le gel convenu des frais d’entretien annuels soit respecté et honoré pour l’année financière 2012‑2013.

2.                  Que l’application des projets de loi sur l’impôt foncier et de loi sur l’évaluation foncière soit suspendue jusqu’à la tenue d’une réunion ou d’une série de réunions qui seraient administrées par un facilitateur ou un médiateur professionnel, afin qu’il y ait une compréhension claire de tous les avantages et les désavantages d’un régime d’impôt foncier proposé par rapport à l’entente juridique de 2008. Cette rencontre ou cette série de rencontres devrait réunir tous les intéressés, c’est‑à‑dire des représentants de la BPCOA, le chef et le conseil, des représentants des résidents autochtones et des représentants de la CFPN.

La BPCOA a joué un rôle à part entière dans la création et le développement du centre de villégiature de BP, et les propriétaires de chalets sont très fiers et reconnaissants des efforts de ceux qui nous ont précédés. Dans leur tradition, on me dit que l’association a manifesté son désir de collaborer aux fins de trouver des solutions viables pour le centre de villégiature de BP. Si la PNBP est d’accord avec les recommandations de l’association et une ou plusieurs séances facilitées sont tenues, alors, à tous le moins, on aura tenté de préserver les droits et les intérêts de tous les intéressés. À ce stade, si l’on ne parvient pas à établir un consensus, les parties pourront se retrancher dans leurs positions respectives et agir en conséquence.

Je demanderais à ce que toute réponse à cette lettre soit postée et soit aussi envoyée par courrier électronique à moi‑même, à L. Delorme, président de la BPCOA, à Ed Rampl et à Gloria Jackson.

Veuillez agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées.

DUBOFF EDWARDS & SCHACHTER LAW CORPORATION

Par :

NEIL J. DUBOFF

NJD : wg

c.c. :     Jeremy Pillon – par courriel à l’adresse : jpillon@incue.ne

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑1435‑12

 

INTITULÉ :

BUFFALO POINT COTTAGERS ASSOCIATION INC. c PREMIÈRE NATION DE BUFFALO POINT ET BUFFALO POINT DEVELOPMENT CORP. LTD. et COMMISSION DE LA FISCALITÉ DES PREMIÈRES NATIONS (intervenante)

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

WINNIPEG (MANITOBA)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 17 NOVEMBRE 2014

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 5 DÉCEMBRE 2014

 

COMPARUTIONS :

Paul Edwards

Kara Bjornson

POUR LA DEMANDERESSE

Grant Stefanson

Bradley Regehr

Uzma Saeed

 

POUR LES DÉFENDERESSES

Clarine Ostrove

Leah Pence

POUR L’INTERVENANTE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Duboff Edwards Haight &

Schachter Law Corporation

Winnipeg (Manitoba)

pour la demanderesse

D’Arcy & Deacon LLP

Avocats

Winnipeg (Manitoba)

POUR LES DÉFENDERESSES

Mandell Pinder LLP

Avocats

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR L’iNTERVENANTE

 

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